Compétence du tribunal arbitral et office du juge
La Fédération de Russie et la République d’Ukraine ont conclu un traité bilatéral de protection des investissements (le TBI). Après avoir défini le terme investissements, le TBI prévoit que « Tout différend entre une partie contractante et un investisseur de l’autre partie contractante qui surgit en rapport avec les investissements, y compris les différends qui concernent le montant, les modalités ou la procédure de paiement des indemnités, prévus à l’article 5 du présent accord, ou la procédure de transfert des paiements, prévue à l’article 7 du présent accord » peut être soumise à l’arbitrage après une tentative de règlement amiable.
Une banque ukrainienne engage, sur le fondement de ce traité, une action indemnitaire devant un tribunal arbitral, en invoquant l’expropriation par la Fédération de Russie, en 2014, de ses actifs situés en Crimée.
Il résulte de l’article 1520, 1°, du Code de procédure civile que, si le juge de l’annulation contrôle la décision du tribunal arbitral sur sa compétence, qu’il se soit déclaré compétent ou incompétent, en recherchant tous les éléments de droit ou de fait permettant d’apprécier la portée de la convention d’arbitrage, ce contrôle est exclusif de toute révision au fond de la sentence.
En matière de protection des investissements transnationaux, le consentement de l’État à l’arbitrage procède de l’offre permanente d’arbitrage formulée dans un traité, adressée à une catégorie d’investisseurs que ce traité délimite pour le règlement des différends touchant aux investissements qu’il définit.
Viole le texte susvisé la cour d’appel de Paris qui, pour annuler la sentence, retient que l’article 9 du TBI n’institue pas une offre générale et inconditionnelle pour tous litiges d’investissements entre une partie contractante et un investisseur de l’autre partie contractante, mais une offre insérée dans les limites fixées par le traité, de sorte que la protection procédurale offerte par la clause d’arbitrage et donc la compétence du tribunal arbitral est subordonnée à l’applicabilité du traité à l’investissement objet du litige et plus précisément à l’existence d’un litige portant sur un investissement qui a nécessairement été réalisé par un investisseur d’une des parties contractantes sur le territoire de l’autre à compter du 1er janvier 1992, alors que ni l’offre d’arbitrage stipulée à l’article 9 ni la définition des investissements prévue à l’article 1er ne comportaient de restriction ratione temporis et que l’article 12 n’énonçait pas une condition de consentement à l’arbitrage dont dépendait la compétence du tribunal arbitral, mais une règle de fond, ce dont il résulte que la cour d’appel devait seulement vérifier, au titre de la compétence ratione temporis, que le litige était né après l’entrée en vigueur du traité.
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