L’identification du juge compétent pour statuer sur l’action en contestation de la validité du contrat de mission conclu entre un avocat et son client

Publié le 13/02/2025
L’identification du juge compétent pour statuer sur l’action en contestation de la validité du contrat de mission conclu entre un avocat et son client
Hyejin Kang/AdobeStock

Il résulte de l’article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, qui est d’interprétation stricte, que le bâtonnier ou le premier président n’est compétent pour statuer sur la validité d’un contrat de mission comportant convention d’honoraires que lorsque la demande en nullité est invoquée, en défense, pour s’opposer à une demande de l’avocat en recouvrement de ses honoraires. Ainsi, ayant relevé que le client saisit un tribunal judiciaire, par voie d’action, en qualité de consommateur, afin de faire constater la mise en œuvre de son droit de rétractation, c’est à bon droit que la cour d’appel a rejeté l’exception d’incompétence invoquée par l’avocat.

Louvrier mérite son salaire, lavocat mérite ses honoraires ! S’il est une chose qui préoccupe le citoyen autant que la résolution de son litige, ce sont les honoraires à verser à son avocat lorsque le ministère de celui-ci est obligatoire. Cela peut se comprendre car, chargé de la défense des intérêts substantiels de son client, l’avocat n’a en principe pour seul moyen de subsistance que ses honoraires1. Aux termes de l’article 10, alinéa 3, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, « l’avocat conclut par écrit avec son client une convention d’honoraires, qui précise, notamment, le montant ou le mode de détermination des honoraires couvrant les diligences prévisibles, ainsi que les divers frais et débours envisagés ». Lorsque l’avocat a accompli des diligences au profit de son client, il est en droit de solliciter le paiement de ses honoraires2. Mais le droit applicable aux honoraires et, plus globalement, aux contrats de mission échappe souvent à la connaissance des clients et même des avocats, notamment lorsque doivent s’appliquer les règles du droit de la consommation.

En l’espèce, un client confie, à distance, à un avocat la défense de ses intérêts dans le cadre d’une procédure pénale. Un contrat de mission et de rémunération au forfait est signé entre les parties. Dix jours plus tard, le client informe l’avocat de l’exercice de son droit de rétractation et sollicite le remboursement de l’acompte qu’il a versé au moment de la conclusion de la convention d’honoraires. Pour briser la résistance de l’avocat, le client saisit le tribunal judiciaire d’une demande tendant au prononcé de la nullité du contrat de mission et de rémunération ainsi qu’à la condamnation de l’avocat à lui restituer les sommes versées3. L’avocat soulève vainement l’incompétence du tribunal judiciaire et le jugement est favorable au client. L’avocat interjette appel devant la cour d’appel de Pau4, mais le jugement est confirmé en appel. Pour écarter l’argument tenant à l’incompétence du tribunal judiciaire, la cour d’appel estime que le client avait saisi cette juridiction par voie d’action, afin de faire constater la mise en œuvre de son droit de rétractation.

L’avocat se pourvoit en cassation et sollicite l’annulation de l’arrêt d’appel. En soutien de sa demande, il invoque trois moyens de défense. Tout d’abord, selon lui, seuls le bâtonnier et le premier président de la cour d’appel sont compétents pour statuer sur les exceptions relatives à la validité d’une convention d’honoraires. Dès lors, il estime que la cour d’appel a violé les articles 174 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 relatif à la profession d’avocat en décidant que la juridiction de droit commun était compétente au motif que le litige ne concernait ni le montant ni le recouvrement des honoraires, mais portait sur la question de la validité de la convention d’honoraires. Ensuite, le requérant affirme qu’à défaut d’accord entre les parties, les contestations relatives au montant et au recouvrement des honoraires des avocats ne peuvent être réglées que par la procédure prévue par les articles 174 et suivants du décret de 1991. Cette procédure spéciale, qui oblige à soumettre ces contestations successivement au bâtonnier de l’ordre des avocats puis au premier président de la cour d’appel, exclut selon lui, par sa nature même, la compétence du tribunal judiciaire. Enfin, il invoque l’article L. 221-28 du Code de la consommation excluant l’exercice du droit de rétractation pour les contrats ayant pour objet certains produits ou certaines prestations spécifiques, notamment les « biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés »5. En clair, pour le requérant, le client-consommateur de services juridiques ne bénéficie pas du droit à la rétractation.

