Comment ne point parler un peu catalogue ?
Jean-Baptiste Tenant de Latour (1779-1862) fut nommé en 1846 bibliothécaire du roi Louis-Philippe Ier, au palais de Compiègne. La somme de ses connaissances a été réunie dans ses Mémoires d’un bibliophile parues en 1861. Cet ouvrage se présente sous forme de lettres à une femme bibliophile (la comtesse de Ranc… [Le Masson de Rancé]), et se compose de nombreuses réflexions sur la bibliophilie, les écrivains et le monde des lettres. Nous poursuivons la publication de la Lettre XIII consacrée à « De Boze ».
Ryan
« En 1753, et après la mort de de Boze, le libraire Gabriel Martin, chez lequel on avait déjà indiqué la publication dont nous venons de parler, fut chargé de rédiger le catalogue usuel, volume in-8, sur lequel on trouve assez souvent portés à la main, non pas les prix de vente, car l’ensemble de cette bibliothèque ne fut pas vendu en détail, mais des prix d’estimation établis par Martin lui-même, à la demande des héritiers. Le président de Cotte, dont le catalogue a eu aussi, depuis, son importance, et MM. Boutin frères, firent l’acquisition des livres de de Boze (au moins de la plus grande partie) moyennant le prix de quatre-vingt mille francs. L’année d’après, G. Martin publia un second catalogue des livres qui restaient à vendre, en les faisant valoir de son mieux dans une sorte d’avis au lecteur ; mais ce second catalogue, de 1754, lorsqu’on y a porté les prix, prouve, en général, que la plupart de ceux qui avaient été fixés par Martin en 1753 ne purent pas être réalisés.
Permettez-moi ici, Madame, je vous en supplie, une toute petite digression critique. De la critique à propos d’un catalogue, cela semble bien un peu étrange au premier abord ; mais, au bout du compte, je n’écris point là une lettre Demoustier (1760-1801, auteur des Lettres à Émilie sur la mythologie), il ne s’agit chez nous ni de Castor ni de Pollux, et puisqu’en définitive, il s’agit d’un cabinet de livres, il n’y a véritablement pas moyen de ne point parler un peu catalogue.
Un homme dont chacun a pu apprécier dans ces derniers temps le grand savoir en bibliographie et la parfaite bienveillance, le si regrettable M. Villenave, a dit dans une occasion : « L’on trouve aussi à la fin (il s’agit du catalogue de 1753) un catalogue de quatorze pages appelé le Petit Boze ; les livres qui le composent, et parmi lesquels se trouvait… (je suis forcé, en vérité, Madame, malgré mon grand éloignement pour toute suppression, de laisser en blanc, dans une lettre qui vous est adressée, le titre rapporté par M. Villenave) la **** de l’Arétin, édition originale in-16, et dont on ne connaît que cet exemplaire, ou plutôt que cette indication, furent vendus en 1754 par le libraire Martin.
J’aurais dans tous les cas, Madame, fait mention ici de ces quatorze pages : car on ne les trouve presque jamais à la suite du catalogue, et, par conséquent, elles rentrent, comme rareté du moins, dans le domaine de l’amateur. » (À suivre)
Référence : AJU014e5