La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte
La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte a été publiée au Journal officiel du 24 octobre 2023. Elle doit permettre d’accélérer la relance de l’industrie française tout en favorisant la transition écologique. Elle cherche à renforcer la prise en compte des enjeux environnementaux dans la commande publique et à améliorer le financement de l’industrie verte.
L. n° 2023-973, 23 oct. 2023, relative à l’industrie verte
Le 9 octobre 2023, les députés et les sénateurs, réunis en commission mixte paritaire, sont parvenus à un compromis sur ce texte législatif qui vise à faire de la France le leader de l’industrie verte en Europe. Présenté au conseil des ministres du 16 mai 2023, il a fait l’objet au Parlement de la procédure accélérée et a été définitivement adopté par ce dernier, le 11 octobre 2023, par un vote ultime du Sénat. Il n’y a pas eu de saisine du Conseil constitutionnel sur ce texte qui poursuit trois grands objectifs : faciliter l’implantation et le développement de sites industriels ; favoriser les entreprises vertueuses dans la commande publique ; et financer l’industrie verte. Il s’inscrit dans le droit fil de la loi n° 2023-175 du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production des énergies renouvelables et de la loi n° 2023-491 du22 juin 2023 sur l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires « qui permettent la décarbonation de l’énergie, prérequis indispensable à une industrie plus verte »1.
La loi du 23 octobre 2023 s’inspire des recommandations du rapport « Simplifier et accélérer les implantations d’activités économiques en France », remis au gouvernement par Laurent Guillot en mars 2022, qui a mis en exergue la longueur des délais nécessaires à l’implantation d’une activité économique en France et a préconisé une réforme de la procédure d’autorisation environnementale. Afin de réduire les délais administratifs d’implantation des projets industriels, elle instaure une simultanéité de l’instruction administrative des projets et de la consultation du public. « Nous voulons diviser par deux les délais, de 17 à 9 mois, en faisant une vraie révolution administrative » a souligné le ministre de l’Économie Bruno Le Maire devant les sénateurs le 20 juin 2023. Il s’agit ainsi d’encourager des projets comme ceux du Big Five (éolien, photovoltaïque, pompes à chaleur, batteries et hydrogène décarboné). La loi vient également instituer « une procédure exceptionnelle simplifiée » contrôlée par l’État pour les projets industriels d’intérêt national majeur. Elle cherche par ailleurs à accélérer la réhabilitation des friches industrielles et à faciliter la mise en œuvre des obligations de compensation des porteurs de projet portant atteinte à la biodiversité.
D’autre part, dans le prolongement de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, la loi du 23 octobre 2023 vise à « verdir » le droit de la commande publique. Comme le rappelle l’étude d’impact du projet de loi : « Par son poids dans l’activité économique, la commande publique constitue un moyen d’intervention efficace pour accélérer et consolider la transition vers des modes de production et de consommation plus vertueux afin de répondre aux enjeux liés à la protection de l’environnement et notamment celui d’une nécessaire diminution des émissions de gaz à effet de serre ».
Enfin, l’épargne privée est mobilisée pour financer l’industrie verte. L’une des grandes nouveautés de la loi du 23 octobre 2023 réside dans la création d’un produit d’épargne de long terme destiné aux jeunes, le « plan d’épargne avenir climat ». Conçu sur le modèle du plan d’épargne retraite (PER), il « permettra de lever 5 Md€ pour financer la transition climatique et l’industrie verte » a déclaré Bruno Le Maire le 7 juillet 2023 à l’Assemblée nationale.
Il s’agira pour nous dans cette étude de présenter les principaux apports de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023. Nous verrons qu’elle présente de nombreuses mesures destinées à accélérer les implantations industrielles (I), à verdir la commande publique (II) et à financer l’industrie verte (III).
I – Les mesures destinées à faciliter l’implantation des sites industriels
La planification industrielle dans les territoires est renforcée. L’article L. 4251-1 du Code général des collectivités territoriales est modifié afin de confier aux régions le soin de fixer dans les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) des objectifs de moyen et long termes en matière de développement industriel (art. 1er).
Pour accélérer la transition écologique et la décarbonation de l’industrie, l’État devra élaborer une stratégie nationale « industrie verte » pour la période 2023-2030 (art. 2). Cette stratégie déterminera en particulier les filières stratégiques qui devront être implantées ou développées prioritairement sur le territoire national.