Le problème et la solution de la Cour de cassation. La Cour de cassation devait répondre à la question de savoir si le bâtonnier ou éventuellement le premier président de la cour d’appel est compétent pour statuer sur la validité d’un contrat de mission comportant convention d’honoraires lorsque la nullité est invoquée par voie d’action par le client de l’avocat. La Cour de cassation répond par la négative et rejette le pourvoi en cassation. Selon la juridiction suprême de l’ordre judiciaire, il résulte de l’article 174 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat, « qui est d’interprétation stricte, que le premier président n’est compétent pour statuer sur la validité d’un contrat de mission comportant convention d’honoraires que lorsque la demande en nullité est invoquée, en défense, pour s’opposer à une demande de l’avocat en recouvrement de ses honoraires ». Cela signifie a contrario que le bâtonnier et le premier président de la cour d’appel ne sont pas compétents pour statuer sur la contestation de la validité du contrat de mission soulevée par voie d’action par le client, en dehors de toute procédure de recouvrement d’honoraires engagée à son encontre par l’avocat. La Cour conclut qu’« ayant relevé que le client avait saisi un tribunal judiciaire, par voie d’action, en qualité de consommateur, afin de faire constater la mise en œuvre de son droit de rétractation, c’est à bon droit que la cour d’appel a rejeté l’exception d’incompétence invoquée par l’avocat ».

La solution est digne d’acclamation, car la loi ne traite spécifiquement ni du droit de rétractation du client-consommateur de services juridiques, ni de l’action en contestation de la validité du contrat de mission engagée par le client de l’avocat. C’est donc sans surprise que l’arrêt est publié au Bulletin. Deux lignes de force émergent de l’analyse en matière de détermination de la juridiction compétente. D’une part, le droit spécial issu du décret de 1991 ne peut s’appliquer que lorsque la validité du contrat de mission est contestée par voie d’exception par le client (I), à la suite de la procédure de recouvrement d’honoraires engagée par l’avocat. En revanche et d’autre part, seul le droit commun à vocation sera applicable lorsque la validité du contrat de mission est contestée par voie d’action du client, indépendamment de tout contentieux lié au recouvrement d’honoraires (II).

I – Contestation de la validité du contrat de mission soulevée par voie d’exception : application du droit spécial

Panorama du droit spécial applicable. Dans l’arrêt sous commentaire, la Cour de cassation rappelle les règles spéciales applicables aux litiges relatifs au contrat de mission de l’avocat. Elles découlent du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat et sont d’ordre public6. Son article 174 dispose que « les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats ne peuvent être réglées qu’en recourant à la procédure » organisée par cet acte règlementaire. Le contentieux7 est structuré autour de deux acteurs majeurs, à savoir le bâtonnier et le premier président de la cour d’appel.

Les réclamations sont soumises au bâtonnier8 par toutes parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise contre récépissé. Le bâtonnier accuse réception de la réclamation et informe l’intéressé que, faute de décision dans le délai de quatre mois9, il lui appartiendra de saisir le premier président de la cour d’appel dans le délai d’un mois. Le bâtonnier, ou le rapporteur qu’il désigne, recueille préalablement les observations de l’avocat et du client. Sa décision est notifiée, dans les 15 jours de sa date, à l’avocat et au client, par le secrétaire de l’ordre, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La lettre de notification mentionne, à peine de nullité, le délai et les modalités du recours.

