Le « juge de l’urgence » face à l’urgence sanitaire : le recours inégal aux données scientifiques par le juge du référé-liberté

Publié le 05/10/2021
Juge
Marta Sher/AdobeStock

Alors que depuis plusieurs mois le prétoire du juge des référés est largement occupé par les litiges liés à l’épidémie de Covid-19, le recours aux données en matière de santé lui était inévitable dans l’arbitrage entre la protection du droit à la santé et des autres libertés fondamentales. Pour autant, et à l’instar des institutions internationales spécialisées, les questions entourant ce virus ont été et demeurent prégnantes en interne, au sein des instances scientifiques et, a fortiori, au sein des tribunaux administratifs. L’État a été tenu d’agir au moment où l’incertitude scientifique était la plus grande et le juge de connaître de la justification de restrictions prises sur la base du peu de données scientifiques disponibles. Le contexte sanitaire particulier invite alors à s’intéresser à la méthodologie employée par le juge du référé-liberté du Conseil d’État dans la mobilisation des données en matière de santé et plus largement à sa gestion de l’incertitude scientifique. Il sera alors possible d’observer que, face à l’urgence sanitaire, le « juge de l’urgence » a tâché de s’adapter à l’évolution rapide des données relatives au virus, ses effets, ses traitements afin de les intégrer, de façon plus ou moins convaincante, à la motivation de ses ordonnances.

Lorsque le système de surveillance national d’un État met en évidence un événement sanitaire inhabituel ou inattendu, ce dernier est tenu à une obligation de notification à l’Organisation mondiale de la santé (OMS) d’une situation pouvant constituer une urgence de santé publique de portée internationale1. Dans le cas de l’épidémie de Covid-19, le comité d’urgence de l’OMS s’est prononcé en ce sens le 30 janvier 2020, et sa recommandation a été suivie le jour même par le directeur général2 de l’OMS. À ce moment-là de la crise, on ne sait que peu de choses sur ce nouveau virus et l’heure est au recueil et à l’échange de données grâce à la fragile coopération mobilisant États, organisations internationales3 et acteurs scientifiques. En interne, la chronologie des événements suffit à mettre en perspective la vitesse à laquelle des décisions ont dû être prises par les autorités françaises et les incertitudes entourant cette épidémie obligeant le Conseil d’État à se faire « juge de l’urgence et des solutions immédiates, dans un contexte changeant »4. Devant une situation exceptionnelle et pour faire face à l’aggravation de l’épidémie, l’exécutif a déclaré l’état d’urgence sanitaire dès le 24 mars sur le fondement d’une loi votée la veille5. Ce dispositif peut être déclaré par décret en conseil des ministres « en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population »6 et autorise le Premier ministre à prendre par décret diverses mesures listées par la loi telles que des restrictions de circulation, l’interdiction de quitter son domicile (confinement), interdire ou limiter les rassemblements, ordonner la fermeture de certains établissements7… autant de restrictions qui ont rythmé le quotidien des Français pendant plusieurs mois et illustrant la mise en œuvre d’une police administrative spéciale : la police sanitaire d’urgence8.

Durant la crise sanitaire, le rôle du juge du référé-liberté9 a été d’apprécier la nécessité des mesures prises au regard de l’impératif de protection de la santé des citoyens dans un contexte en constante évolution et au regard de données soumises au manque de recul et à l’évolution des connaissances sur le sujet. Le juge est souvent tenu d’avoir recours à des données permettant de fonder la légitimité de ses décisions et par la même, une forme d’acceptabilité de celles-ci10 puisque c’est de la motivation de la décision dont il est question. Comme le souligne la Cour européenne des droits de l’Homme, la motivation des décisions est le corollaire indispensable du principe de bonne administration de la justice11, la motivation imposant à celui qui prend la décision la rigueur d’un raisonnement fondé sur des arguments objectifs et constituant une véritable exigence qualitative dans la mesure où elle constitue un des meilleurs gages contre l’arbitraire12.

Si l’on peut aisément distinguer la preuve qui sert à établir qu’un fait est avéré13 de la donnée, élément connu qui sert de base à un raisonnement ou de point de départ à une recherche14, le recours aux données scientifiques en matière de santé n’a donc pas vocation à établir une vérité mais à faire état d’une connaissance acquise sur un sujet, et pour celui qui nous occupe, en matière sanitaire. Elles s’intègrent donc au sein d’une catégorie plus large de données empiriques qui reposent sur une systématisation d’observations revêtant une forme d’objectivité scientifique15. Pour autant et alors même que le juge a besoin de s’appuyer sur des données concrètes pour éclairer ses décisions, l’état des connaissances sur un sujet est susceptible de varier au fil du temps et cela est d’autant plus vrai lorsqu’il est question de virus encore inconnus ou de vaccins nouvellement mis sur le marché.

Notre contribution s’intéressera donc à la manière dont le juge du référé-liberté du Conseil d’État a mobilisé le peu de données disponibles dans le cadre de l’épidémie de Covid-19 et comment il a placé le curseur de son contrôle entre libertés et droit à la protection de la santé dans le cadre d’une situation en constante évolution sur le plan sanitaire. À ce titre, l’on observera que sa méthodologie de recours aux données scientifiques a semblé plutôt convaincante dans le cadre des décisions rendues au regard des premières restrictions imposées par la crise, faisant écho à l’urgence dans laquelle s’est trouvée l’Administration pour endiguer la propagation du virus (I). Toutefois, dans le cadre de son appréciation des mesures de restriction qui se sont prolongées durant les vagues épidémiques successives, l’on notera un recours plus inégal et moins convaincant aux données entourant la connaissance du virus, de ses effets et des vaccins (II).

