Ronan Le Page : « L’économie yvelinoise est dynamique ! »

Publié le 26/09/2023

Par décret présidentiel, le 28 octobre 2022, Ronan Le Page, administrateur de l’État a été nommé sous-préfet, secrétaire général adjoint de la préfecture des Yvelines. Il prend le relais de la sous-préfète à la relance Jehane Bensedira. Cette fonction a été créée durant la crise sanitaire afin d’accompagner la mise en œuvre du plan France Relance. Aujourd’hui, ce poste évolue et un nouveau réseau départemental de sous-préfets référents a été mis en place pour accompagner le déploiement du plan France 2030 et pour accélérer les implantations industrielles en France. Le sous-préfet, Ronan Le Page, détaille ses principales missions et revient sur les caractéristiques de l’économie yvelinoise. Entretien.

Actu-Juridique : En quoi consistent votre fonction et votre activité quotidienne ?

Ronan Le Page : Ma fonction prend la suite de la sous-préfète à la relance Jehane Bensedira qui a quitté ses fonctions à la préfecture, à l’automne 2022. Ses missions consistaient à suivre l’engagement des crédits du plan de relance de l’État dans le département des Yvelines. Ces fonds provenaient à la fois du ministère de l’Économie et de l’Union européenne. L’État français a été soutenu à hauteur de près de 40 Mds€ par l’Union européenne pour tenir le choc face à la crise sanitaire. Il est nécessaire de bien distinguer les mesures exceptionnelles d’accompagnement aux secteurs touchés par la crise sanitaire des programmes pour les investissements productifs. Je suis donc arrivé dans un contexte post-plan de relance. Auprès du préfet des Yvelines, Jean-Jacques Brot, je suis notamment en charge du suivi des politiques gouvernementales en matière de développement économique et de soutien aux entreprises et de la coordination, dans le département, de l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

AJ : Quelle est la différence entre ces deux séries de mesures mises en place par l’État ?

Ronan Le Page : D’abord, le soutien direct à l’économie en plein cœur de la crise sanitaire a permis de réduire l’impact récessif de la pandémie de Covid-19 en France. Dans le cadre de ces politiques publiques mises en place par l’État, la sous-préfète Jehane Bensedira a suivi, conjointement avec les différents services de l’État, les dispositifs d’activité partielle pour les entreprises en difficulté et les mesures de report de charges sociales et fiscales. Des réunions régulières se sont ainsi tenues à l’initiative de la préfecture avec les acteurs économiques et territoriaux.

Dans un second temps, le plan de relance a permis de relancer rapidement l’économie française en proposant sous forme de guichet des mesures à destination de tous, particuliers, entreprises et associations, collectivités ou administrations. Le mot d’ordre était de soutenir des acteurs qui étaient capables de faire revenir leur activité en France. Dans les Yvelines, les aides ont été orientées vers l’automobile, l’aéronautique et le tissu industriel d’équipementiers qui gravitent autour de ces domaines. Il y a eu aussi un soutien vers les innovations de rupture. Les derniers engagements de crédits dans le cadre du plan de relance sont arrivés à terme à la fin de l’année 2021. Durant l’année 2022, il fallait donc assurer un suivi des aides attribuées. Ma prédécesseure a été mobilisée pour être au contact des entreprises et vérifier la bonne utilisation des fonds de soutien pour de l’investissement productif.

AJ : Qu’est-ce qui fait la diversité économique de ce département ?

Ronan Le Page : Notre territoire est très composite. Nous avons le bassin de Paris-Saclay tourné vers les hautes technologies. Nous avons un pôle tertiaire et industriel avec Saint-Quentin-en-Yvelines avec notamment la présence du Technocentre de Renault. Dans le Sud Yvelines, l’activité économique est tournée vers la ruralité mais aussi vers la foodtech. Puis vous avez la vallée de la Seine, longtemps considérée comme un poumon industriel français. Cette zone appelle le plus d’inquiétude par rapport à ce panorama général plutôt positif. Ce territoire nécessite une réponse opérationnelle adaptée de la part de l’État et des acteurs territoriaux, notamment en termes de réindustrialisation. Le conseil départemental est ainsi très mobilisé à travers une action foncière volontariste sur cette zone d’activité.

AJ : Concernant votre activité, vous êtes aussi engagé sur le programme France 2030. C’est en quelque sorte la suite du plan de relance post crise sanitaire ?

Ronan Le Page : Le plan de relance est terminé. L’État a investi dans l’industrie, a permis aux acteurs économiques de se relancer au niveau des trésoreries et des fonds propres. Nous avons sauvé des entreprises et leur avons permis de retrouver des marges pour investir dans l’avenir. Le programme France 2030 renoue avec un objectif plus ancien à travers les programmes d’investissement d’avenir (PIA). Dans les années 1960, De Gaulle a choisi cette stratégie en lançant le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) ou en investissant dans des industries de pointe françaises sur des innovations technologiques de souveraineté. Ces investissements permettent de maintenir la France à la pointe de la concurrence mondiale. Le programme France 2030 n’est donc pas la suite du plan de relance. Il est beaucoup plus tourné vers l’innovation et la réindustrialisation.

