TJ d’Évry : « Tout le monde reconnaît le côté rocambolesque de ce dossier »

Publié le 02/01/2025
TJ d’Évry : « Tout le monde reconnaît le côté rocambolesque de ce dossier »
andranik123/AdobeStock

Beaucoup de bruit pour rien, ou pas grand-chose, c’est ce qui ressort de cette audience pour opposition à une ordonnance pénale dans une affaire de vol. La justice a finalement tranché en faveur du prévenu.

Monsieur C. se présente devant la 9e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire d’Évry-Courcouronnes pour faire opposition à une ordonnance pénale. Il a été condamné en 2023 pour des faits de vol commis à Draveil. La victime, Monsieur B., est présente à l’audience.

La juge unique commence par un rappel des faits en vue de rejuger l’affaire. À l’automne 2023, Monsieur B. était alors locataire d’un appartement dont Monsieur C. est toujours l’actuel propriétaire. Il a porté plainte contre lui après avoir découvert en rentrant à son domicile que les serrures avaient été changées. Auparavant, il avait constaté que Monsieur C. s’était rendu à plusieurs reprises chez lui et il avait alors menacé de ne plus payer le loyer s’il continuait. Ne pouvant rentrer dans l’appartement et étant dans l’impossibilité de récupérer ses affaires, il a porté plainte pour vol et s’est présenté à l’appartement accompagné par des policiers, pour faire constater l’impossibilité de récupérer ses affaires.

Monsieur C. conteste avoir volé les affaires ou empêché son ancien locataire de récupérer ses affaires. Il assure qu’il avait cessé de payer son loyer depuis plusieurs mois. « J’ai essayé de l’appeler, pas de réponse. En septembre, j’ai envoyé une lettre en recommandé pour lui annoncer qu’il devait partir. Le 23 octobre, j’ai mis un nouveau locataire. Les meubles, la vaisselle, c’est à moi ! »

– « Pourquoi vous changez la serrure s’il n’a pas récupéré tous ses meubles ?

– Il ne répondait pas !

– Pour mettre un nouveau locataire dehors, pour le dire de cette manière, il faut lui écrire, vous l’avez fait ?

– J’ai envoyé des messages.

– J’ai seulement des messages de Monsieur B. disant qu’il a fait des virements pour le loyer.

– Il sous-louait mon appart ! »

Le prévenu évoque également une surveillance de son appartement par la BAC en raison d’un supposé trafic. « On a aucune trace de ça, rétorque la juge. Il ne sous-louait pas, il hébergeait quelqu’un, et il en a tout à fait le droit. »

La juge demande une dernière fois pourquoi Monsieur C. fait opposition à l’ordonnance pénale : « Parce que je suis pas coupable ! »

« On dit qu’il a volé, sauf que ce n’est pas lui, et non, ça ne revient pas au même »

Au tour de Monsieur B. d’approcher pour donner sa version. Après avoir été jeté dehors sans ses affaires – y compris celles de son enfant de six ans dont il avait la garde le week-end, il raconte avoir vécu six mois « à la rue » : « Des mois sans voir mon fils à cause de ça. » Des vêtements, mais aussi des objets personnels, ainsi que son passeport étaient dans l’appartement. Les policiers ont pu constater qu’il n’avait pu récupérer que quelques effets. Pourtant, Monsieur C. maintient sa version : il n’a touché à rien.

« Cette affaire aurait pu se régler par une autre solution, à l’amiable », regrette le procureur. « D’autant qu’ils se connaissent tous les deux. » Il relève que le prévenu a court-circuité les règles légales : « Il joue sur les mots, dit qu’il n’était pas présent, mais en formation, il a envoyé son beau-père gérer ses affaires. » De là à requalifier les faits ? La question se pose car il s’agirait davantage d’une complicité de vol. « Mais ça revient au même », tranche le parquet qui insiste à nouveau sur le caractère très évitable de toute cette histoire. Il demande de confirmer l’ordonnance pénale.

« Tout le monde reconnaît le côté rocambolesque de ce dossier », estime l’avocat de Monsieur C., qui insiste aussi sur le fait que son client n’a pas agi selon la procédure. « On dit qu’il a volé, sauf que ce n’est pas lui, et non, ça ne revient pas au même. » Il n’a pas soustrait les affaires de Monsieur B., ni changé les serrures de l’appartement, maintient-il, il n’a pas non plus donné d’instructions. La défense demande la relaxe. À la barre avant la suspension pour le délibéré, Monsieur C. tente une dernière fois de justifier sa démarche : « S’il m’avait appelé pour m’expliquer avant d’aller à la police… mais il l’a jamais fait. »

Le tribunal déclare recevable la demande d’opposition à l’ordonnance pénale et prononce la relaxe. « Vous avez fait les choses de manière anormale, maintient la juge, mais le procureur n’a pas démontré votre intention de voler. »

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