I – Une méthodologie convaincante du recours aux données scientifiques dans le cadre des premières restrictions imposées par la crise sanitaire

Durant la crise sanitaire engendrée par l’épidémie de Covid-19, de multiples restrictions ont été exigées par l’Administration, justifiées par un objectif de protection de la santé de la population. Ces restrictions ont concerné diverses libertés : la liberté de circulation, de commerce, le droit à la vie privée et familiale, etc. Si « la science est source de légitimité et (…) rend la décision judiciaire socialement acceptable »16, les constats du professeur Mustapha Mekki sont également valables pour la décision publique et à plus forte raison lorsque cette dernière a des répercussions dans le domaine de la santé. Le problème se pose donc lorsque la science et l’état des connaissances dans ces matières ont un temps de retard sur les faits, le plus souvent parce que la situation et ses conséquences présentent un caractère inédit.

Dans certains cas, le juge n’a ainsi d’autre choix que de s’en remettre aux données rendues disponibles dans l’immédiat et alors même que la situation est susceptible d’évoluer. « Juge de l’urgence », le juge des référés a opéré un contrôle devant s’inscrire dans une temporalité brève afin de trancher la question de savoir si l’exécutif avait porté atteinte à une liberté fondamentale (A). Dans d’autres cas, on notera qu’il s’est prononcé sur la nécessité de mesures s’inscrivant dans la lutte contre la pandémie sans pour autant se référer à d’éventuelles données scientifiques (B). Dans les deux cas, il sera possible d’observer qu’en dépit d’une situation sanitaire évolutive, le juge des référés a pu apprécier grâce à une méthodologie relativement convaincante, que les mesures prises étaient strictes mais justifiées au regard de l’impératif de protection de la santé de la population.

A – Le recours aux données scientifiques disponibles dans l’urgence de la situation permettant de justifier les restrictions prises par l’Administration

Dans le contexte de l’épidémie de Covid-19 et des restrictions exigées par l’État, le juge des référés du Conseil d’État a été amené à arbitrer entre la protection du droit à la santé et les autres libertés, autrement dit, à vérifier que ces atteintes aux libertés étaient nécessaires et proportionnées, en tenant compte d’une situation sanitaire en constante évolution et des moyens disponibles pour lutter contre le virus (confinement, masques, vaccins…) changeant au gré de l’évolution des connaissances autour du virus et de ses effets. Le « contexte changeant » dans lequel se sont inscrites les mesures prises lors des premières phases de restrictions a pourtant été mis à l’écart par le juge des référés et l’appréciation des mesures prises par l’État s’est opérée dans une temporalité immédiate, à l’appui de données scientifiques faisant état, bien souvent au jour le jour, d’une situation particulièrement préoccupante justifiant des restrictions aux libertés fondamentales.

Des décisions relatives aux restrictions qui se sont prolongées dans la durée de la crise (mars-avril 2021) et qui occuperont nos futurs développements, l’on regrettera le manque de pédagogie dont le juge des référés avait pourtant su faire preuve dans le cadre des mesures prises durant les premières « vagues épidémiques », à l’image d’une décision rendue le 23 décembre 2020 à l’égard de la fermeture des cinémas, théâtres et salles de spectacle17. Dans cette dernière, il pointait d’abord, d’une part, que l’Administration faisait valoir le risque important de contamination au sein de tels lieux clos à forte densité d’occupation mais concédait également que les exploitants des établissements concernés avaient mis en œuvre des protocoles sanitaires particulièrement stricts18 lui permettant de noter, comme le conseil scientifique, que le risque de transmission du virus, dans ces établissements était plus faible que pour d’autres événements rassemblant du public en lieu clos lorsque les protocoles sont appliqués19. Au regard de ces éléments, il exposait ensuite avec pédagogie, les motifs de l’appréciation de la proportionnalité de leur fermeture en pointant d’abord qu’« en l’absence de perspective d’éradication du virus dans un avenir proche, le maintien d’une interdiction générale et absolue d’ouverture au public des cinémas, théâtres et salles de spectacles (…) constituerait une illégalité manifeste si elle était justifiée par la seule persistance d’un risque de contamination »20. Autrement dit, le maintien de cette interdiction ne pouvait donc être regardé comme une mesure nécessaire, adaptée, et proportionnée à l’objectif de préservation de la santé publique qu’en présence d’un contexte sanitaire marqué par un niveau particulièrement élevé de diffusion du virus au sein de la population21. La fermeture de ces établissements ne pouvait donc être maintenue que dans un contexte sanitaire particulièrement défavorable, contexte que le juge caractérisait en exposant les données scientifiques et les indicateurs disponibles22 : la dégradation de la situation sanitaire et l’émergence du variant anglais du virus lui permettaient de conclure que la fermeture des établissements de cinéma et de spectacle ne portait pas une atteinte illégale aux libertés fondamentales dont se prévalaient les requérants23.

De la même manière, en matière de fermeture des remontées mécaniques dans les stations de sports d’hiver, le juge des référés a ignoré le moyen invoqué par les requérants de l’absence de dangerosité de l’utilisation de ces installations au regard du risque de contagion. Dans son examen de la proportionnalité de la restriction, il faisait alors primer le contexte particulièrement préoccupant de la situation sanitaire, marqué par un niveau élevé des contaminations, y compris dans les régions où se pratique le ski alpin, justifiant que « toutes les mesures nécessaires pour éviter un rebond épidémique » étaient alors jugées nécessaires24. Enfin, l’on peut également citer la pédagogie dont il a fait preuve dans une décision relative à l’obligation du port du masque en extérieur sur l’ensemble du territoire de certaines communes se basant sur les données scientifiques disponibles et faisant état à la fois de l’accélération de la circulation du virus25, de ses modalités de propagation (notamment par gouttelettes respiratoires et par voie aéroportée)26 et de l’efficacité du port du masque dans la réduction du risque de contamination27. Eu égard à ces données, mises en perspective avec le contexte (impératif d’endiguer la propagation du virus, fin des vacances scolaires), il conclut que l’obligation de port du masque dans les zones de forte densité de personnes ou lorsque la distance physique ne peut être garantie, est justifiée28.

