Coup d’envoi pour les dépôts de demande d’agrément de CASP en France

Publié le 05/12/2024
Coup d’envoi pour les dépôts de demande d’agrément de CASP en France
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Le 30 décembre 2024, le règlement européen sur les marchés de crypto-actifs entrera pleinement en application. Afin d’accompagner les acteurs de l’écosystème vers une transition aux exigences de ce règlement, l’Autorité des marchés financiers a publié le 2 août 2024 un communiqué et un dossier délivrant des messages-clés à l’attention de ces acteurs. Cet article synthétise les messages portant sur l’agrément en qualité de prestataire de services sur crypto-actifs, la période transitoire, le passeport européen et la procédure simplifiée qui devrait être mise en place en France.

Le règlement européen sur les marchés de crypto-actifs1 (dit MiCAR, Markets in cryptoassets regulation) a offert au secteur des crypto-actifs une réglementation harmonisée au niveau européen. Cette réglementation oblige les entités qui souhaitent fournir des services sur crypto-actifs2 à obtenir au préalable un agrément de prestataire de services sur crypto-actifs (CASP désignant Cryptoasset service provider).

Le MiCAR entre pleinement en vigueur en fin d’année 2024 (30 décembre 2024), il remplacera les régimes nationaux existants3. En France, quatre régimes existent : les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) qui bénéficient d’un agrément, d’un enregistrement « renforcé », d’un enregistrement « simple »4 ou qui fournissent le service mentionné au 5° de l’article L. 54-10-2 du Code monétaire et financier5.

Afin d’accompagner la transition des acteurs de l’écosystème vers le MiCAR, l’Autorité des marchés financiers (AMF) et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) ont organisé un webinaire6, et un communiqué ainsi qu’un dossier ont été publiés le 2 août 20247.

Le communiqué porte plusieurs messages : (i) le dépôt, auprès de l’AMF, des demandes d’agrément en qualité de CASP est possible depuis le 1er juillet 2024, (ii) la période transitoire permet aux PSAN de poursuivre leur activité jusqu’au 30 juin 2026, sans agrément de CASP, (iii) les établissements fournissant leurs services au titre de la période transitoire ne peuvent pas se prévaloir du passeport européen pour fournir leurs services dans d’autres États membres de l’Union européenne8 et (iv) l’agrément de CASP nécessite un travail de préparation incontournable, dans la mesure où « les exigences fixées par les législateurs européens pour l’obtention de l’agrément MiCAR sont plus importantes que celles prévues par la législation française pour l’enregistrement PSAN dit « renforcé » et plus encore pour l’enregistrement PSAN dit « simple ».

L’AMF souligne que l’objectif de la période transitoire est de permettre aux PSAN de se préparer aux exigences du MiCAR et précise qu’elle « ne pourra plus octroyer d’extension de services sur actifs numériques après le 1er janvier : un PSAN souhaitant fournir des services complémentaires devra solliciter un agrément en tant que [CASP] » et qu’il est possible de « basculer sa demande PACTE (en instruction ou à venir) en une pré-instruction de dossier [CASP] dès aujourd’hui (procédure d’agrément ou procédure de notification sous MiCAR) »9.

En parallèle, l’Autorité européenne des marchés financiers (ESMA, European securities and markets authority) a publié un rapport final le 25 mars 2024 contenant des normes techniques réglementaires (RTS, regulatory technical standards) et des normes techniques d’implémentation (ITS, implementation technical standards) portant sur l’autorisation des CASP. Le RTS liste les informations à fournir dans le cadre d’une demande d’agrément de CASP, à savoir :

• des informations générales sur le CASP et le business plan ;

• compétence et honorabilité des membres de l’organe de direction et des actionnaires ;

• sur l’organisation du CASP : conflits d’intérêts, gouvernance et contrôle interne, traitement des réclamations, continuité de l’activité, sécurité informatique, etc. ;

• sur les exigences prudentielles ;

• sur ses obligations de vigilance : détection et prévention du blanchiment et du financement du terrorisme, et des abus de marché ;

• sur les activités exercées par le CASP : conservation des avoirs, règles de fonctionnement des plateformes, etc10.

Le formulaire de demande d’agrément est contenu dans l’ITS.

Ces textes de niveau 211 seront soumis à la Commission européenne pour approbation et adoption. Ce faisant, ils intégreront l’ordonnancement juridique applicable aux CASP.

Afin d’orienter les travaux des candidats à l’agrément de CASP lors de la constitution de leur dossier d’agrément, l’AMF les invite à étayer « le plus possible [leurs] procédures et [leurs] politiques internes. Les procédures ne doivent pas être un rappel des textes, mais doivent décrire de façon opérationnelle comment [leur] établissement les applique. Les procédures doivent être fidèles à la réalité »12.

Par ailleurs, une procédure simplifiée13 semble bien être prévue pour les PSAN qui bénéficient de l’enregistrement « renforcé » ou d’un agrément14. Les PSAN qui bénéficient de l’enregistrement « simple » seraient donc exclus de cette procédure simplifiée, ce qui peut se comprendre au regard de l’écart d’exigence entre ce statut et les exigences applicables aux CASP.

