L’assurance-vie et le droit des majeurs protégés : encore des incertitudes
Les contrats d’assurance-vie peuvent se retrouver confrontés au droit des majeurs protégés. La législation a d’ailleurs été notablement clarifiée en la matière, notamment concernant la désignation ou la substitution du bénéficiaire. Pour autant, quelques incertitudes demeurent. Cette contribution fait le point sur les principales solutions applicables et les questions demeurant à éclaircir.
1. Le contrat d’assurance-vie est généralement défini comme la convention par laquelle l’assureur, en contrepartie du versement d’une ou de plusieurs primes, s’engage à verser une garantie au bénéficiaire désigné, en cas de survenance d’un évènement expressément visé par le contrat, et qui est en relation avec la durée de vie humaine de l’assuré.
2. Ainsi, en cas de vie du souscripteur, l’intéressé restera le titulaire des fonds et pourra récupérer librement le capital et les intérêts. En revanche, en cas de décès de ce souscripteur, le contrat sera dénoué et le capital et les intérêts seront transmis au(x) bénéficiaire(s) de son choix.
3. Ces contrats peuvent prendre des formes variées. La distinction la plus élémentaire concerne les contrats monosupport et les contrats multisupport. Dans les premiers, les versements sont investis sur des produits sans risque, telles que des obligations d’État, et revalorisés chaque année. Le capital investi est alors garanti à tout moment et les intérêts de l’année sont définitivement acquis. Dans la seconde hypothèse, les investissements sont effectués sur différents supports, le fonds en euros et les unités de compte, afin de diversifier ses placements. On précisera ici que le ou les fonds en euros permettent de sécuriser une fraction de l’épargne. Il en va différemment, en revanche, avec les unités de compte dont la valeur est sujette à des fluctuations à la hausse ou à la baisse dépendant, en particulier, de l’évolution des marchés financiers. Un risque de perte en capital existe donc dans ce dernier cas.
4. Le contrat d’assurance-vie présente alors différents intérêts. D’abord, il permet de se constituer un capital sur le long terme (sauf pertes résultant des investissements dans des unités de compte). Il offre aussi la possibilité de compléter ses revenus, notamment pour la retraite, par des retraits réguliers ou la transformation du capital en rente viagère. Enfin, il s’agit d’un excellent outil de transmission de son patrimoine grâce à une fiscalité avantageuse et à une grande liberté dans le choix du ou des bénéficiaires.
5. Il est classique de dire que l’assurance-vie constitue, aujourd’hui, l’un des « placements préférés des Français ». Ainsi, en 2022, l’encours de l’assurance-vie a représenté 33 % du patrimoine financier des Français (1885 milliards d’euros1). On notera cependant que la collecte nette en assurance-vie2 a diminué en 2022 pour s’établir à 8,4 milliards d’euros dans un contexte de baisse générale des flux de placements financiers des ménages3.
6. Or, sans surprise, ces contrats d’assurance-vie peuvent se retrouver confrontés au droit des majeurs protégés. D’une part, il n’est pas rare qu’une personne souscrive un contrat puis que, par la suite, elle se retrouve placée sous un régime de protection. D’autre part, en présence d’un majeur protégé, les organes de protection sont souvent tentés de se tourner vers l’assurance-vie lorsqu’il dispose de capitaux disponibles, par exemple pour placer des liquidités résultant de la vente d’un bien immobilier.
7. Des protections s’imposent alors. En effet, il convient de garder à l’esprit que l’assurance-vie n’est pas sans danger4. En fonction des modalités choisies, des risques de pertes notables sont susceptibles de se rencontrer. De plus, elle permet de transmettre « hors succession ». Dès lors, dans les faits, elle peut être le moyen de priver un héritier réservataire de la part qui lui est normalement réservée par la loi. Un encadrement est donc requis en la matière concernant les majeurs protégés.
8. Dès lors, que prévoit le droit en la matière ? Quelles sont les incidences des différents régimes de protection sur la conclusion de tels contrats ou leurs modifications ? Quelles précisions utiles ont été apportées par la jurisprudence en la matière ? Où se situent les ultimes interrogations5 ?
9. Nous observerons, successivement, les règles « générales » applicables au contrat d’assurance-vie souscrit par le majeur protégé6 (I), puis celles qui concernent plus particulièrement la clause bénéficiaire (II), avant d’observer les incertitudes persistantes (III).
I – Les règles « générales » applicables
10. Pendant longtemps, il n’était pas aisé de concilier les règles protectrices des personnes vulnérables issues du Code civil et les principes édictés par le Code des assurances. Il en va différemment aujourd’hui. Nous ferons ici une distinction selon que nous sommes en présence d’une tutelle ouverte (A) ou un autre régime de protection (B).
A – En présence d’une tutelle
11. Le droit applicable en la matière est assez récent. En effet, on doit à la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007 permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés7, la création de l’article L. 132-4-1 du Code des assurances. Aux termes de l’alinéa premier de ce dernier : « Lorsqu’une tutelle a été ouverte à l’égard du stipulant, la souscription ou le rachat d’un contrat d’assurance sur la vie ainsi que la désignation ou la substitution du bénéficiaire8 ne peuvent être accomplis qu’avec l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille s’il a été constitué ».
12. Dans le même sens, on notera que le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle9 considère que doivent être regardés comme des actes de disposition10, la souscription, le rachat d’un contrat d’assurance-vie, la désignation ou la substitution du bénéficiaire, ainsi que la révocation du bénéfice non accepté d’un contrat d’assurance-vie11.
13. On pourrait s’étonner de la généralité de la solution posée concernant les conventions concernées. Tout contrat d’assurance-vie va impliquer, pour la réalisation de différents actes, l’autorisation du juge des tutelles (ou du conseil de famille). Pourtant, les assurances-vie en euros sont nettement moins risquées, pour le souscripteur, que les contrats en unités de compte. Une limitation de la protection ne serait-elle pas plus judicieuse ? Aucunement. En effet, comme a pu le relever très justement un auteur12, « le contrat d’assurance-vie est un placement à long terme, qui va donc structurer durablement le patrimoine du contractant, avec soit un risque de perte, soit une espérance de revenus faibles, pratiquement aujourd’hui égale voire inférieure à l’inflation réelle pour les contrats en euros ». Il est donc finalement heureux que l’exigence du recours au juge ne fasse pas de distinction selon la nature du contrat ou la nature du support sur lesquels les fonds sont investis13.