Notons également que le recours aux données n’a pas seulement eu pour effet d’éclairer quant à la gravité de la situation sanitaire et justifier les restrictions aux droits fondamentaux. Dans certains cas, le recours aux données a mis en évidence que certaines mesures n’étaient pas proportionnées à l’objectif de protection de la santé de la population, à l’image de l’interruption de la délivrance de visas de regroupement familial aux conjoints et enfants d’étrangers non européens résidant en France. Au regard des données de 2019 relatives aux bénéficiaires du regroupement familial29, le juge avait alors relevé l’absence de preuves rapportées par l’Administration « permettant de regarder le flux en cause (…) comme étant de nature à contribuer de manière significative à une augmentation du risque de brassage et à un risque de “contamination exponentielle” » (…) »30. Dès lors ces constats combinés à la durée de la mesure31 et au renforcement des obligations en matière de tests de dépistage, de quarantaine ou d’isolement des personnes entrant sur le territoire national32 justifiaient que le juge des référés se prononce en faveur de son caractère disproportionné.

Dans certains cas et dans le cadre d’un contexte sanitaire trop incertain, le juge des référés a apprécié la légalité de certaines restrictions sans avoir recours à de quelconques données scientifiques.

B – L’absence de recours aux données scientifiques dans le cadre d’un contexte trop incertain

Au sein de certaines décisions rendues lors de la première vague épidémique (mars-mai 2020), le juge des référés a parfois eu tendance à se priver de rechercher des données scientifiques disponibles. Dans des affaires relatives au refus de l’État de mettre du matériel de protection (masques, gants, blouses et gel hydro-alcoolique) à la disposition des avocats et justiciables lors de leurs entretiens33 et alors même que les requérants faisaient valoir un risque de contamination en l’absence de matériel de protection, le juge des référés du Conseil d’État, se prive de toute référence à des données scientifiques sur les effets de telles mesures pour apprécier l’atteinte alléguée au droit à la vie, au droit à un procès équitable et aux droits de la défense des requérants. Le juge était tenu ici de rechercher une éventuelle carence fautive de la personne publique de prescrire les mesures de nature à faire disparaître l’atteinte alléguée34. Juge d’une éventuelle atteinte aux droits et libertés, le juge du référé-liberté n’a pas vocation à rechercher une éventuelle faute justifiant d’engager la responsabilité de la personne publique et son appréciation du caractère manifestement illégal de l’atteinte s’apprécie notamment « en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative compétente et des mesures qu’elle a déjà prises »35. Aussi, ce sont les moyens fondés sur les « adaptations » permettant à la fois d’éviter les contacts entre personnes36 (travail à domicile, auditions par communications électroniques et téléphoniques, etc.) ou tout au moins de les limiter37 (application des mesures barrières, nettoyage des locaux, distanciation, etc.), ainsi que la pénurie de masques38, qui conduiront le juge du référé-liberté à conclure à une absence de carence portant une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés invoquées39. Il prendra toutefois le soin d’énoncer implicitement l’intensité relative de son contrôle, rappelant « qu’eu égard à l’office du juge des référés, qui ne peut ordonner que des mesures susceptibles d’être prises à très bref délai, aux mesures prises par le gouvernement (…) et aux moyens dont dispose actuellement l’Administration »40, la carence n’est pas caractérisée.

Quand bien même il impose une obligation de moyens, le juge des référés en fait une interprétation particulièrement large et se range, dans cette affaire, derrière un contexte à la fois alarmant et inédit pour justifier que la pénurie persistante des masques disponibles légitime le fait que l’État en dote « d’abord ses agents, à l’égard desquels il a, en sa qualité d’employeur, une obligation spécifique de prévention et de sécurité pour garantir leur santé »41. L’urgence de la situation dans laquelle s’est trouvé l’État, bien qu’implicite, semble pourtant déterminante pour le juge qui se prive ainsi d’apprécier la carence alléguée au regard de données plus objectives et notamment sans faire mention de l’efficacité du matériel de protection réclamé42.

Dans d’autres cas, les données scientifiques n’ont pas été recherchées par le juge des référés, y compris dans le contexte de la crise sanitaire, au moyen d’une forme de « bon sens » dans l’appréciation de la proportionnalité des restrictions prises par l’Administration. Aussi, dans le cas de l’application des restrictions d’entrée sur le territoire national y compris aux étrangers en attente d’un visa pour célébrer leur mariage, le Conseil d’État, sans se référer à quelconque donnée précise, prend le parti d’avancer qu’« eu égard à la faiblesse du nombre de couples en cause »43, l’impact de tels déplacements sur la situation sanitaire du pays est limité. Il en conclura dès lors que ne pas pouvoir entrer en France pour célébrer une union avec un national porte une atteinte disproportionnée à la liberté du mariage d’autant qu’une obligation de produire un test de dépistage négatif (dit test PCR) demeure opposable44.

Dans l’urgence suscitée par les premiers temps de la crise sanitaire et face à l’incertitude entourant à la fois le virus et les moyens permettant d’endiguer sa propagation, le juge du référé-liberté du Conseil d’État n’a eu d’autre choix, lorsque cela était possible, que de s’en remettre aux données rendues disponibles dans l’instant pour apprécier les mesures ou carences prises par les autorités. La motivation de ces décisions repose sur un postulat simple mais somme toute convaincant : les chiffres font état d’une situation alarmante, les autorités publiques devaient y répondre par des mesures rapides et exceptionnelles mais nécessaires. Pour autant, le recours aux données scientifiques au sein des ordonnances en référé rendues dans le cadre de la prolongation des mesures sanitaires a eu tendance à manquer de cohérence.

II – Une méthodologie du recours aux données scientifiques à affiner dans le cadre de la prolongation des restrictions imposées par la crise sanitaire

Dans le cadre de l’appréciation de la légalité des mesures imposées par les suites de la crise sanitaire, le recours aux données scientifiques par le juge des référés a eu tendance à être plus inégal, le caractère alarmant de la situation épidémique justifiant, sur les mêmes périodes, tantôt le maintien de restrictions (fermetures d’établissements par exemple) tantôt, en revanche, le maintien d’événements (examens universitaires) (A). De même, le cas de la vaccination contre la Covid-19 offre une illustration du traitement de l’incertitude par le juge des référés dans un contexte sanitaire évoluant aussi rapidement que la connaissance du sujet (B).

