TJ de Nanterre : « Leur état de santé n’est pas compatible avec un maintien en détention »

Publié le 06/12/2024
Palais de justice de Nanterre
Palais de justice de Nanterre (Photo : @P. Anquetin)

Deux hommes âgés et affaiblis par la maladie ont fait une demande de mise en liberté sous contrôle judiciaire en attendant leur audience pour des faits de vols. La juge a dû décider si leur état de santé était suffisamment préoccupant pour y accéder.

Ils sont deux à entrer ensemble dans le box, lents, le corps fatigué, engoncés dans leur doudoune noire et leur pantalon de jogging. Monsieur B. et Monsieur M. ont la soixantaine bien avancée. Ils ont été présentés tous les deux devant le tribunal judiciaire de Nanterre deux semaines plus tôt en comparution immédiate. Comme la loi le leur permet, ils ont demandé un délai pour préparer leur défense et ont été placés en détention provisoire, une décision justifiée par leurs antécédents.

Aujourd’hui, devant la 16e chambre correctionnelle, ce n’est pas le fond du dossier qui sera examiné, mais si oui ou non Monsieur B. et Monsieur M. peuvent être libérés en attendant l’audience prévue dans deux mois. Tous les deux ont un casier émaillé de faits de vols et d’escroquerie sur personne vulnérable, trois mentions pour Monsieur M., 19 pour Monsieur B., et tous les deux, diabétiques, affirment que leur état de santé s’est dégradé depuis la dernière audience, ce qui a motivé leur demande de placement sous contrôle judiciaire.

« Vous connaissez les conditions d’incarcération à la maison d’arrêt de Nanterre »

« Je dois assumer une amputation du pied, explique Monsieur M., y’a pas de cellule PMR en prison et on ne peut pas me soigner là-bas. Mon pied doit être amputé, le médecin a peur que ça s’aggrave. » Il doit rester hospitalisé un mois avant l’amputation et la convalescence post-opératoire devra durer au moins un an.

« C’est la prostate, c’est le diabète… », énumère Monsieur B., qui doit recevoir des piqûres dans les yeux pour son traitement. « Les piqûres oculaires ne peuvent pas être faites à la prison, complète l’avocate. Donc il est en train de perdre la vue. On ne pourra pas attendre janvier. » Elle ne cache pas son inquiétude : « Vous connaissez les conditions d’incarcération à la maison d’arrêt de Nanterre, ce n’est pas une demande abusive. Leur état de santé n’est pas compatible avec un maintien en détention. Ils ont reconnu l’intégralité des faits qui leur sont reprochés. »

C’est une addiction au jeu qui a conduit les deux hommes à commettre des vols, note-t-elle, une addiction pour laquelle ils n’ont toujours pas de suivi psychologique. C’est aussi la situation de Monsieur M. qui semble particulièrement préoccupante. « Vu l’état de son pied, il y a un risque d’infection généralisée terrible, l’hospitalisation est nécessaire tout de suite. On prévoyait déjà l’amputation d’un orteil, maintenant on est sur une partie du pied, doit-on en arriver à une amputation de l’intégralité du pied ? C’est une demande qui se fonde uniquement sur les raisons de santé ! » Elle propose un transfert à Fresnes pour une proximité avec l’hôpital et assure que tous deux seront bien présents à l’audience de janvier prochain.

« Perdre la vue, c’est un péril imminent »

Pour la procureure, il faut distinguer la situation de chacun des prévenus. Elle reconnaît que l’opération de Monsieur M.  ne peut être faite à la maison d’arrêt, mais Monsieur B. ne fournit pas davantage de pièces justifiant la nécessité de lever son contrôle judiciaire. « Il a 19 mentions pour atteintes aux biens, même avec sa situation médicale, il est encore capable d’escroquer et de voler des gens dans la rue ! » L’avocate rebondit en rappelant le caractère imminent de l’opération de Monsieur M. et le risque d’une intervention chirurgicale qui tomberait à la date de l’audience. Elle conclut en insistant sur le cas de Monsieur B. : « Perdre la vue, c’est un péril imminent, il a plus de 60 ans ! »

Tous les deux n’ont rien d’autre à ajouter pour défendre leur cas. La juge rend sa décision : elle rejette la demande de mise en liberté de Monsieur B., en raison de l’absence de nouveaux éléments médicaux au soutien de cette demande. Pour Monsieur M., elle prononce le placement sous contrôle judiciaire avec obligation d’aller signer une fois par semaine au commissariat de sa ville.

Gare à ne pas oublier et à signaler son hospitalisation, met en garde la juge.

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