Le financement participatif de l’accès au droit : entre régulation financière et régulation juridique

Publié le 29/12/2016

Le développement de l’économie numérique est l’un des enjeux stratégiques de l’économie moderne. Dans le domaine de l’investissement, il a notamment conduit à la mise en place de plates-formes de financement participatif devenues de véritables instruments financiers.

Désormais utilisées pour financer les prestations de service juridique, ces plates-formes sont susceptibles d’améliorer l’accès au droit en général et à la justice en particulier. Elles risquent toutefois de conduire à des dérives et à une forme d’uberisation de ces prestations de service si elles ne sont pas encadrées par le droit et régulées par les pouvoirs publics.

Le développement des réseaux sociaux a bouleversé les relations économiques dans les sociétés occidentales. Ce phénomène a conduit à ce que certains qualifient aujourd’hui d’uberisation de l’économie1 ou de consommation participative2.

L’investissement n’a pas échappé à ce phénomène de développement des relations directes entre consommateurs. Dans ce domaine, le « C to C »3 prend la forme de crowdfunding, c’est-à-dire de financement participatif. Il s’agit de récolter des fonds auprès de particuliers grâce à internet4. Le ministère de l’Économie et des Finances a, depuis plusieurs années, fait le choix de développer l’économie participative. Le 14 février 2014, Fleur Pellerin indiquait vouloir faire de la France « la start-up de l’Europe ».

Ce mode de financement a fait l’objet d’une règlementation en droit français depuis l’adoption de l’ordonnance n° 2014-559 du 30 mai 2014. C’est le financement « par la foule ». Il s’agit du mode de financement par lequel un porteur de projet sollicite une plate-forme électronique pour que celle-ci propose à des internautes de financer un projet donné. Trois modalités sont possibles pour cette opération : le prêt5, le don ou la prise de participation dans une opération d’investissement6.

Le droit français s’est très rapidement adapté à ce phénomène. Pour assurer une régulation de cette activité, la République française a, depuis le 30 mai 2014, fait le choix de réglementer l’activité du seul professionnel intervenant dans l’opération, c’est-à-dire le gestionnaire de la plate-forme électronique. Le financement participatif fait donc l’objet d’une réglementation spécifique visant à assurer cette régulation7. La profession de conseiller en investissement participatif a été créée. Cette nouvelle profession réglementée8 est placée sous l’autorité de l’Autorité des marchés financiers (AMF)9. Des conditions d’âge, d’honorabilité, de compétence professionnelle et d’assurance professionnelle sont imposées aux conseillers en investissement participatif. La loi leur impose des obligations professionnelles de loyauté, d’information de leurs clients10.

Les gestionnaires de ces plates-formes doivent être immatriculés au registre unique des intermédiaires en banque et finance (ORIAS), s’ils organisent des opérations de financement participatif sous forme de prêts.

Lorsque des opérations d’investissement sont envisagées et que l’achat de titres est envisagé, l’immatriculation doit se faire auprès de l’ORIAS. Cet agrément doit être précédé d’un agrément sollicité auprès de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) si la plate-forme envisage de donner des conseils d’investissement en plus de l’offre de souscription de titres. Pour cette dernière activité a été constituée la profession d’intermédiaire en financement participatif, qui fait l’objet d’une réglementation plus dense que celle de conseiller en investissement participatif.

En revanche, si l’intermédiaire financier envisage une opération d’investissement participatif sous forme de don, il n’a pas à être immatriculé. Il peut solliciter un agrément pour ces opérations.

En droit français, la régulation du crowdfunding se fonde donc sur la réglementation professionnelle des intermédiaires financiers et sa force contraignante augmente avec le gain espéré. L’idée de cette réglementation qui a été adoptée très rapidement est, en effet, de protéger les investisseurs et de les informer des risques liés à leur investissement11.

L’accès à la justice et, de façon plus générale au droit, pose des problèmes importants de financement en France. Malgré les nombreuses tentatives de réforme de l’aide juridictionnelle et de la protection juridique, il ne semble pas contestable qu’aujourd’hui, l’accès au droit pour tous ne peut pas être garanti dans des conditions satisfaisantes, faute, pour la République française, d’y consacrer un budget suffisant. Les divers projets de réforme de l’aide juridictionnelle ou, plus généralement, de l’accès au droit, n’ont pas permis de trouver de solutions adaptées. Les propositions ont, pourtant, été nombreuses. La création de structures dédiées à l’aide juridictionnelle, la taxation des actes sous seing privé, la taxation des contrats de protection juridique, celle des chiffres d’affaires des cabinets d’avocats, sont autant de propositions qui n’ont pas permis de trouver un consensus pour financer l’accès au droit qui est pourtant un droit fondamental de plus en plus revendiqué par les citoyens.

L’argent manque pour l’accès au droit et le financement participatif constitue un moyen de trouver des financements. L’idée d’utiliser le financement participatif comme source d’accès au droit a donc séduit. C’est ainsi que quelques plates-formes spécialisées ont lancé des opérations de financement participatif. Certains sites se présentent comme les défenseurs de causes collectives12. Un autre n’hésite pas à se présenter comme le supporter des « demandeurs en se plaçant comme un véritable partenaire et aider les entreprises et les particuliers à gagner leurs litiges »13.

Ces plates-formes de financement participatif apparaissent au carrefour entre deux professions réglementées : les professions financières, en particulier celles d’intermédiaire en financement et les professions juridiques, en particulier celle d’avocat.

À droit constant, face à ces acteurs qui par définition interviennent dans un domaine juridique alors qu’ils ne peuvent pas être des professionnels du droit14, les régulateurs sont des professionnels de… la finance ! Il paraît donc légitime de s’interroger sur la pertinence de l’intervention de ces plates-formes de financement participatif du point de vue des professions du droit.

Appréciées à l’aune de la régulation des professions juridiques, ces plates-formes de financement participatif paraissent susceptibles de permettre le financement d’activités économiques (I) mais présentent des risques importants de dérives. Il est donc nécessaire d’encadrer juridiquement le financement participatif de l’accès au droit (II).

I – Le financement participatif, un moyen d’améliorer l’accès au droit

Le financement participatif constitue un moyen d’améliorer l’accès au droit dans le domaine de l’activité juridique (A) et de l’activité judiciaire (B).

A – Dans le domaine juridique

En France, l’accès à la justice est un droit fondamental. Il est reconnu par le droit de l’Union européenne15, par le droit de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales16 et par le droit interne17.

Garanti par la loi18, cet accès de tous à la justice fait intervenir un grand nombre d’acteurs. Les magistrats, les collectivités territoriales, l’État, les professions réglementées (avocats, huissiers, notaires…) y participent, en particulier au travers de conseils départementaux de l’accès au droit (CDAD).

Le rôle de ces CDAD est un véritable rôle social. Des permanences y sont organisées pour que les membres des professions réglementées puissent y répondre aux justiciables. Même si les moyens alloués à ces CDAD sont évidemment insuffisants, il faut constater qu’ils permettent à des citoyens de consulter par exemple, des avocats, des huissiers ou des notaires et d’avoir ainsi accès au droit.

Jusqu’à aujourd’hui, cet accès au droit était gratuit pour les justiciables et supporté par les personnes morales de droit public19 et par les professions juridiques20.