Il est important de noter que la décision du bâtonnier peut, même en cas de recours, être rendue exécutoire par décision du président du tribunal judiciaire10 dans la limite d’un montant de 1 500 €11, ou, lorsqu’il est plus important, dans la limite des honoraires dont le montant n’est pas contesté par les parties12. Ce montant doit être expressément mentionné dans la décision. Pour les honoraires excédant le montant de 1 500 €, le bâtonnier peut, à la demande d’une des parties, décider, s’il l’estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire, que tout ou partie de sa décision pourra être rendue exécutoire même en cas de recours. Il peut également assortir sa décision de garanties selon les modalités prévues dans le Code de procédure civile (CPC)13.

La décision du bâtonnier est susceptible de recours devant le premier président de la cour d’appel, qui est saisi par l’avocat ou le client, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Une fois la cour d’appel saisie, les parties sont convoquées devant le premier président qui les entend contradictoirement et peut, à tout moment, renvoyer l’affaire devant la cour. L’ordonnance du premier président ou l’arrêt de la cour est notifié par le directeur de greffe par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. À la lecture des dispositions du décret du 27 novembre 1991, force est de constater que la compétence du bâtonnier et du premier président de la cour d’appel est limitée à l’hypothèse d’une contestation du montant et du recouvrement des honoraires de l’avocat. Elle ne détermine pas expressément la juridiction compétente pour connaître de la contestation de la validité du contrat de mission soulevée par voie d’action. La Cour de cassation s’est donc livrée à une interprétation stricte du texte.

Linterprétation stricte des règles spéciales. Étant donné qu’aucune disposition du décret de 1991 ne précise le régime de l’action en contestation de la validité d’un contrat de mission comportant convention d’honoraires, on peut hésiter entre la compétence du bâtonnier ou du premier président de la cour d’appel et celle d’une autre juridiction. Pour la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, il ressort de l’article 174 du décret du 27 novembre 1991, « qui est d’interprétation stricte, que le premier président n’est compétent pour statuer sur la validité d’un contrat de mission comportant convention d’honoraires que lorsque la demande en nullité est invoquée, en défense, pour s’opposer à une demande de l’avocat en recouvrement de ses honoraires ».

Il est d’ores et déjà frappant de constater que l’arrêt ne fait mention que du premier président de la cour d’appel, sans aucune référence au bâtonnier de l’ordre dans lequel exerce l’avocat impliqué dans le litige. Il s’agit probablement d’une erreur de plume car, comme nous l’avons relevé, en matière de contestation du montant ou du recouvrement d’honoraires, le premier président de la cour d’appel n’est en principe saisi qu’en cas de recours contre la décision du bâtonnier et, exceptionnellement, en cas d’absence de ce dernier dans le délai de quatre mois à compter de sa saisine. De ce point de vue, on peut donc considérer que cette motivation vaut également pour le bâtonnier.

Mais, plus substantiellement, l’arrêt apporte la précision – sans précédent – selon laquelle le bâtonnier ou le premier président ne peut examiner une demande relative à la validité du contrat de mission que lorsqu’elle est soulevée par voie d’exception. Autrement dit, il ne peut statuer sur une telle demande que lorsqu’elle est soulevée par le client en riposte à l’action en recouvrement d’honoraires de l’avocat. Cette solution se justifie par le fait qu’en pareille situation c’est l’action en recouvrement de l’avocat qui fonde la compétence du bâtonnier et éventuellement celle du premier président de la cour d’appel, la contestation de la validité du contrat de mission n’étant alors qu’un moyen de défense du client. On y voit bien l’application du principe selon lequel le « juge de l’action est le juge de l’exception »14. Or, dans l’affaire qui nous occupe, la validité du contrat de mission n’a pas été invoquée par le client en réaction à l’action en recouvrement de l’avocat. Au contraire, elle a été mentionnée par voie d’action, car c’est le client qui « a saisi un tribunal judiciaire d’une demande tendant au prononcé de la nullité du contrat de mission et de rémunération et à la condamnation de l’avocat à lui restituer l’acompte versé ». La Cour de cassation décide que, dans ce cas, la juridiction compétente est déterminée par application des règles de droit commun.

