Enjeux de l’enregistrement ou de l’agrément en tant que PSAN avant la fin décembre 2024
Le secteur des actifs numériques a été encadré en France par la loi PACTE (L. n° 2019-486, 22 mai 2019). Cette loi a mis en place un régime qui s’articule autour d’un enregistrement obligatoire et d’un agrément optionnel délivré par l’Autorité des marchés financiers (AMF). Les exigences à remplir par les candidats à l’enregistrement en tant que prestataire de services sur actifs numériques (PSAN) ont été renforcées par la loi DDADUE (L. n° 2023-171, 9 mars 2023). Malgré la mise en place d’un enregistrement renforcé, des différences existent entre, d’une part, l’enregistrement renforcé ou l’agrément en tant que PSAN et, d’autre part, les exigences qui pèsent sur les prestataires de services sur crypto-actifs (CASP), introduites par le règlement européen MICA (markets in crypto-assets). MICA introduit une période transitoire qui permet aux PSAN de continuer à fournir leurs services pendant cette période. Cette période transitoire présente un intérêt pour les PSAN et les porteurs de projet qui souhaitent se lancer dans le secteur des services sur actifs numériques.
1. Cadre réglementaire français. Le secteur français des actifs numériques a été encadré par la loi PACTE du 22 mai 20191. Cette loi oblige les prestataires qui entendent fournir les services mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 54-10-2 du Code monétaire et financier2 à obtenir un enregistrement obligatoire, préalablement à la fourniture des services sur actifs numériques. La loi PACTE a également introduit un régime d’agrément facultatif qui, pour l’heure, connaît un succès limité avec un agrément délivré à fin octobre 2023 contre 97 PSAN enregistrés à la même date3.
2. Évolution des exigences réglementaires françaises. Le régime d’enregistrement issu de la loi PACTE prévoyait un nombre relativement limité d’exigences au moment de l’enregistrement obligatoire par rapport à l’agrément facultatif. Ces exigences ont été renforcées par la loi n° 2023-171 du 9 mars 2023 (loi DDADUE) qui a mis en place un enregistrement renforcé, reprenant en partie les exigences de l’agrément. La loi DDADUE doit entrer en vigueur le 1er janvier 2024. Cependant, depuis le 1er juillet 2023, les porteurs de projet qui souhaitent se faire enregistrer en tant que PSAN doivent anticiper les nouvelles exigences de la loi DDADUE.
3. Évolution du cadre réglementaire européen. Le cadre réglementaire européen a évolué en parallèle de l’évolution du cadre réglementaire français. Dans un premier temps, la cinquième directive LCB-FT4 a mis en place un régime d’immatriculation5. Cette exigence a été transposée au sein des États membres, créant ainsi plusieurs régimes nationaux. Les travaux des législateurs européens se sont poursuivis et ont abouti sur l’adoption du règlement MICA (markets in crypto-assets)6. Selon les termes de MICA : « Une personne ne peut pas fournir des services sur crypto-actifs, au sein de l’Union, sauf si cette personne est : a) une personne morale ou une autre entreprise agréée en tant que prestataire de services sur crypto-actifs conformément à l’article 63 ; ou b) un établissement de crédit, un dépositaire central de titres, une entreprise d’investissement, un opérateur de marché, un établissement de monnaie électronique, une société de gestion d’OPCVM ou un gestionnaire de fonds d’investissement alternatifs autorisé à fournir des services sur crypto-actifs conformément à l’article 60 »7.
4. Clause de grand-père introduite par MICA. Le règlement MICA entrera progressivement en application, à partir du 30 juin 2024 pour les titres III (jetons se référant à un ou des actifs) et IV (jetons de monnaie électronique) de MICA et à partir du 30 décembre 2024 pour le reste du texte8 ; autrement dit, la partie sur les prestataires de services sur crypto-actifs (CASP) figurant au titre V de MICA sera applicable à partir du 30 décembre 2024. À compter de ces dates, le règlement sera applicable directement au sein des États membres. MICA instaure également une période transitoire en faveur des prestataires qui fournissent des services sur crypto-actifs, conformément à leur droit national, avant le 30 décembre 20249. Ces entités pourront bénéficier de la clause de grand-père et continuer à fournir leurs services sans agrément CASP jusqu’au 1er juillet 202610. Ainsi, les PSAN enregistrés ou agréés d’ici le 30 décembre 2024 pourront continuer à fournir leurs services sans l’agrément CASP. Cette période représente un avantage pour les PSAN, car ils pourront continuer d’opérer avec une réglementation relativement stabilisée et des exigences moins contraignantes en ce qui concerne l’enregistrement (notamment pour les exigences de fonds propres, qui ne s’appliquent pas aux PSAN enregistrés). En pratique, cette période laisse le temps aux PSAN de s’organiser afin de préparer des levées des fonds dans le but de répondre aux exigences prudentielles, de mettre en place des procédures pour répondre aux exigences de MICA et d’avoir potentiellement plus de visibilité sur les attentes des autorités nationales compétentes. Ces enjeux pourraient également avoir un impact sur le nombre de dossiers déposés auprès des services de l’AMF.
Notes de bas de pages
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1.
L. n° 2019-486, 22 mai 2019, relative à la croissance et la transformation des entreprises.
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2.
Il s’agit des services suivants : « 1° Le service de conservation pour le compte de tiers d’actifs numériques ou d’accès à des actifs numériques, le cas échéant sous la forme de clés cryptographiques privées, en vue de détenir, stocker et transférer des actifs numériques ; 2° Le service d’achat ou de vente d’actifs numériques en monnaie ayant cours légal ; 3° Le service d’échange d’actifs numériques contre d’autres actifs numériques ; 4° L’exploitation d’une plateforme de négociation d’actifs numériques ».
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3.
La liste des PSAN enregistrés et agréés est disponible à l’adresse suivante : https://lext.so/A57pQv.
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4.
PE et Cons. UE, dir. n° 2018/843, 30 mai 2018, relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme.
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5.
V. PE et Cons. UE, dir. n° 2015/849, art. 47, modifiée par la directive (UE) n° 2018/843 : « Les États membres veillent à ce que les prestataires de services d’échange entre monnaies virtuelles et monnaies légales et les prestataires de services de portefeuilles de conservation soient immatriculés ».
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6.
PE et Cons. UE, règl. n° 2023/1114, 31 mai 2023, sur les marchés de crypto-actifs.
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7.
V. MICA, art. 59, 1.
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8.
V. MICA, art. 149, 3 (sous réserve du 4 de l’article 149).
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9.
V. MICA, art. 143, 3.
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10.
Le III, de l’article 8, de la loi DDADUE dispose que « Les prestataires de services sur actifs numériques enregistrés en France conformément à l’article L. 54-10-3 du Code monétaire et financier, agréés en France conformément à l’article L. 54-10-5 du même code ou fournissant les services mentionnés au 5° de l’article L. 54-10-2 dudit code avant l’entrée en application du règlement du Parlement européen et du Conseil sur les marchés de crypto-actifs approuvé par le Conseil de l’Union européenne le 5 octobre 2022 peuvent continuer de fournir lesdits services en France jusqu’à la fin de la période transitoire prévue par le même règlement ou jusqu’à ce qu’ils aient obtenu leur agrément en qualité de prestataire de services sur crypto-actifs en application de la réglementation européenne en vigueur. À compter de la fin de ladite période transitoire, les articles L. 54-10-1 à L. 54-10-6 du Code monétaire et financier ne sont plus applicables ».
Référence : AJU011g7