Épaves maritimes : une notion « janusienne » à deux régimes pour le retirement

Publié le 13/06/2024
Épaves maritimes : une notion « janusienne » à deux régimes pour le retirement
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L’époque des trésors maritimes, et de ses inventeurs, est révolue, cédant d’abord la place en droit aux règles sur les épaves maritimes et, ensuite, à la notion de « bien culturel maritime », lorsque l’épave maritime présente un caractère archéologique. Qu’elle soit à caractère ou ordinaire, les conditions de son retirement restent étroitement dépendantes de la date de sa découverte et de la zone où elle est située. Seulement, tel un Janus bifront, marqué de deux faces possibles, son devenir reste dépendant de ce caractère dual. L’épave « à caractère » est fréquemment soustraite de son environnement sans autorisation, au grand dam de l’archéologie et des conservateurs des musées, alors que l’épave « ordinaire », elle, a vocation à être laissée à l’abandon, pour le malheur de la navigation et de l’environnement. Dans les deux cas, le processus d’encadrement laisse place à certaines hésitations et un goût d’inachevé.

L’épave maritime renvoie souvent à un récit où s’entremêlent évocation de faits et de personnages transformés, au fil du temps, en une sorte de légende sur fond de réalités historiques. Quel plus bel exemple que l’affaire dite du « trésor de Lava » (« trésor Corse ») où, malgré les fouilles et autres investigations scientifiques du département des recherches archéologiques subaquatiques et sous-marines, le doute persiste sur les circonstances exactes du lieu et du moment de la découverte d’un ensemble exceptionnel de monnaies et d’objets en or romains1 ?Faute de preuves incontestables, mais sans convaincre à ce jour leurs juges2, ses découvreurs continuent d’entretenir le mystère sur cette découverte en variant, suivant les époques, à la manière d’un romancier, le fil du récit de cette fabuleuse aventure. Le « trésor de Lava » n’a-t-il pas provoqué « la fièvre de l’or romain chez les plongeurs corses »3 ?

À la fois fabulation de l’aventure maritime à travers la chasse aux trésors, fondée sur la croyance que toute trouvaille sans maître appartient à celui qui la sort de l’eau, et témoignage de catastrophes maritimes majeures, l’épave maritime symbolise à bien des égards le mythe antique de la création, entre vie et mort.

Pendant longtemps pourtant, ne pas remonter à la surface les navires immergés était de mise ; cela permettait aux populations locales de récupérer tout ce que la mer pouvait rejeter sur ses rivages, que ce soient des parties d’un navire ou de sa cargaison4. Si les fondements du corpus juridique français sont lointains5, la surabondance de textes par suite adoptés, et dont les dispositions ne sont pas clairement conciliées6, a vite embarrassé.

Ainsi en est-il particulièrement de la partie traitant des naufrages, bris et échouements, relevant du titre IX du livre IV de l’Ordonnance sur la marine de 1681, dans lequel se trouvait traitée la question des épaves, qui a fait l’objet de modifications au fil du temps7, au gré des « courants » législatifs et réglementaires. Avec la déclaration royale de 1735, puis celle du 10 août 1770, le découvreur était autorisé à prélever certaines parts des objets trouvés en mer ou sur la grève8 ou des ancres tirées du fond de la mer. Quant aux navires rejetés sur la côte après naufrage, ils étaient attribués au roi, à défaut de revendication et de prise en charge des frais de sauvetage par le verus dominus dans un délai d’un an et un jour . Déjà, ces textes réglaient principalement les problèmes de répartition des produits de l’épave, à savoir les conflits entre les anciens propriétaires de l’épave, le Trésor royal et les sauveteurs de l’épave9.

La Révolution française imposa ses vues, nouvelles et créatrices. La loi des 13-20 avril 1791 a supprimé le « droit d’épave » des seigneurs10. Puis, le Code civil, dès 1804, prévoit à l’article 717 que « les droits sur les effets jetés à la mer, sur les objets que la mer rejette, de quelque nature qu’ils puissent être, sur les plantes et herbages qui croissent sur les rivages de la mer, sont aussi réglés par des lois particulières ». Ces dispositions claires tendent en conséquence à écarter « toute idée faisant de l’État le successeur des seigneurs et des rois dans leurs droits régaliens »11. En l’absence de lois particulières, selon les termes de l’article 717 dudit code, il semble que l’adverbe « aussi » employé dans cet article renvoie plutôt à l’article précédent, l’article 716 du Code civil, sur la découverte de trésors par le pur effet du hasard.

Même parmi les textes postérieurs12, et jusqu’en 1961, aucune loi particulière n’a véritablement établi les principes régissant les épaves maritimes, ni les limitations du droit de propriété sur les navires échoués, ni l’occupation temporaire ou les conditions d’acquisition de la propriété sur les épaves coulées en mer13. Du point de vue opérationnel, les guerres successives contribuant à la présence de nombreux navires coulés en mer, la principale préoccupation des pouvoirs publics a consisté à assurer la signalisation et la sécurité de la navigation, au besoin par la récupération de l’épave, a fortiori si cette présence pouvait menacer le trafic maritime ou l’environnement.

Confronté aux problèmes juridiques posés par l’épave maritime, comme source de créances, le droit moderne a fini par définir assez tardivement, avec la loi du 24 novembre 1961, la notion d’« épave maritime »14, afin de régler son régime juridique en précisant les droits et obligations du propriétaire du navire, du découvreur et de l’autorité maritime. Disposition nouvelle, le texte assimile désormais aux épaves maritimes les objets présentant un intérêt archéologique, historique ou artistique. La notion d’« épave maritime » s’en trouve d’un coup juridiquement sublimée : de presque rien, elle devient presque tout.

Conséquence immédiate, l’époque des trésors maritimes, et de ses inventeurs, est bel et bien révolue15, laissant place en droit aux pilleurs d’épaves et bientôt à la notion de « biens culturels maritimes ». La notion unique d’« épave maritime » étant adoptée, un régime de limitation de propriété sur l’épave, sous certaines conditions, dans l’intérêt des opérations de sauvetage, est du même coup organisé. Sur ce dernier aspect, la récupération et mise hors d’eau des épaves gênantes, l’anticipation du législateur ne sera pas démentie.

Dans les années 1970, avec l’apparition de navires construits dans des matériaux moins nobles, le mythe de la « belle épave » a quelque peu vécu. Les épaves sont devenues des sources de dangers et de pollutions, difficilement recyclables, peu valorisables et source d’embarras16. Depuis lors, les capacités de transport par voie maritime n’ont cessé de croître, au point que cette voie représente environ 75 % du volume des échanges extérieurs de l’Union européenne et 31 % du volume des échanges intérieurs17. En cas d’avaries et de naufrage, le gigantisme des navires, comme la conteneurisation sur des navires de plus en plus imposants, et l’utilisation d’énergie fossile ou nucléaire, font que le navire naufragé n’a plus guère de rapport avec la glorieuse épave mythifiée.

Tour à tour « source de créances, puis source de dettes »18, au fil du temps, le navire, une fois sombré, peut être envisagé comme « trésor maritime » ou, à l’opposé, comme rebut des mers. Avers et revers d’une même qualification, il en résulte la double facette de l’épave maritime ; biface, c’est une notion « janusienne » qui la rend difficilement saisissable, à plus d’un titre.

Ainsi, les conditions de mise hors d’eau des épaves maritimes relèvent de deux codifications différentes en droit français, tenant compte du double caractère de l’épave. Pour les « belles épaves », communément perçues comme des trésors, mais qualifiées juridiquement de biens culturels maritimes depuis la loi de 198919, leur retirement est exceptionnel. Il est strictement régi par le Code du patrimoine20. À l’opposé de la source de valeurs, très recherchée et disputée, le sort de l’épave contemporaine est réglé, quant à lui, par le Code des transports21. Le régime juridique, propre à l’opération de retirement elle-même, est très différent, avec des objectifs diamétralement opposés.

Tout cela ne peut s’expliquer que si l’on entend scruter, un peu à la manière d’une archéologue du droit, les textes juridiques élaborés au fil du temps afin de lier leur application à la date de la découverte de l’épave maritime. Une telle démarche est en tout cas nécessaire pour comprendre le caractère dual des épaves maritimes, longtemps restées la seule qualification en droit français (I). De cette dualité découlent des objectifs inversés, l’un de conservation in situ, l’autre de mise hors d’eau et de retirement. Il en résulte des conditions opposées pour leur gestion par les autorités publiques (II), lesquelles aboutissent à un processus inachevé dans les deux cas.

I – Les épaves maritimes, une notion duale

Les espaces sous-marins ne dissimulent pas seulement sous leur surface un patrimoine inestimable et inconnu, tant s’en faut ! Il faut donc différencier ce qui relève du patrimoine culturel sous-marin, à savoir le bien culturel (A), suivi au titre de l’archéologie sous-marine susceptible de faire progresser les connaissances, du reste (B).