AJ : De quelle manière les acteurs économiques yvelinois ont-ils bénéficié de ce programme ?

Ronan Le Page : Dans les Yvelines, le programme France 2030 a bénéficié à 125 lauréats pour 535 M€. Les premiers lauréats sont des acteurs publics avec des centres ou des laboratoires de recherche. Vous avez également des constructeurs automobiles qui travaillent sur la batterie électrique de demain. Nous allons soutenir une entreprise de Maisons-Laffitte qui souhaite développer un micro-processeur afin d’affirmer notre savoir-faire en termes de composants électroniques. Des sociétés travaillant dans des domaines novateurs et structurants, tels que la cryptographie post-quantique et la décarbonation de l’industrie, vont également être soutenues par les mesures de l’État.

Pour candidater au programme France 2030, il faut se positionner sur un appel à projet spécifique, se préparer à passer devant un jury composé d’experts. Le projet est examiné sur la pertinence de la solution proposée, notamment en termes d’innovation et de réindustrialisation. Les premiers lauréats de France 2030 dans les Yvelines sont des structures importantes mais toutes les entreprises peuvent candidater, de la start-up à la TME, et de la PME à l’ETI, afin de remplir l’objectif du gouvernement d’atteindre les 50 % d’acteurs émergents lauréats. Le délai d’instruction de la candidature et de délivrance des fonds peuvent est être longs, notamment pour les start-up, mais d’autres solutions existent pour accompagner les acteurs émergents (soutien BPI).

AJ : Un autre sujet d’actualité avec le fonds de revitalisation. En quoi consiste ce dispositif cogéré par la préfecture et la Chambre de commerce et d’industrie des Yvelines ?

Ronan Le Page : La revitalisation fait écho à la loi cohésion adoptée en 2002, par laquelle les entreprises de plus de 1 000 salariés procédant à des restructurations affectant leur bassin d’emploi ont une obligation de revitalisation de leur territoire. La société peut se tourner vers la préfecture pour verser des fonds au titre de cette compensation. Les services de l’État avec les partenaires locaux doivent trouver les meilleurs projets entrepreneuriaux à soutenir. À cette fin, en novembre 2022, le préfet des Yvelines et le président de la CCI 78 ont signé une convention de partenariat portant sur la création d’un fonds départemental de revitalisation. La CCI assure l’animation de ce fonds, qui a été lui-même consigné à la Caisse des dépôts et consignation sur un compte de consignation unique. Certes, la compensation est remise à l’État mais l’argent reste celui de l’entreprise qui verse les fonds de soutien aux sociétés sélectionnées. Pour candidater et bénéficier du fonds, les entrepreneurs ont envoyé leur dossier à la CCI qui constitue la porte d’entrée.

AJ : Le 27 juin 2023, vous avez annoncé les premiers lauréats de ce fonds de revitalisation dans le département des Yvelines…

Ronan Le Page : Effectivement, deux entreprises yvelinoises ont bénéficié de 100 000 € chacune. D’abord, l’entreprise Recnorec basée à Trappes et spécialisée dans le recyclage du plastique. Elle utilise cette matière pour fabriquer du mobilier urbain et d’intérieur. C’est un prototype d’usine à retraitement de plastique qui permet de réduire le nombre de déchets produits. Ensuite, la société Les Glaciers parisiens a aussi bénéficié de ce fonds. Elle produit des glaces avec des produits artisanaux locaux qui viennent d’Île-de-France. Dans leur stratégie, elles souhaitent créer de nombreux emplois dans le département. Cette création d’emploi est la valeur cardinale du fonds de revitalisation. Les emplois détruits sont compensés.

AJ : Pour conclure, comment pouvez-vous qualifier l’économie yvelinoise actuelle en un mot ?

Ronan Le Page : En un mot, l’économie yvelinoise est dynamique ! Nous avons un nombre de créations d’entreprises dans le département assez phénoménal. Le territoire se porte bien. Les Yvelines ont une teneur d’emploi salarié industriel importante avec un taux de 20 %. Il est placé dans les premiers départements français dans ce domaine. Le secteur tertiaire est aussi important avec la présence de nombreux sièges d’entreprise. Nous avons de nombreux grands groupes présents avec leurs sous-traitants et leurs filiales. Ensuite, la tension foncière est aussi un signe de dynamisme. Il y a quasiment une continuité du bâti qui part de Paris et qui passe par les Hauts-de-Seine. Dans les Yvelines, nous avons encore des espaces exploitables, surtout dans le sud. Le territoire est vraiment attractif et nous sommes assez sollicités pour de nouvelles implantations. Nous le constatons notamment avec une part d’investissement direct étranger très forte dans le département.

Plan
X