II – Contestation de la validité du contrat de mission invoquée par voie d’action : application du droit commun

Léviction du couple bâtonnier/premier président. La solution de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation paraît claire au premier abord. En effet, en décidant que « le premier président n’est compétent pour statuer sur la validité d’un contrat de mission que lorsque la demande en nullité est invoquée, en défense, pour s’opposer à une demande de l’avocat en recouvrement de ses honoraires », la haute juridiction laisse entendre qu’il est incompétent lorsque la nullité est plutôt invoquée par voie d’action. Il s’agit d’une incompétence matérielle ou d’attribution. Elle est donc d’ordre public. Ainsi, saisi d’une telle demande, le bâtonnier ou le premier président doit se déclarer d’office incompétent et renvoyer les parties à mieux se pourvoir15. Dans le cas contraire, il expose sa décision à l’annulation. Comme le précise la Cour de cassation, cette solution résulte d’une « interprétation stricte » de l’article 174 du décret du 27 novembre 1991. En effet, cet article ne donne expressément compétence au bâtonnier et au premier président que pour statuer sur « les contestations concernant le montant et le recouvrement des honoraires des avocats ». Il n’inclut ni n’exclut la compétence de ceux-ci en cas d’action en nullité du contrat de mission engagée par le client d’un avocat.

Force est donc de constater que la Cour régulatrice a préféré une interprétation protectrice du client de l’avocat, car rien n’empêchait le raisonnement contraire. En réalité, on peut se demander si l’intention de l’auteur du décret de 1991 a été d’éclater le contentieux relatif à la relation entre un avocat et son client en le soumettant tantôt à la compétence du couple bâtonnier/premier président, tantôt à la compétence d’une autre juridiction. Autrement dit, celui-ci n’a-t-il pas voulu confier la résolution de toute contestation survenue à l’occasion des rapports entre l’avocat et son client – y compris celle de la validité du contrat de mission – à l’appréciation du bâtonnier et éventuellement du premier président de la cour d’appel ? On ne peut raisonnablement exclure une réponse affirmative, faute de clarté du décret du 27 novembre 1991. D’ailleurs, le fait que l’article 175 de ce texte dispose que l’avocat peut « saisir le bâtonnier de toute difficulté » laisse penser que ce dernier peut éventuellement connaître d’une contestation relative à la validité du contrat de mission. De ce point de vue – et de ce point de vue seulement –, on pourrait reprocher à la Cour de cassation d’avoir ignoré l’esprit du décret organisant la profession d’avocat.

Quoi qu’il en soit, il ne faut pas confondre l’action en nullité du contrat de mission consécutive à l’exercice du droit de rétractation avec le dessaisissement de l’avocat avant l’intervention d’un acte ou d’une décision juridictionnelle irrévocable. Certes, le dessaisissement, comme la nullité du contrat de mission, « rend inapplicable la convention d’honoraires initialement conclue »16, mais l’avocat peut prétendre au paiement d’honoraires sur la base du temps consacré au dossier du client17.

La compétence de la juridiction de droit commun. L’éviction de la compétence du couple bâtonnier-premier président en matière d’action en nullité du contrat de mission engagée par le client d’un avocat amène naturellement à l’identification de la juridiction apte à trancher le litige. Dans l’affaire qui nous occupe, l’avocat soutenait qu’en décidant « que la juridiction de droit commun était compétente (…), la cour d’appel a méconnu ses pouvoirs et violé les articles 174 et suivants du décret ». Mais, pour la Cour de cassation, « ayant relevé que [le client] avait saisi un tribunal judiciaire, par voie d’action, en qualité de consommateur, afin de faire constater la mise en œuvre de son droit de rétractation, c’est à bon droit que la cour d’appel a rejeté l’exception d’incompétence invoquée par l’avocat ».

