« Les lignes bougent depuis le lancement du Grand Paris »

Publié le 23/01/2019

Pour la quatrième année, l’établissement public foncier de la région Ile-de-France, en partenariat avec l’Association des maires d’Ile-de-France, attribuait le 4 décembre dernier trois Trophées des maires bâtisseurs, dans les catégories « première couronne », « deuxième couronne », et « bourg et villages ».

La ville de Rosny-sous-Bois a emporté le trophée pour la première couronne, pour la présentation d’ un projet de « village vertical ». Cette construction de 28 000 mètres carrés en bois, verre et métal devrait ouvrir ses portes en 2022 et viendra structurer le quartier « Rosny métropolitain », que la ville entend développer autour des futures stations de métro de la ligne 11 et 15. Pour les Petites Affiches, le maire, Claude Capillon, est revenu sur ce projet innovant et nous a présenté sa vision pour Rosny-sous-Bois, une ville portée par le Grand Paris, appelée à se développer fortement dans les années à venir.

Les Petites Affiches

Que représente pour vous le « Trophée des maires bâtisseurs » que vous venez de recevoir ?

Claude Capillon

J’ai reçu le trophée dans la catégorie des maires de la petite couronne. Il est toujours agréable de recevoir un prix, mais au-delà de cela, ce trophée est une reconnaissance de tout ce qu’on a voulu mettre en place pendant des années. Les critères du jury étaient en effet la qualité des constructions, mais aussi la concertation avec les habitants, une dimension à laquelle nous tenons à Rosny-sous-Bois. Nous avons été récompensés pour un projet qui s’appelle le village vertical : un espace multi-fonctionnel qui intègrera des logements et des espaces de vie collective.  Les constructions en hauteur ont beaucoup d’intérêt si on veut lutter contre l’étalement des villes. C’est notamment un moyen de faire des espaces verts autour des immeubles.

LPA

Quelle est la génèse de ce village vertical ?

C. P.

La métropole du Grand Paris a lancé il y a deux ans un concours dont le titre était « Inventons la métropole ». Tous les maires pouvaient proposer un appel à projet, à, condition de maîtriser le foncier. Nous avons proposé un site et avons eu des retours de 25 architectes. Une dizaine de dossiers ont finalement été déposés, dont trois sortaient du lot. Le projet que nous avons sélectionné est donc ce « village vertical ». C’est un projet complètement orienté vers le développement durable, avec une structure tout en bois, verre et métal. Ce sera un espace multifonction. Il y aura, à l’intérieur, des logements, des bureaux, des espaces de coworking, une salle de sport, deux restaurants, une crèche et une conciergerie. Ce projet se situe dans le quartier nord de la ville qui aujourd’hui est un boulevard sans âme. Dans le futur, ce projet sera le projet phare de la ville. On le verra de très loin sur l’autoroute. Comme à l’époque on voyait la tour Pleyel de Saint-Denis.

LPA

Les projets d’architectes que vous avez reçus vous ont-ils surpris ?

C. P.

Ce village vertical est signé par un des architectes contemporains les plus célèbres aujourd’hui, le Japonais Sou Fujimoto. Il a travaillé en association avec l’agence d’architecture montreuilloise Laisné-Roussel. Nous avons reçu d’autres propositions d’architectes connus pour travailler dans le monde entier, de gens qui n’avaient jamais construit le moindre mètre carré en Seine-Saint-Denis, et qui pour certains n’y avaient jamais mis les pieds. En découvrant cela, je me suis dit qu’il se passait quelque chose.

LPA

Le regard sur la Seine-Saint-Denis est-il en train de changer ?

C. P.

La Seine-Saint-Denis a été un territoire stigmatisé par les médias et oublié par les pouvoir publics, qui pendant longtemps concentraient leurs efforts sur l’Ouest de Paris. Je suis un enfant du 93 et je peux dire que c’est pourtant un territoire qui regorge de talents. C’est un département jeune. Chaque année, je mets à l’honneur les nouveaux bacheliers, et je suis toujours frappé par leur qualité. Les lignes ont commencé à bouger au moment où le Grand Paris a été lancé par Nicolas Sarkozy. On est aujourd’hui dans une logique de « rééquilibrage », et de nombreux projets en cours devraient permettre de désenclaver et dynamiser le département. C’est une bonne chose pour les habitants du 93 mais aussi pour le Grand Paris dans son ensemble. Nous avons encore, sur notre territoire, du foncier disponible à des prix abordables. Cela permet de développer des projets immobiliers ambitieux.

LPA

Comment voyez-vous l’avenir de Rosny-sous-Bois ?

C. P.

Je souhaite que ce soit une ville totalement intégrée au Grand Paris, mais gardant son histoire, son âme. Rosny-sous-Bois, jusqu’à une époque encore récente, était une ville pavillonnaire entourée de cultures et terres maraîchères. À travers la révision du plan d’urbanisme, approuvé par le conseil municipal en 2015, j’ai souhaité lutter contre l’étalement urbain. Dans les zones pavillonnaires, il est désormais impossible de construire de nouveaux immeubles. D’un autre côté, j’ai voulu développer la ville, particulièrement là où le métro va arriver. Nous voulons densifier ces quartiers qui seront bien desservis. D’ici huit ans, Rosny-sous-Bois sera à vingt minutes de la place du Châtelet, en plein centre de Paris. Pour l’instant, nous avons déjà la ligne E du RER. Elle ira bientôt jusqu’à la Défense. En 2022, nous aurons également la ligne 11 qui arrivera dans le quartier des Coteaux-Beauclair et en 2030, la ligne 15 du Grand Paris Express.

