Essonne (91)

En Essonne, la diminution du chômage tirée par la baisse des demandeurs d’emploi de longue durée

Publié le 24/03/2023

Le chômage a connu une nouvelle baisse significative en 2022 avec un taux de 7,1 % de la population active au niveau national. Un retour à son niveau le plus bas depuis 15 ans ! Dans le département de l’Essonne, entre décembre 2021 et décembre 2022, le nombre de demandeurs d’emploi, toutes catégories confondues et inscrits à Pôle Emploi, a diminué de 2,9 %. La baisse est plus importante concernant les personnes en catégorie A sans activité avec une chute de 7,2 % en un an, passant de 58 720 demandeurs d’emploi en décembre 2021 à 54 510 en décembre 2022. Emmanuel Blanc, directeur territorial de Pôle Emploi en Essonne, revient sur les éléments explicatifs de cette dynamique historique en évoquant notamment les tensions persistantes dans les recrutements pour certaines activités.

Actu-Juridique : Quel bilan de la situation de l’emploi faites-vous sur l’année 2022 dans le département de l’Essonne ?

Emmanuel Blanc : Au 4e trimestre 2022, le taux de chômage atteint 6,4 % de la population active dans le département de l’Essonne. En comparaison, sur la région Île-de-France, nous sommes à 6,9 % et au niveau national à 7,1 %. Nous constatons donc une amélioration avec globalement une baisse de 7 % de la demande d’emploi en Essonne. Cette évolution est portée notamment par une diminution significative du chômage de longue durée (- 12 %) et de très longue durée (- 22 %). Enfin, en volume, toutes catégories confondues, nous avons 100 170 demandeurs d’emploi inscrits dans le département, dont 54 510 en catégorie A, c’est-à-dire sans activité. Nous sommes sur une évolution historique grâce à un fort dynamisme du marché de l’emploi.

Actu-Juridique : Comment expliquez-vous ce dynamisme dans le département de l’Essonne ?

Emmanuel Blanc : Il y a plusieurs éléments explicatifs. D’abord, en Essonne, nous avons une population d’ouvriers et d’employés qualifiés, de techniciens et d’agents de maîtrise donc plutôt une population qualifiée, qui représente environ 60 % de notre demande d’emploi. La qualification importante des demandeurs d’emploi favorise leur retour à l’emploi. Comme au niveau national, nous rencontrons aussi une tendance structurelle de tensions de recrutement prégnantes, avec une forte augmentation du nombre d’offres d’emploi. Beaucoup d’employeurs témoignent auprès de nous de leurs difficultés de recrutement. Cette situation contribue aussi à la diminution du chômage. Enfin, notre action a aussi une incidence sur l’évolution du marché de l’emploi. À Pôle Emploi, nous travaillons avec un ensemble de partenaires. D’abord, les collectivités locales avec notamment l’accompagnement global pour les bénéficiaires du RSA en partenariat avec le conseil départemental de l’Essonne. Il y a aussi le réseau des missions locales qui aident les jeunes les plus éloignés de l’emploi dans leur démarche pour l’emploi. Je pense aussi à Cap Emploi à propos du soutien des personnes en situation de handicap.

Actu-Juridique : Existe-t-il des disparités au sein de territoires essonniens concernant le dynamisme de l’emploi ?

Emmanuel Blanc : Nous sommes dans un département très varié et très divers. Il y a des bassins d’emploi ruraux et urbains. Nous avons aussi des quartiers prioritaires de la politique de la ville où le taux de chômage est plus important. Je pense notamment aux territoires d’Évry, de Corbeil-Essonnes ou de Grigny. Les habitants des quartiers prioritaire de la politique de la ville représentent 18 % de nos demandeurs d’emploi. Un public confronté à plusieurs difficultés. Ce sont aussi des personnes qui sont demandeurs d’emploi de longue durée, bénéficiaires du RSA ou de minima sociaux à des proportions plus ou moins importantes. Enfin, il y a aussi des jeunes, éloignés de l’emploi, qui ont besoin d’un accompagnement sur mesure et d’un suivi hebdomadaire pour travailler sur leur projet professionnel et les techniques de recherche d’emploi. Les demandeurs d’emploi se trouvent essentiellement dans les territoires urbains qui correspondent à une forte densité de population.

