Yvelines (78)

Justice : un partenariat pour les étudiants et la diversité

Publié le 24/04/2023

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Favoriser l’égalité des chances et encourager la diversité sociale dans le monde juridique : telles sont les promesses que viennent d’officialiser la cour d’appel de Versailles et l’association La Courte Échelle dans le cadre d’une convention de partenariat. Cette dernière débouchera notamment sur l’accueil d’étudiants stagiaires au sein de la juridiction et un accompagnement sur la durée par des professionnels. « La justice, en tant qu’institution de la République, a besoin de s’appuyer sur une meilleure représentation sociale de ses acteurs », soutient Jean-François Beynel, le premier président de la cour d’appel de Versailles. Rencontre.

Actu-Juridique : Pour quelles raisons la cour d’appel de Versailles a-t-elle signé cette convention avec La Courte Échelle ?

Jean-François Beynel : La République s’honore à travers deux sujets qui nous paraissent essentiels à la cour. Le premier est ce que l’on nomme l’ascenseur social, c’est-à-dire l’opportunité qui est donnée à des citoyens issus de milieux défavorisés d’accéder, par le travail, à d’autres situations sociales. Le deuxième concerne la diversité. La France est diverse, et sa justice rendue au nom de son peuple se doit, elle aussi, d’être diverse. Il s’agit de notre responsabilité. À cet égard, la convention de partenariat que nous avons conclue avec La Courte Échelle nous permet de satisfaire à ces principes puisque nous mettrons en relation, via un parrainage, des étudiants juridiques avec des mentors bénévoles, professionnels du droit.

AJ : Quels seront les étudiants concernés ? Des Yvelinois ?

Jean-François Beynel : Non, pas nécessairement. Il n’y a pas d’obligation géographique. Les étudiants qui nous rejoindront pour un stage ou même des postes de contractuels peuvent venir de toute l’Île-de-France ou des départements limitrophes à la région parisienne. Les premiers étudiants qui nous rejoindront, à partir du mois d’avril, viennent par exemple de Villetaneuse, en Seine-Saint-Denis. Aussi, je voudrais rappeler que la cour d’appel de Versailles, contrairement à ce qu’indique son nom, ne traite pas des affaires de la ville de Versailles. Et pour cause, le ressort de la juridiction couvre quatre départements : l’Eure-et-Loir, les Hauts-de-Seine, le Val-d’Oise et les Yvelines.

AJ : Comment se déclinera, concrètement, cette convention pour les étudiants ?

Jean-François Beynel : Ce partenariat leur permettra, premièrement, de bénéficier d’un stage au sein de la juridiction. Ils pourront évidemment découvrir le fonctionnement de la cour, des audiences ou des différents services. Aussi, et cela est extrêmement important, ils recevront le soutien, pendant au moins un an, d’un professionnel du droit sur le principe du mentorat. Ce professionnel bénévole pourra, selon les besoins de l’étudiant, répondre à ses questions sur son parcours universitaire, l’épauler dans son travail, le rassurer, l’accompagner dans son projet professionnel. C’est, il me semble, le point essentiel de cette convention. Les étudiants de la filière juridique font face, tout au long de leur cursus, à des choix et des questions cruciaux pour leur avenir. Un avis, un conseil, donné par un professionnel peut être extrêmement bénéfique, et ce d’autant plus pour un étudiant qui n’évolue pas dans un milieu habitué à ce type de carrières et qui peut légitimement se sentir déboussolé parfois.

AJ : Pourquoi, d’après vous, un magistrat ou un greffier aurait intérêt à s’investir pour aider un étudiant ?

Jean-François Beynel : Beaucoup de mes collègues ont la conviction, comme je vous le disais tout à l’heure, que la justice, en tant qu’institution de la République, a besoin de s’appuyer sur une meilleure représentation sociale de ses acteurs. Aussi, le parrain engagé s’enrichit nécessairement de l’expérience créée avec l’étudiant. C’est une opportunité pour lui également. Il est toujours bienvenu, quel que soit son âge et son expérience, de découvrir d’autres approches du métier. Cela peut déboucher sur une remise en question favorable à toutes les parties.

AJ : L’engagement social et citoyen fait partie des missions d’une juridiction comme la vôtre ?

Jean-François Beynel : C’est avant tout une question de volonté, me semble-t-il. Pour s’engager dans ce type de projet comme celui de La Courte Échelle, encore faut-il en avoir l’envie de le faire et partager, bien évidemment, le diagnostic posé d’un manque de représentativité du corps social français. À ce sujet, pour l’instant, nous observons avec plaisir qu’il y a plus de professionnels qui souhaitent s’investir d’une mission de parrainage que d’étudiants candidats. Aussi, rappelons que le garde des Sceaux a annoncé dans le cadre des États généraux de la justice le recrutement de 10 000 emplois supplémentaires d’ici 2027, dont 1 500 greffiers et 1 500 magistrats. C’est évidemment une chance qu’il nous faudra satisfaire. Or cela nécessite de disposer d’un vivier nécessaire et suffisamment bien formé. C’est aussi une formidable opportunité d’assurer une meilleure diversité au sein des services publics. À ce titre, l’action de La Courte Échelle s’inscrit une nouvelle fois parfaitement dans cet objectif.

AJ : Constatez-vous une moindre attractivité des métiers du droit chez les plus jeunes ?

Jean-François Beynel : Le droit continue d’attirer en masse les étudiants, il n’y a donc pas de problème à ce niveau-là. Néanmoins, de manière générale, les métiers de la fonction publique semblent moins coller aux aspirations des jeunes générations. Le cadre proposé, les évolutions de carrières promises et les valeurs de la fonction publique ne paraissent plus répondre totalement aux désirs des étudiants, comme il y a 20 ou 30 ans. À terme, si la tendance observée se poursuit, nous pourrions faire face à un problème de recrutement.

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