La loi Bien vieillir répond-elle au défi du vieillissement de la population ?
Après des ouvrages qui ont montré les dérives possibles au sein des Ehpad, la loi Bien vieillir, au contenu modeste lié à un vote dans un contexte budgétaire tendu, a été adoptée et publiée. On peut craindre qu’elle ne réponde pas au défi du vieillissement de la population.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024
Le secteur de l’autonomie devra se contenter de quelques mesures de détails, loin de la grande loi attendue. Elle entrera en vigueur le 1er janvier 2025, sauf pour certaines dispositions soumises à la publication de décrets1, et contient quarante articles intégrés dans différents codes, ainsi que quelques autres dispositions qu’elle abroge, modifie, voire complète, créée ou supprime, sans contenir de réelles innovations d’envergure. Cette loi s’articule autour de deux grands thèmes : la prévention des situations liées à la perte d’autonomie (I) et le renforcement de la prise en charge des personnes âgées et vulnérables (II).
I – La prévention des situations liées à la perte d’autonomie
Certains textes antérieurs font l’objet de modifications limitées au vocabulaire.
La loi commence par des dispositions destinées à renforcer le pilotage de la politique de prévention de la perte d’autonomie et lutter contre l’isolement social2 et la précarité des personnes âgées3.
La loi fixe des objectifs généraux (A), assez peu ambitieux, dont la mise en œuvre reposera essentiellement sur les départements (B).
A – Objectifs généraux
Le nouveau Code de l’action sociale et des familles (CASF) harmonisé avec la loi nouvelle, dite Bien vieillir, prévoit une conférence nationale de l’autonomie, organisée au moins tous les trois ans, afin de définir les orientations et débattre des moyens de la politique de prévention de la perte d’autonomie4. Cette conférence s’appuie sur les travaux de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie et l’expertise du centre national de ressources probantes5.
La composition de la conférence nationale de l’autonomie est précisée6, elle est composée de représentants :
• de l’État ;
• des conseils départementaux ;
• d’organismes de sécurité sociale ;
• d’organismes gestionnaires des établissements ou services sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes âgées ;
• d’associations représentatives des personnes âgées ;
• des professionnels concernés par la prévention et l’accompagnement de la personne, c’est-à-dire de personnes et institutions concernées par la prise en charge des problèmes liés à la prise en charge de la vieillesse.
B – Le rôle majeur du département dans la mise en œuvre
La nouvelle loi prévoit que le département pilote le service public départemental de l’autonomie7, en reconnaissant le rôle qu’il jouait déjà, d’où l’accentuation de son importance.
1 – Missions
Le département exerce notamment les missions suivantes :
• réaliser l’accueil, l’information, l’orientation et le suivi dans la durée des personnes âgées, et des proches aidants et apporter une réponse complète, coordonnée et individualisée à leurs demandes, ainsi qu’à celles des professionnels concernés, afin de favoriser un égal accès au service et une coordination dans l’accompagnement et dans les actions entreprises ;
• assister les professionnels des secteurs social, médico-social et sanitaire intervenant auprès des bénéficiaires du service public départemental de l’autonomie dans l’élaboration de réponses globales et adaptées aux besoins ;
• diffuser, planifier et réaliser des actions d’information et de sensibilisation aux démarches de prévention individuelle, des offres de prévention collective8.
Pour l’exercice de ces missions, le service public départemental de l’autonomie respecte un cahier des charges national, fixé par arrêté des ministres concernés.
À compter d’une date fixée par décret, et au plus tard le 1er janvier 20259, dans chaque département ou collectivité exerçant ces compétences, le service public départemental de l’autonomie facilite les démarches des personnes âgées et des proches aidants10.
Cela se traduit par l’existence d’un service public départemental de l’autonomie11 piloté par le département ou la collectivité exerçant les compétences des départements qui est composé de l’agence régionale de santé (ARS), du rectorat, du service public de l’emploi, des établissements sociaux et médico-sociaux (ESMS), des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS)12, des organismes locaux et régionaux de sécurité sociale, de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH)13 et des antennes France services14.
Le SPDA facilite les démarches des personnes âgées et des proches aidants, ses missions sont détaillées.