14. De même, on notera qu’aucune exception n’est prévue à l’égard des opérations envisagées par l’article. C’est très clair pour le rachat ; que celui-ci soit total ou partiel, l’intervention du juge (ou du conseil de famille) sera nécessaire14. Il est vrai que, dans tous les cas, l’acte en question n’est pas sans danger dans la mesure où il peut engendrer des coûts.
15. Une importante question se pose alors. Le tuteur, respectant le formalisme légal et sollicitant l’accord du juge, sera-t-il libre de passer comme il l’entend l’un des actes visés par l’article L. 132-4-1 du Code des assurances ? Certes, il agira en lieu et place du majeur protégé par représentation. Néanmoins, plusieurs limites existent. D’une part, il devra apporter à la gestion patrimoniale, des « soins prudents, diligents et avisés, dans le seul intérêt de la personne protégée » comme le prévoit l’article 496, alinéa 2, du Code civil. D’autre part, et même s’il n’est pas tenu de choisir un contrat monosupport en euros, peu risqué, son choix devra être avalisé par le juge des tutelles. Cette situation est donc de nature à orienter, finalement, le tuteur vers des supports sécurisés15. Ainsi, en pratique, on relèvera essentiellement des contrats en euros ou des contrats multisupports avec une allocation d’actifs prudente. Enfin, il demeure opportun, dans la mesure du possible, que le choix du contrat se fasse avec l’accord du majeur protégé, préalablement informé de l’intérêt de souscrire le contrat et des particularités de ce dernier.
16. Bien évidemment, le non-respect de la règle étudiée sera de nature à entraîner la nullité de l’acte passé. D’abord, il résulte de l’article 465, 4°, du Code civil que si le tuteur a accompli seul un acte qui ne pouvait être accompli qu’avec l’autorisation du juge ou du conseil de famille s’il a été constitué, l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice. Il en va de même si l’acte a été passé par le majeur sous tutelle seul16.
B – En présence d’un autre régime de protection
17. Nous évoquerons ici, en particulier, les cas de la curatelle (1) et du mandat de protection future (2).
1 – En présence d’une curatelle
18. Aux termes du même article L. 132-4-1, alinéa 1er, du Code des assurances, lorsqu’une curatelle a été ouverte à l’égard du stipulant, la souscription ou le rachat d’un contrat d’assurance sur la vie ainsi que la désignation ou la substitution du bénéficiaire ne peuvent être accomplis « qu’avec l’assistance du curateur ».
19. Le curateur accompagnera donc le majeur protégé pour toutes les opérations citées ci-dessus. En conséquence, du fait de cette assistance, l’implication de la personne protégée dans le choix du contrat sera, par définition, plus forte qu’en matière de tutelle. Le curateur ne pourra donc pas, pour sa part, se passer de l’accord du majeur sous curatelle17. Cette solution paraît désormais bien acquise pour la jurisprudence18.
20. En cas d’opérations passées en violation d’une telle exigence, la nullité sera susceptible d’être prononcée. D’une part, si le curateur a accompli seul un acte qui aurait dû être fait avec l’assistance de la personne protégée, l’acte est nul de plein droit sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice19. D’autre part, pour l’article 465, 2°, du Code civil, si la personne protégée a accompli seule un acte pour lequel elle aurait dû être assistée, « l’acte ne peut être annulé que s’il est établi que la personne protégée a subi un préjudice ».
2 – En présence d’un mandat de protection future
21. Le mandat de protection future, moins connu que la tutelle et la curatelle, peut être défini comme un mécanisme volontaire d’anticipation, constituant une alternative aux mesures judiciaires de protection des personnes vulnérables. Plus précisément, il s’agit d’un contrat par lequel une personne va en charger une autre de la représenter, pour le cas où, à l’avenir, elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérêts. Le mandataire de protection future pourra se voir confier aussi bien la gestion des biens que la protection de la personne du mandant20. Son encadrement juridique, trouvant sa source dans la loi n° 2007-308 du 5 mars 200721, figure aux articles 477 à 494 du Code civil.
22. Les solutions applicables au contrat d’assurance-vie ici sont plus délicates à déterminer dans la mesure où le majeur conserve sa capacité juridique et décide des pouvoirs qu’il entend confier au mandataire. Surtout, la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007 n’a adopté aucune disposition spécifique en cas de mise en œuvre d’un mandat de protection future.
23. Il faut donc se retourner vers les dispositions du Code civil, relatives à ce mandat, pour trouver certaines solutions utiles. Or, il apparaît qu’une distinction s’impose selon que ce même mandat est établi sous la forme notariée ou sous seing privé.
24. D’abord, avec le mandat notarié, il est prévu que ce dernier, « même conçu en termes généraux, inclus[e] tous les actes patrimoniaux que le tuteur a le pouvoir d’accomplir seul ou avec une autorisation »22. Il en résulte donc que le mandataire pourra effectuer seul les différents actes visés par l’article L. 132-4-1 (souscription, rachat, etc.) sans avoir à demander une autorisation au juge des tutelles ou au conseil de famille23.
25. En revanche, si le mandat est intervenu en la forme sous seing privé, le mandataire ne pourra accomplir que les actes qu’un tuteur peut faire sans autorisation24, c’est-à-dire les actes d’administration. Dès lors, tous les actes de disposition nécessaires impliqueront l’intervention du juge des tutelles ou du conseil de famille. Par conséquent, le mandataire devra obtenir une telle autorisation s’il souhaite souscrire un contrat d’assurance-vie au nom du majeur protégé.
