Protection du lanceur d’alerte en référé

Publié le 09/02/2023

Protection du lanceur d’alerte en référé

Une salariée informe le comité d’éthique de la situation de harcèlement dont elle estime faire l’objet à la suite de son alerte qui signalait à ce même comité des faits susceptibles d’être qualifiés de corruption, mettant en cause l’un de ses anciens collaborateurs et son employeur.

Quelques mois plus tard, le comité d’éthique conclut à l’absence de situation contraire aux règles et principes éthiques. Licenciée trois mois plus tard, la salariée saisit la formation des référés de la juridiction prud’homale afin principalement que soit constatée la nullité de son licenciement, intervenu en violation des dispositions protectrices des lanceurs d’alerte.

Selon l’article L. 1132-3-3 du Code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, pour avoir relaté ou témoigné, de bonne foi, de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime dont il aurait eu connaissance dans l’exercice de ses fonctions ou pour avoir signalé une alerte dans le respect des articles 6 à 8 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique. En cas de litige relatif à l’application de ces dispositions, dès lors que le salarié présente des éléments de fait qui permettent de présumer qu’il a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime, ou qu’il a signalé une alerte dans le respect de ces textes, il incombe à l’employeur, au vu des éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l’intéressé.

Aux termes de l’article L. 1132-4 du Code du travail, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance de ces dispositions est nul.

Il résulte de l’article R. 1455-6 du Code du travail que le juge des référés, auquel il appartient, même en présence d’une contestation sérieuse, de mettre fin au trouble manifestement illicite que constitue la rupture d’un contrat de travail consécutive au signalement d’une alerte, doit apprécier si les éléments qui lui sont soumis permettent de présumer que le salarié a relaté ou témoigné de bonne foi de faits constitutifs d’un délit ou d’un crime, ou qu’il a signalé une alerte dans le respect des textes précités et, dans l’affirmative, de rechercher si l’employeur rapporte la preuve que sa décision de licencier est justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de ce salarié.

Pour dire n’y avoir lieu à référé, l’arrêt de la cour d’appel de Versailles relève qu’aucun élément ne permet de remettre en cause la bonne foi de la salariée à l’occasion des alertes données successivement à sa hiérarchie puis au comité d’éthique du groupe et en déduit la qualité de lanceur d’alerte de l’intéressée.

L’arrêt retient, d’abord, que le lien entre la réelle détérioration de la relation de travail et l’alerte donnée par la salariée ne ressort pas, de façon manifeste, des évaluations professionnelles de celle-ci et que l’employeur, qui n’a pas eu la volonté d’éluder les termes de l’alerte, apporte un certain nombre d’éléments objectifs afin d’expliciter les faits présentés par la salariée comme étant constitutifs de représailles.

Il énonce, ensuite, après avoir constaté que la lettre de licenciement déclinait des griefs portant exclusivement sur le travail de la salariée, que l’examen du caractère réel et sérieux de tels griefs relève du juge du fond.

En statuant ainsi, alors qu’elle a constaté que la salariée présente des éléments permettant de présumer qu’elle a signalé une alerte dans le respect des dispositions législatives, en sorte qu’il lui appartenait de rechercher si l’employeur rapportait la preuve que sa décision de licencier était justifiée par des éléments objectifs étrangers à la déclaration ou au témoignage de l’intéressée, la cour d’appel viole les textes susvisés.

Sources :
Rédaction
Plan
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