Insolite : Quand Nintendo choisi le nom de Kirby en hommage à son avocat

Publié le 26/06/2025 à 17h00

Quand les clients sont contents de leur avocat, il arrive qu’ils leur fassent des cadeaux pour les remercier, ou bien qu’ils trouvent une manière originale de leur rendre hommage. Voici l’histoire de Kirby.

 

Insolite : Quand Nintendo choisi le nom de Kirby en hommage à son avocat
Kirby et Mario Bros dans le jeu vidéo Mario Party, Nintendo

Si vous connaissez Mario et Luigi, les plombiers les plus célèbres du jeu vidéo et peut-être les plus célèbres tout court, vous connaissez sans doute aussi Kirby, le petit personnage tout rond tout rose qui aspire ses ennemis pour copier leurs pouvoirs. Mais saviez-vous que le studio japonais avait choisi le nom de sa mascotte en hommage à … son avocat ?

L’histoire est racontée par Geoffray Brunaux, récidiviste en matière de livres consacrés au droit des jeux vidéo, dans son excellent dernier opus Une brève histoire juridique du jeu vidéo, venant de paraître aux éditions Mare & Martin (170 pages, 17 €). Chaque chapitre (appelés niveau) développe une thématique juridique de propriété intellectuelle en lien avec un jeu vidéo et une affaire judiciaire ayant éclairci un point de droit du jeu vidéo.

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On y apprend qu’en 1982, les Studios Universal – qui venaient de produire un remake du film King Kong avec Jessica Lange dans le rôle principal (1976, l’original datant de 1933) – décidèrent d’attaquer en justice la firme Nintendo. Cette procédure judiciaire fut entamée par le géant de la production cinématographique après le refus que lui opposa le tout petit studio (à l’époque) de développeurs japonais de lui verser une redevance pour la reproduction et l’utilisation de King Kong et de son scénario dans leur nouveau jeu vidéo : Donkey Kong. Cette procédure transmédia, alors inédite (jeux vidéo contre film, l’une des premières du genre), donna lieu à une série d’arrêts sur le risque de confusion entre les deux Kongs…

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La question principale fut résolue en appel par la United States Court of Appeals du Second Circuit, le 4 octobre 1984, laquelle fut convaincue par les arguments de l’avocat de Nintendo : un certain John Kirby.

Une intrigue identique ?

Le premier argument des studios Universal était la similarité de l’intrigue : un gorille qui enlève une femme en détresse qu’il faut aller sauver en hauteur ! Mais, estimèrent les juges : « les deux n’ont rien en commun hormis un scénario mettant en scène un gorille, une femme captive, un sauveteur et un gratte-ciel ». Si les éléments constitutifs du scénario sont similaires, ils ne sont chacun qu’une réinterprétation des histoires nippones de monstres géants à la Godzilla. 1-0 pour Kirby.

Un nom copié-collé ?

Deuxième argument avancé par le studio de cinéma : les noms quasi copiés collés des deux personnages principaux des œuvres. Certes, le mot kong est bien présent chez King Kong le premier, puis chez Donkey Kong, mais les juges rappelèrent à juste titre que le mot renvoyait à des singes aux proportions énormes. Ne restent que King et Donkey, qui n’ont rien à voir, excepté d’avoir permis à Maître Kirby de marquer son 2e point.

Le précédant Superman

L’argument sur la similarité des noms ayant été balayé en première instance, Universal Studio tenta de produire une enquête réalisée auprès du public américain devant les juges d’appel afin de les convaincre du risque de confusion ; les chiffres avancés démontraient que la confusion existait bel et bien, mais chez un nombre très minoritaire de personnes questionnées. De plus, ces dernières pensaient non pas que les deux « Kongs » étaient confus sinon confondus, mais plutôt que ces deux œuvres, bien que distinctes, partageaient un créateur commun ! La cour cita une affaire Superman similaire, où des prétentions similaires furent rejetées au motif que les scénarios si différents empêchaient le risque de confusion entre les super-héros.

3-0 pour Kirby

Fort de ces victoires judiciaires successives, le studio de geeks qu’était Nintendo à l’époque remercia l’avocat qui permit cette avancée importante en matière de protection juridique des œuvres des développeurs de jeux vidéo face à un géant du cinéma : ainsi, le petit personnage attachant en développement pour la firme Kirby (qui compte aujourd’hui plus de 30 jeux vidéo différents), porterait le même nom que celui qui sauva Donkey Kong des griffes de King Kong, l’avocat John Kirby !

Heureusement pour nous tous, car Kirby, décédé en 2019, sauva par la même occasion les frères Bros, Mario et Luigi, qui firent leur première apparition en tant que sauveteurs de la princesse dans Donkey Kong. D’ailleurs, Mario, appelé « Jumpman » dans ses débuts, s’est lui-même vu rebaptiser Mario après quelques années car l’un des développeurs de chez Nintendo estima que le loueur des locaux Nintendo aux États-Unis lui ressemblait fortement.

Son nom ? Mario Segale…

Bonsoir !

 

 

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