Tribunal de Meaux : Il lance un couteau et perce l’implant mammaire de son amie

Publié le 07/09/2021

Moïse a beau dire qu’il a lancé en l’air le couteau par-dessus son épaule, sans voir que sa compagne était postée derrière lui, le résultat est là : la lame s’est plantée dans un sein et le silicone de la prothèse mammaire, se répandant dans le corps, a provoqué une infection.

Tribunal de Meaux : Il lance un couteau et perce l'implant mammaire de son amie
Salle d’audience au tribunal judiciaire de Meaux (Photo : ©I. Horlans)

 Même John Rambo, le héros des romans du Canadien David Morrell, sait qu’un lancer de couteau doit être millimétré et qu’en règle générale, il est préférable de pointer la cible face à soi plutôt que dans son dos. Moïse, 32 ans, affirme que l’arme blanche ne visait personne lorsqu’il s’est pris pour Sylvester Stallone. Hélas pour Anaïs, debout derrière lui, la lame a atteint son sein gauche et s’est fichée dans l’implant en gel de silicone. Bénéficiant dans un premier temps de dix jours d’incapacité temporaire de travail, elle va devoir subir une opération chirurgicale.

Moïse, un Congolais vêtu du maillot orange Fly Emirates des supporters du Paris Saint-Germain, comparaît le 27 août au tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne), 67 jours après les faits. Il est prévenu de violence aggravée, en récidive. Le 17 juin 2020 déjà, lors d’une CRPC (Comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité), il avait été condamné à un an de prison, intégralement assorti d’un sursis probatoire, pour avoir tiré les cheveux d’Anaïs et tenté de l’étrangler.

« C’était juste “un plan cul” »

 Moïse risque un torticolis tant il exprime par des rotations continues de la tête son rejet de l’accusation. Il est catégorique : jamais il n’a voulu blesser la jeune femme dans la soirée du 22 juin 2021 à Chanteloup-en-Brie. Tout juste admet-il une dispute « qui a un peu dégénéré » au point qu’il a donné « un coup de poing dans le bras » d’Anaïs, « c’est tout ». Il réfute aussi être « en couple » avec elle, une circonstance aggravante. Il raconte au tribunal le début de nuit dans la maison d’Anaïs : « On passait un bon moment et là, elle me parle de vie commune. Je lui dis : “Putain, tu niques le mood”. » En bon français, cela signifie qu’elle gâche l’ambiance.

Il poursuit : « C’était juste “un plan cul”, il n’était pas question qu’on vive ensemble. Elle se fâche, fout mes affaires dehors, m’insulte, me gifle. Je lui mets un coup sur le bras, elle court comme une folle dans le jardin, crie au secours. Je suis dans la cuisine. D’énervement, je balance un couteau sans regarder derrière moi. Cinq secondes plus tard, elle dit : “Moïse, Moïse, je saigne”. Elle a une entaille au sein gauche. Je la soigne et je pars. Voilà. » A ses yeux, il s’agit d’une petite coupure qu’il recouvre d’un pansement. Il est formel : il ne l’a pas atteinte profondément.

« On a toujours été chien et chat »

 La version d’Anaïs, que rapporte la présidente, diffère quelque peu. Ce 22 juin, alors qu’il l’aurait déjà menacée avec une arme à feu, elle prend peur. Il la roue de coups de pied, de poing, s’empare de deux couteaux : « Il me bousille à mort », indique-t-elle aux policiers à sa sortie d’hôpital, le 23. Sa plainte initiale, déposée ce mercredi-là, est retirée le 10 juillet. Elle justifie ainsi son revirement : « On a toujours été chien et chat. Je ne veux pas qu’il aille en prison. »

Toutefois, sous la pression de l’ex-femme de Moïse, qui craint qu’un jour il se montre violent envers leur fille âgée de 2 ans, Anaïs dépose à nouveau plainte le 7 août. Entre-temps, elle a développé une infection. Le silicone, un corps étranger, s’est déversé en elle jusqu’à l’empoisonner. Le 25 août, le chirurgien confirme que, sans opération, elle ne se rétablira pas.

 « Je suis célibataire, c’est une belle femme… »

 Le prévenu se dit « franchement lessivé ». Le dossier précise les raisons de sa fatigue. Depuis l’année 2019, ces deux-là se voient régulièrement « pour passer un bon moment ». L’aventure tumultueuse vire souvent au pugilat. La CRPC de 2020 a sanctionné une de leurs peignées. Accompagnée d’une interdiction de se revoir, ils ont enfreint la mesure judiciaire plusieurs fois. Moïse s’en explique : « Que voulez-vous, je suis célibataire, c’est une belle femme… Elle me relance sans arrêt, j’ai même dû bloquer son numéro de téléphone. Elle a fini par me joindre via Instagram. » La juge Emmanuelle Teyssandier-Igna lui donne un conseil : « Cette fois, vous devrez vraiment rompre ! » Il est d’accord : « La seule chose qui m’importe est de ne jamais la revoir. Si elle me rappelle, je préviens direct la police. »

Me Lucile Levet, qui représente la partie civile, le rassure : « Madame est terrifiée à l’idée de vous revoir ! » L’avocate déplore que « ce séducteur ait humilié ma cliente, la réduisant à un “plan cul”. Il ne regrette pas d’avoir commis des violences mais d’avoir cédé à ses avances ».

 « Un salaud et une oie blanche »

Le procureur Hervé Tétier fustige à son tour « une attitude révoltante » et « les sept à huit marques sur le corps » d’Anaïs. Il reproche aussi à Moïse d’avoir dépeint la jeune femme en « escort-girl alors qu’elle gère un salon de danseuses ». Ses réquisitions sont sévères : révocation du sursis et deux ans de prison, soit trois au total.

« Je suis effaré, s’emporte Jean-Christophe Ramadier, défenseur de Moïse. « Nous n’avons pas lu le même dossier. Ce manichéisme est consternant. On veut nous faire croire qu’il y a le salaud et l’oie blanche ! » Le ministère public ayant ouvert la brèche en évoquant le métier d’Anaïs, Me Ramadier rectifie : « Bien sûr que c’est une escort-girl ! Elle apparaît sur les réseaux sociaux en petite tenue. » Ceci précisé pour soutenir l’idée que Moïse, à la tête d’une entreprise, pourrait être un pigeon idéal et qu’il n’existe aucune preuve qu’il a percé sa prothèse. « Cette affaire n’est pas claire », insiste-t-il, soulignant qu’entre le 22 juin (l’algarade) et le 25 août (programmation d’une intervention chirurgicale), deux mois se sont écoulés sans qu’ils se voient.

Moïse prend la parole en dernier : « Elle sait pertinemment que je ne suis pas violent, que je ne suis pas un mauvais garçon. Elle fait ça parce que je ne reviens pas vers elle. Je veux assumer mes responsabilités, mais pas au-delà. » A 18h30, le prévenu réalise qu’il ne verra pas Lionel Messi effectuer ses premières foulées avec le PSG, le 29, sur la pelouse du stade Auguste-Delaune à Reims. Condamné à la peine requise, trois années de détention, il est directement mené du box à la prison. Il n’a plus le droit de voir Anaïs et devra en outre lui régler une provision de 3 000 euros en attendant que soient fixés les intérêts civils, le 15 mars 2022.

Tribunal de Meaux : Il lance un couteau et perce l'implant mammaire de son amie
Me Lucile Levet au tribunal judiciaire de Meaux vendredi 27 août (Photo : ©I. Horlans)

 

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