Paris (75)

Soumia Malinbaum, une entrepreneuse numérique à la tête de la Chambre de commerce et d’industrie Paris

Publié le 26/01/2022

Membre de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) Île-de-France depuis de nombreuses années, Soumia Malinbaum vient d’être élue présidente de l’établissement public départemental. Entrepreneuse dans le numérique, elle souhaite une « Chambre de commerce et d’industrie qui forme et soutient l’entrepreneuriat ». Son mandat sera notamment occupé par l’accueil d’événements sportifs majeurs, dont les Jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Actu-Juridique : Dans quel état d’esprit entamez-vous votre mandat ? La situation pour les entrepreneurs, du fait de la pandémie, est pour le moins particulière…

Soumia Malinbaum : Oui, toutes mes pensées sont d’ailleurs tournées vers eux. Je sais à quel point il est difficile, aussi bien économiquement que psychologiquement, d’être un entrepreneur aujourd’hui à Paris. Cela fait désormais deux ans qu’ils ne peuvent pas exercer normalement leur activité. Le rôle de la Chambre de commerce et d’industrie est de leur donner de l’énergie, les moyens d’entreprendre et de leur montrer qu’ils ne sont pas seuls. La CCI est là pour les accompagner. Nous avons notamment déployé une cellule d’écoute et de soutien psychologique pour les chefs d’entreprise. Même si les entrepreneurs sont résilients, leur moral peut être atteint dans la durée. Nous nous devons de les soutenir.

À titre personnel, je suis de nature optimiste, j’ai confiance en leur capacité de rebond et d’adaptation. Dans les prochains mois et prochaines années, nous allons devoir apprendre à vivre avec les conséquences de cette pandémie et mettre en place les conditions d’un développement économique pérenne. De grands projets arrivent à Paris tels que la coupe du monde de rugby et les Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Cela nous pousse à être optimiste.

AJ : Quelles sont vos idées concrètement pour soutenir les entrepreneurs durant ces cinq prochaines années ?

S.M. : Mon programme, et celui de toute l’équipe de la CCI, vise d’abord à poursuivre et à approfondir les missions d’accompagnement qui sont historiquement celles de la chambre : accompagnement des commerces, des entreprises, des jeunes entrepreneurs et des personnes en formation ou sans emploi. Cette mission est encore plus importante aujourd’hui du fait de la crise sanitaire.

Aussi, ma feuille de route s’inscrit dans les pas des grandes transformations numériques et environnementales que notre économie connaît depuis quelques années déjà. Il faut notamment que nous aidions les PME du territoire dans leur équipement en outils digitaux. Pour l’environnement, nous devons nous concentrer sur l’aide à la décarbonation de l’économie. Chacun et chacune a sa part à jouer en la matière. Enfin, il y a des enjeux sociaux très importants. Les jeunes font face à de nombreuses difficultés pour se former et pour accéder au marché de l’emploi. Nous ne pouvons pas nous permettre de les laisser de côté.

Lors de la campagne je parlais d’un Paris de la solidarité, d’un Paris de la croissance durable et responsable, et d’une chambre de commerce et d’industrie qui forme et soutient la reconversion. Ces termes résument bien notre ambition.

AJ : Les grands événements sportifs, et notamment les Jeux olympiques, dans un peu plus de 2 ans, sont-ils un horizon sur lequel vous souhaitez vous appuyer ?

S.M. : Ces événements sont des opportunités pour toute la société et notamment pour tous les entrepreneurs et commerçants de la région. Il faut se préparer à de tels événements car plus que jamais Paris sera scrutée par le monde entier. Nos entrepreneurs et l’ensemble du tissu économique doivent tirer parti des opportunités d’affaires et montrer leur savoir-faire.

AJ : Paris est-elle une ville suffisamment innovante, d’après vous ? Notamment en comparaison d’autres métropoles mondiales telles que Londres, New-York ou encore Tokyo…

S.M. : Paris est une ville, d’après moi, profondément innovante. Elle est reconnue en tant que telle à l’international. Prenons l’exemple de Station F : c’est tout de même le plus grand incubateur de start-ups au monde. C’est un signe qui ne trompe pas. Paris regorge d’entrepreneurs, commerçants et artisans. L’innovation et la créativité sont liées à l’histoire de cette ville. C’est également une capitale inspirante pour les artistes, les créateurs, et l’ensemble du monde culturel.

Chaque année, la Chambre de commerce et d’industrie de Paris organise le prix Paris Shop & Design pour récompenser les initiatives les plus réussies en matière de design et d’architecture dans la conception des espaces de ventes, et nous sommes systématiquement étonnés de constater l’extraordinaire créativité des commerçants parisiens. Nous avons aussi lancé récemment le Club Boost Mode Design afin d’accompagner le développement des entrepreneurs dans le secteur de la mode et du design. Tout cela concourt à l’image positive et créative de Paris. Globalement nous pouvons être fiers de l’esprit d’entrepreneuriat qui règne dans la ville. Paris et sa région font des envieux, il me semble, dans le reste du monde, et ce n’est pas pour rien que la région attire chaque année de nombreux investisseurs étrangers. Le fait, également, que Paris se voit confier les événements internationaux dont nous parlions est la preuve d’un savoir-faire qui ne peut être démenti.

AJ : L’innovation constitue un sujet que vous connaissez personnellement. Vous avez, en effet, réalisé l’ensemble de votre parcours dans le secteur du numérique…

S.M. : J’ai créé ma première entreprise en 1991. Je l’ai dirigée pendant 15 ans. Par la suite, j’ai créé une deuxième entreprise pour accompagner les particuliers et les entreprises à s’équiper d’ordinateurs. Nous étions alors dans les années 2000. Enfin j’ai rejoint le groupe Keyrus, au sein duquel je suis toujours en activité, en qualité de vice-présidente du business développement. Keyrus est une entreprise numérique, présente dans 15 pays, qui accompagne les entreprises dans leur transformation numérique et dans l’utilisation des données.

Il est vrai que j’ai toujours évolué dans le monde du numérique. Ce monde a évidemment connu de profondes transformations. Un temps méconnu, il traverse aujourd’hui tous nos environnements. L’enjeu, à présent, pour nos sociétés européennes, est de se doter d’une souveraineté numérique en lien avec nos valeurs.

AJ : La nouvelle assemblée de la CCI Paris est composée majoritairement de femmes (30 sur 58). Quel regard portez-vous sur le développement en cours de l’entreprenariat au féminin ? Est-ce un sujet que vous souhaitez porter aussi durant votre mandat ?

S.M. : C’est un sujet qui me tient évidemment à cœur. J’essaie, autant que possible, d’accompagner le développement de cet entrepreneuriat au féminin, au travers notamment de tutorats. Les jeunes femmes ont besoin de sororité. Entreprendre pour elles n’est pas toujours facile. Elles n’ont pas nécessairement, dans leurs milieux, des modèles sur lesquels elles peuvent se reposer ou trouver des conseils. Beaucoup d’entre elles se censurent et s’interdisent inconsciemment de porter leurs projets. J’essaie donc à ma mesure de les aider et de véhiculer un message. Lors de mon mandat, j’essaierai évidemment de soutenir les réseaux déjà existants.

Je serai particulièrement attentive au sujet du financement. Les femmes ont encore beaucoup trop de mal à financer leurs projets, et c’est évidemment un point de blocage important qui renforce les inégalités.

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