TJ de Versailles : interdit du territoire français, il menace et violente des policiers au centre de rétention administrative de Plaisir

Publié le 31/01/2025

Placé au centre de rétention administrative (CRA) de Plaisir en vue de sa prochaine expulsion dans son pays d’origine, Monsieur M. a été présenté devant le tribunal judiciaire de Versailles pour des faits de violences. Ce jeune homme, condamné à de multiples reprises et sous le coup d’une interdiction du territoire, est soupçonné de faits de violence à l’encontre de fonctionnaires de police.

Tribunal judiciaire de Versailles

Nicolas Dendri

Encadré par deux policiers, Monsieur M. entre calmement dans le box des accusés de la 6e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Versailles. Arabophone et indiquant qu’il comprend très peu le français, ce jeune homme de nationalité algérienne est accompagné par un interprète judiciaire durant sa comparution immédiate. Il est accusé de menaces et d’actes de violence sur des policiers en état de récidive légale. Après les formalités sur l’identité du prévenu, le juge commence à rappeler les faits. Condamné en 2023 à une interdiction du territoire français à la suite de faits de vol, Monsieur M. est placé au centre de rétention administrative (CRA) de Plaisir en attendant son retour en Algérie. Le 17 décembre dernier, un proche est venu lui rendre visite au CRA. Un visiteur qui a tenté d’introduire du cannabis sur le site de rétention. « Je n’étais pas au courant et c’est lui qui possédait le cannabis », interrompt en arabe le jeune homme de 26 ans. Le juge lui indique de garder le silence et poursuit : « D’après un policier, vous étiez mécontent de la situation. L’information s’est aussi répandue dans le centre de rétention, créant une confusion générale avec les autres personnes étrangères retenues au sein du CRA de Plaisir et mobilisant les forces de l’ordre présentes sur site. » Profitant de ce mouvement, Monsieur M. s’en est pris au mobilier en renversant les poubelles et son matelas ou en tapant sur les portes. Puis, il a menacé un premier fonctionnaire de police qui lui demandait de retourner dans sa chambre : « Je vais te tuer ! Tu es mort ! Je sais où tu habites ! » Il s’en est pris ensuite physiquement à lui et à son collègue en leur assénant un coup de tête et un coup de poing.

« Plusieurs témoins décrivent les mêmes faits dont la majore et deux autres policiers. Mais les deux victimes n’étaient pas équipées de caméra-piéton. Ce serait bien que les policiers utilisent ces outils. Je ne leur reproche pas, mais une vidéo est protectrice pour les prévenus et les fonctionnaires de police », regrette le président de l’audience. Durant sa garde à vue, Monsieur M. a contesté les faits, accusant les policiers d’avoir été violent à son égard et demandant à aller à l’infirmerie. Après ce rappel, les premières questions d’un juge tombent.

« Alors, avez-vous commis ces actes à l’encontre des policiers ?

– Non je n’ai commis aucune violence. C’est le fonctionnaire qui a porté plainte contre moi qui est entré dans ma cellule et qui m’a frappé.

– Quand vous êtes remonté du parloir, vous avez crié, renversé du mobilier et menacé les policiers.

– Avant que je remonte, il y avait des gens qui criaient et jetaient les poubelles. Moi je ne faisais rien. Et puis pourquoi j’aurais menacé la police ? Je n’ai pas de problème avec la police. Ce n’est pas moi je vous jure !

– Pourtant ils disent qu’ils ont été contraints de vous maîtriser et il y a des témoins.

– Moi je suis témoin qu’ils m’ont tapé. Il y a un certificat. J’ai des traces partout et j’étais blessé à l’épaule !

– Si vous étiez blessé, pourquoi des policiers vous ont ensuite vu faire des pompes ?

– Je faisais des pompes pour me remettre l’épaule en place. J’ai l’habitude. Ce n’est pas la première fois que mon épaule s’enlève. Quand j’étais en prison mon épaule tombait. Vous pouvez le voir sur mon dossier ! »

Après cet échange où les magistrats doutent de la sincérité du prévenu, le président est revenu sur le parcours de Monsieur M., connu par la justice française pour cinq condamnations pour des faits de violence sur des policiers, de vol et de stupéfiant entre 2022 et 2023. Après avoir exécuté une peine de prison, il a été placé dans le centre de rétention administrative de Plaisir en vue de son expulsion vers l’Algérie.

Les policiers victimes des menaces et des violences se sont portés partie civile. Leur avocate rappelle le « contexte particulier » du CRA de Plaisir avec « des difficultés incommensurables et un manque d’effectif sur un site de rétention où il y a des lieux de vie et des marges de liberté. » La représentante de la partie civile est aussi revenue sur l’absence de la caméra-piéton en reprenant les témoignages des deux policiers et en mettant en avant l’effet de surprise des agitations. Enfin, elle a insisté sur l’incohérence des explications du prévenu avant de demander une réparation du préjudice à hauteur de 700 euros et de 850 euros pour les deux fonctionnaires.

De son côté, le procureur rapporte les « versions concordantes » des témoins pour démontrer que « Monsieur M. n’est pas victime mais auteur des coups. » Le magistrat du parquet n’a pas hésité à ironiser sur sa blessure à l’épaule : « Il n’y avait pas de traces à l’infirmerie. Vous avez été placé en chambre d’isolement et à travers la caméra, on vous a vu faire des pompes. Pour quelqu’un avec une épaule luxée, ce n’est pas compatible de faire des pompes. » Après être revenu sur son parcours judiciaire et la dernière condamnation à un an d’emprisonnement en octobre 2023, le procureur requiert 18 mois d’emprisonnement en précisant « ne pas redemander l’interdiction du territoire français puisqu’elle est déjà prononcée. »

En réponse aux réquisitions, la défense sollicite la relaxe expliquant que Monsieur M. souhaitait mettre fin « à la pagaille et que les policiers ont cru que c’était lui qui était à l’origine de l’agitation. » L’avocate a insisté pour permettre au jeune homme de 26 ans de quitter la France pour retourner en Algérie afin de respecter son interdiction du territoire.

Finalement, après en avoir délibéré, les juges ont reconnu Monsieur M. coupable des menaces et des actes de violence à l’égard des policiers. L’homme est condamné à une peine de 12 mois d’emprisonnement, à verser 300 euros à chacun des fonctionnaires de police au titre du préjudice moral et 400 euros pour les frais d’avocat.

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