A – De l’épave maritime « à caractère » au bien culturel maritime

Pour l’épave « à caractère », le législateur français a suivi le même schéma qu’en matière d’archéologie préventive pour les biens terrestres, dans l’objectif d’éviter la dispersion du patrimoine commun de l’humanité. À l’image du droit de l’archéologie terrestre22, articulé sur la stratégie de protection du patrimoine et des connaissances, le droit des épaves maritimes « à caractère » reprend un schéma de prévention contre les fouilles incontrôlées. La singularité, s’agissant de la découverte dans le domaine maritime, c’est la disparition complète au fil du temps de la notion de « trésors », mis au jour par le fruit du hasard23. Pour autant, déterminer la date de la découverte pour la qualifier juridiquement reste indispensable24.

Après 1804 et l’article 717 du Code civil, il faut attendre les deux guerres mondiales, avec les destructions des navires et des ports, pour que les pouvoirs publics interviennent par des dispositions spéciales25. Étant donné les circonstances particulières, ces mesures répondent à une préoccupation spécifique, celle de dégager les ports français, en enlevant les épaves qui en gênaient l’accès ou le fonctionnement26. Malgré cela, le problème des épaves maritimes ne peut se réduire à cette question d’obstruction en termes de trafic maritime, surtout si elles sont aussi susceptibles d’être source d’enrichissement. Les conditions de leur appropriation, à défaut de propriétaire connu, s’avèrent essentielles.

Il faut alors citer, au cours de cette même période, concernant les trouvailles, la loi du 27 septembre 1941, relative à la réglementation des fouilles archéologiques, et son article 16, qui pose des règles d’attribution de propriété des découvertes fortuites, sans distinguer le caractère terrestre ou maritime des lieux. Suivant ce texte, « les découvertes de caractère mobilier faites fortuitement sont confiées à l’État pendant le délai nécessaire à leur étude scientifique. Au terme de ce délai, qui ne peut excéder cinq ans, leur propriété (…) demeure réglée par l’article 716 du Code civil ; mais l’État peut revendiquer ces trouvailles moyennant une indemnité fixée à l’amiable ou à dire d’expert. Le montant de l’indemnité est réparti entre l’inventeur et le propriétaire, suivant les règles du droit commun, les frais d’expertise étant imputés sur elle. Dans un délai de deux mois à compter de la fixation de la valeur de l’objet, l’État peut renoncer à l’achat ; il reste tenu, en ce cas, des frais d’expertise ». Cette loi s’inscrit-elle dans le cadre des lois particulières visées par l’article 717 du Code civil ? Tout l’indique, puisque, jusqu’en 1961, aucune législation particulière, relative aux épaves maritimes, n’a été adoptée.

Il faut attendre, en effet, la seconde moitié du XXe siècle pour qu’intervienne une rupture en deux temps du sort entourant les belles épaves.

Tout d’abord, la loi du 24 novembre 196127, qui a, pour la première fois, à son article 4, admis l’existence d’épaves maritimes présentant « un caractère archéologique, historique ou artistique »28. Il est d’ailleurs introduit des sanctions pénales à l’encontre de « quiconque aura intentionnellement détruit, mutilé ou détérioré (…) » une épave à « caractère ». Mais il n’y a aucune définition ou précision apportée quant aux caractères requis. Il n’existe pas plus d’indications dans la loi concernant les modes d’acquisition de l’épave, contrairement aux exigences posées par l’article 717 du Code civil. Beaucoup plus précis sur cette question est son décret d’application, en date du 26 décembre 196129, qui vise les objets antiques dès son article 1er : « Sous réserve des conventions internationales en vigueur, constituent des épaves maritimes (…) généralement tous objets, y compris ceux d’origine antique, dont le propriétaire a perdu la possession et qui sont soit échoués sur le rivage dépendant du domaine public maritime, soit trouvés flottant ou tirés du fond de la mer dans les eaux territoriales, soit trouvés flottant ou tirés du fond en haute mer et ramenés dans les eaux territoriales ou sur le domaine public maritime ».

Ledit décret consacre son chapitre V aux « épaves présentant un intérêt archéologique, historique ou artistique »30. À défaut de propriétaire, lorsqu’il est inconnu ou insusceptible d’être retrouvé, ces épaves appartiennent à l’État. Le pouvoir réglementaire a-t-il entendu affirmer la résurgence du « droit d’épave » du seigneur, pourtant contraire à la législation révolutionnaire des 13-20 avril 1791 ? Quant au découvreur, il est tenu de mettre l’épave en sûreté, notamment de la placer hors des atteintes de la mer. Les épaves « à caractère » sont ici régies de la même manière que toute autre épave, avec obligation de la déclarer à l’administrateur de l’inscription maritime, dans les 48 heures de la découverte ou de l’arrivée au premier port si l’épave a été trouvée en mer31. Le défaut de déclaration est sanctionné par la perte des droits à indemnité de sauvetage, une amende et la confiscation de l’épave, tout spécialement pour le découvreur d’une épave « à caractère »32.

Pourtant, faute d’être d’origine législative, mais simplement réglementaire, le doute persiste quant à l’applicabilité de la règle de confiscation de l’épave maritime comme solution acquisitive au profit de l’État… contrairement aux exigences de l’article 717 du Code civil, et sans même évoquer l’article 17 de Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789 !

C’est une seconde étape essentielle, la loi du 1er décembre 1989, qui mettra fin au débat33. Celle-ci a, d’une part, introduit officiellement les biens culturels maritimes, notion autrement plus étendue que celle de « trésor » et ici substituée à celle d’« épave maritime », et, d’autre part, élargi le champ géographique de la législation en englobant, au-delà du domaine public maritime de la mer territoriale, la zone contiguë34. Si ce dispositif juridique, intégré depuis 2004 dans le Code du patrimoine, s’est affiné au fil des années35, il reste toutefois limité à ces zones pour l’application de ses principes, ne pouvant s’étendre au-delà de la zone contiguë36, bien que la France possède la deuxième zone économique exclusive (ZEE) au monde.

Selon le dispositif mis en place dans le domaine public de la mer territoriale et la zone contiguë, étant donné que la mise hors d’eau des épaves maritimes recouvrées est susceptible de provoquer leur disparition37, trois règles essentielles sont posées : l’autorisation préalable des prospections, la prescription d’office de mesures conservatoires et l’obligation de déclaration des découvertes. Sont ici concernées toutes sortes d’épaves maritimes à caractère culturel. Selon le Code du patrimoine français, les biens culturels maritimes comprennent « les gisements, épaves, vestiges ou généralement tout bien qui, présentant un intérêt préhistorique, archéologique ou historique, est situé dans le sol ou le sous-sol du domaine public maritime ou au fond de la mer dans la zone contiguë »38. Ces biens ne peuvent être découverts, par tout type de prospections, fouilles ou sondages ou recherchés à l’aide de matériels de détection, sans avoir obtenu d’autorisation administrative préalable39. Situés dans le domaine public maritime, sans que leur propriétaire n’ait pu être retrouvé, à l’expiration d’un délai de trois ans suivant la publicité de la date de leur découverte, ils appartiennent systématiquement à l’État.

Cela étant, il faut préciser qu’en droit international, la définition de l’épave « à caractère » exige un critère plus précis, en termes d’ancienneté requise, permettant de mieux asseoir la distinction avec l’épave « ordinaire ». En effet, la Convention de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) de 2001, sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, ratifiée par la France en 2012 et entrée en vigueur pour la France le 15 mai 201340, entend protéger « toutes les traces d’existence humaine présentant un caractère culturel, historique ou archéologique qui sont immergées, partiellement ou totalement, périodiquement ou en permanence, depuis 100 ans au moins »41. Il ressort des travaux préparatoires que cette limite temporelle a été adoptée précisément pour donner une définition objective de l’épave « à caractère ».

En dépit de cette précision, les règles internes privilégient une définition élargie du « patrimoine culturel subaquatique », en englobant non seulement les épaves historiques, partie la plus connue du grand public, mais aussi les sites et les lieux de vie immergés, témoignages de l’occupation du territoire par l’Homme. Ce faisant, la France définit plus largement ce patrimoine subaquatique pour y inclure également les sites les plus récents, notamment les vestiges ou épaves immergés des deux guerres mondiales, sans reprendre la condition de l’ancienneté. Étant donné la vulnérabilité du littoral par suite du retrait du trait de côte attendu comme manifestation du changement climatique42, cette différence de conception du patrimoine subaquatique ne sera pas négligeable à l’avenir. Selon le Code du patrimoine, elle comprend, en effet, tous les biens maritimes qui présentent un intérêt préhistorique, archéologique ou historique et risquent d’être menacés par de nombreux touristes et autres explorateurs, connaissant mal les règles de protection des biens culturels et leur fragilité.