Or, ces modalités d’accès au droit ont montré leurs limites. Par exemple, la demande de consultations juridiques gratuites est tellement forte que les juridictions, les points d’accès au droit ou les maisons de la justice et du droit qui y participent sont souvent prises d’assaut par les justiciables. Ainsi, en marge de ces consultations juridiques gratuites, les syndicats ou les associations d’aide aux sans-abris, aux personnes défavorisées ou aux victimes ont développé des consultations juridiques gratuites en partenariat avec les barreaux pour tenter d’augmenter l’accès au droit.

Quelques solutions ont été imaginées. Par exemple, tel barreau demande aux élèves avocats de participer aux consultations juridiques gratuites, tel organisme caritatif participe au financement d’une consultation juridique… mais ces solutions semblent insuffisantes et même parfois dangereuses. L’égalité républicaine se satisfait mal de ce que les citoyens accédant au service public de l’accès au droit disposent d’un service de moindre qualité que celui qui est offert aux autres justiciables. Il n’est donc pas envisageable que les consultations juridiques ne soient données que par des avocats moins expérimentés ou moins qualifiés juridiquement. Pourtant, c’est souvent le cas.

De même, le recours à des organismes caritatifs pour pallier les carences de l’État ne peut pas être satisfaisant du point de vue du rôle de l’État. Il est en outre susceptible de conduire à des communautarismes qui se concilient encore plus mal avec l’égalité républicaine21.

La réponse législative aux nécessités de l’accès au droit est donc insuffisante. Quant aux budgets, ils se fondent principalement sur la générosité et le sens du service public des membres des professions réglementées.

Au surplus, les budgets alloués à l’accès au droit ne permettent pas de verser de rémunérations aux professionnels qui participent à ces missions de service public. Les consultations juridiques ainsi organisées sont donc nécessairement limitées. Même si le sens du service public des membres des professions juridiques n’est pas à démontrer, cet accès au droit ne permet pas de répondre à une demande d’accès au droit qui est de plus en plus importante et de plus en plus spécialisée. En quelques dizaines de minutes, il ne paraît pas possible d’étudier un dossier volumineux, de rédiger une consultation juridique pointue dans un domaine spécialisé du droit ou d’effectuer des recherches juridiques.

Pour compléter cet accès au droit, l’État a investi très largement dans la communication électronique. Le développement de sites internet dédiés à des administrations, des sites gouvernementaux, des juridictions22, du Journal officiel ou de sites d’informations générales tels que « www.service-public.fr » ont été de nature à améliorer la diffusion de l’information juridique.

Là encore, les budgets de la République sont très inférieurs à ses objectifs. L’accès au droit suppose un accès à une information juridique de qualité. Or, la diffusion non régulée d’informations sur internet démontre quotidiennement que l’information qui s’y trouve est souvent de mauvaise qualité, surtout dans des domaines techniques. L’information juridique de qualité provenant des administrations, des professions réglementées ou des universitaires mérite d’être non seulement importante, mais aussi promue.

Au surplus, cette information juridique ne suffit pas pour garantir l’accès au droit. Dès la première année de droit, les étudiants savent que si le droit s’était limité à l’information juridique, il n’aurait jamais été « l’art du juste et du bon »23. Dans le domaine juridique, il ne suffit pas d’accéder à l’information juridique pour accéder au droit. Il faut aussi, choisir les faits utiles, les qualifier, poser le problème de droit, le résoudre en droit et en fait avant de donner une réponse à la question qui était posée. Or, les sites internet d’information juridique ne permettent pas, selon nous, de pratiquer cet art.

Devant ces carences du service public de l’accès au droit, le financement participatif permettrait peut-être d’améliorer l’accès au droit. Des sites collaboratifs ont ainsi permis le développement de l’information juridique comme les sites internet institutionnels ou universitaires24. Ils sont toutefois souvent peu consultés par le grand public. En outre, ils ne permettent pas de fournir un service de consultations juridiques à destination du grand public, alors que l’accès à ce service est un droit fondamental des citoyens.

Assurer des consultations juridiques par la voie du financement participatif constituerait un bon moyen d’assurer le financement de consultations juridiques de bon niveau.

Les consultations juridiques ne peuvent en principe être fournies que par des professionnels du droit25. Les gestionnaires de plates-formes de financement participatif ne pourraient donc pas donner des consultations juridiques.26. Ils pourraient toutefois financer des consultations prises auprès de professionnels du droit (avocats, notaires ou enseignants-chercheurs).

De telles plates-formes ne pourraient être constituées que par des dons ou, à la rigueur, par des prêts d’internautes. Les opérations d’investissement productif ne paraissent, en effet, pas adaptées à ces consultations juridiques qui, par principe, ne sont pas susceptibles de produire des ressources financières directes. Ce type de consultations juridiques rappelleraient, par exemple, celles organisées par les institutions de l’Union européenne qui consultent régulièrement des praticiens ou des chercheurs pour tenter de faire évoluer l’état du droit de l’Union européenne sur une question donnée.

Par exemple, il pourrait être imaginé de financer des programmes de recherche juridique appliquée en se fondant sur ces procédés de financement participatif. Il serait possible, notamment, qu’une association de défense des droits des malades du Sida finance une campagne de recherche sur la lutte contre la discrimination dont ils sont victimes ou qu’un syndicat d’agriculteurs sollicite une consultation pour évaluer l’impact de la conférence ministérielle de Nairobi27 sur la politique agricole commune. Souvent coûteuses, ces consultations ne sont pas sollicitées par ceux à qui elles pourraient servir. Plutôt que d’organiser une consultation sur internet conduisant à diffuser des informations de très faible qualité scientifique, dans des domaines sensibles et juridiquement complexes, une consultation juridique auprès de scientifiques de haut niveau pourrait être financée par une plate-forme de financement participatif.

Le recours au financement participatif permettrait alors d’accéder à des consultations juridiques de haut niveau. Sans doute serait-il opportun, à ce titre, d’adapter les modalités de financement des consultations juridiques par les centres de recherche des universités ou de financement de projets de recherche pour permettre le développement d’une recherche ouverte et susceptible d’être financée ou cofinancée par le financement participatif. La recherche juridique, qui manque cruellement de moyens, et les citoyens, qui manquent souvent cruellement de consultations juridiques scientifiquement étayées, auraient sans doute beaucoup à y gagner.

Le financement participatif de la consultation juridique serait un financement fondé sur le don d’internautes. C’est sans doute parce que ces opérations de financement participatif ne sont envisageables qu’à fonds perdus qu’aucune plate-forme de financement participatif ne s’est encore engagée dans ce type de consultation juridique.

La situation est différente dans le domaine judiciaire pour lequel les plates-formes de financement participatif se sont développées.

B – Dans le domaine judiciaire

Les carences de l’aide juridictionnelle expliquent le recours au financement participatif pour financer des procédures judiciaires.

En droit français, le recours à l’aide juridictionnelle repose sur le postulat que le financement de l’aide juridictionnelle est indépendant de la qualité du service rendu au justiciable. Ainsi, lorsqu’un avocat intervient dans une mission d’aide juridictionnelle, il accomplit la même prestation de service que lorsqu’il intervient en dehors de l’aide juridictionnelle.

