La relaxe au pénal et le dédommagement de la victime au civil
Une cour d’appel, après avoir relaxé le conducteur d’un véhicule automobile poursuivi du chef d’une infraction d’homicide involontaire, constatant qu’aucune demande d’application de l’article 470-1 du Code de procédure pénale n’avait été formée, rejette les demandes indemnitaires des ayants droit de la victime qui saisissent ensuite un juge civil d’une demande de réparation de leurs préjudices.
Selon l’article 1355 du Code civil, l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même, que la demande soit fondée sur la même cause, que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité.
Selon une jurisprudence constante (Cass., ass. plén., 7 juill. 2006, n° 04-10672), il incombe au demandeur à l’action de présenter dès l’instance relative à la première demande l’ensemble des moyens qu’il estime de nature à fonder celle-ci.
Selon l’article 470-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, le tribunal saisi, à l’initiative du ministère public ou sur renvoi d’une juridiction d’instruction, de poursuites exercées pour une infraction non intentionnelle au sens des deuxième, troisième et quatrième alinéas de l’article 121-3 du Code pénal, et qui prononce une relaxe demeure compétent, sur la demande de la partie civile ou de son assureur formulée avant la clôture des débats, pour accorder, en application des règles du droit civil, réparation de tous les dommages résultant des faits qui ont fondé la poursuite.
Le pourvoi pose la question de savoir si le principe de concentration des moyens s’impose à la partie civile lorsqu’elle dispose, devant le juge pénal, de la faculté prévue à l’article 470-1 précité.
Lorsque la partie civile sollicite du juge pénal qu’il se prononce selon les règles du droit civil, elle doit présenter l’ensemble des moyens qu’elle estime de nature à fonder ses demandes, de sorte qu’elle ne peut saisir le juge civil des mêmes demandes, fussent-elles fondées sur d’autres moyens.
En revanche, lorsque la partie civile n’a pas usé de cette faculté, elle ne peut être privée de la possibilité de présenter ses demandes de réparation devant le juge civil. L’interprétation contraire aboutirait à priver d’effet l’option de compétence qui lui est ouverte par la loi n° 83-608 du 8 juillet 1983 dans le but de garantir le droit effectif de toute victime d’infraction d’obtenir l’indemnisation de son préjudice.
Viole les textes susvisés en ne tirant pas les conséquences de ses propres constatations la cour d’appel qui, pour déclarer irrecevable l’action des ayants droit, énonce qu’il résulte de l’article 1355, du Code civil que, lorsqu’une juridiction pénale a statué par une décision définitive sur l’action civile, toute nouvelle demande portant sur les mêmes préjudices, ce qui est le cas en l’espèce, se heurte à l’autorité de la chose jugée, peu important que la juridiction pénale ait débouté les parties civiles de leur demande d’indemnisation, après avoir relevé que les ayants droit n’avaient pas sollicité, en application de l’article 470-1 du Code de procédure pénale, qu’il soit statué sur le fondement des dispositions de la loi du 5 juillet 1985 devant la chambre des appels correctionnels.
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