Un château savoyard
Ce miroir dans lequel se reflète la bibliothèque, est estimé 2 000/3 000 €
Beaussant Lefèvre
La pièce haute de plafond contient une importante bibliothèque chargée de volumes reliés, comme on les aime. Ces rayonnages se reflètent dans le miroir suspendu au-dessus d’une cheminée en marbre blanc. Un canapé, posé contre la partie basse du meuble, invite à s’y asseoir, un livre ouvert dans les mains. Par exemple, Reliquiæ (Caen, imprimerie, de A. Hardel, 1855, in-16), par Jules Barbey d’Aurevilly et Eugénie de Guérin. Cet exemplaire relié en parchemin rigide à minces recouvrements, le dos lisse, les filets dorés cloisonnant le dos, portant notamment en écoinçons sur les plats, les initiales « J. B. D’A. » dorées dans un médaillon doré au centre du plat supérieur, sera mis en vente le 23 septembre 2024, à Drouot, par la maison Beaussant Lefèvre, assistée par Alain Nicolas et Pierre Gheno, lors de la vente du château de Nernier en Haute-Savoie. Cette édition originale a été tirée hors commerce à seulement 50 exemplaires sur hollande, imprimée en décembre 1855 aux frais de Guillaume-Stanislas Trébutien, orientaliste, médiéviste, érudit normand, conservateur à la bibliothèque de Caen, et ami proche de Jules Barbey d’Aurevilly. Il est considéré comme étant un « Bijou bibliophilique pour les happy few ». Ces Reliques comprennent, précise l’expert, « les lettres admirables de sensibilité et de style qu’elle écrivit à son frère bien-aimé, le poète Maurice de Guérin, le journal poignant de douleur et de mysticisme qu’elle tint après la mort prématurée de celui-ci. »
À l’opposé du miroir, la bibliothèque se poursuit jusqu’à une porte-fenêtre donnant sur un jardin qui plonge dans le lac Léman. Le catalogue comprend un peu moins de six cents lots de mobilier, objets et tableaux et une cinquantaine réunissant les livres. Ceux-là concernent pour la plupart l’histoire de la Savoie et de la maison de Sales. De Charles-Auguste de Sales, Le Pourpris historique de la Maison de Sales de Thorenc en Genevois (Annessy, par Jacques Clerc, 1659, petit in-folio), relié en parchemin semi-rigide, est estimé 800/1 000 €. On ne connaît que sept exemplaires de cet ouvrage composé par le neveu et successeur de saint François de Sales au siège épiscopal de Genève, fixé à Annecy. Charles-Auguste de Sales (1606-1660) avait publié plusieurs autres ouvrages, parmi lesquels une Vie de saint François de Sales (1634).
Tous ces livres sont reliés aux armes des comtes d’Antioche. Ce qui a aussi conduit à nommer le château de Nernier, château d’Antioche. La légende laisse croire qu’il est rattaché aux duchés d’Antioche des anciens États latins d’Orient. Cette maison a, certes, appartenu aux Savoie, qui participèrent à la deuxième croisade, mais ensuite à la famille de Nernier qui lui donna son nom. Plusieurs propriétaires se succédèrent, jusqu’à son achat au XIXe siècle par Charles de Brotty, appartenant à la noblesse de Savoie. Ce dernier épousa Percevaude de Saint-Jeoire, dite d’Antioche, dont il prit le surnom. Par habitude ou tradition, on donna le nom d’Antioche au château qui évoque le duché disparu des croisades.
Référence : AJU015c3