Dans chaque département ou collectivité à compétence départementale, une conférence territoriale de l’autonomie est créée pour coordonner l’action des membres du SPDA et allouer des financements pour prévenir la perte d’autonomie.
Des équipes locales d’accompagnement sur les aides techniques, pluridisciplinaires, indépendantes de toute activité commerciale doivent être présentes dans chaque département15, pour accompagner les personnes âgées dans l’évaluation de leurs besoins, le choix et la prise en main des aides techniques et dans la définition des aménagements nécessaires du logement. Un décret définira le cahier des charges national qu’elles devront respecter.
Le groupement territorial social et médico-social permet à des établissements et services de mettre en œuvre un parcours coordonné des personnes âgées accompagnées sur un territoire donné16.
Les ESMS publics pour personnes âgées dépendantes, à l’exception de ceux gérés par un centre communal ou intercommunal d’action sociale ou une collectivité territoriale, ont l’obligation d’adhérer à un groupement hospitalier de territoire ou à un groupement territorial social et médico-social.
La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) se voit dotée par la loi d’une « mission nationale d’accompagnement, de conseil et d’audit », pour accompagner les départements, sur la qualité, le contrôle interne et l’égalité de traitement des demandes17.
Pour lutter contre l’isolement, dans le respect des normes de la CNIL, on prévoit la collecte par les maires de données (identité, âge et domicile) sur les personnes âgées du territoire (sauf opposition de la personne ou de son représentant légal), ainsi que la transmission de ces données18.
Un programme de dépistage précoce et de prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées d’au moins 60 ans est mis en œuvre19.
Avant le 31 décembre 2024, puis tous les cinq ans, une loi de programmation pluriannuelle pour le grand âge détermine la trajectoire des finances publiques en matière d’autonomie des personnes âgées, pour une période minimale de cinq ans.
2 – Structures
Dans chaque département, une conférence territoriale de l’autonomie20 est chargée :
• de coordonner l’action des membres du service public départemental de l’autonomie, d’élaborer un programme annuel d’actions, en fonction des besoins du territoire, de veiller au respect du cahier des charges21 ;
• d’allouer des financements pour prévenir la perte d’autonomie et pour soutenir le développement de l’habitat inclusif22.
La conférence territoriale de l’autonomie, qui n’a pas la personnalité morale, est présidée par le président du conseil départemental. La vice-présidence est assurée par le directeur général de l’agence régionale de santé. Elle est composée des représentants des membres du service public départemental de l’autonomie23. Toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prise en charge de la perte d’autonomie peut y participer, sous réserve de l’accord de la majorité des membres de droit.
Le président de la conférence territoriale de l’autonomie réunit l’ensemble des membres du service public départemental de l’autonomie au moins une fois par an, chaque année avant le 30 avril ; il présente le bilan du programme d’actions de la conférence territoriale de l’autonomie au titre de l’année précédente ainsi que le programme d’actions pour l’année courante24.
Le conseil départemental et l’agence régionale de santé peuvent définir conjointement plusieurs territoires de l’autonomie de manière à couvrir l’ensemble du territoire du département ou de la collectivité25.
La conférence territoriale de l’autonomie peut créer des commissions compétentes pour chaque territoire de l’autonomie26.
Pour exercer ses missions27, la conférence territoriale de l’autonomie rassemble de droit des représentants :
• de l’Agence nationale de l’habitat dans le département ;
• des organismes régis par le Code de la mutualité ;
• des fédérations d’institutions de retraite complémentaire28.
Toute autre personne physique ou morale concernée par les politiques de prévention de la perte d’autonomie, notamment les professionnels de santé spécialisés en gériatrie, peut y participer, sous réserve de l’accord de la majorité des membres de droit.
« Le programme défini par la commission porte sur :
1° l’amélioration de l’accès aux équipements et aux aides techniques individuelles favorisant le maintien à domicile ;
2° l’attribution du forfait autonomie29 ;
3° la coordination et le soutien des actions de prévention mises en œuvre par les services autonomie à domicile intervenant auprès des personnes âgées ;
4° le soutien aux actions d’accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d’autonomie ;
5° le développement d’autres actions collectives de prévention ;
6° le développement d’actions de lutte contre l’isolement des personnes âgées ».
