Dans les forêts de Sibérie
Théâtre de la Huchette
Le prix Renaudot 2019 qu’il a reçu pour La panthère des neiges, son dernier ouvrage, a encore accru la notoriété de Sylvain Tesson, l’écrivain baroudeur ou plus exactement le baroudeur écrivain.
Ce prix lui avait été refusé en 2011 pour un autre ouvrage : Dans les forêts de Sibérie, qui avait obtenu le prix Médicis essai.
Dans les deux cas, il s’agit d’un récit autobiographique, celui d’un séjour, ici dans les montagnes tibétaines, là en Sibérie, entre janvier et juillet 2010, près du lac Baïkal, dans des conditions climatiques extrêmes.
Cet adversaire de l’immobilité, « préparation générale de la mort » a – provisoirement ! – fait le choix de l’ermitage et de l’inaction.
Isolé dans une cabane à 30 km d’une autre habitation, les jours se succèdent avec le minimum d’activités : la pêche, le bois à couper… Fragile refuge mais refuge quand même, face à l’immensité du lac et de la forêt que cette cabane avec un poêle, un lit, un réchaud et des étagères emplies de livres. Une situation idéale pour analyser ce que cette solitude, ce silence, cette autre dimension de l’espace et du temps apportent à sa liberté et à sa quête du sens à donner à la vie.
La seule action c’est le « lâcher prise » et l’écriture.
En 2016, un film fut tiré de ce livre pour les besoins duquel un fugitif russe fut rajouté, ce qui n’est pas le cas de cette adaptation théâtrale signée par William Mesguich qui, seul en scène, fait revivre le soliloque de l’ermite. Sa prestation est tout à fait remarquable, comme l’avait été, dans la même veine, son adaptation de Construire un feu de Jack London. S’il respecte la misanthropie et le narcissisme provocateur du personnage, il fait ressortir son besoin de communiquer avec l’humanité, son idéalisme, sa volonté de changer le monde.
Les aphorismes philosophiques, parfois ordinaires, prennent une dimension poétique grâce à une interprétation mêlant lassitude, retenue et éclats de colère.
Une grande exigence dans la transposition littéraire au théâtre et la complicité dans le respect dû au verbe qui se fait chair…