TJ de Nanterre : « Ce n’est pas quelqu’un qui débute dans la délinquance » !

Publié le 02/01/2024
TJ de Nanterre : « Ce n’est pas quelqu’un qui débute dans la délinquance » !
Fotosenmeer.nl/AdobeStock

Pour un vol de matériel de chantier, un homme originaire de Roumanie comparait devant le tribunal judiciaire de Nanterre. Deux autres personnes étaient présentes au moment des faits, mais il est le seul à avoir été interpellé et à devoir assumer les conséquences de ce larcin.

Une interprète en roumain se place à proximité du box où apparaît un homme jeune vêtu d’un jogging. Monsieur F. est présenté en comparution immédiate devant la 16e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Nanterre pour un vol dans un entrepôt. Il ne reconnaît pas les faits et va donc livrer sa version après le résumé du juge.

Des policiers sont dépêchés sur un chantier du Plessis-Robinson après le déclenchement d’une alarme. Sur place, ils découvrent trois personnes venant vers eux et en train de transporter des outils. Tous prennent la fuite, seul Monsieur F. est interpellé.

Le matériel professionnel, dont des emballages et des chargeurs, était conservé dans un container dont le cadenas a été découpé à la meuleuse. Tout a été restitué. En garde-à-vue, le prévenu a raconté qu’il n’était pas du tout au courant de l’illégalité de la manœuvre : il était sorti faire la manche et a croisé sur son chemin deux hommes qui lui ont proposé une petite somme d’argent contre un coup de main pour transporter du matériel.

– « Donc, vous n’étiez pas présent quand le cadenas a été coupé ?

– Non. Ils m’ont proposé de les accompagner pour charger quelque chose. »

Il ajoute même qu’au départ, il ne souhaitait pas rentrer sur le chantier, mais que les deux autres hommes lui ont assuré qu’il n’y avait « rien de mal » et l’ont convaincu de les suivre. Toujours dans la version du prévenu, les outils étaient sortis lorsqu’il était arrivé devant le conteneur.

Le juge ne semble pas en croire un traître mot et ne s’en cache pas : « Si on croit ce que vous dites, que les dégradations n’ont pas été faites en votre présence, alors pourquoi l’alarme ne s’est pas déclenchée plus tôt ? » Le prévenu hausse les épaules, il n’en sait rien. Le juge ne s’arrête pas en si bon chemin : « Cela voudrait dire que les individus étaient déjà venus avant pour sortir les outils ? »

« On attrape souvent ceux qui courent le moins vite »

Monsieur F. a déjà été condamné en 2022 pour conduite sans permis et sans assurance. En couple et père de deux enfants, il est revenu en France récemment et loge dans un campement.

La procureure précise que deux portes ont été dégradées là où les ouvriers entreposent leur matériel, estimé à plusieurs milliers d’euros. S’il ne peut pas assumer l’intégralité de la responsabilité de ce vol, « on attrape souvent ceux qui courent le moins vite », résume-t-elle. Elle note que Monsieur F. avait une interdiction de territoire pendant trois ans et qu’il est sorti de prison le 1er août 2023. « Ce n’est pas quelqu’un qui débute dans la délinquance, le tribunal n’est pas dupe. » Elle requiert huit mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt.

L’avocate de Monsieur F. demande à ne pas retenir la circonstance de l’effraction pour ce « petit boulot à ramasser du matériel contre 40 euros ». Elle regrette que les vidéos de surveillance n’aient pas été exploitées dans le cadre de la procédure. « On lui reproche l’intégralité des faits mais vu le nombre de produits retrouvés, c’est impossible qu’il ait pu tout dérober. » Elle estime la peine demandée par le ministère public très stricte et s’étonne d’un paradoxe : on ne souhaite pas voir son client rester sur le territoire tout en voulant qu’il soit incarcéré en France « aux frais du contribuable »…

Monsieur F. est finalement déclaré coupable et condamné à six mois d’emprisonnement avec mandat de dépôt. La décision le laisse presque indifférent, il demande simplement au juge dans quelle maison d’arrêt on s’apprête à l’envoyer. « À celle de Nanterre », lance le juge. La réponse semble étonnamment lui convenir.

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