II – Les règles particulières à la clause bénéficiaire
26. Le contrat d’assurance-vie est un contrat de couverture de risque permettant, cela a été dit, de réaliser une opération d’épargne au bénéfice du souscripteur, mais aussi de faire acquérir à une ou plusieurs personnes déterminées la valeur du contrat au décès de l’assuré. La désignation du bénéficiaire doit alors faire l’objet d’une attention particulière. Le législateur en a pleinement conscience.
27. Cela a été observé précédemment25, il résulte de l’article L. 132-4-1 du Code des assurances que « lorsqu’une tutelle a été ouverte à l’égard du stipulant, (…) la désignation ou la substitution du bénéficiaire ne peuvent être accompli[e]s qu’avec l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille s’il a été constitué ». De plus, « après l’ouverture d’une curatelle, ces mêmes actes ne peuvent être accomplis qu’avec l’assistance du curateur ». Dès lors, l’ensemble des solutions précitées, tant en matière de tutelle, que de curatelle ou de mandat de protection future auront vocation à s’appliquer ici de la même manière. Les cas de nullité envisagés également.
28. Ainsi, en cas de tutelle, le juge intervenant devra observer les avantages de la désignation pour le majeur. Rappelons, en effet, que pour l’article 496 du Code civil le tuteur est tenu d’apporter, dans la gestion du patrimoine du majeur, « des soins prudents, diligents et avisés, dans le seul intérêt de la personne protégée »26. Le rôle du tuteur sera, dans tous les cas, ici essentiel27.
29. Bien évidemment, le choix du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie étant un acte éminemment personnel28, il conviendra d’associer le plus possible, en cas de tutelle, le majeur à la décision en question s’il dispose d’une lucidité suffisante. Un auteur29 a pu parler ici de « capacité d’exercice circonstancielle »30. Il est donc recommandé de procéder à l’audition du majeur protégé31.
30. Ce choix du bénéficiaire pourra être réalisé de façon nominative comme de façon plus générale en visant les « héritiers ». Cette dernière clause a l’avantage de présenter une certaine neutralité puisqu’elle renvoie à la dévolution successorale32.
31. La jurisprudence rappelle, à intervalle régulier, la nécessité de respecter ces règles, que cela soit l’intervention du juge en cas de tutelle33, ou l’assistance du curateur en matière de curatelle34. Dans ce dernier cas, on notera cependant que le respect des dispositions relatives à la régularité des actes accomplis par une personne placée sous le régime de la curatelle ne fait pas obstacle à l’action en nullité pour insanité d’esprit fondée sur l’article 414-1 du Code civil35.
32. Quelques particularités juridiques sont néanmoins à observer. Elles concernent la désignation du tuteur ou du curateur comme bénéficiaire (A), mais aussi le cas de l’acceptation par le bénéficiaire (B).
A – Le cas de la désignation du tuteur ou du curateur comme bénéficiaire
33. Une limite notable est prévue par l’alinéa 3 de l’article L. 132-4-1 : lorsque le bénéficiaire du contrat d’assurance sur la vie est le curateur ou le tuteur, « il est réputé être en opposition d’intérêts avec la personne protégée ». Cette idée d’« opposition d’intérêts »36 est importante. Elle tente d’éviter que la personne chargée de protéger le patrimoine ne soit tentée de gérer en fonction de ses propres intérêts plus qu’en fonction de ceux du majeur protégé37.
34. Or, un tel choix n’est pas rare en pratique, dans la mesure où le tuteur, comme le curateur, sera souvent choisi parmi les personnes les plus proches. En cas de contestation, les juges du fond sont alors compétents pour apprécier cette opposition d’intérêts38.
35. En matière de tutelle, le tuteur concerné devra obtenir du juge (ou du conseil de famille) la désignation d’un subrogé tuteur39 ou d’un tuteur ad hoc40. Une solution comparable s’imposera en matière de curatelle, un subrogé curateur ou un curateur ad hoc devant être désigné. Dans tous les cas, ce subrogé interviendra alors pour la désignation, mais aussi pour tous les actes de gestion ultérieurs du contrat.
B – Le cas de l’acception par le bénéficiaire
36. Le bénéficiaire qui entend pérenniser ses droits et ne pas être à la merci de changements d’avis du souscripteur a intérêt à accepter le bénéfice du contrat donc il a connaissance. Or, cette faculté lui est offerte par l’article L. 132-9, I, du Code des assurances. Aux termes de ce dernier, en effet, la stipulation en vertu de laquelle le bénéfice de l’assurance est attribué à un bénéficiaire déterminé « devient irrévocable par l’acceptation de celui-ci, effectuée dans les conditions prévues au II du présent article ». Ainsi, pendant la durée du contrat, après acceptation du bénéficiaire, le stipulant ne pourra plus exercer sa faculté de rachat (même partiellement) et l’entreprise d’assurance ne pourra plus lui consentir d’avance sans l’accord du bénéficiaire. Il en ira de même pour le nantissement du contrat41.
37. Pour la suite de l’article, tant que l’acceptation n’a pas eu lieu, le stipulant peut opérer une révocation42. On notera d’ailleurs, sur ce point, que « lorsqu’une tutelle a été ouverte à l’égard du stipulant, la révocation ne peut intervenir qu’avec l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille s’il a été constitué ».
38. D’un point de vue formel, l’article L. 132-9, II, précise que, tant que l’assuré et le stipulant sont en vie, l’acceptation est faite par un avenant signé de l’entreprise d’assurance, du stipulant et du bénéficiaire. Elle peut également être faite par un acte authentique ou sous seing privé, signé du stipulant et du bénéficiaire, et n’a alors d’effet à l’égard de l’entreprise d’assurance que lorsqu’elle lui est notifiée par écrit. En outre, dans le cas où la désignation du bénéficiaire est faite à titre gratuit, l’acceptation ne peut intervenir que trente jours au moins à compter du moment où le stipulant est informé que le contrat d’assurance est conclu. Après le décès de l’assuré ou du stipulant, l’acceptation est, en revanche, libre.
