L’action en justice des victimes du Mediator et la prescription
Saisi par une victime, le collège d’experts de l’ONIAM retient que son dommage est imputable à un médicament et le laboratoire producteur lui adresse une offre d’indemnisation qu’elle refuse. Sa famille assigne, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, le laboratoire qui oppose la prescription.
Aux termes de l’article 1245-17 du Code civil, transposant l’article 13 de la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 relative au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de responsabilité du fait des produits défectueux, instaurant une responsabilité de plein droit du producteur au titre du dommage causé par un défaut de son produit, les dispositions relatives à la responsabilité du fait des produits défectueux ne portent pas atteinte aux droits dont la victime d’un dommage peut se prévaloir au titre du droit de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle ou au titre d’un régime spécial de responsabilité. Le producteur reste responsable des conséquences de sa faute et de celle des personnes dont il répond.
La Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que la référence, à cet article 13, aux droits dont la victime d’un dommage peut se prévaloir au titre de la responsabilité contractuelle ou extracontractuelle doit être interprétée en ce sens que le régime mis en place par ladite directive n’exclut pas l’application d’autres régimes de responsabilité contractuelle ou extracontractuelle reposant sur des fondements différents, tels que la garantie des vices cachés ou la faute (CJCE, 25 avr. 2002, n° C-183/00).
Il en résulte que la victime d’un dommage imputé à un produit défectueux peut agir en responsabilité contre le producteur sur le fondement du second de ces textes, si elle établit que son dommage résulte d’une faute commise par le producteur, telle qu’un maintien en circulation du produit dont il connaît le défaut ou encore un manquement à son devoir de vigilance quant aux risques présentés par le produit.
Encourt la cassation l’arrêt qui, pour déclarer l’action irrecevable comme prescrite, retient, d’une part, que l’assignation a été délivrée plus de trois ans après la connaissance du dommage acquise à la date de l’avis de l’ONIAM, d’autre part, que la faute reprochée au laboratoire, prise d’un manquement au devoir de vigilance et de surveillance du fait de la commercialisation d’un produit dont il connaissait les risques ou de l’absence de retrait du produit du marché français contrairement à d’autres pays européens, n’est pas distincte du défaut de sécurité du produit, de sorte que la responsabilité délictuelle pour faute ne saurait se substituer au régime de la responsabilité du fait des produits défectueux.
NOTE : Par cet arrêt, la Cour de cassation facilite l’action en justice de la victime d’un médicament défectueux : la victime peut demander au producteur la réparation de son préjudice en choisissant d’invoquer soit le défaut du produit, soit une faute commise par le producteur, ce qui lui laisse davantage de temps pour agir.
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