Ce postulat paraît aujourd’hui très contestable. Il est, en tout état de cause, très fortement remis en cause par l’opinion publique.

En premier lieu, la façon dont les budgets de l’aide juridictionnelle ont été déterminés depuis une vingtaine d’années et le relèvement constant des plafonds en-dessous duquel les justiciables bénéficient de l’aide juridictionnelle conduisent à financer de plus en plus de procédures avec un budget de plus en plus inadapté. Économiquement, il n’est pas possible d’équilibrer les comptes d’un cabinet d’avocats exerçant exclusivement au titre de l’aide juridictionnelle. En conséquence, de plus en plus souvent, les missions d’aide juridictionnelle sont assumées par des cabinets dont la sécurité financière est précaire et pour lesquels ces missions représentent une part importante de l’activité. Pour ces missions, ils n’ont pas d’autre choix que d’intervenir dans l’urgence et en limitant les coûts. La doctrine28 a montré avec pertinence qu’un cabinet d’avocats intervenant régulièrement dans le secteur assisté ne pouvait pas maintenir le même niveau de qualité de service que s’il n’intervenait pas au titre de l’aide juridictionnelle. Il est d’ailleurs particulièrement significatif de constater que les cabinets d’avocats les plus riches comme ceux dans lesquelles se trouvent les avocats dont le niveau scientifique est le plus élevé ne sont pas souvent ceux qui interviennent au titre de l’aide juridictionnelle.

En second lieu, les justiciables considèrent régulièrement que les avocats qui interviennent au titre de l’aide juridictionnelle sont moins bons ou moins motivés que ceux qui interviennent en dehors de ce domaine. Cela démontre que les citoyens comprennent bien qu’un financement insuffisant d’une prestation de service conduit à une baisse de qualité de cette prestation de service. Il est indifférent que ce sentiment soit justifié ou non. L’existence même de ce sentiment démontre qu’il existe une demande d’accès à la justice en dehors de l’aide juridictionnelle pour des justiciables qui, pourtant, peuvent bénéficier de l’aide juridictionnelle.

Lorsqu’ils disposent de ressources inférieures aux plafonds de l’aide juridictionnelle, les justiciables expriment souvent le sentiment que l’aide juridictionnelle ne leur permet pas d’accéder au droit de façon satisfaisante.

Au surplus, lorsqu’ils n’ont pas accès à l’aide juridictionnelle parce qu’ils disposent de revenus supérieurs aux plafonds fixés par la loi, les justiciables expriment souvent le sentiment qu’ils n’ont pas accès à un droit de qualité, faute de moyens. Ce sentiment résulte de nombreux facteurs.

En France, la prestation de service juridique est très bon marché par rapport aux États voisins. De plus en plus, l’idée fait son chemin, notamment dans les pays anglo-saxons, que si le droit français se vend peu cher, c’est parce qu’il n’est pas de bonne qualité.

De même, les condamnations particulièrement faibles, incroyablement faibles même parfois, prononcées par les juridictions expliquent que les justiciables ont de plus en plus souvent le sentiment que l’accès à la justice est coûteux, même si la juridiction leur donne raison. Les condamnations prononcées au titre du remboursement des frais non répétibles sont parfois tellement réduites qu’elles accréditent l’idée qu’en France, la justice ne vaut rien29.

C’est parce que les justiciables ont été convaincus de l’existence de ces lacunes dans l’accès au droit dans le domaine judiciaire qu’ils ont eu recours au financement participatif.

Depuis quelques années, plusieurs sites de financement participatif se sont ainsi développés pour financer la mise en œuvre de procédures judiciaires. Ces plates-formes ont des inspirations très variées.

Certaines visent à défendre des valeurs collectives. Par exemple, le site internet « citizencase.org » organise des actions en justice pour défendre l’environnement, la santé et la consommation responsable. Ce site internet se présente comme un site associatif désintéressé. Il perçoit une redevance de 300 € pour chaque projet lancé sur sa plate-forme et une commission de 8 % sur les fonds collectés si le projet aboutit pour sécuriser les opérations bancaires. Du point de vue des internautes, l’opération de financement participatif est un don. Ils n’attendent aucun retour sur leur investissement.

De façon plus générale, le site « www.wejustice.com » permet de financer des causes collectives ou solidaires. Ce site fonctionne aussi au moyen d’un mécanisme de dons ayant pour objet de financer les honoraires des avocats. Son coût est de 8 % TTC des sommes données.

À l’analyse, cette modalité de financement participatif paraît adaptée à l’état du droit français. Au fond, le recours à une plate-forme de financement permet à des associations de défense de l’environnement ou à des défenseurs de causes collectives ou solidaires d’obtenir des financements participatifs. En lui-même, le recours à ce type de plate-forme n’est pas juridiquement critiquable. L’activité de la plate-forme mériterait toutefois d’être régulée.

D’autres sites ont pour objectif de financer des actions en justice par des sociétés commerciales organisant une opération d’investissement participatif. Par exemple, le site internet « pytum.com » prévoit un mécanisme de financement participatif dans lequel l’investisseur percevra 35 % des fonds investis, le site de financement 5 % et la victime 60 %. Ce mécanisme se double d’une offre de consultation en ligne de la part des avocats intervenant sur le site. Juridiquement, il s’agit d’une opération de financement participatif fondée sur une opération spéculative. Le problème posé par ce type de financement participatif tient à la qualification du bénéfice réalisé par les investisseurs.

Du point de vue de la victime, ce mécanisme paraît contraire à la nature indemnitaire des actions en justice intentées selon le droit français. Contrairement au droit américain, le droit français ne reconnaît pas d’actions punitives. Le juge doit donc permettre à la victime qui le saisit de bénéficier d’une réparation intégrale. La victime ne peut toutefois pas s’enrichir à l’occasion de la procédure. En conduisant à une indemnisation qui sera finalement de 60 % de ce qui est prononcé par le juge, ce mode au financement ne permet pas une indemnisation intégrale du préjudice.

Du point de vue de l’investisseur, l’investissement réalisé à l’occasion d’une procédure intentée par une victime particulièrement désargentée peut choquer. La spéculation sur la misère d’autrui paraît susciter le débat moral…

Juridiquement, les sommes payées pour financer l’opération posent deux difficultés.

En premier lieu, leur montant paraît considérable. Les usages de la profession d’avocat ne permettent pas de retenir des honoraires de résultats supérieurs à 10 ou 15 % du montant des sommes obtenues à l’occasion d’une procédure. Il est ici question pour celui qui agit en justice de perdre 40 % des sommes qui lui seront finalement allouées !

En second lieu, dans la mesure où les sommes versées aux investisseurs dépendent du résultat du procès, il paraît légitime de leur appliquer le régime des honoraires d’avocat, tant du point de vue de leur fixation que du point de vue des règles relatives à leur recouvrement. La question du partage d’honoraires entre l’avocat et les investisseurs pose alors une difficulté qui paraît susceptible d’interdire le recours à ce type de plates-formes lorsqu’elles visent à organiser un investissement participatif.