Cependant, la rédaction de cette motivation peut induire en erreur. En effet, à sa simple lecture, il n’est pas évident de dire si c’est la qualité de consommateur du client ou le fait pour ce dernier d’avoir contesté par voie d’action la validité du contrat de mission qui donne compétence au tribunal judiciaire. Néanmoins, en rapprochant cette motivation de l’interprétation stricte que fait la Cour de l’article 174 du décret de 1991, on comprend bien que c’est la seconde hypothèse qui légitime la compétence de la juridiction du droit commun. Cette précision est importante, car l’avocat peut également saisir le tribunal judiciaire pour solliciter la nullité du contrat de mission18. Dès lors, il semble que la référence à la qualité de consommateur s’explique davantage par la nécessité d’assurer une meilleure protection de la partie faible.

Quoi qu’il en soit, et même si l’arrêt ne le précise pas, la compétence du tribunal judiciaire peut se justifier de deux manières. D’une part, si l’on se place sur le terrain du droit de la consommation, force est de constater que la plupart des dispositions du Code de la consommation donnent compétence au tribunal judiciaire pour trancher les litiges opposant un consommateur (partie faible) à un professionnel (partie forte). Dès lors, on peut naturellement penser que l’action en nullité d’un contrat de consommation, fut-ce un contrat de prestations juridiques, n’échappe pas à la compétence du tribunal judiciaire. D’autre part, en se déplaçant sur le terrain du droit civil, on constate que le législateur n’a pas déterminé la juridiction compétente pour statuer sur la validité d’un contrat de mission d’avocat. Il faudra donc faire application de l’article L. 211-2 du Code de l’organisation judiciaire qui dispose que « le tribunal judiciaire connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n’est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction ». Au regard de ce qui précède, la compétence du tribunal judiciaire était incontestable. Celui-ci sera également compétent pour connaître de toutes les demandes formées, en défense, pour s’opposer à la demande de nullité du contrat de mission de l’avocat.

Le client de lavocat : un consommateur de services juridiques. Dans l’arrêt sous commentaire, la Cour de cassation rappelle que le client d’un avocat a la qualité de consommateur et qu’il peut, à ce titre, mettre en œuvre son droit de rétractation. Or, pour le requérant, ce droit « ne peut être exercé pour les contrats ayant pour objet certains produits ou certaines prestations spécifiques », tel que le contrat portant sur des prestations juridiques. La question de la qualité de consommateur du client d’un avocat n’est pas nouvelle. Dans une affaire portant sur le recouvrement des honoraires, la Cour de cassation avait demandé à la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE)19 si une personne physique qui a conclu un contrat de prestations de services juridiques avec un avocat pouvait être qualifiée de consommateur au sens du droit de l’Union et, notamment, de la directive n° 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 relative aux clauses abusives figurant dans les contrats conclus avec les consommateurs. Elle a également demandé si l’avocat pouvait, dans cette situation, être considéré comme un professionnel et si les contrats de prestations de services juridiques relevaient du champ d’application de la directive précitée.

Dans un premier temps, la CJUE rappelle que la directive s’applique aux clauses « des contrats conclus entre le professionnel et un consommateur qui n’ont pas fait l’objet d’une négociation individuelle ». Dans un second temps, elle relève qu’en « ce qui concerne les contrats de services juridiques (…), dans le domaine des prestations offertes par les avocats, il existe, en principe, une inégalité entre les “clients-consommateurs” et les avocats, due notamment à l’asymétrie de l’information entre ces parties ». Elle conclut que le client d’un avocat est un consommateur. Et, parmi les droits reconnus aux consommateurs, figure le droit de rétractation, notamment lorsque le contrat a été conclu à distance ou hors établissement comme c’est le cas en l’espèce. Le délai de rétractation est 14 jours20. Le droit de rétractation valablement exercé entraîne l’anéantissement du contrat et, le cas échéant, le remboursement des sommes versées par le client-consommateur21. Toutefois, si l’avocat a accompli des diligences à la demande expresse du client, avant la fin du délai de rétractation, ce dernier doit lui verser un montant correspondant au service fourni jusqu’à la notification de sa décision de se rétracter. Ce montant est proportionné au prix total de la prestation convenu dans le contrat. Si le prix total est excessif, le montant approprié sera calculé sur la base de l’évaluation de la prestation fournie22.

