Insolite : quand les salariés sentent trop mauvais

Publié le 25/05/2023

Peut-on licencier un salarié parce qu’il sent mauvais ? Notre chroniqueur de l’insolite, Raphaël Costa, a fouillé dans ses archives du bizarre et découvert quelques décisions de jurisprudence sur le sujet. Narines sensibles s’abstenir !

Insolite : quand les salariés sentent trop mauvais
Photo : ©AdobeStock/PicturePartners

Si vous avez allumé votre transistor cette semaine, vous avez sans doute entendu parler de la validation, par la justice, du licenciement d’un salarié qui émettait volontairement « des pets particulièrement malodorants ».

Bien que cette affaire date en réalité de 2022, il existe toute une série de jugements qualifiant le manque d’hygiène des salariés comme des fautes justifiant leurs licenciements.

Quelques conditions sont néanmoins nécessaires pour justifier ces renvois : il faut que les faits perturbent la vie de l’entreprise et qu’ils soient malveillants et volontaires. Cependant, si ces deux derniers critères ne sont pas remplis, le licenciement peut néanmoins, dans certaines circonstances, être validé.

Les salariés pétomanes

Commençons par un arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence[1] qui a estimé justifié le licenciement de celui qui se vantait, en pleine réunion, de « transpirer de la raie du cul ». Le fait qu’il ait en outre précisé à une cliente qu’il « lui mettrait bien du foutre plein la gueule » n’a évidemment pas plaidé en sa faveur…

En 2012, c’est la Cour d’appel de Versailles[2] qui a validé le licenciement du salarié qui, plusieurs fois par jour, émettait de nombreux rots et flatulences pour provoquer ses collègues de travail ; et avant elle, les juges de Colmar avaient fait de même concernant celui qui avait pris l’habitude de péter sur son assistante car, selon lui, elle le méritait.

Les salariés malchanceux

Et même quand les effluves salariaux ne sont pas volontaires, la Cour d’appel de Paris[3] a pu estimer que l’employeur était dans son bon droit en licenciant celui qui, après plusieurs remarques sur la gêne causée à ses collègues par son « odeur corporelle très forte », n’avait rien fait pour y remédier.

Les remarques malveillantes

À l’inverse, les juridictions protègent les salariés contre les employeurs malveillants qui utilisent l’argument de la mauvaise odeur corporelle ! La chambre sociale de la Cour de cassation[4] a qualifié d’atteinte à la dignité de la salariée la remarque suivante faite par l’employeur : « Madame, auriez-vous une grave maladie, un ulcère qui pourrit, des incontinences, un cancer ? Quand je sors de votre bureau j’ai mes vêtements qui sont imprégnés d’odeurs nauséabondes »… De même, la Cour d’appel de Paris a approuvé l’employeur ayant licencié celle qui dénigrait une collègue musulmane koweïtienne en ces termes : « J’ai des amies au Koweït qui portent le voile mais qui ne sentent pas ».

Et quelle odeur pouvait bien déranger cette dernière au point de refuser de former la nouvelle recrue ? Réponse : « la banane frite ! »

Bonsoir !

[1] 10 septembre 2009, n° 08/22223

[2] 22 mars 2012, n° 10/04404.

[3] 3 octobre 2018, n° 16/12789.

[4] 22 septembre 2010, n° 08-43.717.

 

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