L’Amérique d’Edward Hopper

Publié le 27/01/2020

L’Amérique d’Edward Hopper

Gas, Edward Hopper.

Heirs of Josephine Hopper / 2019, ProLitteris, Zurich – 2019 Digital image, The Museum of Modern Art, New York / Scala, Florence

Une exposition de cet artiste considéré comme l’un des peintres américains les plus importants du XXsiècle constitue toujours un événement. Tant son œuvre insolite donne une vision réaliste et rêvée de l’Amérique.

Les peintures et aquarelles réalisées entre 1910 et 1960 présentées à la Fondation Beyeler font revivre l’atmosphère singulière des compositions d’Edward Hopper : paysages urbains ou de nature, scènes intimistes, réinterprétés entre espace et lumière. Avant de peindre il est tout d’abord illustrateur puis au cours d’un séjour à Paris aux environs de 1908-1910 il découvre les Impressionnistes qui influenceront sans doute sa décision de se consacrer à la peinture à partir de 1920. Entre-temps il grave aussi des scènes quotidiennes en un style précis.

Lumière et ombre savamment réparties, palette colorée, dessin précis légèrement géométrisé impressionnent d’emblée. Peintre de paysages urbains ou de la campagne américaine, Hopper évoque aussi le charme de maisons baroques isolées, surgies de nulle part tout comme des stations-service bordant une route déserte. Œuvres simples en apparence qui pourraient rappeler les images d’Épinal et cependant complexes ; elles annoncent l’Hyperréalisme dans la traduction du réel mais Hopper va bien au-delà avec cette peinture emblématique, silencieuse.

Lorsqu’il évoque la ville, ce sont le plus souvent des instants captés sur le vif, la banalité du quotidien, ainsi « Chop Suey » 1928 où deux jeunes femmes conversent au café, évoquent leurs secrets et un rayon de soleil illumine la table. L’espace est toujours présent tant à l’extérieur qu’à l’intérieur, dans des chambres dépouillées, aux murs nus tandis qu’une fenêtre ouverte apporte la lumière, la vie. Une silhouette féminine est souvent présente, assise sur son lit, pensive. Sous le pinceau de l’artiste les êtres souvent enfermés dans leur solitude, leur ennui. Tout semble paisible, à sa place mais autre est peut-être la réalité. Le mystère enveloppe ces scènes de tous les jours qui, tout à coup, paraissent étranges avec leurs personnages immobiles, presque figés. Il règne là comme une fatalité.

L’artiste surprend volontiers les êtres à travers une vitre ; il donne sa vision des petites villes américaines avec leur environnement particulier. Ou bien il scrute la vaste campagne souvent déserte ponctuée parfois d’une station-service. L’écriture est précise, sans détail inutile et le peintre apparaît comme un grand coloriste. Omniprésent, le silence engendre une certaine mélancolie qui peut devenir obsédante. Les cadrages personnels contribuent à l’originalité de cette œuvre.

LPA 27 Jan. 2020, n° 151e9, p.22

Référence : LPA 27 Jan. 2020, n° 151e9, p.22

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