Par ailleurs, dans le cadre de leurs compétences, les établissements publics fonciers pourront contribuer au développement des activités économiques, « notamment pour faciliter les projets d’implantations industrielles » (art. 3).
Afin de ne pas ralentir la réalisation de projets industriels, l’article 4 de la loi 23 octobre 2023 permet de sanctionner les recours abusifs contre les décisions d’autorisation environnementale. En effet, « dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire de l’autorisation [environnementale, ce dernier pourra] demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l’auteur de celui-ci à lui verser des dommages et intérêts ». Ces dispositions s’inspirent de celles de l’article L. 600-7 du Code de l’urbanisme qui facilite l’action en dommages et intérêts pour recours abusifs.
La loi du 23 octobre 2023 prévoit un déroulement simultané des phases d’examen du dossier de demande d’autorisation environnementale et de consultation du public alors que ces deux phases sont actuellement distinctes et successives (art. 4). Il s’agit de réduire le séquencement des différentes étapes de la procédure d’évaluation environnementale qui, selon l’étude d’impact du projet de loi, « font de la France un des pays européens où le délai réel d’obtention des permis d’exploiter est le plus long ». Pour les demandes d’autorisation environnementale, une nouvelle procédure de consultation du public est instituée. Ce dernier sera consulté dès le début de la phase d’examen et pour une période de trois mois, contre un mois actuellement. Le commissaire enquêteur devra organiser deux réunions publiques au début et à la fin de la période de consultation, en présence du porteur de projet.
Il sera possible de mutualiser les débats publics et les concertations préalables lorsque plusieurs projets d’aménagement susceptibles de relever de l’obligation de saisine de la Commission nationale du débat public (CNDP) sont envisagés dans les huit ans à venir sur un même territoire délimité et homogène (art. 5).
Le texte législatif étend aux implantations d’industries vertes le dispositif de la « déclaration de projet » prévue à l’article L. 300-6 du Code de l’urbanisme ; une procédure permettant de mettre en compatibilité de manière accélérée les documents d’urbanisme locaux avec un projet d’aménagement d’intérêt général (art. 17). Il inclut explicitement dans le champ de la procédure de déclaration de projet l’implantation d’installations industrielles « qui participent aux chaînes de valeur des activités dans les secteurs des technologies favorables au développement durable (…) ».
Un projet industriel qui revêt, eu égard à son objet et à son envergure, notamment en termes d’investissement et d’emploi, une importance particulière pour la transition écologique ou la souveraineté nationale pourra être qualifié par décret de projet d’intérêt national majeur (art. 19). Afin d’associer les élus locaux à l’implantation de ces projets, la procédure de mise en compatibilité du document d’urbanisme ne pourra être engagée « qu’après accord du maire de la commune dans laquelle le projet industriel pourrait être implanté, ou du président de l’établissement public de coopération intercommunale (…) lorsqu’un plan local d’urbanisme intercommunal est applicable sur le territoire de celle-ci, et du président de la région correspondante lorsque son document de planification doit être mis en compatibilité ». Les collectivités territoriales devront disposer « de toutes les données leur permettant de juger de la nature de l’implantation industrielle proposée et de la nécessité de modifier leurs documents stratégiques ou d’urbanisme : une commune qui considère qu’elle n’a pas toutes les données pourra émettre son veto sur ce fondement »2. Chaque région pourra signaler au ministre chargé de l’industrie les projets qui lui semblent susceptibles d’être reconnus d’intérêt national majeur, « après avoir recueilli, si la localisation du projet est déjà connue, l’avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale sur le territoire desquels ces projets pourraient être implantés » (art. 19).