Actu-Juridique : Quels projets importants ont été menés en 2022 par Pôle Emploi dans le département de l’Essonne ?

Emmanuel Blanc : Les projets menés par la direction territoriale de l’Essonne sont liés à la stratégie globale de Pôle Emploi. Nous avons donc mis en place différentes mesures. D’abord, l’installation du conseiller référent indemnisation. L’idée est de personnaliser la relation entre les conseillers en gestion des droits et les demandeurs d’emploi afin de les rassurer et de leur expliquer leurs droits lors de leur inscription. Par exemple, ce conseiller va aussi expliquer l’incidence sur l’indemnisation d’une personne qui reprend une activité réduite ou temporaire. L’objectif est d’avoir un contact personnalisé sur les droits au chômage. Ensuite, nous avons aussi instauré le parcours de remobilisation qui concerne les demandeurs d’emploi de très longue durée. Ce dispositif concerne les personnes inscrites depuis plus de 24 mois. L’ambition est de les redynamiser dans leur démarche de recherche, pour construire des parcours de retour à l’emploi. Cette mise en œuvre a participé à la diminution du chômage de longue durée, en Essonne. Par ailleurs, il y a la mise en œuvre du contrat d’engagement jeune en lien avec les missions locales. L’objectif est de permettre un accompagnement renforcé, avec une allocation versée, pour un retour rapide à l’emploi grâce à un tissu de trente conseillers mobilisés sur le territoire. À la fin de l’année 2022, nous avions 1850 contrats d’engagement jeune signés et 49 % de retour à l’emploi durant l’année, dans le département. Par exemple, nous avons aussi des jeunes engagés dans une mission de service civique, dans le service militaire volontaire ou encore dans des formations.

Actu-Juridique : Vous avez parlé des difficultés de recrutement concernant les métiers en tension. Quelles sont les activités concernées par ces difficultés dans le département ?

Emmanuel Blanc : Les activités qui connaissent des tensions sur le marché de l’emploi sont les métiers du commerce, du transport, de la logistique, du BTP, de la santé, de l’action sociale ou encore de la sécurité. Au-delà du département de l’Essonne, par exemple sur la sécurité, l’enjeu est très important. Ce secteur d’activité est directement lié à l’organisation des Jeux olympiques de Paris en 2024. Aujourd’hui, nous avons des besoins conséquents en Île-de-France : environ 25 000 personnes dans la sécurité civile. Il y a aussi les domaines annexes à l’organisation de cet événement international, comme les transports. Cependant, aujourd’hui, nous avons 10 000 demandeurs d’emploi inscrits dans la sécurité dans la région. C’est largement inférieur aux besoins.

Actu-Juridique : Comment faites-vous face à ces tensions sur le marché de l’emploi ?

Emmanuel Blanc : Notre stratégie va tourner autour de quatre axes. D’abord, nous souhaitons acculturer nos conseillers à la connaissance des secteurs et des métiers en tension. L’objectif est de lutter contre les idées reçues et d’informer les demandeurs d’emploi sur les opportunités liées à ces emplois. Par exemple, dans la sécurité, l’embauche se fait majoritairement en CDI. Dans la branche, les salaires ont augmenté de 7 %. Ensuite, nous voulons travailler avec les branches professionnelles, les fédérations patronales et les collectivités sur l’attractivité de certains secteurs. Le troisième axe concerne la formation et l’adaptation du demandeur d’emploi. En continuant avec l’exemple de la sécurité : un demandeur d’emploi qui n’a aucune expérience dans ce secteur va pouvoir bénéficier d’une formation pour obtenir un emploi. Enfin, nous voulons aussi organiser des événements qui tournent autour de la découverte des métiers en tension et du recrutement. Ces événements sont organisés à travers des sessions de recrutement pour une ou plusieurs entreprises du territoire. En 2022, en Essonne, plus de 1 000 rendez-vous ont eu lieu dans les agences. L’objectif est de favoriser la rencontre entre l’offre et la demande. Pour accompagner ces dynamiques autour des métiers en tension, nous avons mis en place 14 conseillers qui s’occupent spécifiquement des métiers identifiés comme étant en tension par le plan du ministère du Travail déployé en octobre dernier. Ils sont chargés de trouver des demandeurs d’emploi prêts à être embauchés dans les 25 métiers et quatre secteurs identifiés en Île-de-France.