D’autres plates-formes, enfin, ont pour objet de permettre de financer des actions de groupes contre des entreprises ayant adopté des pratiques commerciales illicites30. Même s’il ne peut qu’être approuvé qu’une lutte soit organisée contre des pratiques commerciales déloyales, la démarche paraît franchement surprenante, pour ne pas dire choquante.

En effet, dans un domaine où les actions de groupe ont été refusées aux avocats pour être confiées aux seules associations de consommateurs qualifiées de nationalement représentatives31, il paraît étonnant qu’une société commerciale ayant un objectif mercantile puisse s’arroger le droit d’intervenir en qualité d’intermédiaire entre des justiciables en quête de justice et des entreprises commerciales. Un tel comportement est d’autant plus inadmissible que le site de la société en question indique expressément que cette société commerciale « est le premier service de recours collectif français. Il permet de regrouper des personnes ayant un litige similaire avec une même société dans le cadre d’une action collective ».

Pourtant les articles L. 622-1 et suivants du Code de la consommation attribuent aux associations de défense des consommateurs la fonction de défendre les intérêts collectifs des consommateurs. De son côté, la société par actions simplifiée « Action civile » a pour objet, comme toutes les sociétés commerciales, l’enrichissement de ses actionnaires. Elle n’a ni vocation à exercer l’action publique, dont l’opportunité appartient exclusivement au procureur de la République, ni à exercer des actions de groupe en droit de la consommation. Pourrait-on accepter qu’un lanceur d’alerte s’enrichisse au moyen des alertes qu’il lance ?

S’agissant de l’indemnisation des victimes en matière pénale, celle-ci ne peut être organisée collectivement que dans les conditions des articles L. 621-9 et suivants du Code de la consommation. Ces textes exigent que la représentation conjointe ne puisse se faire que par une association de consommateurs et qu’elle ne sollicite pas de mandat de la part des victimes.

La Cour de cassation a d’ailleurs eu l’occasion de préciser que l’emploi de moyens de communication massive par une association de consommateurs constituait une violation de l’article L. 621-9 du Code de la consommation. En l’espèce, c’est une société commerciale qui sollicite directement les internautes sur son site internet ! Quant aux moyens de communication utilisés, ils paraissent mériter d’être appréhendés à l’aune des règles de communication des avocats !

Quant aux actions de groupe en matière civile, elles ne peuvent être organisées, selon l’article L. 623-1 du Code de la consommation, que par « une association de défense des consommateurs représentative au niveau national et agréée en application de l’article L. 811-1 » du Code de la consommation.

Si la loi a limité la possibilité d’intenter de telles actions à des associations de consommateurs agréées et représentatives, c’est pour permettre une régulation de comportements contraires au droit de la consommation et pour s’assurer qu’il n’y a pas d’exploitation financière de la situation de victimes ni de comportements contraires au droit de la consommation. Lors des débats sur l’instauration de l’action de groupe, la loi Hamon avait d’ailleurs refusé aux avocats la possibilité d’organiser ces actions de groupe pour éviter qu’ils profitent de cette « manne » financière. Plutôt qu’une profession réglementée soumise à une déontologie particulièrement contraignante, ces actions paraissent organisées par une société commerciale. Les méthodes mises en œuvre par cette société commerciale surprennent. Par exemple, elle propose la mise en œuvre d’une médiation à laquelle il n’est pas proposé que les consommateurs soient associés. L’organisation de cette surprenante procédure de « médiation »32 sans médiés, qui paraît plutôt correspondre à une tentative de conciliation qu’à une médiation, semble envisagée en dehors de tout cadre déontologique. Elle n’est évidemment pas à l’abri de dérives. De même, la référence à des « procédures judiciaires automatisées » sur le site internet en question ne paraît pas le gage d’une intervention de qualité au soutien des intérêts des clients de ce site internet. L’ensemble du site internet surprend. Il ne dit rien des honoraires perçus pour mener des actions en justice. Pour savoir comment cette société commerciale est rémunérée, il faut consulter les conditions générales de vente faisant état d’une rémunération de 10 % à 30 % TTC de l’indemnité obtenue. Là où le droit de la consommation exige que les associations de consommateurs versent immédiatement l’ensemble des indemnités perçues sur un compte de la Caisse des dépôts et consignations ou de la Caisse de règlements pécuniaires des avocats (CARPA) de l’avocat les ayant assistées et obtiennent une décision judiciaire pour se faire rembourser leurs frais d’avocat33, la plate-forme « www.actioncivile.com » prévoit que les honoraires particulièrement importants qu’elle exige de percevoir sur le résultat de l’action pourraient être perçus directement auprès de l’entreprise qu’elle poursuit34 ! Au surplus, cette rémunération n’intègre pas… les honoraires d’avocat35 ! La SAS Action civile fait même état d’avocats intervenant gracieusement au soutien de pourparlers préalables à des procédures judiciaires36 ou de spécialités d’avocats non référencées par le site de l’ordre37

Au total, ce site internet prétend défendre les droits des consommateurs au moyen d’actions en justice et paraît peu soucieux de les informer ou de respecter le Code… de la consommation ! Cette particulière légèreté dans l’information du consommateur prêterait à rire si ce n’était pas l’accès à la justice qui était en cause et si les clients du site n’étaient pas, par définition, des victimes de comportements contraires au Code de la consommation !

En réalité, ce site n’est pas un site de financement, il semble, à notre sens, vouloir détourner la loi pour organiser des actions de groupe en violation des dispositions du Code de la consommation. Contrairement à d’autres sites de financement participatif, ce type de sites ne paraît pas devoir être maintenu dans un système crédible de régulation de l’accès au droit.

En fin de compte, il apparaît que seules les plates-formes de financement participatif fondées sur la solidarité et ayant pour objet de donner de l’argent à une personne physique ou morale sont susceptibles d’être compatibles à la fois avec le droit de la consommation et les principes de l’égal accès au droit.

S’il est entendu comme une opération de financement solidaire, le financement participatif de l’accès au droit paraît possible. Il révèle toutefois des risques de dérive et doit donc être encadré par le droit.

II – L’encadrement juridique de la mise en œuvre du financement participatif de l’accès au droit

L’analyse des risques de dérive du financement participatif de l’accès au droit permet d’ores et déjà de proposer des solutions. Pour que la mise en œuvre du financement participatif soit satisfaisante, il paraît nécessaire de l’encadrer juridiquement. Cela nécessite que le financement participatif de l’accès au droit soit mis en œuvre dans le respect du droit (A) et qu’il fasse l’objet d’une véritable régulation juridique (B).

A – Une mise en œuvre dans le respect du droit

La mise en œuvre du financement participatif de l’accès au droit révèle de nombreux risques de dérives.

Un premier risque de dérive peut être identifié dans l’hypothèse où un professionnel du droit membre d’une profession réglementée interviendrait lui-même en qualité de gestionnaire d’une plate-forme d’investissement participatif. Pour s’assurer le bénéfice d’une clientèle obtenue au moyen d’une communication parfois très agressive sur internet, tel professionnel du droit pourrait être tenté de développer sa propre plate-forme de financement participative soit directement, soit par personne interposée. La profession de conseiller en investissement participatif est, en effet, incompatible avec celle d’avocat38. Ce premier risque paraît assez anecdotique. Il n’en va pas de même avec les risques liés aux garanties offertes aux clients par la déontologie de l’avocat.

