Mort de Yasser Arafat et procès équitable
Les requérantes sont la veuve et la fille de Yasser Arafat, hospitalisé à la suite d’une dégradation de son état de santé et décédé. À la demande de sa veuve, aucune autopsie ne fut réalisée. En mars 2012, des traces d’une matière radioactive furent trouvées sur les effets personnels de mort confiés à un journaliste d’Al Jazeera, aux fins d’analyse. Les requérantes déposèrent plainte contre X et le procureur de la République de Nanterre ouvrit une information judiciaire du chef d’assassinat. Trois juges d’instruction furent désignés et trois experts furent commis. Les opérations se déroulèrent en présence d’équipes françaises et, à la demande de l’Autorité palestinienne, une équipe russe.
Les juges d’instruction rendirent une ordonnance de non-lieu, longuement motivée que la chambre de l’instruction confirma.
Invoquant l’article 6 § 1 de la Convention, les requérantes se plaignent tout d’abord du refus de constater la nullité du rapport d’expertise complémentaire, en raison de leurs doutes sur la provenance et la traçabilité de l’échantillon utilisé dans ce cadre, de la méthodologie employée et des résultats contredits par des experts suisses. Elles critiquent ensuite le refus d’ordonner une contre-expertise et de faire droit à leurs autres demandes, compte tenu de l’existence de contradictions entre les résultats des mesures et des analyses effectués par les experts suisses et français.
La Cour constate tout d’abord que le procureur de la République a ouvert une information judiciaire du chef d’assassinat moins d’un mois après le dépôt de et que trois juges d’instruction ont été désignés, ce qui manifeste l’attention portée à la plainte des requérantes par les autorités internes. La Cour note par ailleurs que de très nombreux actes ont été diligentés, sans discontinuer, que ce soit au niveau national ou international, qu’il s’agisse notamment des déplacements à Ramallah dès 2012, des opérations d’exhumation du corps et de prélèvements, ou encore des multiples expertises et auditions de témoins effectuées en France et à l’étranger.
En outre, il apparaît qu’à toutes les étapes de la procédure, les requérantes, assistées de leurs avocats, ont été mises à même d’exercer effectivement leurs droits et de faire valoir leur position sur les différents points en litige. Informées du déroulement de la procédure, elles ont pu présenter des demandes d’actes, exercer des recours et formuler des observations. La Cour relève en particulier que les auditions réalisées ont notamment été effectuées à partir d’une liste de témoins fournie aux juges d’instruction par les requérantes elles-mêmes (paragraphe 8 ci-dessus) et que leur demande d’auditions supplémentaires présentée en 2014 a également été acceptée.
Si les requérantes se plaignent du rejet de certaines de leurs demandes au cours de l’information judiciaire, la Cour considère, eu égard à l’ensemble des actes effectués, que les refus litigieux ne sont pas par eux-mêmes, de nature à remettre en cause l’équité de la procédure, prise dans son ensemble et que tant l’allégation, par les requérantes, de la nullité du rapport d’expertise complémentaire que leurs demandes de contre-expertise et d’investigations supplémentaires ont été dûment examinées par les juges internes, qui les ont rejetées par des décisions motivées.
Enfin, il n’apparaît pas que les juges internes aient tiré des conclusions arbitraires des faits qui leur étaient soumis ou auraient dépassé les limites d’une interprétation raisonnable des pièces de la procédure ainsi que des textes applicables.
Dans ces conditions, la Cour considère que les circonstances de l’espèce ne révèlent, dans la procédure considérée dans son ensemble, aucune atteinte au droit à un procès équitable au sens de l’article 6 § 1 de la Convention.
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