B – L’épave maritime ordinaire

Le Code des transports envisage uniquement les épaves maritimes sans caractère, au moyen d’une énumération à la manière anglo-saxonne43. L’actuel article L. 5142-1 du Code des transports dénombre trois catégories clairement identifiées44. Ces dispositions s’appliquent aux « épaves de navires, de drones maritimes ou autres engins flottants, aux marchandises et cargaisons, aux épaves d’aéronefs et à tout autre objet. Ils doivent se trouver dans les eaux territoriales, dans les eaux intérieures en aval de la limite transversale de la mer, dans les limites administratives des ports maritimes ou sur les rivages dépendant du domaine public maritime ou sur le littoral maritime ».

Le passage juridique d’état de navire à épave « sans caractère » est parfois difficilement mesurable45. Au-delà de son apparence, l’état d’épave maritime résulte de trois critères retenus par le législateur46 : la non-flottabilité, l’absence d’équipage à bord et l’inexistence de mesures de garde ou de manœuvre, sauf si cet état fait suite à un abandon volontaire en vue de soustraire l’engin flottant à la réglementation douanière47. Pour reprendre la première caractéristique, le navire ou l’engin flottant a perdu toute flottabilité. L’état matériel doit alors attester qu’il n’est plus manœuvrable, ni réellement apte à affronter les risques de la mer. Cet élément objectif vise les seuls cas d’innavigabilité totale et irrémédiable. En outre, le navire ou l’engin doit avoir été abandonné par son équipage ou celui qui en avait la garde, en n’en assurant plus la surveillance, ni la maîtrise.

En pratique, il est parfois difficile de distinguer tout engin flottant coulé, dérivant en mer ou retrouvé sur le rivage et la chose volontairement abandonnée, jetée en mer ou sur le rivage. Un tel risque de confusion est bien réel et le législateur, dès 198548, a créé la catégorie intermédiaire de « navire abandonné ». L’article L. 5141-1 du Code des transports vise ici le navire, ou tout autre engin, en état de flottabilité, avec aucun équipage à bord, ni mesure de garde et de manœuvre, présent dans les eaux territoriales ou les eaux maritimes intérieures et présentant un danger.

Un régime particulier pour ces navires abandonnés, qui sont en état de flottabilité, s’est donc imposé. Ils peuvent être réduits à de simples déchets, mais ne sauraient être qualifiés d’épaves dès lors qu’ils sont encore navigables. La qualification de navire abandonné est ainsi une réponse directe apportée à certains propriétaires indélicats qui, ne pouvant plus exploiter leur navire, le laissaient croupir dans les eaux portuaires, intérieures ou territoriales, sans surveillance. Cette pratique rejoint d’ailleurs la situation des navires en fin de vie, qui pose naturellement la question de leur traitement et de leur démantèlement ; l’état de flottabilité les excluant ipso facto de la catégorie d’épave.

Le droit international a dû tenir compte de la diversité des rebuts maritimes pour gérer spécifiquement l’enlèvement des épaves, celles en priorité présentant un danger, à travers la Convention de Nairobi du 18 mai 200749. Pour les pays l’ayant ratifiée, dont la France50, ces dispositions s’appliquent à la ZEE, à savoir la zone adjacente aux eaux territoriales, dans la limite de 200 milles de la ligne de base. Si les eaux territoriales de chaque État sont par principe exclues, la Convention leur réserve cependant la possibilité de les intégrer51.

La notion d’« épave », selon la Convention de Nairobi, est envisagée de manière bien moins restrictive qu’en droit interne, en mettant l’accent sur le danger qu’elle peut représenter. Selon son article 1er, il s’agit de tout ou partie d’un navire naufragé, ou échoué, ou sur le point de l’être, y compris tout objet perdu en mer par un navire et qui est submergé, ou échoué, ou à la dérive52. L’accent est mis sur la cause de ce changement d’état juridique, à savoir l’accident de mer. Celui-ci est considéré comme un abordage, un échouement ou tout autre incident de navigation survenu à bord, ou à l’extérieur d’un navire, qui entraîne une menace imminente de dommages matériels pour un navire ou sa cargaison53.

La définition de la notion de « danger », que représente l’épave maritime, passe très précisément par l’énumération de 14 critères, comme la vulnérabilité de la zone, la densité du trafic ou la nature de la cargaison54. La liste dressée par la Convention de Nairobi de 2007 reste même ouverte sur toute autre circonstance pouvant nécessiter l’enlèvement de l’épave55. Les deux seules exclusions notables, inhérentes au champ d’application de la Convention, sont, d’un côté, la haute mer56 et, de l’autre, les navires et bâtiments de guerre57 ; les épaves restant soumises dans ces deux cas à la loi du pavillon du navire en principe.

Autrement dit, quelle que soit la nature de l’épave maritime, « à caractère » ou ordinaire, son retirement reste étroitement dépendant de la zone où elle est située. Si l’épave « à caractère » est fréquemment soustraite de son environnement sans autorisation, au grand dam de l’archéologie et des conservateurs des musées, l’épave ordinaire, elle, a vocation à être laissée à l’abandon, pour le malheur de la navigation et de l’environnement.

II – Des principes opposés quant à la mise hors d’eau des épaves maritimes

Là où les biens culturels maritimes doivent naturellement être laissés sur place, sauf mise hors d’eau accidentelle58, à l’inverse, il faut plutôt s’empresser de retirer l’épave contemporaine, laquelle ressemble davantage à une charge financière. La différence essentielle entre les deux réside dans la priorité de conservation in situ pour la première (A), et de retirement de l’eau pour la seconde (B).

A – Un objectif de préservation des épaves « à caractère » incomplètement réalisé

Concernant les épaves maritimes à « caractère », biens culturels maritimes depuis la loi du 1er décembre 1989, l’option prioritaire demeure la préservation in situ, avant que toute intervention sur ce patrimoine soit autorisée ou entreprise. De manière générale, les États ayant ratifié la convention de l’Unesco de 200159 ont l’obligation de protéger le patrimoine culturel subaquatique « dans l’intérêt de l’humanité », en évitant toute exploitation commerciale ou tout dommage causé aux biens immergés et, le cas échéant, en sanctionnant les comportements dommageables60. Les sites où les épaves sont découvertes doivent en principe être laissés intacts et, dans la mesure du possible, les biens immergés, de sorte que les États ne peuvent appliquer le droit du sauvetage ou le droit des trésors à ces épaves61.

La plupart du temps, les États préfèrent exercer un contrôle a priori, en instituant un système de notification des découvertes et d’autorisation préalable des récupérations. En France, bien avant la ratification de ladite Convention, le législateur a imposé la déclaration à l’autorité administrative dans les 48 heures de la découverte d’un bien culturel maritime ou de l’arrivée au port, de manière incontournable62. À cela s’ajoute l’autorisation nécessaire avant de pouvoir le mettre hors d’eau63. Ces obligations s’appliquent à toute découverte et en toutes circonstances64.

Rappelons que ces dispositions du Code du patrimoine s’appliquent pour toute trouvaille dans le domaine public maritime65, de la mer territoriale jusqu’à la zone contiguë.

Suivant ce découpage, les lieux de découverte figurant dans la ZEE et la haute mer continuent d’interroger.

S’agissant, en premier lieu, de la présence d’épaves dans la ZEE66, leur sort a été négligé jusqu’à l’adoption de la convention de l’Unesco le 6 novembre 2001, sur la protection du patrimoine culturel subaquatique67. En vertu de l’article 10, alinéa 2, « un État partie dans la zone économique exclusive ou sur le plateau continental duquel se trouve le patrimoine culturel subaquatique a le droit d’interdire ou d’autoriser toute intervention sur ce patrimoine pour empêcher toute atteinte à ses droits souverains ou à sa juridiction tels qu’ils sont reconnus par le droit international, y compris la Convention des Nations unies sur le droit de la mer ». En dépit de l’entrée en vigueur de la convention de l’Unesco de 2001 pour la France le 15 mai 201368, en l’absence de transposition de ses principes dans la législation interne, les moyens préventifs et répressifs ne peuvent être utilisés dans la ZEE pour éviter les risques de dégradation et mettre un terme à des destructions ou pillages d’épaves « à caractère ». Ainsi, lorsqu’un navire battant pavillon d’un autre État pille une épave maritime située dans sa ZEE, la France, État côtier, ne sera pas juridiquement en mesure de l’en empêcher. Dans le même ordre d’idées, un aménageur n’est nullement tenu de solliciter l’autorité maritime pour une évaluation en cas d’aménagement sur le fond de la mer dans la ZEE69, puisque les dispositifs d’évaluation ou de diagnostic archéologiques prévus par le Code du patrimoine ne lui sont pas applicables.