La commission des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie30 est également compétente en matière d’habitat inclusif pour les personnes âgées. Cette commission comprend des représentants des services départementaux de l’État compétents en matière d’habitat et de cohésion sociale.
Le rapport d’activité porte également sur l’activité de la commission des financeurs de l’habitat inclusif pour les personnes âgées, selon un modèle défini par arrêté des ministres chargés des personnes âgées, des personnes handicapées et du logement31. Un décret en Conseil d’État en détermine les modalités d’application32.
La Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie assure, au bénéfice des départements et des maisons départementales de l’autonomie33, une mission nationale d’accompagnement, de conseil et d’audit34, en vue de garantir la qualité du service.
Les rendez-vous de prévention proposés aux personnes âgées d’au moins 60 ans contribuent à la mise en œuvre du programme de dépistage précoce et de prévention de la perte d’autonomie35. Ils donnent lieu à une information sur les conséquences de la grippe en matière de perte d’autonomie36. La loi nouvelle comprend aussi des dispositions relatives au renforcement de la prise en charge des personnes âgées et vulnérables.
II – Le renforcement de la prise en charge des personnes âgées et vulnérables
La nouvelle loi vise à renforcer l’autonomie des personnes vulnérables37 et à garantir à chacun des prestations de qualité accessibles grâce à des professionnels accompagnés et soutenus dans leurs pratiques avec des dispositions visant à garantir les droits fondamentaux des personnes âgées amenant à un inventaire des mesures retenues pour permettre le bien-vieillir (A), et promouvoir la bientraitance en luttant contre la maltraitance (B)38.
Les conditions techniques minimales d’organisation et de fonctionnement des établissements et services sont définies par décret.
A – Inventaire des mesures retenues pour permettre le bien-vieillir
La société du bien-vieillir se caractérise par des mesures d’aide et de protection des personnes âgées (1) et d’autres pour lutter contre leur isolement (2).
1 – Les mesures pour la société du bien-vieillir, aide et protection
Les mesures mises en place méritent un inventaire.
a – Mesures
Création d’un guichet unique. Un guichet unique a pour objectif de centraliser les demandes d’intervention pour les personnes âgées, d’analyser leurs besoins afin de les orienter vers le bon service.
Une refonte du système de services d’aides à domicile. Une refonte du système de services d’aides à domicile a été envisagée, elle consiste à remplacer la tarification horaire des services d’autonomie à domicile par une tarification globale ou forfaitaire, elle se limite pour dix départements à une expérimentation qui doit avoir lieu de 2025 à fin 2026.
Fin de l’aide alimentaire pour les petits-enfants. La prise en charge de personnes âgées ayant des revenus trop faibles39 s’est longtemps réglée par leur prise en charge par la collectivité disposant de recours subrogatoires40 contre les héritiers et la famille41, souvent incapables d’y faire face. Il est mis fin à l’obligation des petits-enfants de participer financièrement à l’accueil de leurs grands-parents en EHPAD42.
b – Garantie des droits et libertés individuelles
L’exercice des droits et libertés individuels est garanti à toute personne accueillie et accompagnée par des établissements et services sociaux et médico-sociaux ; lui sont assurés :
• le respect de sa dignité, de son intégrité, de sa vie privée et familiale, de son intimité43, de sa sécurité et de son droit à aller et venir librement44 ;
• sous réserve des pouvoirs reconnus à l’autorité judiciaire et des nécessités liées à la protection des majeurs protégés, le libre choix entre les prestations adaptées qui lui sont offertes soit à son domicile, soit dans le cadre d’une admission au sein d’un établissement spécialisé ;
• une prise en charge et un accompagnement individualisé de qualité favorisant son développement, son autonomie et son insertion, adaptés à son âge et à ses besoins, respectant son consentement éclairé qui doit systématiquement être recherché lorsque la personne est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision. À défaut, celui de son représentant légal ;
• la confidentialité des informations la concernant ;
• l’accès à toute information ou document relatif à sa prise en charge, sauf dispositions législatives contraires ;
• une information sur ses droits fondamentaux et les protections particulières légales et contractuelles dont elle bénéficie, ainsi que sur les voies de recours à sa disposition ;
• la participation directe de la personne prise en charge à la conception et à la mise en œuvre du projet d’accueil et d’accompagnement qui la concerne.
