Olivier Christen installé au poste de procureur national antiterroriste
Mercredi 19 juin, le tribunal judiciaire de Paris a procédé à l’installation du nouveau procureur national antiterroriste Olivier Christen, en présence du garde des sceaux Éric Dupond-Moretti.
Alors que le renseignement américain alerte sur un risque terroriste exceptionnellement élevé en France à l’occasion des jeux olympiques, son nouveau chef, Olivier Christen, 52 ans, a été installé dans ses fonctions mercredi 19 juin. A sa sortie de l’ENM en 1999, il débute sa carrière comme juge d’instruction à Pontoise. Par la suite, il occupera des postes tant au siège qu’au parquet, et fera également des aller-retours réguliers en administration centrale, d’abord à la Chancellerie sous Dominique Perben, puis Jean-Jacques Urvoas, puis auprès des premier ministres Manuel Valls et Bernard Cazeneuve avant de devenir directeur des affaires criminelles et des grâces en 2020 sous Nicole Belloubet. Il connait déjà le parquet de Paris pour y avoir été procureur adjoint en 2017.
« Rester attentifs, sans alarmisme mais sans naïveté »
Le PNAT c’est 400 dossiers en cours dont l’essentiel concerne l’islamisme radical, le terrorisme basque et corse ainsi que l’ultra-droite, a rappelé le président du tribunal judiciaire Stéphane Noël, lors de son allocution d’accueil. L’enjeu ? Rien moins que « l’existence même de la démocratie et de ses valeurs », a-t-il souligné. Depuis sa création par la loi du 23 mars 2019, les dossiers traités par le PNAT ont donné lieu à 250 jugements rendus en première instance devant la juridiction correctionnelle et 83 procès aux assises. Sept décisions ont également été rendues dans des dossiers de crimes de guerre et de génocide.
« Nous devons rester attentif, a déclaré pour sa part le nouveau chef du parquet antiterroriste, sans alarmisme mais sans naïveté » à l’égard d’un phénomène qui a engendré la mort directe de 275 personnes en France depuis 2012. Parmi les nouvelles menaces, Olivier Christen a évoqué le séparatisme violent en Corse, les nouvelles formes de groupes ultra, et les actions paraétatiques. Mais c’est bien entendu la menace djihadiste qui reste « la plus lourde ».
Le PNAT a ouvert 27 enquêtes depuis le 1er janvier, contre 8 l’an dernier. Elles portent essentiellement sur des individus isolés, sans contact avec les organisations terroristes, qui n’envisagent pas de commettre des actes de grande ampleur mais sont susceptibles de « passages à l’acte mortifères » en lien avec l’actualité internationale.
Les Jeux olympiques, une « cible de haut niveau »
Parmi les « points d’attention » figure bien sûr la tenue des Jeux olympiques qui constituent d’un point de vue terroriste « une cible de haut niveau pour tout segment idéologique ». Le PNAT est déjà en ordre de marche, en lien avec tous les parquets de France et plus particulièrement ceux abritant des lieux olympiques que sont Bobigny, Versailles, Nanterre, Marseille, Nice et Lille.
Autre sujet de préoccupation, ce qu’il qualifie de « sociologie nouvelle djihadisme », à savoir l’implication croissante des mineurs ou très jeunes adultes, nés et scolarisés en France, dans les projets terroristes. Ils ont parfois moins de 15 ans, vivent encore chez leurs parents et font l’objet d’une propagande qui les vise spécifiquement. Un risque qui s’est illustré dans la presse le jour même de l’installation du nouveau procureur avec la révélation par La Nouvelle République de la mise en examen d’un mineur âgé de 15 ans qui s’intéressait aux explosifs et diffusait des vidéos terroristes sur les réseaux sociaux. Ces profils imposent une « prise en charge parfois très lourde » qui nécessiterait un allongement des placements sous contrôle judiciaire aujourd’hui limités à un an ce qui est très peu, estime Olivier Christen.
Émergence d’une double qualification de terrorisme et de crimes contre l’humanité
Le PNAT s’occupe également des détenus et des sortants, soit actuellement 453 personnes dont 250 en détention, sachant que 75 personnes environ sortent tous les ans de prison. Pour ceux-là, Olivier Christen a appelé de ses vœux « des évolutions législatives permettant de sanctionner les manquements au suivi renforcé ». Plusieurs procès sont à venir, donc celui de l’assassinat de Samuel Paty, de l’attentat de la rue Appert, de celui de Condé-sur-Sarthe ou encore des journalistes otages de Daech. Le délai moyen d’audiencement des dossiers terroristes est de 16 mois, le nouveau chef du parquet estime qu’il faut le ramener à 12.
Il a enfin évoqué parmi les nouveaux défis, les affaires relevant de la double qualification de terrorisme et de crimes contre l’humanité. Le premier procès de ce type, concernant le génocide yazidi en 2014, se tiendra en 2026. Au total, le PNAT suit 180 procédures dans le pôle relatif aux crimes contre l’humanité, concernant 35 pays.
En 2023, il comptait 30 magistrats.
Référence : AJU446852