Construction illégale sur une parcelle expropriée : conséquence sur l’indemnisation

Publié le 23/02/2024
Construction illégale sur une parcelle expropriée : conséquence sur l'indemnisation
Court of Cassation on Seine in Paris, France

Les terrains nécessaires à la réalisation du projet d’aménagement d’une ZAC sont déclarés immédiatement cessibles au profit d’une société d’économie mixte.

L’ordonnance d’expropriation de la propriétaire d’une parcelle sur laquelle avait été édifié un bâtiment de 20 m² intervient le 9 septembre 2019 et, faute d’accord sur le montant des indemnités de dépossession, la société d’économie mixte saisit le juge de l’expropriation.

Aux termes de l’article L. 311-8 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, lorsqu’il existe une contestation sérieuse sur le fond du droit ou sur la qualité des réclamants et toutes les fois qu’il s’élève des difficultés étrangères à la fixation du montant de l’indemnité et à l’application des articles L. 242-1 à L. 242-7, L. 322-12, L. 423-2 et L. 423-3, le juge fixe, indépendamment de ces contestations et difficultés, autant d’indemnités alternatives qu’il y a d’hypothèses envisageables et renvoie les parties à se pourvoir devant qui de droit.

Aux termes de l’article L. 321-1 du même code, les indemnités allouées couvrent l’intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l’expropriation.

Il est jugé, en application de cette disposition, que seul peut être indemnisé le préjudice reposant sur un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation (Cass. 3e civ., 3 déc. 1975, n° 75-70061, Cass. 3e civ., 8 juin 2010, n° 09-15183, Cass. 3e civ., 11 janv. 2023, n° 21-23792).

Dès lors, faute pour son propriétaire de pouvoir invoquer un droit juridiquement protégé au jour de l’expropriation, la dépossession d’une construction édifiée irrégulièrement et située sur une parcelle inconstructible n’ouvre pas droit à indemnisation, même si toute action en démolition est prescrite à la date de l’expropriation.

Pour fixer des indemnités alternatives selon que le caractère illégal de la construction sera judiciairement reconnu ou non, l’arrêt énonce que ne donne pas droit à indemnisation le préjudice afférent à une construction édifiée illégalement, sauf si l’infraction pénale est prescrite, et retient qu’il existe une contestation sérieuse, au sens de l’article L. 311-8 du Code de l’expropriation pour cause d’utilité publique, puisque l’expropriée indique que, même si la construction est irrégulière, la prescription est acquise, dans la mesure où la construction est présente depuis plus de dix années et que des poursuites judiciaires pour infractions au Code de l’urbanisme ont été engagées contre elle.

En statuant ainsi, après avoir constaté l’irrégularité de la construction édifiée sur une parcelle inconstructible, dont il s’évince que, même si toute action en démolition est prescrite, l’expropriée ne peut invoquer un droit juridiquement protégé dont la perte pourrait ouvrir droit à indemnisation, la cour d’appel viole les textes susvisés.

Sources :
Rédaction
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