Notes de bas de pages

  • 1.
    F. Loyseau de Grandmaison, « Les spécificités de la procédure de fixation d’honoraires d’avocat devant le premier président de la cour d’appel », GPL 12 oct. 2021, n° GPL427m4.
  • 2.
    CA Basse-Terre, 27 déc. 2023, n° 22/00984 – CA Basse-Terre, 27 déc. 2023, n° 22/00170. Contra CA Paris, 15 nov. 2023, n° 22/00375.
  • 3.
    L’exercice du droit de rétraction anéantit le contrat. En présence d’un contrat conclu hors établissement ne contenant pas la mention relative à l’exercice du droit de rétractation, le cocontractant a le choix entre la rétractation et la nullité (Cass. 1re civ., 31 août 2022, n° 21-10.075, F-B).
  • 4.
    CA Pau, 6 sept. 2022, n° 22/01111.
  • 5.
    C. consom., art. L. 221-28, 3°.
  • 6.
    CA Paris, 5 avr. 2024, n° 23/00487 – CA Paris, 5 avr. 2024, n° 23/00194
  • 7.
    Les parties peuvent trouver un accord, même en cours d’instance, CA Paris, 5 avr. 2024, n° 22/00619.
  • 8.
    La contestation des honoraires du bâtonnier est portée devant le président du tribunal judiciaire.
  • 9.
    Ce délai peut être prorogé dans la limite de quatre mois par décision motivée du bâtonnier.
  • 10.
    F. Loyseau de Grandmaison, « L’exécutoire des décisions de fixation d’honoraires du bâtonnier : morceaux choisis du décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 », GPL 23 nov. 2021, n° GPL429i4.
  • 11.
     Cette règle ne s’applique pas à l’honoraire complémentaire de résultat obtenu ou de service rendu prévu par l’article 10, alinéa 5, de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971.
  • 12.
    Les articles 514-3, 514-5 et 514-6 du CPC s’appliquent en cas de recours devant le premier président de la cour d’appel.
  • 13.
    CPC, art. 517 – CPC, art. 518 à 523. V. aussi les articles 517-1 à 517-4 du CPC qui s’appliquent en cas de recours devant le premier président de la cour d’appel.
  • 14.
    Rappr. CPC, art. 49.
  • 15.
    Rappr. CPC, art. 81, al. 1er – CPC, art. 76 et s.
  • 16.
    CA Paris, 20 sept. 2023, n° 21/00269. Dans une autre affaire, il a été jugé que le dessaisissement de l’avocat rend caduque le contrat (CA Paris, 24 juin 2022, n° 19/00390).
  • 17.
    CA Paris, 20 sept. 2023, n° 21/00269. V. également l’article 10 de la loi du 31 décembre 1971 modifiée.
  • 18.
    Dans une affaire, l’avocat a soulevé la nullité du contrat de mission en réaction à la demande de remboursement introduite par le client (CA Paris, 24 juin 2022, n° 19/00390).
  • 19.
    CJUE, 15 janv. 2015, n° C-537/13 : https://lext.so/WjwZPO.
  • 20.
    C. consom., art. L. 221-18.
  • 21.
    C. consom., art. L. 221-24.
  • 22.
    C. consom., art. L. 225-21.
Plan