Actu-Juridique : Vous avez aussi des initiatives qui permettent de recruter autrement ?

Emmanuel Blanc : Effectivement, nous avons des opérations innovantes comme « Du Stade vers l’emploi » ou la méthode de recrutement par simulation. L’idée de « Du Stade vers l’emploi » est de regrouper des recruteurs et des candidats de manière anonyme autour d’une activité sportive, durant la matinée. Puis, l’anonymat tombe et l’après-midi est consacré à des entretiens d’embauche. L’objectif est de permettre des rencontres entre recruteurs et candidats dans un autre contexte que l’entretien traditionnel et de faire ressortir les savoirs-être dans un contexte sportif. Pour cela, nous identifions et préparons les demandeurs d’emploi en fonction des besoins des entreprises qui participent à cette journée. Nous avons eu trois événements « Du Stade vers l’emploi » en 2022, à Gif-sur-Yvette avec la Fédération française de badminton, à Arpajon avec la Fédération française de rugby et à Brunoy avec celle d’athlétisme. Cette année, nous avons 11 rendez-vous de ce type prévus. Cette initiative est efficace car nous avons un taux de retour à l’emploi qui tourne autour de 70 % au niveau régional.

Actu-Juridique : Vous avez aussi mentionné le recrutement par simulation. En quoi consiste cette méthode ?

Emmanuel Blanc : La méthode de recrutement par simulation (MRS) est assez ancienne. Elle était déjà en place à la fin des années 1990. L’intérêt de ce dispositif est de focaliser le recrutement sur des habiletés. Nous positionnons le demandeur d’emploi en situation professionnelle pour pouvoir évaluer ses capacités à occuper le poste en question. Cette méthode a également été développée dans le cadre de la lutte contre les discriminations. Nous ne sommes pas sur un recrutement à partir d’un CV, de diplômes et d’expériences professionnelles. Les mises en situation sont très concrètes. Par exemple, un magasin de la grande distribution, qui recrute un employé de libre-service, va proposer de faire de la mise en rayon. Le demandeur d’emploi va être en situation pour s’essayer à cette activité en passant des tests dans un contexte proche de la réalité de l’entreprise. Au sein de la direction territoriale de l’Essonne, nous avons une équipe en charge de mettre en œuvre cette méthode de recrutement.

Actu-Juridique : Quelles sont vos perspectives et vos projets pour l’année 2023 pour la direction territoriale de Pôle Emploi en Essonne ?

Emmanuel Blanc : D’abord, j’ai des éléments qui me font penser que nous sommes sur une tendance favorable. Concrètement, le nombre d’offres d’emploi enregistré à Pôle Emploi au 4e trimestre 2022 est supérieur de 20 % par rapport à la même période en 2021. Sur des éléments plus empiriques, par rapport au secteur aéroportuaire autour d’Orly, le niveau des recrutements repart à la hausse. Nous travaillons en collaboration avec la direction territoriale du Val-de-Marne puisque l’aéroport est à cheval entre les deux départements. Mais nous avons un nombre important d’Essonniens qui travaillent sur cette zone. Nous avons une équipe dédiée à l’activité aéroportuaire. Ces dernières semaines, dans les contacts avec les employeurs, il y a de forts besoins dans le transport, la logistique, la sécurité, le commerce, l’hôtellerie, la restauration et l’industrie. En Essonne, nous avons un secteur industriel assez prégnant avec la présence de Sanofi, Alcatel ou encore Thales. Autour de Massy-Palaiseau, c’est très dynamique par rapport aux transports du Grand Paris avec la construction de la ligne 18 ou le tram T12 puis dans la continuité avec le territoire de Paris-Saclay.

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