Ainsi, le principe du libre choix de l’avocat risque d’être remis en cause par le financement participatif de l’accès au droit. La liberté de choix de l’avocat est notamment consacrée par le préambule du Code de procédure pénale et par l’article 6-3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Le choix de l’avocat doit résulter de la décision de son client et non d’un tiers. Pour que l’opération de financement participatif permette de garantir cette liberté de choix, il est impératif qu’aucun avocat ne soit conseillé, agréé voire imposé par la plate-forme de financement participatif. Pour qu’il existe une liberté de choix de l’avocat, il est en effet impératif que l’internaute ait la conscience constante qu’il peut choisir l’avocat de son choix et qu’il en peut changer comme il l’entend. Le recours à des avocats conseillés, présentés comme des partenaires éventuellement agréés ou imposés par les sites de financement participatif est de nature à limiter ce droit. Un tel conseil ou un tel agrément serait d’autant plus mal venu que le bénéficiaire du financement participatif est, par définition dans une situation de dépendance économique totale à l’égard de la plate-forme et des investisseurs. Dans un tel climat de dépendance, lui garantir le libre choix de son avocat exclut tout conseil de la part des financeurs. Au contraire, la loyauté la plus élémentaire doit conduire le site de financement participatif à indiquer clairement qu’il n’a aucune qualité pour se substituer aux organes de la profession d’avocat ou aux universités pour délivrer des diplômes ou des certifications professionnelles. Ce conseil, cette préconisation ou ce choix imposé serait évidemment anticoncurrentiel. Il serait aussi source d’éventuels conflits d’intérêts et susceptible de porter atteinte à l’indépendance de l’avocat.

Le financement participatif de l’accès au droit doit garantir l’indépendance de l’avocat. Il n’est pas possible, par exemple, que les investisseurs ou la plate-forme puissent avoir une influence quelconque sur l’avocat choisi par le bénéficiaire du financement participatif. Les choix stratégiques relatifs à la procédure ne peuvent intervenir que directement entre l’avocat et son client sans que les investisseurs ou les gestionnaires de la plate-forme ne puissent intervenir39 ou n’en soient même informés40. Là encore, la situation de dépendance économique du bénéficiaire du financement participatif doit conduire à une particulière vigilance. Il semble donc indispensable qu’il n’y ait aucun lien entre l’avocat choisi par l’internaute et le gestionnaire de la plate-forme ou les investisseurs. Cela exclut, par exemple, que des sites de financement participatif proposent simultanément un accès à une plate-forme de financement participatif et un service de consultations juridiques en ligne.

De la même façon, le caractère absolu du secret professionnel des avocats et même, parfois, le secret de l’instruction ou de l’enquête préliminaires interdisent que le dossier soit communiqué au gestionnaire de la plate-forme de financement participatif. Pourtant, certaines conditions générales de service prévoient une obligation de communication en ligne du dossier, dont la taille est même parfois limitée à un certain nombre de pages ! Ces conditions générales de service vont jusqu’à stipuler un mandat pour négocier au profit du gestionnaire de la plate-forme, ce qui semble susceptible de faire naître des conflits d’intérêts… En matière juridique, le secret professionnel impose souvent que le résultat de la consultation juridique sollicitée ne puisse pas être communiqué aux investisseurs ou à la plate-forme de financement. La rigueur du secret professionnel doit conduire à ce que la consultation juridique financée par un financement participatif soit conservée par l’avocat et son client. En pratique, l’avocat et son client devraient rédiger une attestation conjointe non détaillée indiquant que la consultation juridique a été effectivement réalisée. Il pourrait être imaginé que cette attestation conjointe puisse être communiquée aux investisseurs et au gestionnaire de la plate-forme. Une telle communication mériterait d’être encadrée par la loi compte tenu de son caractère attentatoire au secret professionnel.

Le secret professionnel interdit en outre que la plate-forme de financement participatif soit un intermédiaire quelconque entre l’avocat et son client. Leurs échanges étant couverts par le secret professionnel, la plate-forme ne peut pas les abriter…

En outre, la réglementation du démarchage tant pour les activités des investisseurs que pour celles des avocats doit conduire à interdire que des sites de financement participatif ne se livrent à un démarchage qui irait au-delà d’une offre de service personnalisée conforme aux principes fondamentaux de la profession d’avocat. Cette question complexe mérite une intervention normative du Conseil national des barreaux qui pourra travailler de concert avec l’AMF et l’ACPR pour préciser les conditions dans lesquelles les plates-formes de financement participatif peuvent offrir l’accès à des plates-formes de financement participatif sans pratiquer une sollicitation interdite.

La question de l’impossibilité de la mise en œuvre des actions de groupe par le financement participatif n’est évidemment pas sans lien avec la question précédente41. À droit constant, les dispositions du Code de la consommation précédemment rappelées conduisent à écarter la possibilité d’utiliser des plates-formes de financement participatif pour financer des actions de groupe, sauf à ce que les actions de groupe en question soient intentées au profit d’association de consommateurs et, par ailleurs, conformes aux dispositions du Code de la consommation. C’est le juge qui détermine les modalités dans lesquelles les consommateurs victimes d’un comportement peuvent être informés de l’action intentée42, de même il n’est pas possible que l’association soit rémunérée au moyen des sommes perçues à titre d’indemnisation. C’est au moyen de leurs fonds propres et des sommes allouées au titre des frais non répétibles que les associations de consommateurs doivent assurer le financement de ces actions de groupe.

Comme tous les modes d’investissement, le financement participatif doit être examiné au regard de la prévention du blanchiment. Cet examen est d’autant plus nécessaire que les avocats doivent participer à la prévention des opérations de blanchiment. La problématique de la prévention du blanchiment est celle de la vérification de l’origine des fonds utilisés à l’occasion d’une opération financière. En l’espèce, il faut s’assurer que l’opération de financement participatif ne constitue pas un moyen déguisé de blanchir de l’argent ayant une origine frauduleuse. Si le financement participatif prend la forme d’un don, alors le risque de blanchiment est particulièrement réduit. Dans une perspective classique, les opérations de blanchiment supposent un placement, une conversion et une intégration. Même si la définition du blanchiment est aujourd’hui plus large, la logique de l’opération suppose qu’il soit possible de réaliser une intégration, c’est-à-dire de récupérer une partie des sommes préalablement placées et converties. Or, lorsque l’opération de financement participatif prend la forme d’un don, l’intégration susceptible d’être réalisée est très réduite. Elle peut être constituée de l’avantage fiscal éventuel obtenu à partir de l’opération de financement participatif. Aujourd’hui, cet avantage n’est susceptible d’être obtenu que dans l’hypothèse où le don est fait au profit d’une association susceptible de délivrer un reçu fiscal ouvrant droit à réduction d’impôts. Cela limite sensiblement la possibilité de réaliser une opération de blanchiment ! En revanche, si le financement participatif prenait la forme d’un prêt, voire d’une opération d’investissement, le blanchiment pourrait être réalisé. La prévention du blanchiment ne pourrait alors incomber qu’à la plate-forme de financement participatif qui devrait mettre en œuvre des moyens propres à s’assurer que les fonds placés dans l’opération de financement participatif ne proviennent pas du résultat d’activités délictueuses avant d’avoir été placés sur plusieurs comptes contrôlés par une même personne. Cette problématique n’est, d’ailleurs, pas spécifique au financement participatif de l’accès au droit.

