Du Clos Lucé au Louvre

Publié le 28/09/2016

Le château du Clos Lucé et ses jardins, avec, au premier plan, l’hélice volante de Léonard de Vinci.

Léonard de Serres

Visiter le château du Clos Lucé, c’est retrouver une page d’histoire de France et de l’histoire de l’art. Un moment émouvant puisque cette demeure édifiée en 1471, devenue résidence de culture et d’agréments pour les rois, a accueilli en 1516 et jusqu’à sa mort en 1519 Léonard de Vinci, invité par François Ier.

Le souvenir de ce génie demeure intact par la volonté des propriétaires, la famille Saint Bris, qui, après avoir acquis cette résidence en 1854, n’a cessé, en particulier depuis soixante ans, de réhabiliter les lieux et de donner vie à la mémoire du peintre.

Il y a 500 ans, Léonard arrivait de Rome en France à dos de mulet avec, dans ses bagages, trois tableaux qu’il voulait conserver avec lui : La Joconde, Vierge à l’Enfant avec sainte Anne, inachevé et qui le restera, et Saint Jean-Baptiste, dont il a fini l’exécution au Clos Lucé. Afin de célébrer cet anniversaire est organisée l’exposition : « Du Clos Lucé au Louvre, les trois chefs-d’œuvre de Léonard de Vinci » ; elle évoque l’histoire de la création de ces œuvres en Italie et leur parcours d’Amboise à Paris.

Peintre, sculpteur, musicien, philosophe, Léonard de Vinci, élève de Verrocchio, symbolise l’art et les sciences ; il devance largement son époque. Studieux, il a étudié l’anatomie, le modelé et bien d’autres domaines divers. L’exposition propose un regard contemporain sur ces créations majeures qui suscitent depuis cinq siècles l’admiration et des interprétations variées. Ces œuvres auxquelles tenait tant le peintre sont réalisées avec ce sfumato vaporeux qui enveloppe les formes en des tons fondus, unissant l’être et la nature dans une subtile entente entre ombre et lumière. Grâce aux moyens modernes, on décèle parfois le dessin sous la peinture et des modifications. Un fort précieux et intéressant manuscrit prêté par la Bibliothèque nationale de Naples relate, de la main d’Antonio de Beatis, secrétaire du cardinal d’Aragon, la visite que ce dernier a rendu à Léonard de Vinci, un précieux témoignage.

Kérozen, Gioconda, 1996, Museo Ideale Leonardo Da Vinci.

Léonard de Serres

L’exposition présente le résultat d’études scientifiques menées par le Centre de recherche et de restauration des musées de France qui livrent quelques secrets sur ces tableaux, en particulier La Joconde qui intrigue les historiens de l’art depuis cinq siècles avec son sourire énigmatique et qui est source d’écriture pour les romanciers. Plusieurs représentations de cette jeune femme si célèbre réalisées dans différents pays (elle deviendra un mythe au XIXe siècle) sont exposées. L’une d’elles est exécutée par Salai, élève privilégié de Léonard de Vinci. On admire aussi la qualité de matière d’une Joconde nue, un temps attribuée à Léonard et finalement de la main de Francesco Melzi en 1772, peut-être d’après un dessin du maître. Les artistes modernes et contemporains sont également inspirés par cette jeune femme qui intrigue. L’exposition réunit des œuvres de Fernando Botero, qui la recrée dans son écriture particulière aux personnages opulents, une forme d’hommage, et d’autres autour de lui. Ce tableau a suscité la dérision chez Marcel Duchamp qui lui ajoute une moustache en 1919, puis la rase en 1965 ! Les cubistes, les surréalistes emprunteront cette image pour réaliser peintures, collages sous-tendus parfois d’une idée poétique.

Léonard de Vinci incarne l’idéal humaniste et se révèle un extraordinaire novateur dans tous les domaines. Il fut également un merveilleux dessinateur.

À visiter encore, les ateliers restaurés et restitués selon le témoignage du cardinal d’Aragon : chevalet, objets, pinceaux, autant de souvenirs du travail du maître dans ces lieux qui créent une véritable émotion. Déambuler dans le vaste parc animé de quelques-unes des machines imaginées par Vinci, visiter le « jardin de Léonard », autant de moments d’admiration pour ce génie visionnaire.

LPA 28 Sep. 2016, n° 119j2, p.14

Référence : LPA 28 Sep. 2016, n° 119j2, p.14

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