A – Le recours inégal aux données dans l’appréciation de la proportionnalité des restrictions se poursuivant dans la durée

Un recours inégal aux données scientifiques a pu être relevé principalement lorsque le juge des référés a été tenu de se prononcer sur la fermeture de certains lieux accueillant du public. Dans le cadre des galeries d’art, contraintes à la fermeture par l’application de l’état d’urgence sanitaire45, une association demandait au juge que ces établissements soient intégrés à la liste des établissements autorisés à accueillir du public au même titre que d’autres établissements (les salles de vente aux enchères notamment) et alléguait une atteinte à diverses libertés fondamentales parmi lesquelles la liberté de création, la liberté d’expression, la liberté du commerce ainsi que le principe d’égalité46. Sans citer ses sources, le juge du référé-liberté du Conseil d’État se fonde sur « les données scientifiques disponibles à la date du 12 avril 2021 » faisant état d’une « situation épidémiologique sur le territoire métropolitain (…) très préoccupante avec des indicateurs épidémiologiques et hospitaliers très fortement dégradés » elle-même justifiant que « la fermeture au public des galeries d’art au même titre que la plupart des autres commerces (…) vise à réduire les occasions de déplacements de personnes hors de leur domicile afin de limiter les interactions sociales à l’occasion desquelles la propagation du virus est facilitée »47. Il conclura alors que la fermeture au public des galeries d’art ne porte pas une atteinte manifestement illégale aux libertés dont se prévaut l’association requérante48. Le juge octroie ici un degré d’autorité particulièrement fort aux données scientifiques disponibles pour ne pas rechercher et se prononcer sur la possibilité de mesures moins contraignantes pour concilier protection de la santé et liberté du commerce (port du masque obligatoire, jauges, horaires limités, etc.) compte tenu de la prolongation de restrictions dans le temps.

S’il est aisé de concéder que le caractère critique de la situation sanitaire peut justifier la nécessité et la proportionnalité des fermetures ordonnées par les autorités publiques, le défaut de mention des sources des données utilisées peut tendre à faire du juge du référé-liberté du Conseil d’État un relais de la communication gouvernementale comme certains auteurs avaient pu le relever à l’égard d’ordonnances rendues plus tôt dans le contexte de la crise sanitaire49. Par ailleurs, les conclusions de cette décision interpellent d’autant plus que quelques jours après, le juge des référés appréciera la proportionnalité de mesures prises à la même période mais faisant état de certaines contradictions quant aux données scientifiques utilisées.

Ainsi, dans une affaire relative au maintien des épreuves du brevet de technicien supérieur (BTS), des étudiants et associations se prévalaient d’une atteinte au droit à la vie des candidats aux examens50. Ils alléguaient notamment que les établissements scolaires étaient dans l’incapacité matérielle de garantir le respect des protocoles sanitaires. Quelques jours seulement après l’ordonnance portant sur la fermeture des galeries d’art (respectivement les 14 pour les galeries et 30 avril pour le BTS), le juge du référé-liberté s’en remet à des données scientifiques dont on peut relever des contradictions avec celles mentionnées pour la même période, dans l’affaire relative à la fermeture des galeries d’art, énonçant cette fois que « si la situation reste très préoccupante en France, il résulte des données publiées par Santé publique France (…) que le nombre de cas positifs est en baisse depuis la mi-avril, avec une diminution des taux d’incidence et de dépistage »51. Au surplus, sa décision se fondait sur la mise en place d’un protocole sanitaire dans les établissements scolaires « reposant sur les prescriptions émises par le ministère des Solidarités et de la Santé au vu des recommandations émises par le Haut conseil de la santé publique »52. La mise en place de ces protocoles et les modalités de répartition des candidats et des dates d’examen53 permettaient ainsi, selon le juge du référé-liberté du Conseil d’État, de concilier la tenue des examens avec la préservation de la santé des candidats.

La mise en perspective de ces décisions peut occasionner une certaine confusion quant à la motivation et à la méthodologie du recours aux données scientifiques utilisées. L’ambiguïté des ordonnances rendues par le juge des référés peut alors sembler faire écho à l’embarras, légitime, des autorités pour faire face au mieux et au plus vite à la situation épidémique faisant du premier, non plus un « simple » juge de l’urgence mais un juge de l’urgence dans laquelle se sont trouvées les autorités publiques pour faire face à la crise sanitaire. C’est en effet le contexte rapidement changeant qui semble placer le juge dans une forme de difficulté à traiter les données scientifiques disponibles dans une forme de logique, toute prise de recul sur les mesures prises étant difficile au regard du caractère inédit du virus et de l’avancée des recherches simultanément à la crise. Le juge, se refusant à endosser un rôle d’expert, se montre alors particulièrement prudent.

Ce contexte rapidement évolutif et incertain autour de l’épidémie de Covid-19 se retrouve au sein d’ordonnances ultérieures, portant à nouveau sur la fermeture prolongée d’établissements du fait de la circulation du virus. Aussi, le 21 mai 2021, le juge du référé-liberté conclut que la fermeture des discothèques est justifiée car ces établissements présentent des risques particuliers54. Il se fonde là encore sur les indicateurs épidémiologiques et hospitaliers faisant état d’une amélioration bien que rendant toujours compte d’une situation préoccupante55, à laquelle s’ajoute à cette période, la circulation de « variants » du virus représentant alors la majorité des contaminations en France56. Faute de connaître les effets du vaccin et la réaction de l’immunité acquise à ces mutations du virus, le juge du référé-liberté conclut qu’au regard du risque inhérent à l’activité pratiquée dans les établissements de nuit, « le maintien de la fermeture de ces établissements participe de la politique de lutte contre la propagation de l’épidémie »57. Le cas de la vaccination illustre d’ailleurs également la difficulté de traitement de l’incertitude scientifique par le juge des référés.

