Obligation réelle environnementale : les clés pour répondre présent

Publié le 30/04/2025
Arbre, nature, enfants
Volodymyr/AdobeStock

Le 17 juin prochain, Lextenso proposera, en partenariat avec la rédaction du Defrénois, une formation relative à l’obligation réelle environnementale (ORE), animée par Me Benoît Hartenstein, notaire à Metzervisse, correspondant ARBRES 57. Cette formation vise à acquérir toutes les clés de la pratique de cet outil encore mal connu et peu utilisé malgré une demande croissante des citoyens. Explications.

Actu-Juridique : Pourquoi proposer une formation sur les ORE ?

Benoît Hartenstein : Le 9 avril dernier, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat s’est réunie en table ronde pour dresser le bilan et examiner les perspectives de l’ORE. Ont notamment été pointés à cette occasion une méconnaissance de cet outil juridique et ce qui semble constituer un manque d’investissement des notaires en la matière, mais dont la raison très probablement un déficit d’information, voire de formation, sur ce sujet. Le sénateur, Olivier Jacquin, soulignait comment, à titre personnel, il avait rencontré des difficultés à trouver un notaire qui se dise compétent pour l’accompagner dans son projet d’ORE et Vanessa Kurukgy, intervenant au titre de la Fédération des conservatoires d’espaces naturels, confirmait qu’elle disposait d’une liste de notaires acceptant d’intervenir mais une liste encore trop réduite. Le faible portage politique et administratif ainsi qu’une incitation fiscale trop faible peut encore expliquer ce mésusage alors que la demande de nos concitoyens, à titre individuel ou à travers les communes et collectivités locales, ne cesse de croître, je peux en témoigner également.

Cette formation s’adresse donc à tous les praticiens et leurs collaborateurs puisque je reçois des demandes de particuliers de la France entière et qu’il est important que, par son maillage territorial, le notariat puisse répondre à ces demandes.

AJ : Pouvez-vous rappeler le cadre juridique que constitue l’ORE ?

Benoît Hartenstein : L’ORE a pour finalité de protéger la biodiversité ou de restaurer des fonctions écologiques. Il s’agit d’un contrat, passé par acte authentique, entre, d’une part, le propriétaire (public ou privé) d’un bien immobilier et, d’autre part, un cocontractant (une collectivité publique, un établissement public ou encore une association ayant pour objet la défense de l’environnement). Les parties se fixent des obligations, de faire ou de ne pas faire, réciproques et complémentaires, en vue d’atteindre précisément les objectifs fixés. Ces obligations, limitées dans le temps, perdurent pendant toute la durée du contrat, indépendamment des changements de propriétaire à la suite d’une vente, d’une donation ou encore d’une succession. Par ailleurs, rappelons que l’article 1394 D du Code général des impôts permet déjà aux communes d’exonérer de l’impôt foncier les propriétaires ayant conclu un tel contrat.

AJ : Dans quels contextes êtes-vous sollicité pour conclure une ORE ?

Benoît Hartenstein : À titre d’exemple, le 18 septembre 2021, les propriétaires du Château de Bétange, près de Florange, ont signé une ORE avec la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), pour une durée de 99 ans. Ce contrat a pour objectif de préserver 156 marronniers formant une allée menant au château et les espèces protégées qui s’y trouvent, cette allée, longue de 650 mètres, sur 15 mètres de large, ayant été plantée en 1856, à l’initiative de Théodore de Gargan.

Le 22 octobre 2021, une seconde ORE a été signée, également pour une durée de 99 ans, entre une association agréée pour la pêche et la protection du milieu aquatique et le Syndicat des eaux vives des 3 Nied, dans le département de la Moselle. Cette ORE porte sur une zone humide de près de 13 hectares et le contrat a pour objectif de préserver, notamment, des mares et chenaux qui jouent un rôle fondamental pour le stockage des eaux de crues, ainsi que pour la préservation de nombreuses espèces vivantes.

On le voit, les ORE s’adaptent facilement aux enjeux environnementaux repérés sur le bien immobilier à sauvegarder ; il peut y avoir, ainsi, autant d’obligations de faire ou de ne pas faire, réciproques et spécifiques, déterminées en fonction des objectifs à atteindre sur le lieu. Les notaires, tout particulièrement, par leur proximité avec les propriétaires privés comme publics, disposent de tous les atouts pour répondre efficacement présents.

AJ : La commission sénatoriale s’est montrée critique à l’égard de l’implication du notariat en la matière. En ce qui vous concerne, êtes-vous néanmoins optimiste ?

Benoît Hartenstein : Assurément je le suis ! Dès 2018, la 4e commission du 114e Congrès des notaires de France (« Demain le territoire ») mettait en lumière l’ORE en soulignant que « la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages avait pour objectif de protéger et valoriser notre patrimoine naturel. Pour y parvenir, elle crée notamment un outil juridique nouveau : l’obligation réelle environnementale. Elle offre un cadre juridique aux propriétaires souhaitant participer à la protection de l’environnement. Cet acte étant obligatoirement dressé par acte authentique et publié, il intéresse le notariat au premier plan » (DEF136c9). L’an passé, la 1re commission du 120e Congrès des notaires de France (« Vers un urbanisme durable ») invitait nos consœurs et confrères à anticiper les défis environnementaux en adoptant, notamment, une proposition visant à créer un statut de l’arbre dans le Code civil. Le notariat sait toujours répondre présent aux enjeux sociétaux ; il démontrera une fois de plus qu’il est un acteur impliqué et fiable en matière d’ORE.

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