39. N’y a-t-il pas là un danger pour notre majeur protégé ? A priori oui. Conscient de cela, le législateur a prévu une limite à l’alinéa 4 de l’article L. 132-4-1. Ainsi, aux termes de ce dernier, « l’acceptation du bénéfice d’un contrat sur la vie conclu moins de deux ans avant la publicité du jugement d’ouverture de la curatelle ou de la tutelle du stipulant peut être annulée par la seule preuve que l’incapacité était notoire ou connue du cocontractant à l’époque où les actes ont été passés ». Cette hypothèse fait songer à l’action liée à la période « suspecte » de deux ans prévue par l’article 464 du Code civil43. Une différence peut néanmoins être soulignée : avec le cas visé à l’article L. 132-4-1, la preuve d’un préjudice pour le majeur protégé n’est pas nécessaire. Il est en quelque sorte présumé.
40. Un auteur44 n’a pas manqué de relever, néanmoins, la « rédaction fort maladroite et donc peu protectrice » de cette disposition. En effet, celle-ci ne vise que les contrats conclus dans les deux ans qui précèdent l’ouverture du régime de protection, ce qui laisse sans possibilité de contestation les contrats souscrits avant le délai de deux ans, mais acceptés au cours de ce délai. Il aurait été plus judicieux de prendre en considération la date de l’acceptation. Cela aurait protégé plus efficacement le contractant45.
41. En fonction des circonstances, l’article 464 du Code civil46 devrait néanmoins pouvoir « prendre le relai ». Pour mémoire, il n’est pas nécessaire ici (comme pour l’action en nullité pour insanité d’esprit47) de prouver « l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte », mais simplement une « inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l’altération de ses facultés personnelles ». Cela paraît plus aisé à démontrer. Ce constat est cependant à relativiser. En effet, deux conditions supplémentaires sont imposées par l’article 464 : d’une part, l’action ne peut atteindre que des actes conclus par le majeur moins de deux ans avant la publicité du jugement ouvrant la mesure de protection48 et, d’autre part, il faut démontrer que cette inaptitude était « notoire ou connue du cocontractant à l’époque où les actes ont été passés ». Or, ces conditions, et plus particulièrement la seconde, ne sont pas faciles à rapporter.
III – Les incertitudes persistantes
42. Si l’article L. 132-4-1 du Code monétaire et financier a clarifié l’état du droit applicable, certaines questions demeurent, aujourd’hui encore, incertaines. Il convient alors de les mentionner ici. Elles portent sur la gestion du contrat d’assurance-vie (A), mais aussi la détermination du bénéficiaire par voie testamentaire (B).
A – Concernant la gestion du contrat
43. La gestion du contrat n’est pas expressément envisagée par l’article L. 132-4-1, si ce n’est l’hypothèse du rachat. La disposition légale ne dit rien, en revanche, du pouvoir de verser une nouvelle prime (1), ou encore de celui de réaliser des arbitrages (2). Des incertitudes demeurent par conséquent.
1 – Le versement d’une nouvelle prime
44. Les contrats d’assurance-vie sont soit à prime unique, soit à primes périodiques, soit à versement libre. Une question se pose alors : qui peut décider du versement d’une nouvelle prime, par exemple, en matière de curatelle ? Le tuteur seul ou le tuteur avec l’autorisation du juge des tutelles ou du conseil de famille ?
45. La loi, et plus particulièrement l’article L. 132-4-1 du Code des assurances, ne dit mot en la matière. Le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 relatif aux actes de gestion du patrimoine des personnes placées en curatelle ou en tutelle qualifie, pour sa part, le versement de nouvelles primes d’acte de disposition49.
46. Or, force est de constater qu’un courant doctrinal est favorable à une solution partagée à l’égard de ces primes. En effet, le versement des primes pourrait être regardé soit comme un acte d’administration, soit comme un acte de disposition, en fonction des circonstances. Plus précisément, il conviendrait de prendre en compte l’importance de la prime par rapport au patrimoine et l’origine des sommes employés, en distinguant selon qu’elles proviennent d’économies, ou qu’elles ont été prélevées sur les revenus50.
47. Cette solution peut paraître de bon sens. En effet, lorsque le versement résulte de l’« emploi et remploi des capitaux et des excédents de revenus », donc de ses économies, la qualification d’acte de disposition doit être retenue51. En revanche, l’« emploi et remploi des sommes d’argent qui ne sont ni des capitaux ni des excédents de revenus » est un acte d’administration52. Le versement de la nouvelle prime réglée directement sur les revenus du majeur devrait relever de cette seconde hypothèse. Un auteur53 considère, de surcroît, que si la prime est issue d’un capital (c’est-à-dire un versement constituant en principe un acte de disposition), le versement peut encore s’analyser comme un acte d’administration « en fonction de l’importance de la modicité de la prime au regard du patrimoine du contractant ».
48. Les distinctions précitées demeurent néanmoins relativement fragiles. D’une part, la loi ne les envisage pas, et, d’autre part, la jurisprudence n’a pas encore eu l’occasion de statuer précisément sur cette thématique.
49. On notera simplement que, récemment, la Cour de cassation a été interrogée sur le point de savoir si les dispositions de l’article 501 pouvaient être applicables au versement de primes sur un contrat d’assurance-vie existant. Pour mémoire, depuis la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, ce texte autorise le tuteur à placer des fonds sur un compte, et cela sans autorisation du juge54. Par un avis en date du 18 décembre 2020, la haute juridiction a fermement rejeté cette interprétation et a confirmé que, sauf circonstances particulières, le tuteur doit solliciter l’autorisation du conseil de famille, ou à défaut, du juge des contentieux de la protection, pour verser des primes sur un contrat d’assurance sur la vie existant55. Implicitement, cette décision pourrait laisser penser que le versement de nouvelles primes constitue bien un acte de disposition. La Cour de cassation ne nous paraît donc pas favorable à la distinction proposée par le courant doctrinal précité.
