Les honoraires d’avocats ? Parlons-en !

Publié le 14/03/2023

Le 8 mars dernier, lors de l’émission C ce soir, une victime de violences conjugales a expliqué qu’un bon avocat était aussi difficile à trouver qu’une aiguille dans une botte de foin, ajoutant que les avocats/influenceurs « dépouillaient » leurs clientes. Notre chroniqueuse, Me Julia Courvoisier, saisit cette occasion pour répondre à toutes les questions que se posent les clients sur les honoraires. 

Photo d'un tas de pièces et billets euros passés à la loupe
Jürgen Fälchle / AdobeStock

Décidément chers lecteurs, l’heure n’est pas à la sympathie envers les défenseurs que nous sommes. Et depuis quelques jours, je dois dire que nous ne sommes pas épargnés ! Des avocats de voyous lorsque nous plaidons en défense. Des avocats voleurs lorsque nous défendons des victimes.

Je ressens toujours beaucoup de tristesse lorsque ma profession dans sa globalité est attaquée à coups de préjugés. Et encore une fois, elle l’a été. De façon, je dois le dire, un peu injuste.

« Toutes les économies d’une vie qui sont passées dans les frais d’avocat »

Dans le cadre d’une émission fort intéressante consacrée à la lutte contre les violences conjugales, une jeune femme, victime, a déclaré : « trouver un avocat bon, professionnel et transparent, c’est comme chercher une aiguille dans une botte de foin. On a plutôt des avocats influenceurs qui nous dépouillent. 90 % des victimes que j’ai se plaignent des avocats. C’est catastrophique. Toutes les économies d’une vie qui sont passées dans les frais d’avocat« .

Ces propos, fruits d’une expérience que je n’ai aucune légitimité à remettre en question, sont, je le crois, un peu excessifs. Non pas parce que cette situation n’existe pas, mais parce qu’ils mettent en cause l’ensemble des 70.000 avocats de France sans aucune distinction. Ils sont excessifs pour deux autres raisons : la première c’est qu’une expérience, encore plus une mauvaise expérience, ne permet pas à elle seule d’en déduire l’existence d’une règle. La seconde, c’est que si ces « mauvais » avocats existent, ils sont une minorité que la majorité d’entre nous dénonce.

Je vais donc, chers lecteurs, vous donner quelques conseils (gratuits) qui vous aideront à dénicher l’avocat qu’il vous faut !

Un tarif libre mais assis sur des éléments objectifs

Il faut d’abord comprendre que les honoraires des avocats sont fixés librement. Et c’est heureux.

Cela étant dit, comme la profession d’avocat est aussi une profession réglementée, l’article 11-1 du RIN prévoit que :

« L’avocat informe son client, dès sa saisine, des modalités de détermination des honoraires et l’informe régulièrement de l’évolution de leur montant. L’avocat informe également son client de l’ensemble des frais, débours et émoluments qu’il pourrait exposer ».

L’article 11-2 précise quant à lui que :

« Les honoraires sont fixés selon les usages, en fonction de la situation de fortune du client, de la difficulté de l’affaire, des frais exposés par l’avocat, de sa notoriété et des diligences de celui-ci. L’avocat chargé d’un dossier peut demander des honoraires à son client même si ce dossier lui est retiré avant sa conclusion, dans la mesure du travail accompli.

La rémunération de l’avocat est fonction, notamment, de chacun des éléments suivants conformément aux usages :

*le temps consacré à l’affaire,

*le travail de recherche,

*la nature et la difficulté de l’affaire,

*l’importance des intérêts en cause,

*l’incidence des frais et charges du cabinet auquel il appartient,

*sa notoriété, ses titres, son ancienneté, son expérience et la spécialisation dont il est titulaire,

*les avantages et le résultat obtenus au profit du client par son travail, ainsi que le service rendu à celui-ci,

*la situation de fortune du client ».

Vous l’aurez compris, chaque avocat fixe les tarifs qu’il veut, tout en respectant un certain nombre de principes qui l’aident à trouver le plus juste montant.

Il est évident qu’un ténor du barreau ayant trente ans d’expérience ne vous facturera pas le même montant qu’un confrère qui vient de prêter serment.

