Enregistrement sonore d’une audience et liberté de la presse

Une vidéo intitulée « tribunal de commerce de Nanterre : les manœuvres collusives de trois juges et d’une greffière », publiée sur le profil d’un justiciable, contenait et commentait des enregistrements sonores des juges consulaires et du greffier, réalisés à l’occasion d’une audience du tribunal de commerce. Le montage des échanges sonores mentionnait l’identité des juges et de la greffière qui s’exprimaient, contenait un texte expliquant la nature du litige ainsi que des commentaires critiques dénonçant le fait que les juges consulaires et la greffière avaient délibéré pendant les deux temps de suspension d’audience.
Dès lors qu’il n’est pas contesté que les enregistrements poursuivis ont été effectués dans la salle d’audience, la cour d’appel a fait l’exacte application de la loi en confirmant le jugement ayant déclaré le prévenu coupable du chef de publication d’enregistrement sonore ou visuel effectué sans autorisation à l’audience d’une juridiction.
En premier lieu, l’interdiction instituée par l’article 38 ter de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse a pour objectif de garantir tant la sérénité des débats et, ainsi, une bonne administration de la justice, que le respect de la vie privée des participants aux procès, leur sécurité, ainsi que la présomption d’innocence des personnes poursuivies en matière pénale.
En second lieu, cette interdiction commence dès l’ouverture de l’audience et se prolonge jusqu’à ce que celle-ci soit levée, et s’applique pendant les périodes de suspension de l’audience, en ce compris les temps d’échanges entre la formation de jugement et le greffe, auraient-ils même lieu, comme cela est allégué en l’espèce, hors la présence du public et des parties, lesquels ne constituent pas un délibéré dès lors qu’aucune décision n’a été prise à leur issue et que l’affaire a été mise en délibéré à la clôture des débats.
NOTE : Les mis en cause prétendaient que, sauf à ajouter au texte d’incrimination, celui-ci ne permet pas de réprimer la captation d’images ou de sons provenant non de l’audience elle-même, mais d’un délibéré et qu’en outre, ce texte n’a pour objet que de garantir la sérénité et la sincérité des débats judiciaires, qui conditionnent la manifestation de la vérité et contribuent ainsi à l’autorité et à l’impartialité du pouvoir judiciaire.
Sources :