B – Le cas de la vaccination : illustration de la difficulté du traitement de l’incertitude scientifique par le juge des référés dans le cadre de la crise sanitaire

L’administration de vaccins constitue un exemple éclairant du traitement de l’incertitude par le juge des référés dans l’appréciation de restrictions aux droits fondamentaux, incertitude pouvant être due à un manque de recul sur l’efficacité de celui-ci ou sur les potentiels effets indésirables de ses composants.

Dans le cadre de la campagne de vaccination contre l’épidémie de Covid-19, le juge n’a pas retenu d’obligation de vacciner en priorité la totalité des personnes incarcérées, jugeant que le risque de développer une forme grave de la maladie n’apparaissait pas plus élevé pour les détenus que pour la moyenne de la population au regard des données disponibles58. L’association requérante alléguait pourtant que tant l’état sanitaire général que les conditions de détention, caractérisées par un fort risque de propagation de virus, imposaient une vaccination urgente de cette population particulièrement vulnérable. Le juge des référés se fondera alors à la fois sur les avis de la Haute autorité de santé et sur les données fournies par l’Administration pour retenir que la décision de ne pas inscrire prioritairement l’ensemble des détenus dans la première phase de la campagne vaccinale ne révélait pas de carence grave et manifestement illégale59.

Principalement, le juge des référés retenait qu’« il n’existe pas, en l’état actuel des connaissances scientifiques, de certitude sur l’efficacité possible du vaccin contre la Covid-19 quant à la réduction des risques de transmission de la maladie »60 rappelant que l’avis rendu par la Haute autorité de santé du 30 novembre 2020 signalait « cette incertitude »61. Dans cette affaire, l’incertitude entourant les effets du vaccin bénéficie donc à la décision de mise à l’écart des personnes détenues de la première campagne de vaccination62, dans la mesure où l’Administration avait pris diverses mesures destinées à limiter la propagation de l’épidémie au sein des établissements pénitentiaires (respect des gestes barrières, distribution de masques, mesures de confinement aux détenus transférés entre établissements pénitentiaires, campagnes de dépistage)63.

Au sein de la mise en balance des intérêts en présence opérée par le juge, la restriction est donc jugée proportionnée dans la mesure où d’autres dispositions protectrices ont été mises en place pour protéger la santé des détenus, là où en parallèle, le juge retient une incertitude autour de l’efficacité du vaccin. Sans en faire mention, il ressort de cette décision datant de février 2021 que le juge des référés préserve ici une certaine marge d’appréciation des autorités publiques64, à plus forte raison s’agissant d’une situation de crise. Il se range ainsi derrière la stratégie nationale de vaccination mise en place en concertation avec la Haute autorité de santé et les autres mesures protectrices prises pour justifier que le contrôle de proportionnalité bénéficie, dans le cas d’espèce, à la décision de l’Administration.

Sans se risquer à ouvrir un débat qui justifierait une contribution à part entière, l’on regrettera dans cette affaire que le juge se dispense de confronter les données récoltées en interne à d’éventuelles sources internationales portant sur l’évaluation de l’efficacité du vaccin issues de l’OMS ou de l’Union européenne par exemple. Si ce point peut se justifier par un défaut d’éléments apportés par la requête au soutien de son argumentation, l’on notera également, la mise à l’écart de la notion de « bénéfice-risque » pourtant déjà utilisée dans d’autres affaires portant sur la vaccination dans le cadre d’un contentieux pour excès de pouvoir mais justifiant d’évoquer une méthodologie à affiner par le juge65. Si l’efficacité du vaccin contre l’épidémie de Covid-19 était effectivement encore à démontrer à grande échelle à l’époque de la décision, les risques sanitaires liés à sa propagation, eux, étaient toutefois connus de l’Administration. C’est également l’incertitude quant à l’efficacité du vaccin qui justifiera que le juge des référés refuse, dans deux ordonnances, de suspendre les contraintes de déplacements auxquelles la population était soumise durant la troisième vague épidémique (mars-avril 2021), relevant que la vaccination n’élimine pas complètement la possibilité que les personnes vaccinées demeurent porteuses du virus66 ainsi que les incertitudes qui demeurent quant à la contagiosité réelle des vaccinés susceptibles d’être porteurs sains du virus, notamment au regard de la diffusion des variants67.

Pour autant, toujours en matière de vaccination contre la Covid et à la même période, l’incertitude a parfois pu être levée et les restrictions suspendues, illustrant à nouveau une progression inégale des connaissances durant et autour de la crise sanitaire. Dans une ordonnance rendue le 3 mars 2021 concernant la restriction de sortie des résidents d’EHPAD, le juge du référé-liberté du Conseil d’État énonce que cette interdiction totale est disproportionnée sur la base des effets positifs de la vaccination68 tranchant ainsi avec les précédentes décisions évoquées. L’apparente ambiguïté du traitement des données par le juge peut toutefois s’expliquer par la nuance à la fois sur le fond des connaissances mobilisées et dans les atteintes alléguées. Dans cette affaire, il retient en effet que selon les données scientifiques disponibles « les premiers effets de la vaccination peuvent être constatés avec une diminution du nombre de cas signalés chez les plus de 75 ans »69 mais également que les vaccins « permettent de prévenir (…) le développement d’une forme grave de la maladie »70, sans nier l’incertitude à la fois autour de la contagiosité des personnes vaccinées ou de l’efficacité du vaccin à l’égard des variants du virus71 mais qui constituent d’autres éléments à éclaircir. Ici, à la fois au regard du profil des personnes visées (qui diffère des personnes détenues) et à l’échelle de la restriction (établissements spécifiques), la restriction apparaît donc comme étant disproportionnée au juge de l’urgence du Conseil d’État. Plus question ici d’apprécier des restrictions s’inscrivant au sein d’une stratégie nationale et justifiant de rechercher si les vaccins sont suffisamment efficaces pour freiner à eux seuls la propagation du virus, le juge des référés était ici tenu de rechercher si leur administration pouvait justifier de desserrer l’étau des restrictions nécessaires au pic de la crise sanitaire, à l’égard d’une partie de la population particulièrement vulnérable.