D’ailleurs, ladite convention de l’Unesco de 2001, au titre de son article 4, tend à écarter la convention de Londres de 1989, relative aux opérations d’assistance effectuées par des autorités publiques ou sous leur contrôle70, en présence d’une épave historique ou culturelle71. En effet, le texte de l’Unesco oblige à rémunérer l’opération au regard du respect des prescriptions archéologiques figurant dans les règles de l’annexe. Celle-ci semble s’imposer à un double titre, à la fois comme règle spéciale aux épaves historiques et archéologiques et règle postérieure à la convention de 1989. Les États ayant ratifié les deux conventions auront donc à appliquer celle de l’Unesco, sans avoir besoin de formuler de réserve d’exclusion des épaves « à caractère » du champ d’application de la convention de 1989. Un tel ordonnancement est essentiel au regard de l’article 303 de la convention de Montego Bay, lequel reste au demeurant assez lâche sur le sujet72. Tout en affirmant que l’État côtier peut considérer l’enlèvement de telles épaves comme une infraction sur son territoire, il ne peut porter « atteinte ni aux droits des propriétaires identifiables, au droit de récupérer des épaves et aux autres règles du droit maritime, ni aux lois et pratiques en matière d’échanges culturels »73. Cette disposition se réduit dès lors à poser une simple obligation de diligence, laissant l’opportunité aux États des moyens à mettre en œuvre pour préserver les épaves maritimes « à caractère ».

Au regard de son intérêt scientifique, il est vrai, la question du retirement de la « belle épave » reste âprement discutée. L’application du droit du sauvetage aux biens culturels immergés ne rencontrerait guère l’adhésion de l’archéologie subaquatique. Celle-ci considère, en général, qu’il importe de laisser tous les éléments de l’épave en place, au risque de détruire ces ressources non renouvelables ; les fouilles sur le site menaçant souvent sa stabilité. Pour les archéologues, les épaves « à caractère » ne devraient être récupérées qu’à condition qu’il soit scientifiquement démontré « qu’elles ne peuvent plus être préservées dans leur environnement naturel »74.

Dans cette perspective, pour parachever l’ensemble du système construit au profit de l’archéologie avec cohérence, il peut être proposé d’étendre les dispositions actuelles du Code du patrimoine aux biens culturels maritimes qui se trouvent dans la ZEE de la France, en précisant les moyens dédiés à la protection de ces biens par l’État. C’est le système déclaratif, prévu en mer territoriale en cas de découverte d’un bien culturel maritime dans ladite zone économique, ainsi que le système d’autorisation pour la mise hors d’eau qui seraient alors étendus. Il serait, dans le même temps, nécessaire d’instaurer des mesures de sauvegarde, visant à empêcher tout danger immédiat pour le patrimoine culturel subaquatique retrouvé dans cette zone. Enfin, un tel dispositif devrait être complété par un arsenal de sanctions en cas d’absence de déclaration de la découverte dans ladite zone, de fausse déclaration quant au lieu de la découverte, de prospections, prélèvements ou fouilles réalisés sans autorisation de l’État dans ladite zone, de manière à décourager les comportements non conformes à la convention de l’Unesco75.

En second lieu, lorsque les épaves « à intérêt » se situent en haute mer76, l’article 149 de la convention de Montego Bay impose qu’elles soient « conservé[e]s et cédé[e]s dans l’intérêt de l’humanité toute entière, compte tenu en particulier des droits préférentiels des droits ou du pays d’origine, ou de l’État d’origine culturelle, ou encore de l’État d’origine historique ou archéologique ».

Curieusement, aucun rôle n’a finalement été attribué à l’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) à cet effet. Tout au plus, les prospecteurs et des titulaires de contrats d’exploration doivent notifier à l’AIFM les découvertes de biens culturels maritimes faites au cours de leurs prospections77. Ils doivent interrompre leurs activités dans un rayon raisonnable jusqu’à la décision du conseil de l’AIFM, lequel pourra autoriser la reprise des activités, après consultation du directeur général de l’Unesco entre autres78. Dans cette vaste étendue, c’est finalement s’en remettre au bon vouloir des opérateurs pionniers des grands fonds marins… et à leur bonne foi !

De lege ferenda, quelle que soit la zone de la découverte, une fois l’épave maritime « à caractère » retrouvée, la réglementation devrait permettre de créer une zone de protection, autour d’elle, pour éviter tout dommage, de manière incidente, du fait d’activités menées dans ses environs, telles que la pose de câbles sous-marins ou d’éoliennes, le chalutage ou la plongée79. S’il n’est pas certain qu’une telle mesure soit suffisante pour lutter contre les risques de pillage ou récupération illicite, elle reste la solution naturelle de préservation matérielle des lieux, laquelle s’imposerait aux divers utilisateurs de la mer.

La solution de créer une aire protégée n’est pas explicitement envisagée par la convention de l’Unesco de 2001, ni par les règles figurant dans son annexe. Elle est simplement préconisée par son Conseil consultatif, scientifique et technique80. Ainsi, en laissant aux États le soin de choisir les moyens les mieux adaptés pour éviter tout dommage aux biens culturels maritimes, la convention de l’Unesco est loin d’affirmer une obligation de résultat à leur encontre. Il en est de même dans la Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique de 1992, prise dans le cadre du Conseil de l’Europe81. Si elle impose des engagements précis aux États parties en relation avec des éléments du patrimoine archéologique, situés dans n’importe quel espace maritime soumis à leur juridiction, le contrôle des activités susceptibles de causer un dommage fortuit aux biens culturels maritimes n’est pas directement envisagé. Il est donc laissé à la bonne volonté des États parties.

Il reste que, en vertu d’autres instruments internationaux82, la présence d’épaves « à caractère » immergées peut être un argument pour motiver la création d’une aire marine protégée83. Certes, pour l’instant, les initiatives nationales en ce sens demeurent assez rares84… peut-être en raison d’arbitrages économiques dus aux activités déployées autour de ces épaves, tels que la plongée ou le chalutage.

B – Un objectif de retirement des épaves ordinaires incomplètement réalisé

L’approche et les enjeux sont complètement différents concernant l’épave ordinaire85. Des enjeux économiques, diplomatiques et écologiques poussent à retirer le plus rapidement possible les épaves dites « sans caractère » ou tout autre engin maritime flottant, trouvés en mer ou sur le littoral. Une telle opération de retirement reste, là encore, juridiquement déterminée par la zone de situation de l’épave, dans la logique de la convention de Montego Bay sur le droit de la mer de 198286.

Suivant ce découpage, il n’existe aucun texte général régissant aujourd’hui le retirement des épaves en haute mer87, excepté le cas spécifique des avaries ou accidents survenus à tout navire ou engin ayant à son bord des substances nocives, dangereuses ou des hydrocarbures. En l’occurrence, les opérations de secours sur des navires en difficultés transportant des hydrocarbures ou des substances dangereuses seront menées conformément au paragraphe 4 de l’article II de la convention de Bruxelles du 29 novembre 1969 en cas d’accident entraînant ou pouvant entraîner une pollution par les hydrocarbures. Selon l’article L. 218-72, I, du Code de l’environnement, « dans le cas d’avarie ou d’accident en mer survenu à tout navire, aéronef, engin ou plate-forme transportant ou ayant à son bord des substances nocives ou dangereuses ou des hydrocarbures, et pouvant créer un danger grave d’atteinte au littoral ou aux intérêts connexes français (…), le propriétaire ou tout exploitant (…) peut être mis en demeure, par l’autorité compétente, de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser ce danger ». Il en va de même en cas de perte d’éléments de la cargaison d’un navire, transportée en conteneurs, en colis, en citernes ou en vrac, susceptibles de créer un danger grave, direct ou indirect, pour l’environnement88.

En revanche, quand l’épave se situe dans la ZEE, dans les eaux territoriales ou intérieures françaises, et selon l’article L. 218-72, II, du Code de l’environnement, c’est la convention de Nairobi du 18 mai 2007 qui s’applique. Entrée en vigueur en France depuis le 20 mai 201689, elle impose alors une procédure prédéfinie à l’État affecté pour enjoindre au propriétaire de l’épave dangereuse de la retirer90. L’État affecté reste seul maître de l’évaluation du danger, de l’appréciation de la nécessité de retirer l’épave, des délais de l’opération, des méthodes envisagées pour y procéder, comme du résultat souhaité. Il décide des mesures nécessaires « pour s’assurer que l’opération se déroule d’une manière qui respecte (…) la sécurité et la protection du milieu marin »91, tout en observant la proportionnalité entre les mesures prises et les dommages subis. Peu importent donc les droits premiers du propriétaire sur son épave, nécessité fait loi ! Dans l’hypothèse d’un danger imminent ou d’un propriétaire récalcitrant, les pouvoirs de l’État impacté s’avèrent même renforcés. Ce dernier pourra procéder au retirement « par les moyens les plus pratiques et les plus rapides disponibles »92, aux frais du propriétaire. La décision de retirement devient ainsi un acte juridique unilatéral indépendant de la volonté du propriétaire du navire93. Le sort de l’épave et la décision de son retirement finissent par échapper totalement aux prérogatives de son propriétaire94.