Pour accélérer la réhabilitation des friches industrielles, la procédure de cessation d’activités des anciens sites industriels est facilitée. La procédure du tiers demandeur, qui a été instaurée par la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et à un urbanisme rénové (dite loi ALUR) et son décret d’application n° 2015-1004 du 18 août 2015, est améliorée (art. 8). Cette procédure permet de transférer à un tiers la responsabilité de la remise en état d’un site sur lequel une activité d’installation classée a été exploitée. Le tiers prend alors en charge les coûts de cette remise en état et devient responsable de celle-ci vis-à-vis de l’administration. Des modifications sont apportées à l’article L. 512-21 du Code de l’environnement qui indique désormais qu’un tiers intéressé pourra demander au préfet de se substituer à l’exploitant dès la notification de la cessation d’activité (art. 8). Il pourra aussi demander « à se substituer à l’exploitant pour réaliser, outre la réhabilitation, tout ou partie des mesures de mise en sécurité de l’installation ». Il pourra enfin demander au préfet, « par anticipation » et avec l’accord de l’exploitant, l’autorisation de se substituer à ce dernier « en cas de future cessation d’activité ».
Comme on le sait, la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages a prévu que, lorsqu’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) n’a pas été exploitée pendant trois années consécutives, le préfet peut mettre en demeure l’exploitant de procéder à la mise à l’arrêt définitif. Le législateur a complété l’article L. 512-19 du Code de l’environnement pour donner la possibilité au préfet de mettre en demeure l’exploitant de procéder à la mise à l’arrêt définitif d’une partie seulement d’une installation classée, en cas d’inexploitation durant trois années consécutives (art. 8).
D’autre part, la loi du 23 octobre 2023 vise à faciliter la mise en œuvre des obligations de compensation pour l’implantation de sites industriels portant atteinte à la biodiversité. Selon l’article L. 163-1 du Code de l’environnement, les mesures de compensation des atteintes à la biodiversité sont les mesures « rendues obligatoires par un texte législatif ou réglementaire pour compenser, dans le respect de leur équivalence écologique, les atteintes prévues ou prévisibles à la biodiversité occasionnées par la réalisation d’un projet de travaux ou d’ouvrage ou par la réalisation d’activités ou l’exécution d’un plan, d’un schéma, d’un programme ou d’un autre document de planification ». Les « sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation » (SNCRR) viendront désormais remplacer les « sites naturels de compensation », créés par la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, qui n’ont pas fonctionné (art. 15). Cette réforme doit permettre « aux porteurs de projet de réaliser des opérations de compensation par anticipation, y compris pour des projets isolés, par exemple pour des sites “clés en main” », indique l’exposé des motifs du projet de loi. Le nouvel article L. 163-1, A, du Code de l’environnement dispose que des opérations de restauration ou de développement d’éléments de biodiversité pourront être réalisées par des personnes publiques ou privées sur des SNCRR. Le gain écologique de ces opérations sera identifié par des unités de compensation, de restauration ou de renaturation, lesquelles pourront être vendues par les personnes responsables des opérations à toute autre personne publique ou privée. Les SNCRR feront l’objet d’un agrément préalable de l’autorité administrative compétente. Ils pourront donner lieu, sous certaines conditions, à l’attribution « de crédits carbone au titre du label “bas carbone” ».
II – Les mesures tendant au verdissement de la commande publique
Deux nouveaux motifs d’exclusion des marchés publics pour les entreprises ne respectant pas leurs obligations en matière environnementale sont créés.
Le gouvernement est tout d’abord habilité à légiférer par voie d’ordonnance pour prévoir un nouveau dispositif d’exclusion facultative des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession qui concernera les entreprises ne respectant pas leurs obligations de publication d’informations en matière de durabilité issues de la directive (UE) n° 2022/2464 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 (art. 25). Il s’agit d’un mécanisme similaire à celui introduit par la loi Climat et Résilience du 22 août 2021 en ce qui concerne le plan de vigilance des sociétés. En application de la directive (UE) n° 2022/2464 du 14 décembre 2022 dite directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive), qui a été publiée le 16 décembre 2022 au Journal officiel de l’Union européenne, « les grandes entreprises et les petites et moyennes entreprises devront inclure, dans le rapport de gestion, les informations qui permettent de comprendre les incidences de l’entreprise sur les questions de durabilité, la manière dont ces questions de durabilité influent sur l’évolution des affaires, les résultats et la situation de l’entreprise »3.
Les acheteurs publics auront aussi la possibilité d’exclure des procédures de passation des contrats de la commande publique les entreprises ne satisfaisant pas à l’obligation d’établir un bilan des émissions de gaz à effet de serre (BEGES) prévue par l’article L. 229-25 du Code de l’environnement (art. 29). Cette obligation impose d’élaborer un diagnostic précis des émissions de gaz à effet de serre, accompagné d’un plan de transition, en vue d’identifier et de mobiliser des leviers de réduction de ces émissions.
