Le sceau du secret et la médiation

Publié le 09/02/2023
Sceau
Anna/AdobeStock

La médiation est aujourd’hui largement pratiquée. Le problème de sa confidentialité, que la doctrine avait déjà posé, a été partiellement résolu par un récent arrêt de la Cour de cassation.

Depuis le début des années 2000, et plus encore depuis la loi de 2016 portant modernisation de la justice au XXIe siècle, les modes alternatifs de règlement des conflits s’insèrent aujourd’hui, sous le sigle MARC, en droit positif français. La médiation en fait partie. L’article 131-1 du Code de procédure civile dispose que « le juge, saisi d’un litige peut, après avoir recueilli l’accord des parties, désigner une tierce personne afin d’entendre les parties et de confronter leurs points de vue pour leur permettre de trouver une solution au conflit qui les oppose ». Si le processus est aujourd’hui bien développé, il pose encore un certain nombre de difficultés au rang desquelles on trouve le problème de la confidentialité.

L’article 21-3 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 dispose que « sauf accord contraire des parties, la médiation est soumise au principe de confidentialité ». Ce principe est également posé aux articles 131-14 et 531 du Code de procédure civile et à l’article L. 213-2 du Code de justice administrative. Comme l’avait souligné M. Reverchon-Billot, le principe de confidentialité, ici énoncé, est le fondement de la justice participative1. Par l’application de ce principe, les constatations du médiateur et les déclarations recueillies au cours de la médiation ne peuvent être divulguées aux tiers ni invoquées ou produites dans le cadre d’une instance judiciaire ou arbitrale sans l’accord des parties.

Le principe est beau, mais il reste très difficile à mettre en œuvre. Il est vrai que tout au long de la médiation, les parties sont invitées à se rapprocher et à trouver un accord en faisant des concessions. La partie qui va vers son adversaire ne doit en aucun cas avoir à le faire avec la crainte que sa bonne volonté puisse se retourner contre elle. Les déclarations ou constatations du médiateur, de même que les offres faites par ce dernier, ne doivent pas pouvoir être utilisées par les parties au cours d’une procédure juridictionnelle2.

L’arrêt rendu le 9 juin 2022 par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation apporte quelques éclaircissements quant aux contours de la confidentialité de la médiation. Dans les faits, une partie à une médiation avait produit au soutien de son assignation à comparaître différentes pièces relatives à la procédure de médiation et, entre autres, l’avis du médiateur. Son adversaire a estimé que le respect du principe de confidentialité constituait une formalité substantielle et, dans cette perspective, a demandé que la nullité de l’assignation soit prononcée mais également que les pièces litigieuses soient écartées des débats. Le tribunal d’instance de Marseille a rejeté l’exception de nullité de l’acte introductif d’instance en l’absence de grief et a au vu des pièces litigieuses. La Cour de cassation a adopté une position contraire. Après avoir souligné que « l’atteinte à l’obligation de confidentialité de la médiation impose que les pièces produites sans l’accord de la partie adverse, soient, au besoin d’office, écartées des débats par le juge », elle a cassé le jugement rendu en première instance3.

Il est certain, ici, que le sceau du secret n’a pas entouré le processus de médiation puisque l’avis, même succinct, du médiateur a été versé au débat. Or, les opinions, avis et propos du médiateur sont couverts par le principe de confidentialité. Il paraît naturel d’écarter du débat des pièces produites en méconnaissance du principe de confidentialité. C’est le cas de la jurisprudence antérieure4. Et la Cour de cassation a ici confirmé cette position : « l’obligation de confidentialité de la médiation impose que les pièces produites soient, au besoin d’office, écartées des débats par le juge ».

Notes de bas de pages

  • 1.
    M. Reverchon-Billot, « La justice participative : naissance d’un vrai concept », RTD civ. 2021, p. 297, spéc. n° 21.
  • 2.
    CA Versailles, 13e ch., 26 janv. 2021, n° 19/05110.
  • 3.
    N. Hoffschir, « La confidentialité de la médiation et ses conséquences », Dalloz actualité, 8 juill. 2022.
  • 4.
    CA Dijon, 2e ch. civ., 18 mars 2021, n° 20/01180 – CA Paris, 4-9, 8 oct. 2020, n° 17/15973.
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