En conséquence, l’accident survenu à tout navire, aéronef, engin ou plate-forme, est réglé conformément aux dispositions de la convention de Nairobi du 18 mai 2007, sur l’enlèvement des épaves, dès que l’accident peut créer un danger d’atteinte au littoral ou aux intérêts connexes français, tels que définis par cette convention. Il en va de même dans le cas de la perte d’éléments de la cargaison d’un navire susceptibles de créer un danger d’atteinte au littoral ou aux intérêts connexes français95. Cela conduit le propriétaire ou tout exploitant à être mis en demeure par l’autorité compétente96 pour faire cesser ce danger. Il a le devoir de retirer l’épave de l’eau et la charge de la responsabilité financière, le propriétaire pouvant être recherché pour tous les frais occasionnés par l’opération97. Il est tenu de payer les frais de localisation, de signalisation et d’enlèvement de l’épave, sauf à démontrer que ces frais sont incompatibles avec d’autres conventions internationales98, telles celle de 1969 sur la pollution en mer ou celle de 1996 sur le transporteur de marchandises dangereuses99. Le propriétaire est ainsi obligé de contracter une assurance de nature à garantir aux États le recouvrement des frais éventuels100.

Précisément, les conditions de l’opération d’enlèvement, en présence d’épaves maritimes dangereuses101, sont fixées par décret en Conseil d’État. Le danger est existe « lorsque l’épave présente, en totalité ou en partie, un caractère dangereux pour la navigation, la pêche ou l’environnement, l’accès à un port ou le séjour dans un port[. Le] propriétaire a l’obligation de procéder à la récupération, à l’enlèvement, à la destruction ou à toute autre opération en vue de supprimer le caractère dangereux de cette épave »102. En cas de mise en demeure infructueuse103, celle-ci ayant vocation à octroyer un délai au propriétaire pour l’accomplissement des opérations indispensables, en tenant compte de la situation de l’épave ou de la difficulté des opérations à entreprendre, l’autorité administrativepeut alors faire pratiquer les opérations nécessaires à la récupération et l’enlèvement104.Cette même autorité peut faire procéder d’office à ces opérations en cas d’urgence, ou si le propriétaire est inconnu, s’il ne peut être avisé en temps utile, ou encore à la demande même du propriétaire.Dans tous les cas, « les opérations se font aux frais et risques du propriétaire »105 et l’État peut recouvrer le montant de leur coût auprès de celui-ci.

Quoi qu’il en soit106, en dehors même de cette hypothèse de dangerosité que représente l’épave, selon l’article R. 5142-1 dudit code, toute personne découvrant une épave doit, dans la mesure du possible, la mettre en sûreté, notamment en la plaçant hors des atteintes de la mer107. Dans la continuité de la loi du 24 novembre 1961, elle doit ensuite déclarer la découverte dans les 48 heures ou lors de l’arrivée au premier port si l’épave a été trouvée en mer, auprès du préfet ou de son représentant. À partir de cette déclaration, les épaves découvertes sont placées sous la protection et la sauvegarde du préfet, qui prend toutes les mesures utiles pour le sauvetage et veille à la conservation des objets sauvés.

Ainsi, la découverte d’une épave dont le propriétaire est inconnu doit faire l’objet d’une publicité par le préfet, sous la forme d’affiches ou d’insertion dans la presse. Le propriétaire dispose alors d’un délai de trois mois, à compter de la date de publication ou de la notification de la découverte ou du sauvetage de l’épave, pour revendiquer son bien et, lorsque le sauvetage n’a pu être fait, pour déclarer qu’il entend y procéder. Le propriétaire récalcitrant peut être mis en demeure de procéder aux opérations de sauvetage ou, si l’existence de l’épave remonte à plus de cinq ans, la déchéance des droits du propriétaire peut être prononcée par décision de l’autorité administrative compétente108.

En l’absence de réclamation de l’épave par le propriétaire ou en présence de déchéance de ses droits109, l’autorité administrative pourra finalement procéder à la vente de l’épave au profit de l’État. Cette opération est assortie d’un cahier des charges précis, imposant à l’acquéreur les modalités et les délais d’enlèvement ou de récupération de l’épave110. Il est déduit du produit de la vente de l’épave les frais d’extraction, de récupération ou de démolition, en particulier ceux exposés par l’autorité compétente, mais aussi les frais de gestion et de vente, de la rémunération du sauveteur, des droits de douane et autres taxes111.

En réalité, les rapprochements entre protection environnementale et gestion des épaves maritimes « à caractère » ou « ordinaires » restent insuffisamment exploités. Certains imaginent et réclament déjà, à travers l’immersion volontaire d’épaves dépolluées, la valorisation de zones propices à la vie sous-marine, à la reconstruction des récifs coralliens et au développement des activités subaquatiques112. Pour l’heure, si l’impératif de récupération des épaves ordinaires se conçoit plus aisément au regard des exigences de préservation de l’environnement113, la création d’aires marines protégées à double intérêt, naturel et culturel, a vocation à se propager pour les épaves « à caractère » ! Difficile décidément de s’extraire de cet objet janusien qu’entretient en droit la notion d’« épave maritime ».