Enfin, c’est dans le domaine de l’honoraire que le financement participatif semble susceptible de conduire aux abus les plus importants.

Les sommes perçues par les gestionnaires de sites de financement participatif peuvent être considérées comme des sommes perçues en paiement des frais financiers. Leur perception ne peut alors se comprendre que si les frais en cause sont conformes au coût réel de la prise en charge financière des sommes collectées au titre du financement participatif.

Les sommes perçues à l’occasion de l’opération de financement participatif peuvent aussi être considérées comme des honoraires du conseiller en financement participatif ou de l’intermédiaire en financement participatif. Les honoraires en question ne peuvent alors qu’être la contrepartie du service financier rendu. Leur détermination ne peut donc pas se faire en fonction de l’intérêt du litige ou de la quantité de travail à fournir par l’avocat qui sera chargé de rédiger la consultation juridique ou de mener à bien la procédure. Ils ne peuvent pas être une rémunération des services de l’avocat, puisque les honoraires des avocats ne peuvent pas être partagés avec d’autres professionnels, sauf dans les cas fixés par le règlement intérieur national43. En aucun cas, il n’est possible de partager des honoraires avec un professionnel de l’investissement participatif.

Quant à la possibilité d’obtenir une indemnisation proportionnelle au résultat de la procédure envisagée, elle est, elle aussi, exclue en raison de la prohibition des pactes de quota litis, autant que de l’interdiction du partage d’honoraires.

Juridiquement, pour ne pas porter atteinte au droit d’accéder au droit, les sommes versées à la plate-forme de financement participatif ne doivent donc pas excéder la rémunération raisonnable d’un intermédiaire financier. Pour cette question aussi, une intervention normative du Conseil national des barreaux permettant de réglementer un niveau de rémunération raisonnable des plates-formes de financement participatif pourrait être envisagée dans le cadre de la régulation du secteur.

B – Une mise en œuvre régulée

Puisque le financement participatif constitue un moyen de faciliter l’accès au droit, il ne peut pas complètement échapper à l’État. Comme dans les autres domaines du droit économique, l’intervention de l’État pourrait être une intervention d’État régulateur incitant certains comportements, en régulant les autres pour s’assurer qu’ils sont globalement conformes aux principes fondamentaux de l’accès au droit. Le financement participatif c’est le financement par la foule. Il ne peut pas se substituer aux modalités publiques de l’accès au droit, parce que la foule ne garantit pas toute seule l’ensemble des droits et libertés fondamentales. Pour que tout citoyen puisse accéder au droit, il faudra donc toujours que cet accès au droit soit garanti par l’État.

Par exemple, les partisans du financement participatif citent régulièrement le cas de Carmen Vanhuss, aux États-Unis, qui avait été violée et tuée dans son appartement. Près de vingt ans plus tard, les services de police avaient arrêté les investigations. Devant le refus des autorités de police de financer un test ADN, l’enquêteur chargé de l’affaire a lancé une campagne de financement participatif et levé les fonds nécessaires à la réalisation de ce test44. Pour trouver les auteurs de ces actes atroces, il a été facile de trouver un financement par la foule. En revanche, s’il s’était agi de disculper une personne poursuivie des mêmes faits, il aurait probablement été plus difficile de trouver de tels financements. Or dans un système judiciaire respectueux des droits de l’Homme, il n’est pas possible que les parties disposent d’un inégal accès à la justice ou que la présomption d’innocence ne soit pas pleinement garantie parce que la foule a une idée préconçue sur la culpabilité d’une personne poursuivie.

L’accès au droit doit donc être garanti par l’État, même si le financement participatif permet de faire appel à la générosité publique.

Du point de vue du conseil et de l’incitation, la régulation du financement participatif devrait permettre de proposer une harmonisation européenne des conditions de financement participatif de l’accès au droit. La République française, dont le droit est le plus avancé dans ce domaine, devait promouvoir cette harmonisation européenne. Le droit des autres États européens est souvent beaucoup moins avancé dans le domaine du financement participatif. Par exemple, la Belgique n’a pas encore adopté de règlementation relative au financement participatif. Sans une harmonisation de la règlementation de l’accès au financement participatif de l’accès au droit, il est possible que la réglementation française puisse être détournée pour mettre en place des plates-formes de financement participatif peu scrupuleuses contournant le caractère protecteur de la loi française en faisant héberger leur plate-forme de l’autre côté de la frontière.

Elle devrait aussi prévoir un régime fiscal favorable pour les sommes versées au profit de l’accès au droit afin que ces sommes puissent être déductibles en partie de l’impôt sur le revenu payé par les souscripteurs, puisqu’elles visent à garantir l’accès au droit.

Par ailleurs, compte tenu des risques de dérives, il paraît légitime d’interdire purement et simplement les comportements les plus graves et de réguler les comportements qui ne sont pas abusifs.

En premier lieu, certaines activités paraissent devoir être purement et simplement interdites en raison de leur contrariété avec le droit positif ou des graves dangers qu’elles comportent.

Ainsi, l’interdiction de plates-formes qui organisent un détournement des dispositions du Code de la consommation relatives aux actions de groupe paraît s’imposer.

De même l’interdiction du financement participatif constitué comme une opération de spéculation sur la procédure intentée par autrui paraît s’imposer dans un système judiciaire fondé sur la réparation du préjudice et non sur la punition de l’auteur.

En second lieu, il paraît nécessaire d’organiser une véritable régulation du financement participatif de l’accès au droit. Actuellement, le financement participatif fait l’objet d’une régulation par les organismes financiers. Cette régulation permet de s’assurer que les entreprises gestionnaires de plates-formes de financement participatif préviennent suffisamment les investisseurs des risques liés à l’opération de financement participatif.

Cette régulation est évidemment nécessaire, mais elle paraît insuffisante pour le domaine de l’accès au droit. Pour permettre une régulation juridique du financement participatif de l’accès au droit, deux possibilités peuvent être envisagées.

La première possibilité consisterait dans l’intervention de représentants des professions particulièrement intéressées par l’accès au droit, en particulier dans le domaine judicaire. Il s’agirait donc au moins de faire intervenir des représentants des huissiers et des avocats dans la régulation financière des plates-formes de financement participatif. Une coopération entre l’ACPR et l’AMF et les organes représentatifs de ces professions permettrait une meilleure prise en compte des nécessités de la régulation juridique de ces opérations de financement participatif.

Une deuxième possibilité peut être envisagée qui paraît plus adaptée à cette régulation.

Les plates-formes de financement participatif qui organisent des collectes et des dons en faveur d’une cause particulière ne font l’objet que d’une régulation financière réduite45. Pourtant le financement participatif de l’accès au droit paraît devoir être envisagé par ce type de plates-formes et par des plates-formes visant à un prêt non rémunéré. Il paraît donc légitime que la régulation juridique de ces plates-formes soit réalisée par les représentants des professions juridiques ou judiciaires.