Contrat de séjour. Dans un souci de protection de la personne hébergée, afin de garantir l’exercice effectif de ses droits45, lors de son accueil dans un établissement ou dans un service social ou médico-social il lui est remis, ainsi qu’à la personne chargée de la mesure de protection juridique ou à la personne de confiance46 désignée47, un contrat de séjour donnant lieu à l’accord de principe ou au refus de la personne accueillie ou de son représentant légal pour le contrôle effectué dans son espace privatif48. Sur chacun de ces points, l’accord ou son refus est consigné par écrit dans le contrat de séjour ou le document individuel de prise en charge et demeure révocable à tout moment.
Le contenu minimal du contrat de séjour ou du document individuel de prise en charge49 est fixé par voie réglementaire selon les catégories d’établissements, de services et de personnes accueillies. Les règles applicables au dépôt de garantie qui peut être demandé par les établissements d’hébergement50 ainsi que les modalités de sa restitution sont définies par décret51. Le non-respect de ces règles fait l’objet de sanctions administratives dont le montant ne peut excéder 3 000 € pour une personne physique et 15 000 €52 pour une personne morale.
Tarification/facturation. Les règles de tarification ont été précisées par la loi qui prévoit aussi la possibilité pour les départements d’aménagement et d’expérimentations53, permettant une certaine flexibilité des tarifs actuellement très encadrés.
Les départements, qui payent l’aide sociale à l’hébergement (ASH) pour permettre l’accueil des plus démunis, plafonnent les prix facturés aux résidents pour l’hébergement ; la loi prévoit qu’ils puissent, à partir de l’an prochain, prévoir plusieurs niveaux de prix pour les résidents, les résidents ayant un budget supérieur pourraient être amenés à payer plus cher.
Les modalités de facturation de frais au décès du résident sont précisées par décret54.
Les nouvelles dispositions, notamment celles concernant l’hébergement et le séjour de la personne accueillie accordent un grand rôle à la personne de confiance.
c – Règlement de fonctionnement de l’établissement et de séjour
Dans chaque établissement et service social ou médico-social un règlement de fonctionnement55 définit les droits de la personne accueillie et les obligations et devoirs nécessaires au respect des règles de vie collective au sein de l’établissement ou du service.
Fonctionnement. Le règlement de fonctionnement est établi après consultation du conseil de la vie sociale ou, le cas échéant, après mise en œuvre d’une autre forme de participation.
Les dispositions minimales devant y figurer et les modalités de sa révision sont fixées par décret en Conseil d’État56.
Personne de confiance. La personne de confiance57 peut avoir un grand rôle à jouer.
La désignation est faite par écrit et cosignée par la personne désignée. Elle est valable sans limitation de durée, à moins que la personne majeure ou la personne de confiance n’en disposent autrement.
Les règles relatives à la personne de confiance58 sont applicables dans le cadre de la loi bien-vieillir59.
Accueil. L’accueil est articulé autour de quelques règles d’évaluation des établissements et de leur mise en place.
Principe d’évaluation : les établissements d’accueil et d’hébergements des personnes âgées peuvent faire l’objet d’évaluations, les organismes pouvant procéder à celles-ci60 sont accrédités par l’instance nationale d’accréditation61 ou par un organisme européen équivalent62.
Accueil de jour : au titre de l’accueil temporaire63, les établissements peuvent assurer un accueil de jour dans des locaux dans lesquels ils assurent un accueil à titre permanent. Lorsque ces établissements disposent d’une capacité d’accueil autorisée inférieure à un seuil fixé par décret, ils peuvent assurer cet accueil de jour pour chacune de leurs places disponibles.
Accueil de nuit : à titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter du 1er juin 2024, le directeur général de l’agence régionale de santé peut, après consultation du président du conseil départemental, instaurer un quota minimal de chambres réservées à l’accueil de nuit dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes et dans les résidences autonomie.
