Grand Paris

Activité économique en Île-de-France : optimisme de mise pour la rentrée

Publié le 04/09/2020

La région Île-de-France, poumon économique du pays, a vu une relance notable de son activité économique dès la fin du confinement. Le marché des cessions-acquisitions connaît une dynamique semblable depuis le mois de mai dernier. Interview croisée d’Antoine de Riedmatten, président du groupe In Extenso et membre du Cercle Perspectives, et de Marc Sabaté, associé et directeur général d’In Extenso Finance & Transmission.

Les Petites Affiches : Le redémarrage de l’activité des TPE-PME a-t-il été puissant après le confinement ? Le rebond attendu a-t-il eu lieu ?

Antoine de Riedmatten : Oui, la reprise d’activité a été soutenue au mois de mai, au moment du déconfinement. D’après nos données, le chômage partiel est devenu même marginal à partir du mois de juin. Nous sommes passés ainsi d’un mois d’avril durant lequel le chômage partiel était la règle à un retour d’activité important depuis.

Si l’on prend le cas de l’Île-de-France, l’évolution est très nette pour la restauration par exemple. La situation reste, en revanche, problématique pour les hébergements. De nombreux hôtels sont encore fermés ou ont encore un taux faible d’occupation. Or cela se traduit directement au niveau du personnel. L’autre point noir, bien sûr, c’est le domaine culturel où l’activité n’a pas encore redémarrée.

LPA : L’Île-de-France est tout de même la région où le taux d’activité partielle est resté le plus élevé selon votre baromètre. Pourquoi ?

A.R. : Plus précisément, c’est en région Île-de-France et Provence-Alpes-Côte d’Azur que le taux d’activité partielle est resté le plus important après le déconfinement : 26 % en mai dernier contre 22 % pour la moyenne nationale. Ce sont dans ces deux régions que la part d’hôtellerie de luxe et de touriste haut de gamme est la plus élevée.

De nombreux Français sont partis cet été en vacances en Bretagne, dans les terres ou sur la côte atlantique. La côte d’Azur et Paris accueillent plutôt une clientèle étrangère aisée. Une clientèle asiatique et américaine, par exemple, qui ne peut toujours pas se déplacer. Si on regarde d’ailleurs précisément les hôtels encore fermés dans la capitale, ce sont plutôt des 4 ou 5 étoiles très prisés de cette clientèle étrangère. Ce marché aura bien des difficultés à se relever puisqu’il dépend de la situation sanitaire chez nous, en France, mais aussi de celle à l’extérieur des frontières européennes. Les touristes européens qui peuvent eux voyager ont généralement des budgets moindres quand ils viennent nous visiter.

Activité économique en Île-de-France : optimisme de mise pour la rentrée
Marc Sabaté

LPA : Le marché des cessions-acquisitions s’inscrit-il dans les mêmes dynamiques ?

Marc Sabaté : Le volume d’opérations du premier semestre 2020, en baisse de 46 % en Île-de-France, est caractérisé par 3 tendances. La première c’est le référentiel de comparaison. L’année 2019 a été une année exceptionnellement haute. Sur les 6 premiers mois, l’an passé, en Île-de-France, nous étions sur une croissance du volume des opérations de 22 % comparé à 2018. Ensuite, il y a eu bien évidemment un arrêt brutal à partir de mi-mars dernier du fait du confinement. Quand on souhaite acheter une entreprise on souhaite logiquement la visiter, or ce n’était plus possible. Enfin, nous avions constaté un ralentissement dès la fin 2019 lié à l’anticipation d’une crise. L’économie de la cession-acquisition est tirée par les grands mouvements de l’économie, y compris internationale. La crise Covid ayant débuté à l’automne dernier en Asie, nous avons eu une baisse d’activité, bien que lente, quelques mois auparavant.

Depuis le mois de juin dernier, nous observons aussi un rebond important. Au niveau national, le volume d’opération est en passe de retrouver son niveau d’avant confinement. L’indice est tombé au plus fort de la crise à 49 pour remonter à 84 en juin. On est ainsi dans la même situation que lors de la crise de 2008 et la faillite de Lehman Brothers. 3 mois après le krach du groupe bancaire, intervenu en septembre, nous avions connu un très fort rebond de l’activité cession-acquisition.

LPA : Êtes-vous inquiets quant aux effets de la crise économique attendus par beaucoup à la rentrée ?

A.R. : Nous estimons, concernant le niveau d’activité des TPE-PME, que le sujet et les inquiétudes concernant des faillites devraient porter davantage sur le début de l’année 2021 que sur la rentrée prochaine. L’argent injecté dans l’économie, notamment via le prêt garanti par l’État (PGE), va permettre aux entreprises qui se portaient bien avant la crise de faire face aux difficultés à court terme. Les PGE ont été consentis à partir de mars dernier et il y a un échéancier important au bout d’un an. C’est à ce moment-là que l’on saura ce qu’il adviendra de cet outil. Sera-t-il remboursé ? Deviendra-t-il un prêt à moyen ou long terme ? Les débats auront lieu à partir de janvier prochain.

Les défaillances qui pourraient néanmoins arriver en septembre concerneront des entreprises qui étaient en difficulté avant la crise sanitaire. Je pense notamment à des entreprises placées sur le secteur de la distribution non-alimentaire et qui étaient fortement concurrencées déjà par internet.

Aussi les mesures prises depuis quelques semaines par le gouvernement visent à soutenir efficacement les entreprises pour la rentrée. Celles concernant par exemple l’emploi des jeunes sont suffisamment ciblées pour inciter leur embauche dès le mois de septembre prochain.

Enfin les différentes annonces politiques montrent bien qu’il n’y aura pas de nouveau confinement généralisé pour éviter que l’économie ne s’arrête de nouveau. Alors peut-on dire que la fin de l’année 2020 se passera aussi bien que le mois de juin pour l’activité des entreprises ? Cela reste difficile à prédire mais ne me paraît pas impossible.

M.S. : Les discussions et les échanges que l’on peut avoir avec des investisseurs et des chefs d’entreprises qui sont dans une perspective d’engager des opérations laissent entrevoir une forme d’attentisme d’ici à 2021. Et ce, pour les mêmes raisons énoncées précédemment.

Aussi concernant les cessions-acquisitions la situation est extrêmement contrastée selon les secteurs. La crise actuelle vient ainsi accélérer la transformation qui était attendue de certains modèles économiques. Je pense notamment au secteur du textile, de la mode ou l’industrie du luxe. Il y aura par conséquent des rebonds prévisibles pour l’activité fusion-acquisition notamment sur l’ingénierie financière des entreprises qui vont devoir penser leur sortie de PGE. Enfin, n’oublions pas que l’économie est bien financée, il y a de l’argent et des acheteurs qui scrutent les opportunités.

A.R. : J’ajouterai qu’il n’est plus possible de raisonner désormais de façon annuelle, et donc de se projeter assurément sur 2021. La crise et les incertitudes qui l’entourent nous obligent à penser par trimestre. L’an prochain se posera notamment la question cruciale du vaccin.

Si au deuxième trimestre 2021 nous avons un vaccin, l’activité économique, dans son ensemble, pourra repartir et nous pourrons alors anticiper nos activités sur un temps plus long. Si ce n’est pas le cas, nous resterons dans une logique de « stop and go ». La problématique du vaccin est aujourd’hui centrale.

X