En Thessalie (IV)
Quoi qu’on en dise, la Grèce est notre mère. Les lieux, les pierres et les monuments sont comme un rappel de notre civilisation. René Puaux (1878-1937) publia un Nouveau guide de la Grèce, en 1937, à la Société française d’éditions littéraires et techniques. « L’intérêt de ce livre m’est apparu, un soir d’été, au cours d’une promenade sur l’esplanade du Phalère », disait-il. Il n’avait trouvé dans aucun guide les récits des traditions légendaires du Phalère et son histoire. Il résolut de « rédiger un guide de tout autre ordre, celui du Touriste-Poète », qui ne manque pas d’ironie. Nous poursuivons notre promenade en Thessalie. BGF
BGF
« Apollon vint se purifier dans la Vallée du Tempé, après avoir tué le serpent Python. Son sanctuaire était dans un des vallons latéraux de la rive droite. Tous les huit ou neuf ans, une théorie était envoyée de Delphes pour y cueillir les lauriers destinés aux vainqueurs des jeux pythiques. Ajoutez un laurier de Tempé à votre herbier héroïque. Ne prenez point de laurier-cerise, mais du Laurus-nobilis qui, d’ailleurs, est devenu rare.
Volo (l’ancienne Lolehos). En sortant de Volo, par la route d’Halmyros, vous rencontrez un petit torrent : l’ancien Anauros. C’est sur ses bords que Jason rencontra par deux fois la reine du ciel, Héra, la première fois sous les traits d’une vieille femme qu’il transporta galamment sur l’autre rive, et, la seconde fois, dans toute sa gloire, pour recevoir de lui le même service. Jason laissa tomber dans le fleuve une de ses sandales, et l’oracle, suivant lequel Pelias serait détrôné par un homme déchaussé d’un pied, se trouva réalisable.
Vous aurez noté que le bureau du télégraphe se trouve à l’angle des rues Jason et Gambetta. L’imprévu du second nom vous aura détourné du passé millénaire. Je me permets de vous y ramener, en vous rappelant que les forêts du voisin Pélion fournirent la charpente du vaisseau Argo qui conduisit les Argonautes à la conquête de la toison d’or. Son chantier fut à Pegasae, de l’autre côté de la baie. C’est ici que Jason ramena son épouse Médée.
Iolchos fut, suivant l’historien Apollodoros, fondée par Cretheus, le grand-père de Jason, dont Æson fut le père. Ce Cretheus eut une épouse, nommée Tyro, qui le trompa avec Poséidon. Les dieux étaient alors, comme vous l’avez déjà noté, irrésistibles. Des cinq enfants, Pelias et Nelée furent de sang divin et Æson, Phérès et Amythaon, de sang royal. Ces origines différentes créèrent de violentes complications familiales qui aboutirent à l’expédition des Argonautes.
On dansait, ici et dans le voisinage, la Carpéa, excellent exercice de mobilisation rapide. L’un des danseurs déposait ses armes et faisait mine de labourer et semer tout en regardant fréquemment derrière lui. L’autre danseur arrivait en se dissimulant. Le premier bondissait, reprenait ses armes et le pseudo-combat se livrait en cadence, au son des flûtes, autour de la charrue et des bœufs.
Le mont Pelion est celui que les géants voulurent placer sur le mont Ossa (ou inversement) en y ajoutant l’Olympe, pour escalader le ciel. Près de sa cime était l’antre du centaure Chiron, le plus illustre éducateur de l’antiquité. Ce collège montagneux, dirigé par un homme-cheval, devait être plus sportif qu’intellectuel. Achille y fit de la chasse à courre.
Sur le sommet du Pelion, les dieux assistèrent aux noces de Thétis et de Pelée, un couple dont il vous est parlé plus longuement à l’article Alkhani. C’est au dessert qu’Eris (la discorde), qui n’avait pas été invitée, lança sur la table la fameuse pomme « à la plus belle » qui mit dans l’embarras le premier juge des concours de beauté : le berger Pâris ».
(À suivre)