Héroïnes romantiques au musée de la Vie romantique

Publié le 26/04/2022

Charles de Steuben (1788-1856), La Liseuse (1829).

RMN-Grand Palais/Gérard Blot

Elles se nomment Sapphô, Marie Stuart, Ophélie, Atala, Héloïse… Mais qui sont-elles réellement ? Plus ou moins célèbres, ces femmes ont connu une vie dramatique et ont ancré dans l’imaginaire collectif de leur époque une certaine vision du féminin. Et comment sont-elles représentées dans les arts au XIXe siècle ? C’est pour explorer et répondre à ces deux questions que le musée de la Vie romantique propose depuis le 6 avril 2022 et jusqu’au 4 septembre prochain l’exposition « Héroïnes romantiques ».

Pas moins d’une centaine d’œuvres sont exposées : toiles, sculptures, manuscrits, objets d’art pour tisser des liens entre les Beaux-arts, la littérature et les arts de la scène qui jouent au XIXe siècle un important rôle dans la diffusion d’un héroïsme féminin aux tonalités tragiques.

Décalées par rapport au XXIe siècle, les œuvres choisies et présentées mettent en scène des femmes diaphanes, fragiles, dénudées, résignées face à un destin inéluctable. Pour ce sujet peu exploré, aucune œuvre réellement majeure qui aurait marqué les esprits ; mais des peintures de Théodore Chassériau, d’Eugène Delacroix, d’Antoine-Jean Gros, de Léon Cogniet, de Léopold Burthe qui sont autant de témoignages des fortes passions vécues par ces femmes ; des passions jusqu’au trépas…

Le parcours de l’exposition se déroule en trois temps : héroïnes du passé, héroïnes de fiction, héroïnes en scène. Parmi les héroïnes du passé, nombreux ont été les peintres inspirés par la mort de Sapphô, à l’instar d’Antoine-Jean Gros qui peint la poétesse de Lesbos, sa lyre dans les bras sur le point de se jeter dans le vide par désespoir amoureux. Après le mythe d’Antigone, c’est autour du martyre de Jeanne d’Arc sur le bûcher peint par Alexandre-Évariste Fragonard et des amours interdites entre Héloïse et Abélard de diffuser le romantisme de vies ainsi sacrifiées…

Les écrits de Chateaubriand, d’Hugo, de George Sand, de Madame de Staël inventèrent des personnages de fiction : Atala, Esmeralda, Corinne, Velléda, Juliette, Mathilde ou Lélia, toutes des figures féminines majeures du romantisme. Ces héroïnes de fiction expriment l’impossible conciliation entre un ordre social bien établi et la liberté à vivre leurs passions. Pour Flaubert, Emma Bovary imprégnée de lectures romantiques se « rêve » elle aussi en héroïne amoureuse prête à mourir.

Le XIXe siècle est une époque majeure pour le ballet, l’opéra, le théâtre. Et certaines artistes de devenir des femmes adulées (Mesdemoiselles Rachel et Mars, Maria Malibran, Marie Taglioni) car elles jouaient des rôles de tragédiennes.

Les opéras mettent en scène des héroïnes sacrifiées qui ne survivent quasiment jamais aux héros. L’Othello de Rossini célèbre Desdémone, interprétée par les cantatrices Maria Malibran et Giuditta Pasta, peintes ici par François Bouchot, Henri de Caisne et François Gérard.

L’exposition se glisse à merveille dans l’hôtel Scheffer-Renan qui, au cœur du quartier de la Nouvelle Athènes, est à lui seul un petit bijou de romantisme. Des arbres centenaires, une allée pavée, un jardin de roses mènent à un petit pavillon à l’italienne et à deux ateliers d’artistes. À la Monarchie de juillet, le Tout-Paris intellectuel et artistique fréquenta ce lieu appelé alors « l’enclos Chaptal » : Delacroix, Sand, Chopin, Liszt, Berlioz, Tourgueniev, Dickens…

Et après la visite, rien de mieux que de profiter du jardin autour d’une tasse de thé ou d’un café, le salon Rose Bakery accueillant les visiteurs romantiques du XXIe siècle.

• Musée de la Vie Romantique, 16 rue Chaptal, 75009 Paris.

Plan
X