Les modalités de mise en œuvre de cette expérimentation ainsi que la liste des territoires concernés sont déterminées par décret.
Dans un délai de six mois avant le terme de l’expérimentation, le gouvernement remettra au Parlement un rapport d’évaluation de l’expérimentation, aux fins d’apprécier l’opportunité de sa pérennisation64.
Ces règles sont applicables aux couples ou aux personnes qui accueillent habituellement de manière temporaire ou permanente, à temps complet ou partiel, à leur domicile, à titre onéreux, plus de trois personnes âgées65.
Nutrition. Les règles relatives à la quantité et à la qualité nutritionnelle des repas proposés aux personnes hébergées sont fixées par un cahier des charges établi par arrêté des ministres chargés des personnes âgées et de l’alimentation, de même pour les autres prestations fournies66.
2 – Lutter contre l’isolement des personnes âgées
La loi prévoit des mesures destinées à lutter contre l’isolement des personnes âgées.
a – Droit de visite
Les règlements des établissements déterminent les modalités de respect du droit prévu en matière de visites des intéressés67 et garantissent le droit des personnes qu’ils accueillent de recevoir chaque jour tout visiteur de leur choix68. Sauf si le résident en exprime le souhait, aucune visite ne peut être subordonnée à l’information préalable de l’établissement.
b – Animaux
Sauf avis contraire du conseil de la vie sociale69, les établissements70 garantissent aux résidents le droit d’accueillir leurs animaux de compagnie, sous réserve de leur capacité à assurer les besoins physiologiques, comportementaux et médicaux de ces animaux et de respecter les conditions d’hygiène et de sécurité définies par arrêté du ministre chargé des personnes âgées. Ce même arrêté détermine les catégories d’animaux qui peuvent être accueillies et peut prévoir des limitations de taille pour chacune de ces catégories71.
c – Statut de curateur ou de tuteur
La loi inclut un statut de curateur ou de tuteur de remplacement, présenté comme moyen pour éviter l’isolement d’une personne vulnérable.
Les informations relatives aux mesures de sauvegarde de justice, de curatelle, de tutelle et d’habilitation familiale, ainsi que celles relatives aux mandats de protection future72 et aux désignations anticipées73 sont inscrites dans un registre national dématérialisé dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État. Cela entre en vigueur à une date fixée par décret, et au plus tard le 31 décembre 2026.
d – Carte professionnelle
La mise en place d’une carte professionnelle spécialement conçue pour les intervenants au domicile des personnes âgées est mise en place. La délivrance de cette carte est soumise à l’obtention préalable d’une certification ou à la justification de trois années d’exercice professionnel dans des activités d’intervention au domicile des personnes âgées.
Un décret définit les catégories de professionnels bénéficiant de la carte professionnelle, les modalités de délivrance et de son retrait ainsi que les facilités associées à sa détention. L’entrée en vigueur est prévue à compter du 1er janvier 2025. Cette mesure va dans le sens d’une plus grande effectivité de la protection des personnes âgées à domicile victime d’escrocs.
B – Lutte contre la maltraitance
La loi prévoit des sanctions de la maltraitance (2), ce qui commence par son repérage (1).
1 – Repérage de la maltraitance des personnes âgées
La loi acte la mise en place d’une entité chargée de recueillir et de traiter les signalements de maltraitance74 à l’égard des adultes accueillis et vulnérables. Dans chaque département, une instance est chargée du suivi, de l’analyse des alertes et de leur transmission au procureur.
2 – Sanctions pénales
a – Sanction principale
La nouvelle loi prévoit des sanctions pénales avec des risques de concours avec des textes existant et ayant pour objet la protection des personnes vulnérables75.
La notion de maltraitance n’est pas une notion pénale et n’a de sens autonome que dans le Code de l’action sociale et des familles, qui la définit comme un geste, une parole, une action ou un défaut d’action76.