2 – La réalisation d’arbitrages
50. Les arbitrages sur contrat d’assurance-vie permettent d’adopter le choix des supports de placement des primes à l’évolution de la situation ou des objectifs du souscripteur. Ils ont donc une incidence sur le niveau de risque supporté par le contractant, ici le majeur protégé.
51. Or, sur ce point à nouveau, la loi ne nous donne aucune indication sur les règles à suivre. On notera simplement que le décret n° 2008-1484 du 22 décembre 2008 prévoit que les « actes de gestion de portefeuille, y compris de cession de titres à condition qu’elles soient suivies de leur remplacement », sont des actes d’administration56. Des arbitrages devraient donc pouvoir être réalisés, en matière de tutelle, par le tuteur seul. Mais peut-on encore admettre une telle solution si l’acte en question présente des dangers, comme le passage d’un contrat monosupport à un contrat multisupport ?
52. La doctrine n’est, hélas, pas uniforme sur cette question. Pour certains auteurs, il faudrait ici distinguer selon les circonstances. Ainsi, le fait de céder des titres pour placer le produit en support euros pourrait éventuellement être considéré comme un simple acte d’administration, tandis que l’opération inverse serait nécessairement un acte de disposition et impliquerait l’autorisation du juge des tutelles57. Dit autrement, les arbitrages sécuritaires relèveraient de la catégorie des actes d’administration et les arbitrages sur des supports dynamiques constitueraient des actes de disposition.
53. Pour d’autres, en revanche, seule la qualification d’acte de disposition serait à retenir58. Il est vrai qu’aucun texte spécial n’envisage précisément la question des arbitrages sur contrat d’assurance-vie. Un auteur59 relève, en outre, que tant la souscription d’un contrat monosupport en euros que l’arbitrage d’un contrat multisupport vers des fonds en euros « est de nature à structurer durablement le patrimoine du contractant sur des supports faiblement rémunérateurs ». Il en conclut alors qu’« il y a bien un risque supporté par le majeur ».
54. Il serait heureux que la jurisprudence vienne nous éclairer sur cette question. À notre connaissance, cependant, la Cour de cassation n’a jamais été interrogée sur ce point.
B – Concernant la détermination du bénéficiaire par voie testamentaire
55. Un cas particulier est à aborder ici : il s’agit de la clause bénéficiaire testamentaire. Il résulte, en effet, de l’article L. 132-8, alinéa 8, du Code des assurances que la désignation ou la substitution du bénéficiaire peut se faire par l’intermédiaire du testament.
56. Or, le testament est un acte purement personnel, pour lequel l’assistance et la représentation ne sont pas possibles d’après les articles 470 et 476, alinéa 2, du Code civil. En conséquence, et malgré sa vulnérabilité, la personne sous tutelle peut tester seule après y avoir été autorisée par le juge, ce dernier se contentant alors de s’assurer que le tutélaire a bien la lucidité nécessaire pour réaliser un tel acte.
57. Une importante question se pose alors : les dispositions de l’article L. 132-4-1 du Code des assurances s’appliquent-elles à la désignation ainsi qu’à la substitution du bénéficiaire lorsque celles-ci ont lieu par voie testamentaire ? On pourrait estimer qu’il s’agit là de dispositions spéciales devant déroger aux règles plus générales du Code civil.
58. Un courant doctrinal60 considère cependant que « le respect du caractère strictement personnel du testament doit conduire à en écarter l’application. Aussi est-ce seulement lorsque la désignation, la révocation ou la substitution de bénéficiaire ont lieu entre vifs que la personne protégée doit être représentée par le tuteur ». En revanche, lorsqu’elles ont lieu par voie testamentaire, la représentation doit être exclue.
59. La jurisprudence, pour sa part, s’est montrée favorable au régime spécial du Code des assurances, considérant que celui-ci déroge, en matière de curatelle, à l’article 470 du Code civil. Ainsi, en l’absence d’assistance du curateur, la modification du bénéficiaire ne peut être efficace, quand bien même elle aurait été faite par voie testamentaire61. Dans un tel cas, le testament se trouve privé d’efficacité quant à la substitution en question. Ainsi, le notaire qui recevra le testament d’une personne en curatelle comportant une modification de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie devra tenir compte de cette jurisprudence en obtenant l’assistance du curateur, logiquement sous forme d’un accord par acte séparé (afin de conserver la confidentialité du testament).
60. Il serait heureux, selon nous, que le législateur confirme de telles solutions tant en matière de tutelle que de curatelle. De la sorte, le droit échapperait à toute incertitude sur ces points-là aussi.
61. Un auteur62 constate néanmoins qu’il est rare que la clause bénéficiaire soit inscrite dans un testament : elle figurera le plus souvent dans la police ou dans un avenant, ou encore elle sera déposée auprès d’une étude notariale. Or, dans ces cas, les dispositions des articles 470 et 476 du Code civil ne pourront pas être invoquées. Voilà qui simplifie la chose.
Notes de bas de pages
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1.
Banque de France, Analyse et synthèses, Le marché de l’assurance-vie en 2022, n° 146, 2023, p. 6.
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2.
Pour mémoire, la « collecte brute » de l’assurance-vie correspond à l’ensemble des versements effectués sur les contrats (les « cotisations »). Or, si on retire à ce total les retraits et les versements des capitaux décès (les « prestations »), on obtient la « collecte nette ».
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3.
Cette baisse reflète des évolutions contrastées selon les supports : les unités de compte ont vu leur collecte nette atteindre son plus haut niveau depuis 2011 (38,2 milliards d’euros), alors que les fonds euros ont enregistré une décollecte nette (29,8 milliards d’euros).
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4.
J. Hauser, « Majeurs protégés : le piège de l’assurance-vie, présent et avenir » : RTD civ. 2008, p. 276.
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5.