Notes de bas de pages

  • 1.
    Sur cette énigme et ce trésor, composé de plusieurs objets et pièces en or, recueillis à plusieurs époques différentes, v. J. Lafaurie, « Trésor d’un navire romain trouvé en Méditerranée », Revue numismatique 1958, p. 70 à 104. Le doute originel de ce trésor romain provient primitivement du lieu de sa découverte, situé dans la crique de Capo Di Feno (Corse-du-Sud), entre le rocher de Pietra Piumbata et la côte. Ce lieu perpétue ainsi le souvenir lointain d’un effondrement rocheux puisque, à proximité, se trouve en surface une structure antique (vestige d’une villa), entretenant l’idée qu’un tel trésor serait originairement terrestre… avant de finir en mer ; aucune épave de navire antique n’ayant été relevée sur le site.
  • 2.
    T. corr. Marseille, 29 et 30 janv. 2024 : E. Paolini, « Trésor de Lava : le Corse accusé d’avoir pillé un plat en or massif écope d’un an de prison avec sursis », Le Figaro, 27 mars 2024 ; C. Chasse, A. Morel et T. Lhoste, « Trésor de Lava : embrouilles corses », Affaires sensibles, France TV 2, diffusé le 21 avr. 2024.
  • 3.
    Point de vue d’un des principaux mis en cause, F. Biancamaria, Le trésor de Lava. La fièvre de l’or romain chez les plongeurs corses, 2004, Albin Michel.
  • 4.
    MnM Paris et ministère de la Culture (Drassm), symposium, « After the wreckage… wreck recovery, reuse and recycling », 2 au 4 avr. 2024 : https://lext.so/F8f2kS.
  • 5.
    Fondée sur « le droit romain, puis sur “l’Ordonnance du Roy François premier touchant l’Amirauté de France” de février 1543, l’État français est parvenu dès le XVIIe siècle à imposer, par “l’Ordonnance de la Marine du mois d’Aoust 1681” voulue par Colbert », T. Duchesne et J.-M. Martinet, « Rapport d’études de la 1re session maritime méditerranéenne. Quelle politique de la France pour les fonds marins en Méditerranée ? », 2023, FMES, spéc. p. 60.
  • 6.
    E. du Pontavice, Les épaves maritimes aériennes et spatiales en Droit français, 1961, LGDJ, t. 2, Bibliothèque de droit maritime fluvial aérien et spatial, in RIDC 1964, 16-1, spéc. p. 260.
  • 7.
    « Texte fondamental en la matière, l’Ordonnance royale sur la marine de 1681, dont le Procureur du Roi, Valin, dans son commentaire de 1760, a dit qu’elle était “la plus belle de toutes celles de Louis XIV”. (…) Bien des dispositions de cette Ordonnance sont encore en vigueur. (…) L’article 5 de la loi de 1961 a ainsi abrogé l’article 5 du titre IX du livre IV de l’ordonnance sur la marine d’août 1681 ». En ce sens, Sénat, rapp., Session ordinaire 1961-1962, Annexe au procès-verbal de la séance du 19 octobre 1961, n° 14-1, J. Yvon, p. 2 et 3 : https://lext.so/CFYPaZ.
  • 8.
    Pleine propriété sur les vêtements des naufragés retrouvés par exemple.
  • 9.
    Déclaration du Roi, 25 juin 1735, prévoyant le cas où un navire est naufragé, sans qu’il reste aucun vestige permanent à la surface des eaux – A. 27 thermidor an VII, sur la déclaration des épaves – A. 17 floréal an IX, sur les pouvoirs des administrateurs. V., sur ces textes, Sénat, rapp., Session ordinaire 1961-1962, Annexe au procès-verbal de la séance du 19 octobre 1961, n° 14-1, J. Yvon, p. 2 et 3 : www.senat.fr.
  • 10.
    E. du Pontavice, « Les épaves maritimes aériennes et spatiales en Droit français », 1961, LGDJ, t. 2, Bibliothèque de droit maritime fluvial aérien et spatial, in RIDC 1964, 16-1, spéc. p. 260.
  • 11.
    En ce sens, JCl. Civil Code, art. 717, spéc. n° 34, v° Modes divers d’acquérir la propriété – Épave, 2023, A. Bouzon-Roulle ; comp. J. Ha Ngoc, JCl. Transport, fasc. 1140, v° Épaves maritimes, 2021, spéc. p. 2.
  • 12.
    Rappr. seulement la loi du 27 septembre 1941, relative à la réglementation des fouilles archéologiques, avec son article 16, qui pose des règles d’attribution de propriété des découvertes fortuites basées sur l’article 716 du Code civil.
  • 13.
    Règl., 17 juill. 1816, attribuant, avec quelques réserves, à l’Établissement des invalides de la marine le produit de la vente des épaves – D., 28 févr. 1918, créant un droit de réquisition sous certaines conditions, texte dont la légalité a été maintes fois discutée devant les tribunaux – L., 16 nov. 1918 et L., 18 sept. 1940, relatives, l’une et l’autre, au renflouement des navires.
  • 14.
    Né de la loi du 24 novembre 1961 relative à la police des épaves maritimes, L. n° 61-1262, 24 nov. 1961 : D. 1961, p. 352 – D. n° 61-1547, 26 déc. 1961 : D. 1962, p. 41 – complété par A. 4 févr. 1965 : D. 1965, p. 106, lui-même mod. par A. 9 janv. 1987 : D. 1987, p. 117 – v., plus récemment, D. n° 78-847, 3 août 1978 : D. 1978, p. 375 – D. n° 85-632, 21 juin 1985 : D. 1985, p. 347 – D. n° 91-1226, 5 déc. 1991, modifiant celui de 1961 : D. 1992, p. 3 – adde L. n° 96-151, 26 févr. 1996, relative aux transports : D. 1996, p. 91.
  • 15.
    Par ex., conv. de La Haye, sur les lois et coutumes de la guerre sur terre de 1907, spéc., pour la spécificité des biens culturels, art. 27 et 56 – conv. de La Haye, pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé, signé le 14 mai 1954, entrée en vigueur le 7 août 1956 : https://lext.so/EuoSAJ.
  • 16.
    M. Remond-Gouilloud, « La protection de la mer contre les épaves de navires », RJE 1979, p. 91 à 101, spéc. p. 92 : « L’épave, depuis toujours source de convoitise, partant source de rêves, [n’est] plus aujourd’hui qu’une source d’ennuis. Aujourd’hui en effet, l’épave obstrue, l’épave pollue, l’épave n’est plus qu’une triste ordure » ; sur l’utilité d’enlever les épaves maritimes, v. P. Griggs, « Le projet de Convention sur l’enlèvement des épaves », DMF 2006, p. 683 et s.
  • 17.
    Chaque année, 400 millions de passagers, dont environ 14 millions pour les navires de croisière, embarquent, ou débarquent, dans les ports des États membres, PE et Cons. UE, règl. n° 2023/1805, 13 sept. 2023, relatif à l’utilisation de carburants renouvelables et bas carbone dans le transport maritime et modifiant la directive 2009/16/CE : JOCE, 22 sept. 2023.
  • 18.
    Sur l’idée d’une épave, « source de créances à sources de dettes », v. les réflexions de M. Remond-Gouilloud, spéc. « La protection de la mer contre les épaves des navires », in RJE 1979, n° 2.
  • 19.
    Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique de 2001 dans le cadre de l’Unesco, adoptée le 2 nov. 2001, entrée en vigueur le 2 janv. 2009 (https://lext.so/1s5RqA) et ratifiée par la France (D. n° 2013-394, 13 mai 2013, portant publication de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique (ensemble une annexe), adoptée à Paris le 2 nov. : JO n° 0111, 15 mai 2013).
  • 20.
    L., 1er déc. 1989, relative aux biens culturels maritimes – codifiée C. patr., art. L. 532-1 et s., Ord. n° 2004-178, 20 févr. 2004.
  • 21.
    C. transp., art. L. 5142 et s.
  • 22.
    La Convention, sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, de 2001, prise dans le cadre de l’Unesco, et adoptée le 2 novembre 2001 (CMI, annexe, 2002, p. 154 et s.), reflète le besoin d’assurer la même protection au patrimoine culturel submergé que celle déjà accordée au patrimoine culturel terrestre.
  • 23.
    Au sens de C. civ., art. 716.
  • 24.
    Rapp. dans l’affaire dite du « trésor de Lava », l’anachronisme des qualifications retenues, tel le recel de biens culturels maritimes ou le déplacement sans autorisation de biens culturels maritimes pour des faits de découverte remontant à 1985… bien avant la loi de 1989 sur les biens culturels maritimes, v. T. corr. Marseille, 29 et 30 janv. 2024.
  • 25.
    L., 16 nov. 1918 et L., 18 sept. 1940 relatives, l’une et l’autre, au renflouement des navires.
  • 26.
    L., 18 sept. 1940, portant organisation du renflouement ou de la démolition sur place des épaves immergées dans les eaux territoriales françaises : JO, 19 sept. 1940 ; JCP G 1944, III 9070 ; S. 1940, 4, p. 286 – Ord., 11 déc. 1944 : JO, 12 déc. 1944.
  • 27.
    L. n° 61-1262, 24 nov. 1961, relative à la police des épaves maritimes : JO, 25 nov. 1961.
  • 28.
    L. n° 61-1262, 24 nov. 1961, art. 4 : « Quiconque aura intentionnellement détruit, mutilé ou détérioré une épave maritime présentant un intérêt archéologique, historique ou artistique, ou tout autre objet en provenant, sera puni des peines prévues à l’article 257 du Code pénal ».
  • 29.
    D. n° 61-1547, 26 déc. 1961, fixant le régime des épaves maritimes : JO, 12 janv. 1962.
  • 30.
    Spéc. D. n° 61-1547, 26 déc. 1961, art. 24.
  • 31.
    Renvoi opéré par l’article 24 dudit décret à son article 2.
  • 32.
    D. n° 61-1547, 26 déc. 1961, art. 31.
  • 33.
    L. n° 89-874, 1er déc. 1989, relative aux biens culturels maritimes.
  • 34.
    Comprise entre 12 et 24 milles marins (de 22 à 44 kilomètres de la ligne de base).
  • 35.
    Not., dans le contexte de l’article 70 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine, prenant en compte la dimension scientifique de la protection du patrimoine archéologique et renforcement des dispositions en matière d’archéologie préventive.
  • 36.
