Cécile de Saint Michel : « l’intelligence artificielle et la data se chargeront dorénavant des tâches les plus mécaniques »

Publié le 09/11/2023

Reportée de quelques mois, la généralisation de la facturation électronique n’en reste pas moins un sujet d’actualité pour les entreprises et les experts-comptables. Avec elle, le métier d’expert-comptable poursuit sa métamorphose entamée il y a quelques années déjà. « La transformation digitale des cabinets doit être l’occasion de renforcer la place stratégique des experts-comptables auprès des chefs d’entreprise », juge Cécile de Saint Michel, la présidente du Conseil national de l’ordre des experts-comptables. Entretien.

Actu-Juridique : Quel regard portez-vous sur votre première année de mandature à la présidence du Conseil national de l’ordre des experts-comptables ?

Cécile de Saint Michel : Ce fut une année riche au regard des nombreux projets que nous avons lancés. Numérisation, durabilité et formation sont les trois piliers de notre mandature et sur ces trois sujets précisément nous n’avons pas manqué de porter de nombreuses initiatives. Je pense notamment à notre plan « Profession comptable 2030 », qui vise à accompagner les professionnels pour mieux appréhender les profondes mutations qui impactent notre métier.

AJ : L’actualité pour les experts-comptables c’est la généralisation à venir de la facture électronique. La profession est-elle prête ?

Cécile de Saint Michel : Oui, ce sujet était d’ailleurs au cœur des échanges lors de notre Congrès de Montpellier fin septembre. La facturation électronique est une réelle opportunité pour les cabinets puisqu’elle permettra, à terme, d’automatiser des tâches à très faibles valeurs ajoutées et de dégager en conséquence du temps pour proposer d’autres services à nos clients. C’est une évolution évidemment positive. Elle permettra aussi de consolider l’attractivité des entreprises du fait de l’allégement des tâches administratives et des délais de règlement réduits. À l’occasion de notre dernier Congrès, Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, a précisé le calendrier d’entrée en vigueur de la réforme après le report annoncé quelques semaines auparavant. Si aucune obligation ne sera faite avant 2026, nous devons rester mobilisés vers cette transition. La transformation digitale des cabinets doit être l’occasion de renforcer la place stratégique des experts-comptables auprès des chefs d’entreprise.

AJ : Quelles seront à ce propos les missions que vous pourrez proposer dorénavant aux chefs d’entreprise ?

Cécile de Saint Michel : Accompagnements financiers, RH, cyber, l’expert-comptable de demain sera capable d’épauler le chef d’entreprise sur un ensemble de problématiques. Néanmoins, la comptabilité ne disparaîtra pas pour autant. Il faudra toujours analyser les données pour conseiller au mieux les entreprises. Les chiffres, si je puis dire, ne s’envoleront pas. Ils resteront le cœur de notre métier.

AJ : « Profession comptable 2030 » est un plan ambitieux. Les experts-comptables ne sont-ils pas suffisamment formés aux enjeux évoqués ?

Cécile de Saint Michel : Oui, l’Ordre engage une somme (4,7 millions d’euros dont 3 millions d’euros d’aide de l’État) pour déployer ce plan de formation comme il n’en avait jamais engagé auparavant. Les experts-comptables et leurs collaborateurs sont déjà dotés de connaissances solides mais il est vrai que l’ensemble des transformations auxquelles nous faisons face nous engage à un effort supplémentaire. Il s’agit, particulièrement pour les 170 000 collaborateurs dans nos cabinets, de monter en compétence puisque l’intelligence artificielle et la data se chargeront dorénavant des tâches les plus mécaniques. Piloté par le Centre de formation de la profession comptable (CFPC) et les instituts régionaux de formation (IRF), ce plan s’articule autour de quatre grandes thématiques : intégrer un cabinet, améliorer sa performance dans son cœur de métier, contribuer au développement de nouvelles missions et développer une compétence spécifique.

AJ : La formation des étudiants suit-elle, elle aussi, ces tendances ?

Cécile de Saint Michel : Nos cabinets ont besoin de compétences issues de filières différentes de celles qui conduisent à la comptabilité : sécurité informatique, data, analyse de données, juridique. Un cabinet est constitué en réalité d’un ensemble varié de corps de métier. Quant à la formation vers les métiers comptables elle-même, nous travaillons actuellement à une réforme des diplômes pour répondre précisément aux transformations du métier. C’est un sujet d’actualité sur lequel est investi Laurent Benoudiz, notre vice-président chargé de la formation.

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