Pour d’autres travaux doctrinaux, K. Buhler, « Les majeurs protégés et l’assurance-vie » : JCP N 2008, n° 36, 1271 ; S. Hovasse, « Assurance-vie et régime de protection juridique » : JCP N 2009, n° 27, 1182 ; J.-M. Plazy, « Les contrats sur la vie et le contrat obsèques » in Nouveau droit des majeurs protégés. Difficultés pratiques, G. Raoul-Cormeil (dir.), 2012, Dalloz, Thèmes & commentaires, p. 81 ; N. Peterka, « L’assurance-vie à l’épreuve de la protection juridique des majeurs » in Mélanges en l’honneur de Georges Champenois, 2012, Defrénois, p. 641, EAN : 9782856231852 ; M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 183 ; D. Noguéro, « La gestion dynamique de l’assurance-vie », RRJ 2018-1, p. 133 ; M. Gayet, « Assurance-vie. Les pouvoirs du tuteur en matière d’assurance-vie : retour sur des clarifications successives », Resp. civ. et assur., juin 2021, étude 8.
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6.
Nous n’évoquerons pas, ici, le cas dans lequel le majeur protégé est l’assuré sans être, dans le même temps, le souscripteur. Normalement, cette dernière situation ne pose guère de difficulté. En effet, l’acceptation de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie est un acte d’administration que le tuteur peut réaliser sans autorisation (D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 2, colonne 1, IV). Il en ira différemment, simplement, en présence d’une charge. Dans cette hypothèse, l’acceptation deviendra un acte de disposition (D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 2, colonne 2, IV).
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7.
L. n° 2007-1775, 17 déc. 2007, permettant la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance sur la vie non réclamés et garantissant les droits des assurés : JO, 18 déc. 2007, texte n° 3 : S. Hovasse, « Commentaire de la loi du 17 décembre 2007 relative à la recherche des bénéficiaires des contrats d’assurance-vie réclamés », JCP N 2008, 1130.
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8.
Sur ces deux cas liés à la clause bénéficiaire, v. infra, n° 26 et s.
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9.
JO, 31 déc. 2008, texte n° 94.
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10.
Pour mémoire, le décret n° 2008-1484 définit, par son article 2, les actes de disposition comme « les actes qui engagent le patrimoine de la personne protégée, pour le présent ou l’avenir, par une modification importante de son contenu, une dépréciation significative de sa valeur en capital ou une altération durable des prérogatives de son titulaire ». Ils s’opposent aux actes d’administrations qui sont, pour leur part, « les actes d’exploitation ou de mise en valeur du patrimoine de la personne protégée dénués de risque anormal » (D. n° 2008-1484, art. 1).
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11.
D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 1, colonne 2, IX.
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12.
M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 185.
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13.
On notera, cependant, que le rapport de la mission interministérielle sur l’évolution de la protection juridique des personnes envisageait une évolution. En effet, celui-ci prévoyait une déjudiciarisation dans certains cas, et notamment pour « l’ouverture d’une assurance-vie avec une clause bénéficiaire standard ». La proposition n’a cependant pas été reprise par le législateur. Rapp. de la mission interministérielle sur l’évolution de la protection juridique des personnes, sous la présidence d’Anne Caron Déglise, 2018, p. 99, n° 51.
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14.
Un auteur (M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 195) voit, plutôt, dans le rachat partiel un acte de gestion permettant la perception de revenus. Or, pour le décret du 22 décembre 2008, la perception des revenus constitue un acte d’administration (D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 1, colonne 1, II). Dès lors, selon ce courant doctrinal, pour les rachats de faible importance par rapport à la valeur totale du contrat, « la qualification d’acte d’administration est plus logique ». Dans le même sens, S. Hovasse, « Assurance-vie et régime de protection juridique », JCP N 2009, n° 27, 1182.
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15.
M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 185.
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16.
C. civ., art. 465, 3°.
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17.
On notera que, dans quelques cas, seule l’intervention du curatélaire sera requise : lorsque, sur le fondement de l’article 471 du Code civil, le juge a fait de telles opérations des « actes que la personne en curatelle a la capacité de faire seule ». Cette solution est peu vraisemblable ici, de par les risques attachés au contrat étudié.
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18.
Concernant la désignation ou la substitution du bénéficiaire, v. infra, n° 31.
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19.
C. civ., art. 465, 4°.
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20.
On notera qu’un tel mandat peut également être conclu par des parents, au bénéfice de leur enfant vulnérable, dans la perspective du jour où ils seront décédés ou plus à même de pourvoir à ses intérêts (C. civ., art. 477, al. 3).
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21.
L. n° 2007-308, 5 mars 2007, portant réforme de la protection juridique des majeurs : JO, 7 mars 2007, texte n° 12.
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22.
C. civ., art. 490, al. 1.
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23.
Une exception est cependant prévue à l’article 490, alinéa 2 : « Le mandataire ne peut accomplir un acte de disposition à titre gratuit qu’avec l’autorisation du juge des tutelles ». Cette solution aura alors une incidence en cas de désignation d’un bénéficiaire différent du souscripteur. Dans ce dernier cas, en effet, nous serons bien en présence d’un acte de disposition à titre gratuit.
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24.
En effet, pour l’article 493, alinéa 1er, « Le mandat est limité, quant à la gestion du patrimoine, aux actes qu’un tuteur peut faire sans autorisation ».
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25.
V. supra, n° 11.
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26.
Le changement de bénéficiaire doit ainsi être de l’intérêt du majeur sous tutelle, CA Paris, 7 déc. 2021, n° 21/01775 : JCP G 2022, n° 4, act. 145, obs. G. Kessler.
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27.
En revanche, le compagnon de la souscriptrice n’a pas qualité pour saisir le juge des tutelles d’une demande tendant à la modification, à son profit, de la clause bénéficiaire des contrats d’assurance-vie litigieux. L’autorisation de substituer un bénéficiaire à un autre devra donc être sollicitée exclusivement par le tuteur, Cass. 1re civ., 19 mars 2014, n° 13-12016 : Bull. civ. I, n° 47 ; Dr. famille 2014, comm. 86, obs. I. Maria ; AJ fam. 2014, p. 318, obs. T. Verheyde ; RTD civ. 2014, p. 336, obs. J. Hauser ; D. 2014, p. 2270, obs. J.-J. Lemouland ; RGDA mai 2014, n° RGA110t1, note L. Mayaux.