    C. patr., art. L. 532-1 – C. patr., art. L. 532-12, soit jusqu’à 12 milles marins pour le domaine public maritime et 24 milles à partir des lignes de base pour la zone contigüe. V. spéc. C. Garcin, « La protection du patrimoine culturel sous-marin depuis la loi n° 89-874 du 1er décembre 1989 », ALD 1990, p. 135 ; C. Lavialle, « La loi n° 89-874 du 1er décembre 1989 relative aux biens culturels maritimes », JCP 1991, I 3489 ; G. Gurun, « L’épave, bien culturel maritime : une notion à découvrir », in Annuaire de droit maritime et océanique, t. XIII, 1995, Université de Nantes, p. 269 et s.
  • 37.
    V. les objectifs de Conv. de l’Unesco, 2 nov. 2001, in CMI, annexe, 2002, p. 154 et s.
  • 38.
    C. patr., art. L. 532-1.
  • 39.
    C. patr., art. L. 532-7.
  • 40.
    L. n° 2012-1476, 28 déc. 2012, après dépôt de son instrument de ratification le 7 févr. 2013 – D. n° 2013-394, 13 mai 2013, portant publication de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique (ensemble une annexe), adoptée à Paris le 2 nov. 2001 : JO, 15 mai 2013. Pour une analyse approfondie de la convention, M. They, « La Convention de l’Unesco de 2001 sur la protection du patrimoine culturel subaquatique : un succès en demi-teinte », RDIA 2021, n° 4, p. 32 et s.
  • 41.
    Conv. de l’Unesco, 2 nov. 2001, sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, entrée en vigueur le 2 janv. 2009, art. 1 (a).
  • 42.
    Not. Cour des comptes, rapp., 12 mars 2024, La gestion du trait de côte en période de changement climatique, spéc. p. 51 et s. : https://lext.so/xbTFQn.
  • 43.
    Spéc. les aéronefs en état d’innavigabilité ; les embarcations, machines, agrès, ancres, chaînes, engins de pêche abandonnés, et les débris des navires et aéronefs ; les marchandises jetées ou tombées à la mer et, enfin, les objets perdus ou abandonnés.
  • 44.
    C. transp., art. L. 5141-1 à L. 5142-8 – C. transp., art. R. 5141-1 à R. 5142-25. Comp. l’évolution de l’énumération dans le D. n° 78-847, 3 août 1978, portant modification du décret n° 61-1547 du 26 décembre 1961 fixant le régime des épaves maritimes : JO, 13 août 1978.
  • 45.
    En ce sens, M. Remond-Gouilloud, « La protection de la mer contre les épaves de navire », RJE 1979, p. 99.
  • 46.
    C. transp., art. L. 5142-1 : « L’état d’épave résulte de la non-flottabilité, de l’absence d’équipage à bord et de l’inexistence de mesures de garde et de manœuvres ».
  • 47.
    C. transp., art. L. 5142-1, al. 2.
  • 48.
    L. n° 85-662, 3 juill. 1985 – D. n° 87-830, 6 oct. 1987, repris par C. transp., art. L. 5141-1 et C. transp., art. L. 5141-2. V. Y. Tassel, « Des navires et engins flottants abandonnés dans les eaux territoriales et les eaux intérieures (loi du 3 juillet 1985) », in Annuaire de droit maritime et océanique, t. X, 1989, Université de Nantes, p. 189 et s.
  • 49.
    Conv. de Nairobi, sur l’enlèvement des épaves, adoptée le 18 mai 2007 et entrée en vigueur le 14 avr. 2015.
  • 50.
    D. n° 2016-615, 18 mai 2016, portant publication de la convention internationale sur l’enlèvement des épaves adoptée à Nairobi le 18 mai 2007, signée par la France le 24 septembre 2008 : JO, 20 mai 2016.
  • 51.
    B. Toure, « Le démantèlement des navires en fin de vie », Rev. dr. transp. 2008, dossier 2.
  • 52.
    Selon l’article 1er de la convention de Nairobi, le « navire » est désigné comme « un bâtiment de mer de quelque type que ce soit et englobe les hydroptères, les aéroglisseurs, les engins submersibles, les engins flottants et les plates-formes flottantes sauf lorsque ces plates-formes se livrent sur place à des activités d’exploration, d’exploitation ou de production des ressources minérales des fonds marins ».
  • 53.
    Accident de mer défini à l’article 1, point 3, de la Convention internationale de Nairobi (et par application de C. transp., art. L. 5123-2, IV).
  • 54.
    Ces critères rejoignent d’ailleurs ceux déjà utilisés pour déclarer des « zones maritimes particulièrement vulnérables », en raison de l’importance reconnue de leurs caractéristiques écologiques, socio-économiques ou scientifiques et de leur éventuelle vulnérabilité. Rapp. n° 010951-01, IGAM n° 2017-107, juill. 2017, Naufrage des navires Maersk Searcher et Maersk Shipper, transferts de déchets et déconstruction des navires, leviers juridiques et bonnes pratiques techniques, J.-M. Berthet, R. Kbaier et J.-L. Veille.
  • 55.
    Conv. de Nairobi, art. 6.
  • 56.
    En cas de danger grave, de risque d’atteinte au littoral ou aux intérêts connexes, l’État concerné risque, comme dans le modèle français, de mettre en demeure le propriétaire du navire, ou son exploitant, pour qu’il prenne les mesures adéquates. Le cas échéant, la puissance publique palliera la carence du propriétaire.
  • 57.
    Sont ainsi protégés de toute qualification d’épave maritime les bâtiments de guerre, navires d’État et les navires utilisés à des fins de service public non commercial vis-à-vis de tout État autre que celui du pavillon, en haute mer comme lors de l’exercice de droit de passage inoffensif dans la mer territoriale. V. Conv. des Nations-Unies, 10 déc. 1982, sur le droit de la mer, art. 96 (dite Conv. de Montego Bay).
  • 58.
    C. patr., art. L. 532-3 – C. patr., art. L. 532-7 et s. – C. patr., art. L. 542-1 et s., sur l’utilisation de techniques de détection.
  • 59.
    Conv. de l’Unesco, 2 nov. 2001, sur la protection du patrimoine culturel subaquatique, art. 2, § 4. A. Maniatis, Le patrimoine culturel subaquatique et le tourisme, in Annuaire de droit maritime et océanique, t. XLI, 2023, Université de Nantes, spéc. p. 277 et s.
  • 60.
    Conv. de l’Unesco, 2 nov. 2001, art. 2, § 7.
  • 61.
    Conv. de l’Unesco, 2 nov. 2001, art. 4.
  • 62.
    V. les différentes versions antérieures à C. patr., art. L. 532-3 : au plus tard dans les 48 heures de la découverte ou de l’arrivée au premier port. C. patr., art. L. 532-3.
  • 63.
    C. patr., art. L. 532-4, sauf mise hors d’eau fortuite, qui doit alors être déclarée dans les 48 heures.
  • 64.
    CE, 30 mars 2016, n° 377945, navire Thésée : DMF, 1er sept. 2017, n° 794, note V. Negri ; AJDA 2016, p. 1666 et s.
  • 65.
    C. patr., art. L. 532-1.
  • 66.
    S’étendant jusqu’à 200 milles de la ligne de base de la mer territoriale.
  • 67.
    Conv. de l’Unesco, 2 nov. 2001, art. 10, al. 2. En effet, deux articles de la convention de Montego Bay sont consacrés à la protection « des objets de caractère archéologique ou historique », mais elle ne permet à l’État côtier d’agir que dans sa mer territoriale et dans sa zone contiguë.
  • 68.
    Entrée en vigueur en France par le décret n° 2013-394 du 13 mai 2013 portant publication de la convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique (ensemble une annexe), adoptée à Paris le 2 novembre 2001 : JO, 15 mai 2013.
  • 69.
    Par ex., mesurer l’impact d’un futur parc éolien en mer.
  • 70.
    Conv. de Londres, 28 avr. 1989, sur l’assistance en mer, art. 5, § 1.
  • 71.
    C’est le cas dès lors qu’une telle épave entre dans le champ d’application de la Convention de l’Unesco de 2001, dans la mesure où celle-ci interdit l’exploitation commerciale du patrimoine culturel subaquatique.
  • 72.
    Comp. § 1 et § 3 de Conv. de Montego Bay, art. 303 : A. Maniatis, « Le patrimoine culturel subaquatique et le tourisme », in Annuaire de droit maritime et océanique, t. XLI, 2023, Université de Nantes, spéc. p. 237 et s.
  • 73.
    Conv. de Montego Bay, art. 303, § 3, faisant référence à l’art. 33 de ladite convention, sur la zone contigüe : A. Maniatis, « Le patrimoine culturel subaquatique et le tourisme », in Annuaire de droit maritime et océanique, t. XLI, 2023, Université de Nantes, spéc. p. 239.
  • 74.
    M. They, Rép. Internat. Dalloz, v° Épave maritime, 2023, spéc nos 100 et s.
  • 75.
    En ce sens, T. Duchesne et J.-M. Martinet, « Rapport d’études de la 1re session maritime méditerranéenne. Quelle politique de la France pour les fonds marins en Méditerranée ? », 2023, FMES, spéc. p. 61 et s.
  • 76.
    Rappr. Accord se rapportant à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, adopté formellement le 19 juin 2023 au siège de l’Organisation des Nations unies, A/CONF.232/2023/4, art. 7.
  • 77.
    AIFM, 27 juill. 2012, ISBA/18/A/11, règlement relatif à la prospection et à l’exploration des encroûtements cobaltifères de ferromanganèse dans la Zone, spéc. art. 8 – AIFM, 15-16 juill. 2013, ISBA/19/C/17, règlement relatif à la prospection et à l’exploration des nodules polymétalliques dans la Zone et des questions connexes – AIFM, 6 mai 2010, ISBA/16/C/L.5, règlement relatif à la prospection et à l’exploration des sulfures – AIFM, 15-19 juill. 2019, ISBA/25/C/WP.1, Projet de règlement relatif à l’exploitation des ressources minérales dans la zone, art. 35 : https://lext.so/Os2V-5.
  • 78.
    AIFM, 15-19 juill. 2019, ISBA/25/C/WP.1, Projet de règlement relatif à l’exploitation des ressources minérales dans la zone, art. 35.
  • 79.