Conclusion

Le recours aux données peut permettre à l’Administration de justifier certaines politiques ou, à l’inverse, être utilisé par les administrés pour les contester72 et dans les quelques décisions traitées dans la présente contribution l’on serait tenté de rechercher un éventuel caractère politique. En effet, on observe que le recours aux données scientifiques dans l’appréciation de la nécessité des mesures prises durant la crise sanitaire a suivi la même « variabilité » que celle des connaissances et de leur gestion par l’État. Lorsque, dans les premiers temps, les données faisaient état d’une crise alarmante et inédite, le juge des référés s’est rangé derrière les chiffres de l’urgence pour justifier, avec pédagogie, les restrictions imposées à la situation. Dès les débuts de la crise sanitaire, le juge des référés s’appuie sur la présomption d’un degré d’autorité important des données qu’il mobilise s’approchant de la force probatoire recherchée dans le procès civil ou pénal. Pour autant, son appréciation de la nécessité des restrictions prolongées en même temps que les vagues épidémiques successives fait apparaître davantage d’incohérences puisque les données mobilisées justifiaient tantôt la poursuite des restrictions, tantôt de les assouplir, mais sans que soit systématiquement utilisée dans la mise en balance des intérêts en présence, la possibilité d’avoir recours à des méthodes moins restrictives dont l’efficacité tendait pourtant à être reconnue par la communauté scientifique (protocoles sanitaires, masques, jauges, etc.).

Gardant à l’esprit que le juge, n’est toutefois « pas apte à analyser les données scientifiques comme le ferait un expert »73, l’on notera surtout qu’il a su intégrer sa mission d’arbitrage entre l’impératif de protection de la santé et des autres libertés au sein d’un contexte sanitaire rapidement changeant. Ce contexte, grave et inédit a alors justifié, le plus souvent, qu’il fasse pencher la balance de la proportionnalité en faveur des restrictions. Le juge du référé-liberté s’est finalement rangé derrière la portée plus limitée de son office que celle du juge de plein contentieux et face à l’urgence sanitaire, le « juge de l’urgence » a parfois fait application de l’adage « à l’impossible nul n’est tenu ». La portée de son contrôle a semblé en effet l’empêcher d’ordonner ou tout au moins encourager l’État à pourvoir à la fourniture de matériel ou de traitements qu’il n’avait pas ou qui n’existaient pas encore. L’attention des juristes devra donc se porter sur les probables futures décisions du juge de plein contentieux s’il est saisi de la recherche d’une faute de l’Administration dans sa gestion de la crise sanitaire.

