L’article 25 bis de la loi de finances 2025 : vers la fin de l’attractivité fiscale française pour les managers d’entreprises sous LBO ?

Publié le 03/04/2025
L’article 25 bis de la loi de finances 2025 : vers la fin de l’attractivité fiscale française pour les managers d’entreprises sous LBO ?
ARMMY PICCA/AdobeStock

La loi de finances (LF) 2025 adoptée définitivement le 5 février par le recours à l’article 49, alinéa 3 de la Constitution est venu introduire via son article 25 bis un régime fiscal et social spécifique touchant aux gains de management packages. Or une telle mesure n’est pas sans compromettre la stratégie managériale de certains investissements LBO.

En l’espèce, l’article 25 bis de la loi de finances 2025 instaure à l’article 163 bis H du CGI un nouveau régime d’imposition conduisant une part des plus-values réalisées par les dirigeants de sociétés à être assimilée juridiquement à des salaires et à être taxée comme telle. Ce nouveau dispositif vient soumettre les gains réalisés sur les titres financiers (actions, parts sociales, obligations, bons de souscription) souscrits ou acquis par les dirigeants ou les salariés de sociétés (ou qui leur seraient attribués)1, et ce lorsque ces gains sont acquis en contrepartie de leurs fonctions au sein de ladite société émettrice2. Le texte précise qu’il en va de même pour toute société dans laquelle la société émettrice détient directement ou indirectement une quote-part du capital social3.

En pratique, outre le fait que le législateur retranscrit ici les principes établis par la jurisprudence du Conseil d’État du 13 juillet 20214, les titres visés par les dispositions du nouvel article 163 bis H du CGI doivent présenter un risque de perte en capital ainsi qu’avoir été détenus durant au moins deux années consécutives, sauf, toutefois, s’ils ont fait l’objet d’une acquisition dans le cadre d’un régime légal de type BSPCE notamment.

En pareilles circonstances et par principe, les gains réalisés par les dirigeants et salariés dans le cadre de leurs fonctions dans la société sont imposés comme étant des salaires. Exceptionnellement, seule une partie des gains est considérée comme une plus-value dont le montant taxable est établi par la multiplication du prix d’acquisition ou de souscription des titres en question par au maximum trois fois l’indice de performance financière de la société émettrice.

L’article 25 bis de la loi de finances 2025 précise également que ces nouvelles règles d’impositions concernent les opérations qualifiées d’intercalaires relevant des articles 150-0 B et 150-0 B ter du CGI5, lesquelles ne peuvent désormais plus bénéficier de régimes de sursis ou de report d’imposition. Idem concernant les opérations de transmission à titre gratuit des titres concernés6. Le gain financier réalisé par le cédant (donateur) est ainsi imposable au titre de l’année durant laquelle le cessionnaire (donataire) a disposé de ses titres ou les a cédés, ou encore mis en location ou bien même convertis7.

De plus, le texte précise que désormais le gain issu de la détention de titres objets de management package détenus via un plan d’épargne en actions (PEA) ne bénéficie plus d’aucune exonération fiscale en matière d’impôt sur le revenu. Désormais, et ce à compter de la promulgation de la loi de finances 2025, l’inscription en PEA de tels titres est interdite sous peine de clôture immédiate du plan d’épargne concerné.

Outre ce nouveau régime, le nouvel article 163 bis H du CGI prévoit qu’une nouvelle contribution sociale spécifique de 10 % soit prélevée sur le gain issu d’un management package8. Cette contribution sera recouvrée de la même manière que les prélèvements sociaux sur le revenu issu du patrimoine.

Ce faisant, le gain de sortie d’un management package acquis en contrepartie de leurs fonctions par les dirigeants et/ou salariés de sociétés est fiscalisé comme étant une plus-value de cession dans la limite du plafond exposé précédemment, soit à un barème de 12,8 % d’IR et à 17,2 % de prélèvements sociaux, ainsi qu’à 4 % de contribution différentielle sur les hauts revenus (CDHR)9 ; le solde étant lui encore soumis à un traitement comme salaire, c’est-à-dire à l’application du barème progressif de l’IR ainsi qu’à une contribution salariale spécifique de 10 %.

En conséquence, une telle réforme de la fiscalité des management packages est une très mauvaise nouvelle pour les dirigeants d’entreprises placées sous financement LBO ainsi que pour les gérants de fonds d’investissement recourant à l’effet de levier. Désormais, les gains qu’ils percevront en rémunération de leurs fonctions dans les sociétés cibles seront imposés à hauteur de 59 %, c’est-à-dire le double d’une taxation en capital avant l’adoption du PLF 2025, et ce dès lors que le gain obtenu sera supérieur à trois fois l’investissement réalisé par le fonds ou la holding au moment de la revente des titres de la société cible.

Avec une telle fiscalité, bon nombre de managers d’entreprises sous LBO vont indéniablement hésiter avant de s’engager aux côtés d’un fonds d’investissement au sein de la société cible. Les fonds LBO sont, a priori, les grands gagnants de cette réforme portée par l’article 25 bis de la LF 2025. Mais, sur le long terme, un fonds d’investissement sera-t-il capable de se passer des services de managers expérimentés afin de mener à bien sa stratégie financière ? Rien n’est sûr. Les fonds LBO risquent eux aussi de perdre en efficacité avec une telle réforme fiscale.

Notes de bas de pages

  • 1.
    On pense notamment aux stock-options de C. com., art. L. 225-177 (dont les BSPCE) ainsi qu’aux actions gratuites de C. com., art. L. 225-197-1.
  • 2.
    CGI, art. 163 bis H, I nouv.
  • 3.
    CGI, art. 163 bis H, I nouv.
  • 4.
    CE, 13 juill. 2021, n° 428506, 435452 et 437498.
  • 5.
    Ces opérations intercalaires sont définies par C. com., art. L. 225-197-1, III, ainsi que par le BOFiP BOI-RSA-ES-20-20-10-20, § 130.
  • 6.
    CGI, art. 163 bis H, II nouv.
  • 7.
    CGI, art. 163 bis H, II nouv.
  • 8.
    CSS, art. L. 137-42 nouv.
  • 9.
    LF 2025, art. 3.
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