    En ce sens, T. Duchesne et J.-M. Martinet, « Rapport d’études de la 1re session maritime méditerranéenne. Quelle politique de la France pour les fonds marins en Méditerranée ? », 2023, FMES, spéc. p. 17 : « Actuellement, 3.950 entités archéologiques reposent dans les eaux sous juridiction de la France en Méditerranée (épaves entières ou des objets isolés) sur un total de 7.000 pour la France. La très grande majorité, soit 97,9 %, est située à moins de 50 mètres de profondeur, le reste, environ 80 entités, reposant au-delà de 50 mètres. Ces biens culturels maritimes identifiés sont quasi exclusivement situés dans la mer territoriale (3.914) ; les autres se trouvant en zone contiguë (28) et en ZEE (8) ».
  • 80.
    Unesco, Rapport final et recommandations et résolutions, Deuxième réunion du Conseil consultatif scientifique et technique, 8 mai 2011, UCH/11/2.STAB/220/7, p. 8. V. la faiblesse normative de l’article 5 de la convention, lequel énonce que chaque « État partie emploie les moyens les mieux adaptés dont il dispose pour empêcher ou atténuer toute incidence négative due à des activités relevant de sa juridiction ayant une incidence fortuite sur le patrimoine culturel subaquatique ».
  • 81.
    Révisée, dite Conv. de la Valette, v. art. 1, § 2, iii. et 3, et art. 5.
  • 82.
    La France a créé quatre aires marines protégées au titre des instruments internationaux ou régionaux, pour protéger des biens culturels, v. Planification de l’espace maritime, Débat public – Dossier du maître d’ouvrage, sept. 2023-janv. 2024, spéc. p. 6 à 12 : https://lext.so/RMx7cH.
  • 83.
    En ce sens, T. Duchesne et J.-M. Martinet, « Rapport d’études de la 1re session maritime méditerranéenne. Quelle politique de la France pour les fonds marins en Méditerranée ? », 2023, FMES, spéc. p. 78 : « La zone d’interdiction de chalutage pourrait recouvrir les eaux de la partie orientale du Parc naturel marin du Cap Corse et de l’Agriate, depuis le sémaphore du Cap Corse jusqu’à la limite sud-est du Parc. Ce périmètre pourrait devenir une zone de protection forte (ZPF) dans le sens du décret n° 2022-527 du 12 avril 2022 définissant cette notion. (…) La mesure quoique radicale n’est pas complètement nouvelle puisque la Commission européenne a déjà mis en place depuis septembre 2022 une interdiction d’accès à 87 zones sensibles de l’Atlantique Nord-Est à tous les engins de fond ».
  • 84.
    En ce sens, M. They, Rép. internat. Dalloz, v° Épave maritime, 2023, spéc nos 93 et s. ; rappr. A. Maniatis, « Le patrimoine culturel subaquatique et le tourisme », in Annuaire de droit maritime et océanique, t. XLI, 2023, Université de Nantes, spéc. p. 238 et s.
  • 85.
    C. Lallement, « Les épaves dangereuses dans les ports maritimes », Neptunus 2000, 6 (1), p. 14 à 19.
  • 86.
    C. Legendre, « Les épaves et le droit international maritime », DMF 1975, p. 195 et s.
  • 87.
    Si l’on excepte la règle selon laquelle la loi du pavillon s’applique aux épaves des navires de guerre et autres navires d’État appartenant ou exploités par un État à des fins gouvernementales et non commerciales.
  • 88.
    Version en vigueur au 1er août 2024.
  • 89.
    D. n° 201-615, 18 mai 2016, portant publication de la convention internationale sur l’enlèvement des épaves, adoptée à Nairobi le 18 mai 2007, signée par la France le 24 septembre 2008, dite Conv. de Nairobi : JO, 20 mai 2016. La Convention peut entrer en vigueur en France, ayant été ratifiée par plus de dix États conformément aux exigences de l’article 18, paragraphe 1. Trente-trois États l’ont ratifiée, dont les principales puissances maritimes mondiales : https://lext.so/sByJ4C.
  • 90.
    Conv. de Nairobi, art. 9, § 1 et 2. L’État d’immatriculation du navire, le propriétaire du navire et les éventuels autres États concernés, doivent être immédiatement informés.
  • 91.
    Conv. de Nairobi, art. 9, § 4.
  • 92.
    Conv. de Nairobi, art. 9, § 7 et 8.
  • 93.
    Sous réserve de la discussion des moyens techniques utilisés pour le retirement et payés par le propriétaire de l’épave.
  • 94.
    A. Vialard, « Déclin du droit de propriété privée dans le nouveau régime juridique des épaves », DMF 1983, p. 505 et s.
  • 95.
    Version en vigueur au 1er août 2024.
  • 96.
    C. envir., art. R. 218-6.
  • 97.
    Conv. de Nairobi, art. 10.
  • 98.
    Il est prévu des causes exonératoires aux articles 10 et 11 de la convention de Nairobi de 2001.
  • 99.
    Sont visées, entre autres, la convention internationale de 1969 sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures et la convention internationale de 1996 sur la responsabilité et l’indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses.
  • 100.
    En revanche, pour tout ce qui relève de sa responsabilité, la convention ne fait que renvoyer aux régimes international ou national applicables.
  • 101.
    Il faudra sans doute, pour apprécier le danger, tenir compte des dispositifs européens : PE et Cons. UE, dir. n° 2005/35/CE, 7 sept. 2005, relative à la pollution causée par les navires et à l’introduction de sanctions en cas d’infractions, telle que modifiée par la directive n° 2009/123/CE – PE et Cons. UE, dir.n° 2024/1203, 11 avr. 2024, relative à la protection de l’environnement par le droit pénal et remplaçant les directives 2008/99/CE et 2009/123/CE : JOUE L 2024/1203, 30 avr. 2024  (spéc. art. 3, 2, i, qui vise les rejets par les navires de substances polluantes relevant du champ d’application de l’article 3 de la directive n° 2005/35/CE).
  • 102.
    C. transp., art. R. 5142-5.
  • 103.
    Sur les conditions de cette mise en demeure, v. C. transp., art. R. 5142-6 – C. transp., art. R. 5142-7.
  • 104.
    C. transp., art. R. 5142-6.
  • 105.
    C. transp., art. R. 5142-9.
  • 106.
    « Se trouvant dans les eaux territoriales, dans les eaux intérieures en aval de la limite transversale de la mer, dans les limites administratives des ports maritimes ou sur les rivages dépendant du domaine public maritime ou sur le littoral maritime » (C. transp., art. L. 5142-1).
  • 107.
    À l’exception de celles faisant partie des biens culturels maritimes.
  • 108.
    C. transp., art. L. 5143-2.
  • 109.
    Le propriétaire peut être déchu de ses droits en application l’article L. 5142-2 du Code des transports ; la créance des sauveteurs, ainsi que celle des administrations qui ont procédé aux travaux de sauvetage, est garantie par un privilège sur la valeur de l’épave de même rang que le privilège des frais pour la conservation de la chose (C. transp., art. L. 5142-3 – C. transp., art. L. 5142-5).
  • 110.
    C. transp., art. R. 5142-12, selon lequel la vente ne peut avoir lieu moins d’un mois après la date à laquelle elle aura été annoncée. S’il s’agit d’une marchandise périssable, l’autorité compétente (visée à C. transp., art. R. 5142-6) peut faire procéder à la vente sans qu’aient été observés les délais prévus aux alinéas précédents. Et en présence d’une épave de faible valeur, dont la vente ne procurerait aucun produit net appréciable, elle peut être remise au sauveteur en propriété selon l’article R. 5142-13 du Code des transports.
  • 111.
    C. transp., art. L. 5142-14, le produit net de la vente est versé à l’Établissement national des invalides de la marine (compte Gestion des épaves), où il peut être réclamé pendant cinq ans par le propriétaire non déchu de ses droits ou par ses ayants droit. À l’expiration de ce délai, il est acquis au Trésor. Si le propriétaire est déchu de ses droits, le produit net de la vente est immédiatement acquis au Trésor.
  • 112.
    V. les réflexions sur le régime encadrant le stationnement des récifs ou « navires récifs » sur le fond de la mer et sur la volonté d’immerger des épaves dans le but de favoriser l’économie bleue du littoral, la restauration écologique et la création de nouveaux spots de plongée, BELDA Consulting, étude exploratoire, « Aspects juridiques de l’immersion des navires pour en faire des récifs coraliens », mars 2022 : https://lext.so/9G-ACn.
  • 113.
    V., pour une raison qui touche à la santé des populations, lors des enquêtes de terrain menées par le Drassm, en association parfois avec la Convention pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est. « Un certain nombre de cargaisons dangereuses envoyées par le fond lors des deux grands conflits contemporains ou volontairement immergées après 1945, notamment dans les espaces maritimes de la ZEE, étaient désormais susceptibles, à court terme, par le jeu de la corrosion maritime de se répandre dans les eaux de notre pays. Or, ce risque, difficile d’emblée à juguler, est a fortiori accru dans le contexte d’interventions incontrôlées menées par des opérateurs mobilisés à la récupération de ces épaves historiques sans avoir, faute de législation ad hoc, prévenu les autorités françaises ni sollicité leur aval », T. Duchesne et J.-M. Martinet, « Rapport d’études de la 1re session maritime méditerranéenne. Quelle politique de la France pour les fonds marins en Méditerranée ? », 2023, FMES, spéc. p. 61.
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