Des faits constitutifs de maltraitances peuvent éventuellement être pénalement répréhensibles77, dans le cadre des infractions contre les personnes vulnérables que sont les personnes âgées, notamment l’abus de faiblesse78 sanctionné par trois ans d’emprisonnement et 375 000 euros d’amende.
De plus, ceux qui s’abstiennent de signaler une situation de maltraitance dont ils ont eu connaissance risquent d’être poursuivi pour non-assistance à personne en danger et encourent une peine de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 € d’amende79.
Ceci est complété par une sanction administrative : une amende dont le montant peut être porté, de manière proportionnée à la gravité des faits constatés, jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires réalisé en France dans le champ d’activité en cause, par le gestionnaire, lors du dernier exercice clos.
b – Sanctions complémentaires
Nul ne peut exploiter ni diriger l’un des établissements, services ou lieux de vie et d’accueil80, y intervenir ou y exercer une fonction permanente ou occasionnelle, à quel que titre que ce soit, y compris bénévole, y exercer une activité ayant le même objet en qualité de salarié employé par un particulier employeur81, ou être agréé, s’il a été condamné définitivement soit pour certains crimes, soit délits en rapport avec la vulnérabilité des personnes âgées82.
L’incapacité prévue s’applique également en cas de condamnation définitive à une peine supérieure à deux mois d’emprisonnement sans sursis pour les délits prévus83 :
Le contrôle des incapacités est assuré par la délivrance du bulletin n° 2 du casier judiciaire84 et par l’accès aux informations contenues dans le fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes85, avant l’exercice des fonctions de la personne et à intervalles réguliers lors de leur exercice.
Lorsque l’incapacité est avérée et qu’il n’est pas possible de proposer un autre poste de travail n’impliquant aucun contact avec des personnes accueillies ou accompagnées, il est mis fin au contrat de travail ou aux fonctions de la personne concernée.
En cas de condamnation, prononcée par une juridiction étrangère et passée en force de chose jugée, pour une infraction constituant, selon la loi française, un crime ou l’un des délits mentionnés, le tribunal judiciaire du domicile du condamné, statuant en matière correctionnelle, déclare, à la requête du ministère public, qu’il y a lieu à l’application de l’incapacité d’exercice prévue, après constatation de la régularité et de la légalité de la condamnation et l’intéressé dûment appelé en chambre du conseil.
Les personnes faisant l’objet d’une incapacité d’exercice peuvent demander à en être relevées86.
Conclusion
Cette loi s’avère finalement d’un apport limité, bien loin d’une véritable loi sur le grand âge.
Notes de bas de pages
-
1.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 2, III et s.
-
2.
L. n° 2024-317, 18 avr. 2024, art. 1 à 10.
-
3.
A. Campéon, « Les mondes ordinaires de la précarité et de la solitude au grand âge », Retraite et société 2015/1, n° 70, p. 83-104.
-
4.
CASF, art. L. 113-3, I, al. 1er, 1re phrase – L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 1.
-
5.
CASF, art. L. 113-3, I, al. 2.
-
6.
CASF, art. L. 113-3, II, modifié par L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 1.
-
7.
CASF, art. L. 113-2, I, al. 2 – L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 2, a) – CASF, art. L. 149-5, Il.
-
8.
CSS, art. L. 223-7-1.
-
9.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 2, III.
-
10.
CASF, art. L. 149-10.
-
11.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 2.
-
12.
CASF, art. L. 1434-12.
-
13.
C. trav., art. L. 52-14-3-1.
-
14.
CASF, art. L. 149-6 – L. n° 2000-321, 12 avr. 2000, art. 27, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.
-
15.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 3.
-
16.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 6.
-
17.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 7.
-
18.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 8.
-
19.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 9.
-
20.
CASF, art. L. 149-7.
-
21.
CASF, art. L. 149-5.
-
22.
CASF, art. L. 149-8 à L. 149-13 – CASF, art. L. 149-5 et s., créé par L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 2.
-
23.
CASF, art. L. 149-6, 1° à 4°.
-
24.
CASF, art. L. 149-8.
-
25.
CASF, art L. 149-1.
-
26.
CASF, art. L. 149-9.
-
27.
CASF, art L. 149-7.
-
28.
CSS, art. L. 922-4.