Le législateur a voulu rendre plus dissuasives les sanctions financières encourues en cas de non-respect de l’obligation d’établir un BEGES en augmentant leur montant maximal (50 000 € et 100 000 € en cas de récidive). Il a également voulu inciter les entreprises concernées à satisfaire à cette obligation. C’est la raison pour laquelle il a prévu que l’octroi d’aides publiques à la transition écologique et énergétique sera conditionné à la transmission des informations relatives à la mise en œuvre de cette obligation pour les entreprises de plus de 500 salariés et à l’établissement d’un BEGES simplifié pour les entreprises de 50 à 500 salariés.
Par ailleurs, l’article 29 de la loi du 23 octobre 2023 vient introduire à l’article L. 2152-7 du Code de la commande publique une définition de l’offre économiquement la plus avantageuse. Il précise la façon dont cette dernière est déterminée, notamment par la prise en compte du critère environnemental et cela dans l’attente de l’entrée en vigueur de l’article 35 de la loi Climat et Résilience du 22 août 20214. L’offre économiquement la plus avantageuse pourra « être déterminée sur le fondement d’une pluralité de critères non discriminatoires et liés à l’objet du marché ou à ses conditions d’exécution, parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux » (art. 29).
D’autre part, le texte législatif permet le renforcement des schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER) qui ont été instaurés par la loi n° 2014-856 du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire. Il étend à l’État l’obligation d’adopter un SPASER (art. 29). Cette obligation ne concernait jusqu’ici que les collectivités territoriales et les acheteurs soumis au Code de la commande publique dont le statut est fixé par la loi et dont le volume d’achats annuel est supérieur à un montant fixé par voie réglementaire.
La loi du 23 octobre 2023 ouvre la possibilité de mise en commun des éléments du SPASER par plusieurs acheteurs au sein d’un schéma élaboré conjointement. L’article L. 2111-3 du Code de la commande publique est complété afin de préciser que les SPASER visent notamment « à réduire les émissions de gaz à effet de serre et la consommation d’énergie, d’eau et de matériaux ». En outre, les SPASER participeront désormais à la promotion d’une durabilité des produits et d’une sobriété numérique.
On soulignera que le gouvernement a annoncé la création par voie réglementaire d’un standard « triple E » (excellence environnementale européenne) qui valorisera les entreprises les plus vertueuses, avec en particulier un accès privilégié à la commande publique. Sa mise en place a été confiée à l’Association française de normalisation (AFNOR).
III – Les mesures destinées à financer l’industrie verte
La loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 a prévu une obligation de référence générale dans les contrats d’assurance-vie pour les unités de compte ayant obtenu les labels reconnus par l’État satisfaisant aux objectifs de transition écologique ou d’investissement socialement responsable (art. 32). Elle impose de référencer dans les contrats au moins une unité de compte composée de 5 à 10 % de titres émis issus des labels d’État. La liste de ces labels ainsi que leurs critères et modalités de délivrance seront précisés par décret. En vue de la publication de ce décret, le Sénat avait tenu à ajouter un avis obligatoire de l’Autorité des marchés financiers et de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. Mais la commission mixte paritaire a suivi l’Assemblée nationale qui a souhaité supprimer l’obligation d’obtenir l’avis de ces deux autorités, laquelle ne figurait pas dans le projet de loi initial.
Un nouveau produit d’épargne destiné aux personnes physiques âgées de moins de 21 ans, le « plan d’épargne avenir climat » (PEAC), est créé afin de soutenir les priorités de financement de l’économie française et la transition écologique (art. 34). Mesure phare de la loi du 23 octobre 2023, le PEAC pourra être distribué par les banques et les assurances. Il prendra la forme d’un contrat de capitalisation distribué par des assureurs ou celle d’un compte titres associé à un compte en espèces. Il ne pourra avoir qu’un titulaire et sera clôturé lorsque ce dernier atteindra l’âge de 30 ans. Le projet de loi initial avait prévu le versement, par l’État, d’un abondement pour toute ouverture d’un PEAC au cours de l’année de naissance du titulaire. Mais cette disposition n’a pas été retenue par la commission mixte paritaire. Le nouvel article L. 221-34-3 du Code monétaire et financier prend soin d’indiquer que les versements effectués sur le PEAC seront « affectés à l’acquisition de titres financiers qui contribuent au financement de la transition écologique et d’instruments financiers bénéficiant d’un faible niveau d’exposition aux risques dont les émetteurs ont leur siège en France ou dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales ». Les titres financiers contribuant à la transition écologique devront donc avoir été émis par des entreprises françaises ou européennes à l’image de ce qui a été prévu par le législateur pour le plan d’épargne en actions (PEA).