Une immatriculation de ces plates-formes auprès d’une autorité administrative ou, éventuellement, auprès du Conseil national des barreaux paraîtrait adaptée. Elle permettrait, par exemple, de vérifier a priori que les plates-formes de financement participatif n’envisagent que des opérations de financement participatif fondées sur le prêt et sur le don, qu’elles ne risquent pas de porter atteinte au libre choix de l’avocat, au secret professionnel ou à l’indépendance de l’avocat. Cela permettrait aussi de s’assurer que les frais perçus par les plates-formes de financement participatif à l’occasion des collectes de fonds ne sont pas excessifs ou que les sommes perçues à l’occasion de ces collectes sont bien employées dans leur totalité au financement de l’accès au droit. L’ACPR et l’AMF pourraient alors, ensuite s’assurer de l’information suffisante des opérateurs économiques, du respect des règles professionnelles par les intermédiaires financiers et de l’existence de moyens adaptés de transfert des flux financiers à l’occasion de l’opération de financement participatif.

Cette régulation juridique du financement participatif permettrait de surveiller la pratique des plates-formes de financement dans le domaine de l’accès au droit. Elle devrait aussi permettre de faciliter les financements d’action de groupe, car l’analyse quantitative et qualitative du nombre d’actions de groupe menées par les associations de consommateurs et l’existence de sites internet tentant de détourner le Code de la consommation pour permettre à des sociétés commerciales de s’enrichir en organisant des actions de groupe démontrent que les associations de consommateurs ne disposent pas de moyens suffisants pour répondre à la demande d’action de groupe manifestement présente dans la société et insatisfaite par les associations de consommateurs46.

En complément de ce mécanisme de régulation, la mise en place d’un mécanisme de financement participatif par la profession d’avocat paraîtrait une bonne solution. Les lacunes de l’accès au droit démontrent qu’il existe un véritable besoin de financement des procédures judiciaires. Or, ce sont les avocats qui connaissent le mieux les nécessités du financement des procédures qu’ils intentent. Personne ne peut, mieux qu’eux, connaître les impératifs de leur déontologie et mesurer, en conséquence, la portée de ces exigences déontologiques sur le financement de leur procédure. D’ailleurs, depuis l’adoption de la loi Macron47, les avocats doivent systématiquement signer des conventions d’honoraires avec leurs clients. La question du financement de la procédure est donc désormais une question qui doit systématiquement être abordée entre l’avocat et son client dès l’information précontractuelle. La possibilité de recourir au financement participatif relève de cette question.

Pour éviter que les coûts du financement soient excessifs, que l’indépendance de l’avocat soit réduite ou que le secret professionnel ne soit pas pleinement garanti, la meilleure solution serait que l’avocat et le client soient les seuls maîtres du financement du coût de l’intervention de l’avocat. Or, la profession d’avocat s’est organisée pour gérer le maniement des fonds du client détenus par son avocat. Le système des CARPA a permis de mettre en place des règles de maniement des fonds adaptés aux exigences des clients et à la prévention des opérations de blanchiment. L’efficacité et la rigueur de la gestion de l’Union nationale des Caisses des règlements pécuniaires des avocats (UNCA) a d’ailleurs été saluée par la Cour des comptes48. La profession d’avocats dispose donc de tous les moyens pour pouvoir mettre en œuvre une plate-forme de financement participatif qui pourrait permettre d’éviter l’enrichissement de sociétés commerciales à l’occasion du financement de l’accès au droit. En outre, la mise en place d’une telle plate-forme permettrait de garantir aux justiciables et à leurs clients le même respect des règles déontologiques pour l’accès au droit, qu’il soit financé avec l’ancienne économie ou avec la nouvelle économie. À propos du développement de plates-formes de consultation juridique sur internet, un économiste avait déclaré : « L’avenir ce n’est pas des juristes dans les ordres mais des juristes qui créent des plates-formes sur internet »49. Comme juriste, mais aussi comme citoyen, il faut sans doute espérer que l’avenir permette que l’activité des juristes soit conforme au droit. Espérons donc que les juristes qui créent les plates-formes sur internet écoutent les juristes qui sont dans les ordres.