Au titre de la procédure simplifiée, l’AMF invite les candidats à l’agrément de CASP à :

• envoyer un dossier complet (conforme au RTS qui liste les pièces constitutives d’un dossier d’agrément) reprenant les éléments déjà envoyés auparavant à l’AMF dans le cadre de la procédure d’enregistrement renforcé/agrément en qualité de PSAN ;

• ajouter une mention spécifique en cas d’évolution significative d’une information donnée.

L’AMF précise que « les éléments déjà analysés préalablement par [elle], et n’ayant pas connu d’évolution significative, donneront lieu à revue limitée sans aucune duplication des diligences déjà effectuées »15. En bonne pratique, il nous semble que la transmission des procédures ayant fait l’objet d’évolutions significatives, faisant apparaître ces modifications en marque de révision, pourrait faciliter l’évaluation des agents de l’AMF.

Autorité des marches financiers

Notes de bas de pages

  • 1.
    PE et Cons. UE, règl. (UE) n° 2023/1114, 31 mai 2023, sur les marchés de crypto-actifs.
  • 2.
    Les services prévus par le MiCAR sont : la conservation et l’administration de crypto-actifs pour le compte de clients ; l’exploitation d’une plateforme de négociation de crypto-actifs ; l’échange de crypto-actifs contre des fonds ; l’échange de crypto-actifs contre d’autres crypto-actifs ; l’exécution d’ordres pour le compte de clients ; le placement de crypto-actifs ; la réception et la transmission d’ordres sur crypto-actifs pour le compte de clients ; la fourniture de conseils en crypto-actifs ; la gestion de portefeuille de crypto-actifs ; la fourniture de services de transfert de crypto-actifs pour le compte de clients.
  • 3.
    Ce remplacement s’articulera avec les périodes transitoires pour les entités qui fournissent des services sur crypto-actifs au titre du droit national mises en place par les clauses de « grand-père ». En France, cette période s’étend jusqu’au 30 juin 2026 pour les PSAN enregistrés ou agréés ou fournissant les services mentionnés au 5 de l’article L. 54-10-2 du Code monétaire et financier. V. notamment A. Aranda Vasquez, « Application de la clause de grand-père prévue par MiCA aux PSAN enregistrés ou agréés en France », Actu-Juridique.fr 11 juin 2024, n° AJU012v4.
  • 4.
    Les exigences mises en place pour l’obtention d’un enregistrement « simple » ont été renforcées par la loi DDADUE (L. n° 2023-173, 9 mars 2023). Cette loi a introduit le dispositif d’enregistrement « renforcé » qui a succédé à l’enregistrement « simple ». V. notamment, A. Aranda Vasquez, « Enjeux de l’enregistrement ou de l’agrément en tant que PSAN avant la fin décembre 2024 », Actu-Juridique.fr 30 nov. 2023, n° AJU011g7.
  • 5.
    La fourniture de ces services (i.e. la réception et la transmission d’ordres sur actifs numériques pour le compte de tiers ; la gestion de portefeuille d’actifs numériques pour le compte de tiers ; le conseil aux souscripteurs d’actifs numériques ; la prise ferme d’actifs numériques ; le placement garanti d’actifs numériques ; le placement non garanti d’actifs numériques) n’est pas soumise à l’obtention d’un agrément ou d’un enregistrement.
  • 6.
    Le support du webinaire est disponible à l’adresse suivante : https://lext.so/o_WaSJ.
  • 7.
    Le communiqué est disponible à l’adresse suivante : https://lext.so/nrM_1A.
  • 8.
    A. Aranda Vasquez, « L’AEMF apporte des éclairages sur la fourniture de services transfrontaliers par des prestataires de services sur crypto-actifs bénéficiant de la clause de grand-père prévue par MiCA », Actu-Juridique.fr 16 avr. 2024, n° AJU012s6 ; A. Aranda Vasquez, « Les PSAN peuvent-ils bénéficier du passeport européen ? », Actu-Juridique.fr 13 janv. 2022, n° AJU002s3.
  • 9.
    AMF, « MiCA : de PSAN à PSCA », webinaire, 1er juill. 2024.
  • 10.
    AMF, « MiCA : de PSAN à PSCA », webinaire, 1er juill. 2024.
  • 11.
    Il existe quatre niveaux de textes européens. Ces niveaux peuvent être présentés schématiquement de la manière suivante : le texte de niveau 1 correspond à la réglementation de base adoptée par le Parlement européen et le Conseil (règlement ou directive), le texte de niveau 2 correspond à un texte technique (RTS ou ITS) adopté par la Commission, le texte de niveau 3 correspond à des lignes directrices relatives aux textes de niveau 1 et 2 émises par un comité de superviseurs nationaux et le texte de niveau 4 correspond au rapport qui suit l’application des règles de l’Union européenne au niveau national.
  • 12.
    AMF, « MiCA : de PSAN à PSCA », webinaire, 1er juill. 2024.
  • 13.
    Cette possibilité est offerte par l’article 143, 6 du MiCAR.
  • 14.
    AMF, « Le règlement européen Markets in Crypto-Assets (MiCA) », 2 août 2024, https://lext.so/cX7zC9.
  • 15.
    AMF, « Le règlement européen Markets in Crypto-Assets (MiCA) », 2 août 2024, https://lext.so/cX7zC9.
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