Notes de bas de pages

  • 1.
    RSI 2005 (entré en vigueur le 15 juin 2007), art. 6.
  • 2.
    OMS, déclaration sur la deuxième réunion du comité d’urgence du règlement sanitaire international concernant la flambée de nouveau coronavirus 2019 (2019-nCoV), Genève, 30 janv. 2020, disponible en ligne : https://lext.so/uJrxZq.
  • 3.
    V. sur ce point : D. Houssin, « La coopération sanitaire internationale à l’épreuve du Covid-19 », in Politique étrangère, 2020, Institut français des relations internationales, n° 3, p. 33-45 ; C. Putti, « Réflexions autour de l’efficacité des mécanismes de coopération internationales en matière sanitaire dans le contexte de l’épidémie de Covid-19 », L’Observateur des Nations-Unies 2020, vol. 49, p. 43-58.
  • 4.
    CE, « Un an de recours en justice lié à la Covid-19 – Retour en chiffres sur l’activité du Conseil d’État, juge de l’urgence et des libertés », communiqué de presse du 20 avril 2021. V. également, la contribution de L. Vatna sur l’impact de la crise sanitaire sur le juge administratif : L. Vatna, « Le juge administratif et la crise de la Covid-19 – Entre protection de la santé et respect des libertés : le juge administratif à l’épreuve de la Covid-19 », Rev. EDH 2020, Actualités Droits-Libertés.
  • 5.
    La loi du 23 mars 2020 (L. n° 2020-290, 23 mars 2020 : JO, 24 mars 2020) a créé un régime d’état d’urgence sanitaire, défini aux articles L. 3131-12 à L. 3131-20 du Code de la santé publique. L’état d’urgence a été déclaré pour une durée de deux mois à compter du 24 mars 2020. La loi du 11 mai 2020 l’a ensuite prorogé jusqu’au 10 juillet 2020 (L. n° 2020-546, 11 mai 2020 : JO, 12 mai 2020). Une nouvelle progression de l’épidémie (qualifiée de « deuxième et troisième vagues épidémiques ») a par la suite conduit le président de la République à prendre le 14 octobre 2020, un décret déclarant de nouveau l’état d’urgence sanitaire à compter du 17 octobre sur l’ensemble du territoire national, prolongé ensuite jusqu’au 16 février 2021 par l’article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire (L. n° 2020-1379, 14 nov. 2020 : JO, 15 nov. 2020). Une loi du 15 février 2021 prolonge l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 1er juin 2021 (L. n° 2021-160, 15 févr. 2021 : JO, 16 févr. 2021). Enfin, la loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire organise la sortie de l’état d’urgence sanitaire (L. n° 2021-689, 31 mai 2021 : JO, 1er juin 2021).
  • 6.
    L. n° 2020-290, 23 mars 2020, art. 2, introduit à l’article L. 3131-12 du Code de la santé publique : JO, 24 mars 2020.
  • 7.
    L. n° 2020-290, 23 mars 2020, art. 2, introduit à l’article L. 3131-15 du Code de la santé publique : JO, 24 mars 2020.
  • 8.
    A. Pech, « De maux en mots : les premiers temps d’une gestion incertaine du Covid-19 », Journal du droit administratif (disponible en ligne), mars 2020.
  • 9.
    Sur les procédures d’urgence devant le juge administratif, l’article L. 511-1 du Code de justice administrative dispose que : « Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais ». Aux termes de l’article L. 521-2 du même code : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ».
  • 10.
    V. not. C. Bonnote, « L’acceptabilité sociale est-elle un indice de la qualité de la Justice administrative ? », Revue française d’administration publique 2016, n° 159, p. 689-700.
  • 11.
    CEDH, gde ch., 21 janv. 1999, n° 30544/96, Garcia Ruiz c/ Espagne, § 26.
  • 12.
    P. Pastor Villanova, ouverture du séminaire portant sur : « L’autorité du pouvoir judiciaire : la responsabilisation du pouvoir judiciaire : une responsabilité partagée entre le juge et l’État », séminaire du 26 janvier 2018 organisé par la Cour européenne des droits de l’Homme, les actes de ce dernier sont disponibles en ligne.
  • 13.
    S. Guinchard et T. Debard (dir.), Lexique des termes juridiques, 28e éd., 2020-2021, Dalloz, p. 816 ; Selon H. Lévy-Bruhl, la preuve a également une fonction d’acceptabilité et d’adhésion à une décision, selon ses termes, « elle a une fonction sociale qui consiste à faire accepter la thèse que l’on soutient (…) [elle constituerait par ailleurs] un mécanisme dont le but est de recueillir l’adhésion du groupe social plus que de rechercher la vérité » : H. Lévy-Bruhl, La preuve judiciaire : étude de sociologie juridique, 1963, Marcel Rivière et Compagnie, p. 22 et 46.
  • 14.
    Dictionnaire Larousse, éd. 2021, en ligne.
  • 15.
    V. sur ce point les propos introductifs de la contribution de B. Rottier sur les données empiriques et leur utilisation faite par le juge judiciaire. L’auteur revient sur la définition de données empiriques et réfute la définition proposée par l’Académie française voulant opposer données scientifiques aux données empiriques. Comme l’auteur, nous soutenons qu’une donnée empirique peut avoir une coloration scientifique, au surplus, que la recherche scientifique s’appuie mais également pourvoit à fournir des données empiriques : B. Rottier, « Le juge judiciaire face aux données empiriques », Revue française d’administration publique 2020, n° 173, p. 56.
  • 16.
    M. Mekki, « Le droit privé de la preuve…à l’épreuve du principe de précaution », D. 2014, p. 1391.
  • 17.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698.
  • 18.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698, § 10.
  • 19.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698, § 12.
  • 20.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698, § 13.
  • 21.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698.
  • 22.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698, § 14.
  • 23.
    CE, réf., 23 déc. 2020, n° 447698.
  • 24.
    CE, réf., 11 déc. 2020, n° 447208, § 11.
  • 25.
    CE, réf., 6 sept. 2020, n° 443750, § 6.
  • 26.
    CE, réf., 6 sept. 2020, n° 443750, § 7.
  • 27.
    CE, réf., 6 sept. 2020, n° 443750. Notons par ailleurs que le juge se fonde sur des sources à la fois internes (Haut conseil de la santé publique, Conseil scientifique Covid-19) et internationales (OMS).
  • 28.
    Il retiendra toutefois, à l’échelle d’un département, que certains centres-villes de communes facilement identifiables peuvent être exempts d’une telle obligation en fonction de leur densité de population : CE, réf., 6 sept. 2020, n° 443750, § 8-12.
  • 29.
    CE, réf., 21 janv. 2021, n° 447878, § 18 : les données font état d’une moyenne inférieure à 400 personnes par semaine ou 60 personnes par jour.
  • 30.
    CE, réf., 21 janv. 2021, n° 447878, § 18.
  • 31.
    CE, réf., 21 janv. 2021, n° 447878, § 20.
  • 32.
    CE, réf., 21 janv. 2021, n° 447878, § 19.
  • 33.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983.
  • 34.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 5 : « Il (…) appartient au juge des référés, lorsqu’il est saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 et qu’il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée par une personne morale de droit public à une liberté fondamentale, résultant de l’action ou de la carence de cette personne publique, de prescrire les mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte (…). Le caractère manifestement illégal de l’atteinte doit s’apprécier notamment en tenant compte des moyens dont dispose l’autorité administrative compétente et des mesures qu’elle a déjà prises ».
  • 35.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 5.
  • 36.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 12.
