Tous les intervenants à un chantier sont tenus à l’obligation de sécurité

Publié le 24/01/2025

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Aux termes de l’article L. 4532-9 du Code du travail, sur les chantiers soumis à l’obligation d’établir un plan général de coordination, chaque entreprise, y compris les entreprises sous-traitantes, appelée à intervenir à un moment quelconque des travaux, établit, avant le début des travaux, un plan particulier de sécurité et de protection de la santé. Ce plan est communiqué au coordonnateur.

Selon l’article R. 4532-64 du même code, ce plan particulier de sécurité et de protection de la santé doit décrire les travaux et processus de travail de l’entreprise pouvant présenter des risques pour la santé et la sécurité des autres intervenants sur le chantier, notamment lorsqu’il s’agit de travaux comportant des risques particuliers.

Il résulte de ces dispositions, d’une part, que l’obligation d’établir un plan particulier de sécurité et de protection de la santé concerne l’ensemble des entreprises dont les travaux concourent à la réalisation de l’opération de construction et n’est pas limitée à celles participant directement à la construction, d’autre part, que les entreprises soumises à cette obligation doivent inclure dans ce plan les risques particuliers que leur travaux et processus de travail comportent pour la sécurité des autres intervenants sur le chantier.

En l’espèce, pour déclarer deux sociétés coupables d’exécution de travaux de maintenance sans respect par l’employeur des règles de sécurité et d’homicide involontaire, l’arrêt attaqué énonce qu’il est constant que l’accident est survenu sur un chantier de bâtiment ou de génie civil relevant de l’obligation de faire établir un plan général de coordination en matière de sécurité et de protection de la santé et que les dispositions de l’article L. 4532-9 du Code du travail sont générales et visent chaque entreprise appelée à intervenir à un moment quelconque des travaux.

L’arrêt relève qu’il n’existe aucune exonération concernant une prestation de services, en l’espèce une opération de maintenance préventive, laquelle par son caractère obligatoire chaque trimestre concourt à l’opération de bâtiment ou de génie civil envisagée et constate que l’une de ces sociétés n’a établi aucun plan particulier de sécurité et de protection de la santé au titre de cette opération de maintenance d’une grue à tour pour laquelle elle devait intervenir tous les trois mois, sur un chantier prévu pour une durée initiale de vingt-cinq mois, soit au minimum huit fois.
Il retient que le risque de survenance d’un accident lors d’une opération de maintenance d’une grue était déjà identifié au sein du groupe auquel appartiennent ces sociétés depuis 2011, puisque c’est à l’occasion d’un accident dont un technicien avait été victime lors d’une telle opération qu’une note de service a été rédigée. Et considère qu’en s’abstenant d’établir un plan particulier de sécurité et de protection de la santé relatif aux opérations de maintenance de la grue à tour, la société a commis un manquement à une obligation de prudence ou de sécurité.

L’arrêt constate en outre que le plan particulier de sécurité et de protection de la santé établi par l’autre société n’a pas intégré les opérations de maintenance de la grue à tour dont elle était locataire et utilisatrice, consistant en des visites obligatoires trimestrielles et annuelles, que l’opération de maintenance en cause est par nature dangereuse puisqu’elle fait intervenir deux salariés de deux entreprises différentes, en sorte qu’il s’imposait de convenir de mesures de prévention communes et d’un mode opératoire prenant en compte les contraintes opérationnelles de chacun d’entre eux.

L’arrêt considère qu’en n’intégrant pas cette opération de maintenance dans son plan particulier de sécurité et de protection de la santé, cette société a empêché le coordonnateur de sécurité de procéder à une évaluation des risques et de définir des mesures de prévention.

En statuant ainsi, par des motifs dont il résulte que le champ d’application de l’article L. 4532-9 du Code du travail n’est pas limité à la construction, mais comprend l’ensemble des travaux concourant à la réalisation d’une telle opération, la cour d’appel ne méconnaît aucun des textes légaux.

En effet, en premier lieu, il ressort de ce qui précède que les dispositions de ce texte, dont la violation constitue un délit en application de l’article L. 4744-5 du Code du travail, déterminent de manière claire et précise les entreprises tenues d’établir un plan particulier de sécurité et de protection de la santé, de sorte qu’il n’y a pas lieu de les éclairer par d’autres textes, et ne méconnaissent ainsi pas l’article 7 de la Conv. EDH.

En second lieu, l’interprétation de ce texte ne méconnaît pas davantage l’article 7 précité, dès lors qu’elle était prévisible en ce que, d’une part, elle découle des termes mêmes de la loi, d’autre part, elle a déjà été consacrée par un arrêt publié (Cass. crim., 22 oct. 1986, n° 85-96.499) rendu sur les dispositions similaires alors applicables du Code du travail, qui n’a pas fait l’objet, depuis, d’un revirement de jurisprudence.

Sources :
Rédaction
Plan