Essonne (91)

Paul Durand-Ruel et le post-impressionnisme

Publié le 16/09/2021

Paul Durand-Ruel laisse le souvenir d’un grand marchand d’art, ami des peintres qu’il a soutenus. Grâce à lui ils ont pu se faire connaître, en particulier les post-impressionnistes. Parti trop tôt, il n’a pu assurer leur succès.

Henry Moret, Maxime Maufra, Albert André Georges d’Espagnat et Gustave Loiseau sont peu connus du grand public car aucune exposition collective de leurs œuvres n’a été réalisée. La présentation actuelle de leur peinture dans la Propriété Caillebotte à Yerres (91) a pour but de les réunir et de mettre en lumière le talent de ces artistes post-impressionnistes tout à la fois proches et différents. Quelques-uns se sont consacrés au paysage et aux peintures marines, ainsi Maufra, Loiseau ou Moret demeurant attachés à l’impressionnisme. D’autres ont été séduits par le synthétisme de Gauguin. Plus loin d’eux Espagnat et André ont peint des scènes de genre. Tous ont apprécié leur marchand, ont noué avec lui des relations professionnelles autant qu’amicales.

Les soixante toiles figurant sur les cimaises n’ont, pour certaines, jamais été montrées, c’est donc une vraie découverte. Un portrait très naturel de Durand-Ruel par Renoir ouvre l’exposition qui se situe sur deux niveaux. Au premier étage figurent trois paysagistes : Loiseau, Maufra, Moret qui aiment les bords de mer en Normandie et ceux de Bretagne plus sauvages, ils traduisent leur caractère particulier chacun selon son tempérament. Parmi les quatorze œuvres de Loiseau, l’on découvre des vues de Rouen et de Dieppe en des compositions structurées adoucies par une touche légère posée en un réseau de traits parallèles et entrecroisés dans une intéressante originalité. À l’instar de Monet, il évoque les paysages selon les saisons, par exemple Pont de chemin de fer à Pontoise sous la neige, dans une atmosphère bleutée. Proche de Monet, Henry Moret peint de nombreux sites bretons aux couleurs intenses. Dans Temps calme à Ouessant, il oppose un fort contraste entre mer et rochers. On le devine fasciné par l’eau. Gauguin a eu également une certaine influence sur son travail lors du séjour du peintre à Pont-Aven. Il crée un compromis entre impressionnisme et divisionnisme en une écriture vigoureuse. Également admirateur de la mer, Maufra compose de nombreuses vues du littoral. Le regard est souvent attiré par le fort dialogue entre mer et rochers. Parfois il évoque seulement les falaises animées de personnages ou encore un échouage de bateau avec vérité. À Pont-Aven, lieu aimé des peintres, il rencontre Gauguin et Sérusier mais il demeurera indépendant, aimant une palette claire pour ses paysages synthétiques. Ces artistes peignent la nature pour elle-même : la mer se fracassant contre les roches ou un environnement plus calme et souvent sauvage typique de la nature bretonne.

Albert André, Femme aux paons, 1895.

Photo Archives Durand-Rue

Exposées au rez-de-chaussée, les compositions d’Albert André et Georges d’Espagnat révèlent une autre approche. À la mer et son environnement, ils préfèrent les portraits intimistes, les scènes familières. Après des études à l’Académie Julian, André exécute des tableaux remarqués par Renoir. Il l’encourage et le présente à Durand-Ruel qui, à son tour, l’apprécie. Il réalise une peinture de caractère : quelques aspects de la vie urbaine et la nature méditerranéenne dans une rigueur discrète et dont il capte la lumière. Délicats sont ses portraits de La Femme en bleu ou Femme au paon parmi les fleurs. Une réelle poésie se dégage de ses toiles. Georges d’Espagnat était proche de Maurice Denis, Bonnard et Vuillard sans en être influencé. Ses paysages à tendance impressionniste modifiée par le contact avec les Fauves sont peints en une gamme colorée, ensoleillée et lumineuse qui recrée l’atmosphère du Midi comme dans Crique au Lavandou sous l’éclairage doré du couchant. La couleur est le moteur de sa création et lui permet des audaces inattendues.

Proches de la nature, ces artistes en offrent un panorama diversifié et de qualité, ils méritent d’être découverts ou mieux connus.

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