  • 37.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 14.
  • 38.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 16 et 18.
  • 39.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 19.
  • 40.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 19.
  • 41.
    CE, réf., 20 avr. 2020, n° 439983, § 18. Notons qu’en revanche certaines catégories du personnel pénitentiaire en contact direct et prolongé avec des personnes détenues font partie des agents pour lesquels le port du masque a été imposé et pour lesquels l’Administration pourvoit à leur fourniture : CE, réf., 8 avr. 2020, n° 439821, § 15-16.
  • 42.
    Cette ordonnance n’est pas s’en rappeler celle du 8 octobre 2020 au sein de laquelle le juge du référé-liberté avait conclu que l’absence de masques en milieu carcéral ne portait pas atteinte aux libertés fondamentales invoquées : CE, réf., 8 oct. 2020, n° 444741, § 25. V. A. Keravec et A. Artières-Glissant, « Le juge des référés et la circulation du Covid-19 en prison, l’administration pénitentiaire à la hauteur des exigences sanitaires ? », Rev. EDH 2021, Actualités Droits-Libertés.
  • 43.
    CE, réf., 9 avr. 2021, n° 450884, § 11.
  • 44.
    CE, réf., 9 avr. 2021, n° 450884, § 11-12.
  • 45.
    CSP, art. L. 3131-15 issu de la loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19 : « Dans les circonscriptions territoriales où l’état d’urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la Santé, aux seules fins de garantir la santé publique : (…) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l’ouverture, y compris les conditions d’accès et de présence, d’une ou plusieurs catégories d’établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, en garantissant l’accès des personnes aux biens et services de première nécessité. » Le Premier ministre a pris, sur le fondement de cet article, le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’urgence sanitaire, mesures qui ont été adaptées à l’évolution de la situation sanitaire notamment par le décret du 19 mars 2021 qui a décidé de restrictions supplémentaires dans seize départements puis du décret du 2 avril 2021 qui a étendu ces restrictions à l’ensemble du territoire métropolitain.
  • 46.
    CE, réf., 14 avr. 2021, n° 451085, § 7.
  • 47.
    CE, réf., 14 avr. 2021, n° 451085, § 9 : le juge se réfère notamment au taux d’incidence, à la tension hospitalière, aux taux d’hospitalisation et d’admission en services de soins critiques, au taux de mortalité, l’ensemble de ces indicateurs étant lus à la lumière des chiffres de la semaine précédente.
  • 48.
    JCE, réf., 14 avr. 2021, n° 451085, § 9.
  • 49.
    R. Letteron, « Covid-19 : le Conseil d’État tombe le masque », Blog Liberté, Libertés chéries, 31 mars 2020, disponible en ligne : https://lext.so/fcI05Q.
  • 50.
    CE, réf., 30 avr. 2021, nos 451849 et 451991.
  • 51.
    CE, réf., 30 avr. 2021, nos 451849 et 451991, § 8.
  • 52.
    CE, réf., 30 avr. 2021, nos 451849 et 451991, § 8.
  • 53.
    CE, réf., 30 avr. 2021, nos 451849 et 451991, § 9.
  • 54.
    CE, réf., 21 mai 2021, nos 452294 et 452449.
  • 55.
    L’on regrettera là encore toutefois que le juge ne mentionne pas la source des données utilisées.
  • 56.
    CE, réf., 21 mai 2021, nos 452294 et 452449, § 7.
  • 57.
    CE, réf., 21 mai 2021, nos 452294 et 452449, § 8.
  • 58.
    CE, réf., 5 févr. 2021, n° 449081.
  • 59.
    CE, réf., 5 févr. 2021, n° 449081, § 17.
  • 60.
    CE, réf., 5 févr. 2021, n° 449081, § 14.
  • 61.
    Nous soulignons.
  • 62.
    Il ajoutera par ailleurs que les personnes détenues bénéficient d’une forme de priorité au sein de la stratégie vaccinale dans la mesure où « comme les autres personnes vivant en collectivité [les personnes détenues sont] inscrites dans la quatrième phase de la campagne de vaccination » estimant ainsi que « la vaccination leur sera donc ouverte à titre prioritaire avant l’ensemble de la population qui ne présente pas de facteurs de risque identifiés, inscrite dans une cinquième phase de la campagne » : CE, réf., 5 févr. 2021, n° 449081, § 16.
  • 63.
    CE, réf., 5 févr. 2021, n° 449081, § 15.
  • 64.
    Sur l’évaluation de la marge d’appréciation dans le cadre du contentieux administratif, v. not. J.-M. Sauvé, « Le principe de proportionnalité, protecteur des libertés ? », Les cahiers Portalis 2018, n° 5, p. 19-21.
  • 65.
    CE, 1re-4e ch. réunies, 6 mai 2019, n° 415694 : Lebon : des requérants demandaient au Conseil d’État d’annuler la décision de rejet de leur demande par le ministre chargé de la Santé tendant à imposer aux fabricants des vaccins obligatoires de ne pas utiliser d’adjuvants aluminiques. Ils faisaient ainsi valoir des suspicions que, l’aluminium puisse présenter des risques pour la santé des enfants vaccinés. Dans cette affaire et contrairement au juge des référés dans le cadre du vaccin contre l’épidémie de Covid-19, le juge de l’excès de pouvoir accepte de se référer à des données à la fois internes (rapports de l’Académie nationale de médecine, du Haut conseil de la santé publique et de l’Académie nationale de pharmacie), et internationales (travaux de l’OMS) pour justifier « qu’aucun lien de causalité n’a pu être établi, à ce jour, entre adjuvants aluminiques et maladie auto-immune » (Ibid., § 7). Ajoutant que les vaccins en cause « ont une efficacité reconnue (…) pour prévenir des maladies infectieuses graves, pouvant mettre en jeu le pronostic vital, et qu’une baisse de la couverture vaccinale entraînerait des risques graves de réapparition de telles maladies » (Ibid., § 8), il conclut finalement qu’« en l’état des connaissances scientifiques », on ne pouvait retenir que le rapport entre les bénéfices et les risques ne serait pas favorable aux vaccins contenant des adjuvants aluminiques et que la décision attaquée ne saurait donc être retenue comme illégale (Ibid., § 10).
  • 66.
    CE, réf., 1er avr. 2021, n° 450956, § 6 : « Il ressort de l’ensemble de la procédure que pour efficace que soit la vaccination (…) elle n’élimine pas complètement la possibilité que les personnes vaccinées demeurent porteuses du virus. Si une étude américaine produite en délibéré semble indiquer que le nombre en serait faible, elle ne suffit pas à ce stade à démontrer, au regard de l’accélération de l’épidémie, que seul le respect des gestes barrières par les personnes concernées suffirait à limiter suffisamment la participation à la circulation du virus (…) ».
  • 67.
    CE, réf., 6 mai 2021, n° 451455, § 11 : « Au regard des incertitudes qui demeurent quant à la contagiosité réelle des vaccinés susceptibles d’être porteurs sains du virus, notamment au regard de la diffusion des variants et de l’ampleur des conséquences négatives pour la santé publique d’une levée sans délai des contraintes qui, à ce stade, progressivement réduites, cesseront d’être en vigueur le 2 juin 2021, il n’y a pas matière, en l’espèce, pour le juge des référés à user des pouvoirs qui sont les siens ».
  • 68.
    Nous soulignons.
  • 69.
    CE, réf., 3 mars 2021, n° 449759, § 9.
  • 70.
    CE, réf., 3 mars 2021, n° 449759, § 10.
  • 71.
    CE, réf., 3 mars 2021, n° 449759, § 10.
  • 72.
    V. sur ce point le dossier, « L’action publique, l’expertise et le juge », Revue française d’administration publique, La documentation française, oct. 2020, n° 173, 296 p.
  • 73.
    A. Thomas-Aubergier, « La preuve et l’incertitude scientifique », Les cahiers Portalis, n° 5, nov. 2017, p. 135.
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