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28.
Cass. 1re civ., 11 juin 1996, n° 94-16723 : Bull. civ. I, n° 249 ; D. 1998, Jur., p. 20, note P. Delmas Saint-Hilaire ; RTD civ. 1996, p. 877, obs. J. Hauser ; RGDA 1997, p. 818, note L. Mayaux ; Defrénois 30 nov. 1996, n° 36434, p. 1355, note J. Massip. Pour l’arrêt, la révocation de la désignation d’une personne comme bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie est un acte « éminemment personnel » à son auteur.
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29.
J.-M. Plazy, « Les contrats sur la vie et le contrat obsèques », in Nouveau droit des majeurs protégés. Difficultés pratiques, G. Raoul-Cormeil (dir.), 2012, Dalloz, Thèmes & commentaires, p. 92.
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30.
On rappellera que, pour l’article 473, alinéa 2, du Code civil, « Le juge peut, dans le jugement d’ouverture ou ultérieurement, énumérer certains actes que la personne en tutelle aura la capacité de faire seule ou avec l’assistance du tuteur ». La modification de la clause bénéficiaire pourrait donc être prévue ici. Néanmoins, en raison des risques liés à cet acte, cette situation est peu vraisemblable. D’ailleurs, une telle désignation pourrait se révéler très fragile, puisqu’elle pourrait, potentiellement, être remise en cause sur le fondement de l’insanité d’esprit. Une solution analogue est prévue, pour la curatelle, à l’article 471 du Code civil.
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31.
M. Gayet, « Assurance-vie. Les pouvoirs du tuteur en matière d’assurance-vie : retour sur des clarifications successives », Resp. civ. et assur. 2021, n° 18 ; N. Peterka, A. Caron-Déglise et F. Arbellot, Protection de la personne vulnérable 2021/2022. Protection judiciaire et juridique des mineurs et des majeurs, 2020, Dalloz Action, p. 759, n° 354.102.
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32.
Pour des difficultés, M. Gayet, « Assurance-vie. Les pouvoirs du tuteur en matière d’assurance-vie : retour sur des clarifications successives », Resp. civ. et assur. 2021, n° 17. L’auteur relève que l’usage de ces clauses types peut conduire à des difficultés d’interprétation, notamment lorsqu’il y a un testament, puisque cela soulève la question de savoir si les légataires universels ou à titre universel sont bénéficiaires. Il faut alors interpréter une clause bénéficiaire choisie par le tuteur, au regard du testament du souscripteur, « un exercice qui se révélera pour le moins périlleux ». Illustrant cette nécessité d’interprétation, Cass. 1re civ., 30 sept. 2020, n° 19-11187 : JCP N 2020, n° 45, act. 891 ; Dr. famille 2020, comm. 164, obs. A. Tani ; Resp. civ. et assur. 2020, comm. 214, obs. M. Gayet ; Defrénois 11 févr. 2021, n° DEF168k9, obs. D. Noguéro.
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33.
Pour des faits antérieurs à la loi n° 2007-1775 du 17 décembre 2007, la jurisprudence considère aussi que la modification de la clause bénéficiaire d’un contrat d’assurance-vie constitue un acte de disposition, Cass. 1re civ., 21 oct. 2022, n° 20-23610 : D. 2023, p. 1191, obs. J.-J. Lemouland ; LEDA nov. 2022, n° DAS200z4, obs. C. Béguin-Faynel ; RGDA nov. 2022, n° RGA201b6, note A. Pimbert ; AJ fam. 2022, p. 560, obs. C. Lesay ; Dalloz actualité, 24 nov. 2022, obs. K. Bonafini ; Dr. famille 2022, comm. 182, obs. I. Maria ; JCP N 2023, n° 4, 1018, obs. A. Tani ; Defrénois 15 déc. 2022, n° DEF211h1, obs. D. Noguéro.
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34.
Cass. 1re civ., 8 juill. 2009, n° 08-16153 : Bull. civ. I, n° 161 ; Dr. famille 2009, comm. 114, obs. I. Maria ; D. 2010, p. 2125, obs. J.-J. Lemouland ; RTD civ. 2009, p. 698, obs. J. Hauser ; Defrénois 30 nov. 2009, n° 39033, p. 2200, obs. J. Massip ; AJ fam. 2009, p. 352, note F. Pécaut-Rivolier ; RGDA 2009, p. 1216, note L. Mayaux ; LPA 29 juill. 2009, p. 9, note D. Noguéro. Ici, les juges précisent que la décision prise par le curateur sans audition de la majeure protégée, et donc sans son accord, n’était pas admissible. Certes, l’article 472, alinéa 2, du Code civil prévoit que le juge peut autoriser le curateur à représenter le majeur protégé, mais ce cas ne joue que dans des cas particuliers expressément visés. Or, la désignation du bénéficiaire, même au profit des héritiers, ne figure pas au nombre de ceux-ci.
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35.
Cass. 1re civ., 15 janv. 2020, n° 18-26683 : JCP G 2020, n° 4, act. 90 ; JCP N 2020, n° 39, 1199, obs. N. Peterka ; D. 2020, p. 805, note G. Raoul-Cormeil ; Dr. famille 2020, comm. 51, obs. I. Maria ; DEF 5 mars 2020, n° DEF157y4, note J. Combret ; D. 2020, p. 1205, obs. D. Noguéro ; AJ fam. 2020, p. 191, obs. J. Houssier ; BJDA 2020, comm. 16, n° 68, M. Robineau.
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36.
G. Raoul-Cormeil, « L’opposition d’intérêts, obstacle à la magistrature tutélaire (étude à partir du contrat d’assurance sur la vie) », RGDA 2011, p. 397.
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37.