Le projet de loi de finances pour 2024, en cours de discussion parlementaire, prévoit d’exonérer d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux les revenus générés par le PEAC (art. 3).
D’autre part, la loi du 23 octobre 2023 donne la possibilité aux assurés d’avoir un accès plus facile aux actifs non cotés afin de contribuer au financement de l’industrie verte (art. 35). Les contrats d’épargne retraite et d’assurance-vie devront inclure dans leur mandat de gestion une part d’unités de compte investies dans le non-côté, afin de participer au financement de la décarbonation des petites et moyennes entreprises (PME) et des entreprises de taille intermédiaire (ETI).
Pour que les épargnants puissent transférer plus facilement leurs capitaux vers des supports d’investissement « dédiés au développement durable », le délai maximal imparti pour le transfert de l’épargne retraite est réduit de 18 à 6 mois (art. 37).
La loi du 23 octobre 2023 entend aussi soutenir le développement en France des fonds européens d’investissement de long terme dits ELTIF, créés par le règlement (UE) n° 2015/760 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2015 (le règlement ELTIF 1), qui contribueront au financement de la décarbonation de l’économie. Le gouvernement est habilité à légiférer par ordonnance pour adapter le droit français aux révisions apportées au règlement ELTIF 1 et moderniser la gamme des fonds français (art. 40). Le règlement européen (UE) n° 2023/606 du 15 mars 2023, dit règlement ELTIF 2, qui a été publié au Journal officiel de l’Union européenne du 20 mars 2023, a modifié le règlement ELTIF 1.
Le texte issu de la commission mixte paritaire ne reprend pas l’amendement voté par l’Assemblée nationale qui venait rendre obligatoire le Say on climate pour les sociétés cotées5. Il ne reprend pas non plus la disposition adoptée par le Sénat qui imposait aux sociétés de capital-risque (SCR) un minimum d’investissement dans des actifs contribuant « au financement de la transition écologique dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État ».
Enfin, le projet de loi de finances pour 2024, en cours d’examen au Parlement, vient créer un crédit d’impôt au titre des investissements en faveur de l’industrie verte (art. 5). Selon le gouvernement, ce crédit d’impôt (C3IV) destiné à encourager les investissements dans les secteurs stratégiques pour la transition énergétique devrait « générer environ 23 Md€ d’investissements et la création de 40 000 emplois directs sur le territoire national d’ici 2030 ».
En conclusion, il apparaît que la loi du 23 octobre 2023, qui a été présentée comme l’une des réponses à l’Inflation Reduction Act (IRA)6 adopté par le Congrès américain en 2022, marque incontestablement une nouvelle étape importante dans la politique industrielle de la France. Elle devrait contribuer au verdissement des politiques publiques.
Notes de bas de pages
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1.
V. AN, rapp. n° 1512, 7 juill. 2023, p. 7.
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2.
V. CMP, rapp. nos 1710 et 19, 9 oct. 2023, p. 24.
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3.
V. La Lettre de la DAJ (direction des affaires juridiques du ministère de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique), n° 348, 22 déc. 2022.
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4.
Ce texte a introduit l’obligation pour les acheteurs de retenir au moins un critère d’attribution prenant en compte les caractéristiques environnementales de l’offre. Il entrera en vigueur au plus tard le 21 août 2026.
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5.
Adopté contre l’avis du gouvernement, le dispositif retenu prévoyait un vote consultatif, tous les trois ans, des actionnaires sur la « stratégie climat et durabilité » de l’entreprise et un vote consultatif, chaque année, sur les résultats obtenus.
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6.
La loi IRA a prévu quelque 370 milliards de dollars de subventions aux entreprises qui investissent dans les énergies propres sur le sol américain.
Référence : AJU011c5