Seine-et-Marne (77)

À Meaux, l’ancienne prison devient une cité de la musique

Publié le 06/10/2021

Depuis le 8 juillet 2004, la « maison d’arrêt de Meaux » ne se situe pas à Meaux, mais bien dans la commune de Chauconin-Neufmontiers. Cette prison de 826 places a été commandée dans le cadre de l’opération « Prisons 4 000 » dirigée par le ministère de la Justice et lancée en 1998, dans le but d’augmenter les capacités pénitentiaires en France. L’ancienne prison du XIXe siècle, construite en centre-ville et devenue obsolète n’a pour autant pas été détruite. Elle deviendra même bientôt la nouvelle cité de la musique de la ville et prendra le nom de Simone Veil.

Jusqu’au milieu du XIXe siècle, la prison de Meaux se trouvait dans l’ancien palais des comtes de Champagne, remplacé aujourd’hui par l’hôtel de ville. Ce château, construit durant le Moyen Âge, était en très mauvais état, ce qui poussa la décision de créer une nouvelle prison dans le faubourg Saint-Nicolas. La maison d’arrêt de Meaux s’inscrit aussi dans le cadre des constructions carcérales du Second Empire. Pas moins de 48 prisons départementales sont érigées entre 1853 et 1863.

Édifiée entre 1854 à 1857, cette prison a cependant été progressivement désaffectée à la suite de l’inauguration du centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin en 2004. Dans l’attente de sa reconversion, le service Patrimoines et Inventaire d’Île-de-France a mené une campagne photographique et une étude historique en 2011 pour cette prison, reconnue comme « particulièrement représentative de son époque », par Judith Förstel, conservatrice du patrimoine au sein du Conseil régional d’Île-de-France.

Un patrimoine à préserver

L’ancienne prison de Meaux est située rue des Cordeliers. Imposante, ses plans ne respectent pas tout à fait la circulaire Persigny du 17 août 1853. Dans cette « circulaire relative à la construction et à l’appropriation des prisons départementales », le ministre de l’Intérieur invite le préfet à faire appliquer la loi, soit l’abandon de cellules individuelles, jugées trop coûteuses, au profit d’un retour au régime communautaire. On revient alors à la doctrine des quartiers partagés partout en France.

L’ancien architecte départemental de Seine-et-Marne, Ernest Mangeon, trace pour le nouvel établissement un plan rectangulaire, caractéristique des prisons du XIXe siècle comme celle de Coulommiers ou encore Fontainebleau qu’il dessine également. À l’intérieur, précise Sophie de Moustier, responsable de la valorisation du patrimoine culturel au Conseil régional d’Île-de France, « un vaste espace de circulation central gouverne les quatre niveaux de la maison d’arrêt (dont trois étages de cellules). Cette grande nef s’achève à l’est et à l’ouest par deux sortes d’absides arrondies. Celle placée au bout du bâtiment permettait de surveiller simultanément l’ensemble des cellules et des “préaux” (cours de promenade) disposés en camembert dans la cour orientale. C’est l’application du principe “panoptique” caractéristique de l’architecture carcérale de cette époque : un seul lieu d’observation doit permettre de contrôler l’ensemble de la prison ».

L’édifice a été construit en meulière, une pierre caverneuse de couleur brune que l’on trouve en abondance en Île-de-France ; un matériau reconnu pour ses grandes qualités d’isolation thermique. « L’architecte a, par ailleurs, joué de sa couleur pour animer les façades, en réhaussant la teinte naturelle de la pierre par des joints en mortier de tuileau, de teinte rosée », poursuit Sophie de Moustier. Une cinquantaine de détenus hommes peuvent y séjourner en attendant d’être envoyés au bagne.

Une nouvelle prison à Meaux-Chauconin

Dans son rapport de visite (du 14 au 24 janvier 2014), le Contrôleur général des lieux de privation de liberté rappelle les raisons de la construction d’une nouvelle prison : « Les équipements ont été conçus pour améliorer les conditions de vie et d’hygiène des personnes détenues et pour favoriser l’accueil des familles. Les conditions de travail des personnels ont également été prises en compte ». Mise en service le 8 juillet 2004, le centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin a accueilli ses premiers détenus au début de l’année 2005, entraînant peu à peu la fermeture de la maison d’arrêt de Meaux.

Sur une surface totale de 14 hectares, le nouveau centre a été construit dans le cadre de l’opération « Prisons 4 000 » en application de la loi de programme n° 95-9 du 6 janvier 1995 relative à la justice (L. n° 95-9 du 6 janvier 1995) et qui a débouché sur la construction des établissements de Liancourt (Oise), La Farlède (Var) et Chauconin-Neufmontiers (tranche dite 4 000 B). La conception avait été confiée à l’agence Architecture Studio et la réalisation à l’entreprise de travaux publics Quille.

Le cahier des charges prévoit un plan classique de forme carrée d’environ 230 mètres de côté avec deux miradors en diagonale sur un mur d’enceinte de six mètres de hauteur, entourant un chemin de ronde et une seconde ligne de grillage autour des quartiers de détention.

L’innovation se trouve alors dans l’équipement d’une douche pour chacune des 600 cellules de neuf mètres carrés. On revient donc au régime cellulaire, avec pour seul équipement collectif le gymnase. Prison pour hommes, elle est réservée aux détentions préventives ou aux courtes peines.

Des cellules aux salles de musique

De 2004 à aujourd’hui, l’ancienne prison de Meaux a donc été laissée à l’abandon, se recouvrant peu à peu de graffitis et de végétation sauvage. Mais plus pour longtemps. Le projet final de la transformation de l’établissement pénitentiaire en conservatoire de musique a été validé par la communauté d’agglomération du Pays de Meaux le 4 mai 2021, après de longues années de débats. Le lauréat du concours d’architecte a lui aussi été annoncé : AA Group.

Rénovée et agrandie, l’ancienne prison meldoise doit pouvoir accueillir les musiciens du conservatoire et de l’harmonie. Avec un budget à 13 M€, ce nouveau pôle musical a un double objectif : mutualiser les moyens et rendre l’agglomération attractive. Un nouveau bâtiment doit être construit à gauche de la prison, sur l’actuel parking. Il accueillera notamment un auditorium de 310 places. Les anciennes cellules des prisonniers seront, quant à elles, transformées en salles individuelles de répétition. Les travaux devraient débuter fin 2021 pour une ouverture aux musiciens prévue en février 2024.

X