LPA

Que représente l’arrivée du métro ?

C. P.

Le métro est une arrivée capitale pour le développement économique de la ville. Le faire arriver jusqu’à chez nous a été une bagarre qui a duré des années. Les premières discussions à ce sujet remontent à 1936 !  Au départ, la ligne devait s’arrêter à l’hôpital de Montreuil. Les maires des cinq communes concernées par ce projet : Les Lilas, Montreuil, Noisy-le-sec, Romainville et Rosny-sous-Bois ont parlé d’une seule voix pour exiger que le métro aille jusqu’à Rosny. Ces villes, pourtant de couleur politique différentes, ont su se battre ensemble dans leur intérêt commun.

LPA

Quelles conséquences l’arrivée du métro aura-t-elle pour la ville ?

C. P.

Rosny compte aujourd’hui 45 000 habitants, et sa population devrait encore s’accroître avec l’arrivée du métro. On estime que d’ici 2023, la ville comptera 50 000 habitants. Les familles viennent ici, attirées par la proximité de l’emploi, des transports, mais aussi par un certain cadre de vie. Rosny n’est pas une ville dortoir. Elle compte 350 associations, et il s’y passe des choses tous les week-end. Qui dit arrivée de nouvelles populations dit construction d’écoles, de crèches, de maisons de retraites. Depuis le début de mon mandat en 2014, nous construisons un groupe scolaire tous les deux ans. La construction de crèches est également une priorité. Nous arrivons à Rosny à satisfaire 40 % des demandes.

LPA

Comment construisez-vous ?

C. P.

On peut faire du développement urbain de qualité, à travers des labels écoquartiers, qui allient à la fois le logement, les commerces de proximité et l’activité économique. L’éco-construction est notre priorité. Nous allons lancer la construction de la zone d’aménagement concerté (ZAC) des Coteaux-Beauclair, un projet d’éco-quartier de 1 300 logements, qui devrait être livré à l’arrivée du métro. Le label éco-quartier, ce n’est pas simplement de l’affichage. Il est décerné par un jury qui, tout au long de la construction, plusieurs fois dans l’année, évalue que l’on respecte bien le cahier des charges.

LPA

Depuis quand avez-vous cet engagement environnemental ?

C. P.

Cet engagement est antérieur à mes mandats de maire. Claude Pernès, mon prédécesseur, m’avait chargé de mettre en place l’agenda 21 (plan d’action pour le XXIe siècle adopté lors du sommet de la Terre à Rio de Janeiro en 1992, NDLR). Cela m’a amené à rencontrer des responsables associatifs qui m’ont permis de prendre conscience de la nécessité de changer nos modes de vie. Je ne suis pas étiqueté vert, mais je suis le seul maire de France à avoir eu un stand à la COP 21 !

LPA

Comment se fait-il que vous ayez été le seul maire présent à la COP ?

C. P.

J’avais en effet été surpris de voir que les collectivités étaient un peu représentées, mais les maires pas du tout ! J’imagine néanmoins qu’ils ont été visiter la COP. Pour tenir un stand, il fallait avoir des choses à montrer. C’était le cas pour Rosny. Nous avions des réalisations concrètes dont nous pouvions faire état. Nous chauffons 10 000 foyers par géothermie, Nous n’utilisons plus de produits phytosanitaires pour le désherbage municipal, plus de peintures avec solvants pour les bâtiments municipaux… Nous faisons des écoles avec des façades bioclimatiques, misons sur les énergies renouvelables… Pour moi, l’écologie n’a pas de couleur politique. C’est simplement avoir conscience que l’on ne peut plus se comporter comme avant et faire bouger les lignes dans ce sens.

LPA

Vous voulez également faire de Rosny une ville verte…

C. P.

Notre but est d’avoir une trame verte entre les deux collines : celle de la Boissière, à l’Ouest, à la limite de Montreuil et celles du plateau d’Avron, à l’Est, à la frontière de Neuilly-Plaisance. Nous avons décidé de faire un parc de 17 hectares sur le plateau d’Avron, sur une zone d’anciennes carrières que l’on pouvait très difficilement construire. C’est un espace avec des zones humides, des espèces rares à protéger. Ce nouveau parc, les habitants l’ont voulu très naturaliste. Il y aura des parties préservées, auxquelles les habitants n’auront pas accès. Cela permettra d’installer les animaux d’une ferme pédagogique. Des cheminements en bois permettront aux promeneurs et joggeurs de circuler, mais le parc sera interdit aux vélos.  Les aires de jeux pour enfants seront concentrées à l’entrée. Ce parc complètera l’offre d’espaces verts plus classiques que nous avons déjà à Rosny. Une ville urbaine comme Rosny-sous-Bois peut également abriter de grands espaces verts.

 

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