Il est aussi évident qu’une audience d’une journée ne vous sera pas facturée le même prix qu’une audience qui va durer sept jours.

Il est encore évident qu’un dossier à l’instruction pénale avec placement en détention provisoire ne vous coûtera pas le même tarif qu’une audience de comparutions immédiates d’une après-midi.

Il est également évident qu’un gros cabinet d’avocat ayant plusieurs collaborateurs vous facturera plus cher qu’un avocat exerçant seul.

Il est enfin évident que le client qui ne dispose que de maigres ressources devra être informé qu’il bénéficie peut-être d’une assurance de protection juridique ou qu’il peut solliciter l’aide juridictionnelle.

Toutes ces situations doivent être prises en compte lorsque l’avocat dresse son devis et vous propose des honoraires. Vous ne devez jamais quitter son bureau sans savoir ce que son intervention va vous coûter, si vous lui confiez votre dossier. L’avocat propose un tarif et le client doit l’accepter après avoir été informé et éclairé.

L’honoraire est la « juste rémunération » de l’avocat. Et en cas de conflit, le client mécontent peut saisir l’ordre des avocats d’une réclamation, qui pourra donner lieu à un remboursement des honoraires indûment perçus.

TVA, cotisations, frais et charges…

Il est important aussi de noter que le montant total facturé ne tombe pas dans la poche de l’avocat. Il faut en déduire :

– 20 % de TVA qu’il se contente de collecter pour l’État,

– environ 55 % de cotisations et charges obligatoires (sécurité sociale, retraite, maternité, cotisations ordinales).

Avec l’honoraire, l’avocat paye également ses charges courantes : loyer, collaborateurs, salariés et charges diverses. Comme tout chef d’entreprise me direz-vous, en effet, mais c’est important de le préciser.

Pendant très longtemps, le nom de l’avocat a circulé de façon un peu confidentielle en fonction de ses qualités et de ses réussites. Un peu comme un bon médecin, les clients communiquaient à leurs proches le nom de celui qui les avait bien défendus. Ces recommandations existent toujours et, dans mon cas, c’est exclusivement comme cela que mes clients me contactent. Certains croient, à tort, que mes 27.000 abonnés sur Twitter remplissent ma salle d’attente. Pas du tout : mes clients me viennent à chaque fois de la recommandation d’autres clients, sauf quelques rares exceptions.

Mais l’avènement des réseaux sociaux et de la médiatisation de notre profession a un peu changé les codes. C’est une réalité : aujourd’hui, le client va taper le nom de l’avocat sur internet pour en savoir plus sur lui. L’avocat est-il intervenu dans des dossiers médiatisés ? Intervient-il à la télévision ? A-t-il des comptes sur les réseaux sociaux et si oui, est-il beaucoup suivi ? Combien a-t-il de followers ? S’il en a beaucoup, c’est qu’il est évidemment meilleur que les autres !

Nous l’avons tous fait, et pas uniquement pour trouver un avocat.

Le nombre de followers impose la confiance et le respect dans l’esprit d’un grand nombre. Ce n’est ni une bonne chose, ni une mauvaise : c’est ainsi et il faut l’accepter.

On peut être un excellent avocat, par ailleurs présent sur les réseaux sociaux.

Les bonnes questions à se poser 

Alors comment choisir ?

Posez-vous quelques questions :

1/ Cet avocat est-il déjà intervenu dans des dossiers comme le vôtre ?

2/ Cet avocat a-t-il des disponibilités pour vous rencontrer dans les meilleurs délais ?

3/ Cet avocat est-il compatible avec vos moyens financiers ?

4/ Cet avocat accepte-t-il l’aide juridictionnelle si vous pouvez en bénéficier ?

5/ Cet avocat est-il à votre écoute ?

6/ Avez-vous confiance en cet avocat à la fin du premier rendez-vous ?

7/ Cet avocat accepte-t-il d’être payé en plusieurs fois si vous le lui demandez ?

8/ Cet avocat répond-il à vos questions et à vos interrogations ?

9/ Comprenez-vous ce que vous explique cet avocat ?

Sachez enfin, chers lecteurs, qu’un avocat ne peut pas vous certifier que vous allez obtenir ce que vous voulez.

Et si c’est lui qui prend contact avec vous pour vous proposer ses services : fuyez !

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