Notes de bas de pages

  • 1.
    L’expression a été utilisée par Maurice Lévy dans un entretien au Financial Times en décembre 2014.
  • 2.
    Pour une étude juridique globale des conséquences juridiques de ce phénomène économique, v. Bernheim-Desvaux S., « La consommation collaborative ou participative. Consommation collaborative portant sur un produit », Contrats, conc. consom. 2015, étude 2.
  • 3.
    Les relations de C to C (ou C2C) constituent les relations économiques directes entre consommateurs, ou consommation collaborative.
  • 4.
    V. Berrebi C. et Vatine S., « Le crowdfunding, en pratique, opportunités et limites », JCP G 2014, 1266, spéc. n° 49.
  • 5.
    Qualifié parfois de « crowdlending ».
  • 6.
    Qualifiée parfois de « crowdequity ».
  • 7.
    V. Ord. n° 2014-559, 30 mai 2014 : JO, 31 mai 2014 ; v. de Matteos O., « Le financement participatif se dote d’un cadre », Comm. com. électr. 2014, alerte 64.
  • 8.
    Les articles L. 547-1 et s. du Code monétaire et financier régissent la profession de conseiller en investissement participatif (C. mon. fin., art. L. 547-1 et s.).
  • 9.
    V. règl. gén. AMF, art. 325-33 et s. et instr. AMF, 1er oct. 2014, sur le « processus d’examen par l’AMF de la demande d’immatriculation des conseillers en investissements participatifs et transmission des informations annuelles par ces derniers » (DOC 2014-11).
  • 10.
    V. instr. AMF, 1er oct. 2014, relative aux « informations aux investisseurs à fournir par l’émetteur et le conseiller en investissement participatif ou le prestataire de services d’investissement dans le cadre d’une offre de financement participatif » (DOC-2014-12).
  • 11.
    Cet objectif a été rappelé par Olivier Carré et Christophe Caresche dans le rapport d’information déposé à la présidence de l’Assemblée nationale le 16 septembre 2015 (rapp. n° 3063) au nom de la commission des finances de l’économie générale et du contrôle budgétaire « sur l’investissement productif de long terme » (v. rapp., p. 32).
  • 12.
    C’est le cas, par ex., des sites www.wejustice.com et http://citizencase.org (en matière environnementale) ou de www.actioncivile.com (en matière de pratiques commerciales illicites) qui visent à financer des actions de groupe (v. Russell G., « Un site pour organiser les actions collectives en Justice », le Figaro.fr (économie), 6 juill. 2014).
  • 13.
    Extrait du site www.actoowin.com.
  • 14.
    Les intermédiaires en investissement ne peuvent pas exercer d’autre profession en même temps. Il est donc impossible, tant du point de vue de la déontologie des avocats (la profession d’intermédiaire en investissement est évidemment incompatible avec celle d’avocat) que du point de vue des règles applicables aux intermédiaires en investissement qu’ils cumulent la qualité d’avocat et celle d’intermédiaire en investissement.
  • 15.
    La Cour de justice de l’Union européenne a réaffirmé régulièrement ce droit au juge en droit de l’Union européenne, en particulier dans les affaires CJUE, 13 mars 2007, n° C 432-05, Unibet c/ Justitiek Auslerrn, confirmé par CJUE, 18 mars 2010, nos C 317/08 à C-320/08, Alassini c/ Telecom Italia Spa, dans lequel la CJUE considère que le droit au juge n’exclut pas la possibilité de prévoir des procédures de conciliation.
  • 16.
    Pour un ex. de reconnaissance judiciaire par le Conseil de l’Europe, v. CEDH, 28 oct. 2010, n° 1643/06, Suda c/ République tchèque.
  • 17.
    Pour une reconnaissance du droit au juge dans la jurisprudence administrative, v. CE Salan, 11 mai 1962 : Lebon, p. 317 ; RDP 1962, p. 542. Pour une reconnaissance dans la jurisprudence constitutionnelle, v. Cons. const., 23 juill. 1999, n° 99-416 DC, § 38 (décision « couverture maladie universelle ») ; Cons. const., 2 mars 2004, n° 2004-492 (port du bracelet électronique) ; Cons. const., 19 janv. 2006, n° 2005-532 DC (réquisition de données électroniques).
  • 18.
    V. L. n° 91-647, 10 juill. 1991, relative à l’aide juridique (art. 1er) ; L. n° 98-1163, 18 déc. 1998, relative à l’accès au droit et à la résolution amiable des conflits.
  • 19.
    État et collectivités territoriales, not. au travers de la participation du ministère de la Justice, des départements ou des communes.
  • 20.
    Avocats, huissiers, notaires.
  • 21.
    Par ex., si l’accès au droit est organisé par une association religieuse.
  • 22.
    Il est toutefois regrettable sur ce point que la volonté d’ouverture de la République française n’ait pas conduit à rendre accessible aux professionnels du droit toutes les bases de données de la jurisprudence des juridictions.
  • 23.
    « Ars aequi et boni ». La formule a été attribuée à Ulpien, juriste romain du IIIe siècle avant J.-C., originaire de Tyr (qui avait repris cette formule de Celse pour affirmer que le droit venait de la Justice). Les juristes avaient donc déjà la fonction de connaître le licite et l’illicite mais aussi d’aspirer à « la vraie philosophie et non la fausse » (v. Ulpien, Institutes, Livre 1er, Digeste, 1, 1, 1 1 à 4).
  • 24.
    On pense, par ex., au blog de Mme Tambou disponible à l’adresse suivante : https://blogdroiteuropeen.com.
  • 25.
    V. L. n° 71-1130, 31 déc. 1971, portant réforme de certaines professions juridiques et judiciaires, art. 54 et s.
  • 26.
    V. activité d’investissement qui est une activité commerciale au sens de C. com., art. L. 110-1, 7°.
  • 27.
    Conférence ministérielle de l’OMC tenue du 15 au 19 décembre 2015 ayant conduit à l’adoption de nombreuses dispositions sur l’agriculture et le développement.
  • 28.
    V. Lecomte D., « Aide juridictionnelle, de l’irrationalité encore ! », Gaz. Pal. 30 août 2014, n° 190k8, p. 7.
  • 29.
    Là encore, la comparaison avec certains voisins européens est éclairante. Par ex., dans le système britannique, le montant des frais non répétibles n’est pas forfaitairement fixé par le juge, il est égal aux sommes payées effectivement à l’avocat de la partie qui a gagné et dans l’hypothèse où ces honoraires sont contestés, ils sont appréciés par un autre avocat intervenant comme expert et dont les honoraires seront finalement payés par celui qui perd à l’instance de taxation.
  • 30.
    V., par ex., le site www.actioncivile.com.
  • 31.
    V. Ligneul N., « L’action de groupe “à la française” : de la mondialisation des procédures au projet de loi sur la consommation », Gaz. Pal. 25 janv. 2014, n° 163s2, p. 11.
  • 32.
    Le site internet définit la médiation comme « un processus amiable de résolution des conflits, qui prévoit l’intervention d’un tiers impartial et indépendant, appelé le Médiateur, dont le rôle est de faciliter la recherche d’une solution à un différend. Si la médiation échoue, le dossier renseigné par le plaignant est automatiquement transmis au tribunal ; il pourra ainsi être obtenu autant de décisions de justice que de plaignants ». Contrairement à ce qui est indiqué sur le site internet, il ne s’agit en réalité ni d’une action de groupe, ni d’une médiation.
  • 33.
    V. C. consom., art. L. 623-9.
  • 34.
    V. conditions générales de la société Actioncivile.
  • 35.
    V. conditions générales de service de la société Actioncivile.
  • 36.
    Cela peut surprendre, tant du point de vue de la liberté de choix de l’avocat. C’est aussi très surprenant du point de vue des clauses habituelles des contrats d’assurance des professions juridiques.
  • 37.
    Par ex., Me Hayat Djabeur, avocat au barreau de Paris, est présenté par le site internet comme un avocat spécialisé dans le droit de la consommation et le droit social, alors que sa page sur l’annuaire du barreau de Paris ne fait pas référence à un certificat de spécialité. De même, la fiche de l’annuaire du barreau de Paris de Me Jacqueline Laffont, avocate au barreau de Paris, ne fait pas état d’un quelconque certificat de spécialité, pourtant le site internet la qualifie de « très grande spécialiste du droit des affaires et de la propriété intellectuelle » et précise qu’elle est « immensément respectée par ses confrères » [sic !].
  • 38.
    V. C. mon. fin., art. L. 547-1 ; D. n° 91-1197, 27 nov. 1991, art. 111 et 115.
  • 39.
    En vertu du principe de l’indépendance.
  • 40.
    Dans le respect du secret professionnel.
  • 41.
    La jurisprudence a eu l’occasion d’interdire des activités de démarchage visant à organiser des actions de groupe en 2005 (avant l’entrée en vigueur de la loi Hamon), v. Avena-Robardet V., « Le site classaction.fr condamné pour démarchage juridique illicite et clauses abusives », D. 2006, p. 141 : TGI Paris, 1re ch., 6 déc. 2005, n° 05-10504.
  • 42.
    V. C. consom., art. L. 623-7.
  • 43.
    V. art. 18 et s. qui visent les partages des honoraires avec des experts-comptables ou des notaires.
  • 44.
    V. McAughlin K., « Police officer removed from two-decade-old cold case after crowdsourcing funds to pay for DNA test », Mailonline, 27 févr. 2015.
  • 45.
    V. supra.
  • 46.
    C’est, par ex., cette volonté d’accéder à la justice pour des causes justes qui avait justifié la création de WeJustice (v. Delzanno C., « Obtenir justice grâce au financement participatif », Dr. et patr., n° 251, oct. 2015, p. 16).
  • 47.
    L. n° 2015-990, 6 août 2015, art. 51, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
  • 48.
    V. « La gestion et l’efficacité des CARPA », rapport d’enquête de la Cour des comptes sur la gestion de l’aide juridictionnelle par les CARPA, 9 oct. 2007.
  • 49.
    Propos de Jean-Marc Daniel tenus aux 5e États généraux du droit des affaires du CNB le 6 mars 2016.
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