-
29.
CASF, art. L. 313-12, III.
-
30.
CASF, art. L. 149-11.
-
31.
CASF, art. L. 149-11.
-
32.
CASF, art. L. 149-13.
-
33.
CASF, art. L. 149-4.
-
34.
CASF, art L. 223-5, 2° – L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 7, dernière phrase – CSS, livre II, titre II, chapitre III.
-
35.
CSS, art. L. 1411-6-3 – L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 7, I.
-
36.
CSS, art L. 1411-6-2 – L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 9, 1.
-
37.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 17 à 18, portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie.
-
38.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024.
-
39.
H. Noguès, « Les revenus des personnes âgées. Un enjeu de société », Gérontologie et société 2006/2, vol. 29, n° 117, p. 31-43.
-
40.
M. Richevaux, Les indispensables du régime général des obligations, 2018, Paris, Ellipses, Plein Droit, p. 117-122, fiche 18 et 19, La Subrogation.
-
41.
BOI-ENR-DMTG-10-40-20-20151214, « III. Récupération des aides sociales ».
-
42.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024.
-
43.
C. civ., art. 9.
-
44.
DDHC, art. 2 et 4.
-
45.
CASF, art. L. 311-3.
-
46.
CSP, art. L. 1111-6.
-
47.
CASF, art. L. 311-3 – CASF, art. L. 311-5-1.
-
48.
CASF, art. L. 313-13-1.
-
49.
CSP, art. L. 6121-7.
-
50.
CASF, art. L. 312-1, I, 6° – CASF, art. L. 342-1, 2° à 4°.
-
51.
CASF, art. L. 311-4-1, II bis.
-
52.
CASF, art. L. 312-9.
-
53.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 24, dite bien vieillir.
-
54.
CASF, art. L. 314-10-1.
-
55.
CASF, art. L. 311-7.
-
56.
CASF, art. L. 311-7, modifié par L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 11, version en vigueur depuis le 10 avr. 2024.
-
57.
CSP, art. L. 1111-6, I.
-
58.
CSP, art. L. 1111-6.
-
59.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024.
-
60.
CASF, art. L. 312-8, al. 1er, art. 32 modifié par la loi bien vieillir.
-
61.
L. n° 2008-776, 4 août 2008, art. 137, de modernisation de l’économie.
-
62.
CASF, art. L. 312-8, art. 32 modifié par la loi bien vieillir.
-
63.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024.
-
64.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 27.
-
65.
CASF, art. L. 313-V.
-
66.
C. rur., art. L. 230-5.
-
67.
CASF, art. L. 311-5-2, al. 1er – CASF, art. L. 312-1, I, 6° et 7°, créé par L. n° 2024-317, 8 avr. 2024, art. 11, en vigueur depuis le 10 avr. 2024.
-
68.
CASF, art. L. 311-5-2.
-
69.
CASF, art. L. 311-6.
-
70.
CASF, art. L. 312-1, I, 6°.
-
71.
CASF, art. L. 311-9-1.
-
72.
C. civ., art. 481.
-
73.
C. civ., art. 448.
-
74.
CASF, art. L. 119-2.
-
75.
T. Scherer, « Dispositions pénales de la loi pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie : des signalements, du fichage et des secrets », Dalloz actualité, 6 mai 2024.
-
76.
CASF, art. L. 119-1.
-
77.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024 – CASF, art. L. 119-2.
-
78.
L. n° 2024-317, 8 avr. 2024 – CASF, art. L. 119-2 – C. pén., art. 223-15-2.
-
79.
C. pén., art. 223-6.
-
80.
CSP, art. L. 2324-1 – C. trav., art. L. 7231-1, 1° et 2°.
-
81.
C. trav., art. L. 7221-1.
-
82.
C. pén., Livre II, titre II, chapitre Ier.
-
83.
C. pén., art. 221-6 à 221-6-2 – C. pén., art. 222-19 à 222-20-2.
-
84.
CPP, art. 776.
-
85.
CPP, art. 706-53-7.
-
86.
C. pén., art. 132-21 – CPP, art. 702-1 et 703.
Référence : AJU013u2