Pour un exemple remarqué, Cass. 1re civ., 8 juill. 2009, n° 08-16153 : Bull. civ. I, n° 162 ; AJ fam. 2009, p. 352, obs. L. Pécaut-Rivolier ; Dr. famille 2009, comm. 114, obs. I. Maria ; RGDA 2009, p. 1216, obs. L. Mayaux ; RJPF 2009, n° 12, p. 18, obs. J. Casey ; RTD com. 2009, p. 698, obs. J. Hauser ; Procédures 2009, comm. 325, obs. M. Douchy-Oudot ; Defrénois 30 nov. 2009, n° 390333, p. 2200, note J. Massip.
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38.
Sur cette appréciation, Cass. 1re civ., 17 mars 2010, n° 08-15658 : Bull. civ. I, n° 66 ; D. 2010, Pan., p. 2126, obs. J.-J. Lemouland ; Dr. fam. 2010, comm. 88, obs. I. Maria ; Defrénois 30 juin 2010, n° 39133, p. 1369, note J. Massip.
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39.
Aux termes de l’article 454, alinéa 1er, du Code civil : « Le juge peut, s’il l’estime nécessaire et sous réserve des pouvoirs du conseil de famille s’il a été constitué, désigner un subrogé curateur ou un subrogé tuteur ». Ainsi, le subrogé curateur ou le subrogé tuteur « assiste ou représente, selon le cas, la personne protégée lorsque les intérêts de celle-ci sont en opposition avec ceux du curateur ou du tuteur ou lorsque l’un ou l’autre ne peut lui apporter son assistance ou agir pour son compte en raison des limitations de sa mission ».
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40.
CA Paris, 7 déc. 2021, n° 21/01775 : JCP G 2022, n° 4, act. 145, obs. G. Kessler.
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41.
C. assur., art. L. 132-10, al. 2.
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42.
Ce droit de révocation ne peut être exercé, après la mort du stipulant, par ses héritiers, qu’après l’exigibilité de la somme assurée et au plus tôt trois mois après que le bénéficiaire de l’assurance a été mis en demeure par acte extrajudiciaire, d’avoir à déclarer s’il accepte.
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43.
Aux termes de cet article 464 : « Les obligations résultant des actes accomplis par la personne protégée moins de deux ans avant la publicité du jugement d’ouverture de la mesure de protection peuvent être réduites sur la seule preuve que son inaptitude à défendre ses intérêts, par suite de l’altération de ses facultés personnelles, était notoire ou connue du cocontractant à l’époque où les actes ont été passés. Ces actes peuvent, dans les mêmes conditions, être annulés s’il est justifié d’un préjudice subi par la personne protégée ».
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44.
J.-M. Plazy, « Les contrats sur la vie et le contrat obsèques », in Nouveau droit des majeurs protégés. Difficultés pratiques, G. Raoul-Cormeil (dir.), 2012, Dalloz, Thèmes & commentaires, p. 96.
-
45.
M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 199.
-
46.
V. supra, note n° 43.
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47.
C. civ., art. 414-1. Aux termes de ce dernier : « Pour faire un acte valable, il faut être sain d’esprit. C’est à ceux qui agissent en nullité pour cette cause de prouver l’existence d’un trouble mental au moment de l’acte ».
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48.
Cela a été dit, l’action doit, en outre, être introduite dans les cinq ans à compter du jour de ce jugement.
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49.
D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 2, colonne 2, IV.
-
50.
V. not., sur ce point, N. Peterka, A. Caron-Déglise et F. Arbellot, Protection de la personne vulnérable 2021/2022. Protection judiciaire et juridique des mineurs et des majeurs, 2020, Dalloz Action, p. 759, n° 354.116 ; M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 193.
-
51.
D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 1, colonne 2, II, 1°.
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52.
D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 1, colonne 1, II, 1°.
-
53.
M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 193.
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54.
Selon l’article 501, alinéa 1 : « Le conseil de famille ou, à défaut, le juge détermine la somme à partir de laquelle commence, pour le tuteur, l’obligation d’employer les capitaux liquides et l’excédent des revenus. Le tuteur peut toutefois, sans autorisation, placer des fonds sur un compte ».
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55.
Cass. 1re civ., 18 déc. 2020, n° 20-70003 : D. 2021, p. 1371, note G. Raoul-Caormeil ; D. 2020, p. 1257, obs. J.-J. Lemouland et D. Noguéro ; Dr. famille 2021, comm. 31, obs. I. Maria ; JCP N 2021, n° 26, 1247, obs. L. Fabre.
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56.
D. n° 2008-1484, 22 déc. 2008, annexe 2, colonne 1, I, 2°.
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57.
N. Peterka, « L’assurance-vie à l’épreuve de la protection juridique des majeurs » in Mélanges en l’honneur du professeur Gérard Champenois, 2012, Defrénois, p. 649, EAN : 9782856231852.
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58.
D. Noguéro, « La gestion dynamique de l’assurance-vie pour le majeur protégé », RRJ 2018, p. 232 ; M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 194.
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59.
M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 194.
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60.
N. Peterka, A. Caron-Déglise et F. Arbellot, Protection de la personne vulnérable 2021/2022. Protection judiciaire et juridique des mineurs et des majeurs, 2020, Dalloz Action, p. 759, n° 354.103.
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61.
Cass. 2e civ., 8 juin 2017, n° 15-12544 : Dalloz actualité, 22 juin 2017, obs. T. de Ravel d’Esclapon ; JCP G 2017, 730, note D. Noguéro ; D. 2017, p. 1819, note N. Peterka ; D. 2018, p. 1279, obs. P. Pierre ; RTD civ. 2017, p. 615, obs. J. Hauser ; RDC mars 2018, n° RDC114x8, obs. S. Gaudemet ; D. 2017, Pan., p. 1490, obs. J-J. Lemouland et D. Noguéro ; Dr. famille 2017, comm. 190, obs. I. Maria ; D. 2018, p. 1279, obs. P. Pierre ; RDC mars 2018, n° RDC114x8, obs. S. Gaudemet.
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62.
M. Leroy, « L’assurance sur la vie contractée par le majeur protégé » in Le patrimoine de la personne protégée, J.-M. Plazy et G. Raoul-Cormeil (dir.), 2015, LexisNexis, p. 198.
Référence : AJU010i6