QPC : visites et saisies domiciliaires de l’administration des impôts

Publié le 17/03/2022

Une QPC, transmise par la chambre commerciale de la Cour de cassation, reproche à l’article L.16 B du Livre des procédures fiscales de permettre à l’administration fiscale de saisir toutes les données accessibles ou disponibles depuis les supports informatiques présents dans les lieux visités, y compris lorsque ces données sont stockées dans des lieux distincts de ceux dont la visite a été autorisée par le juge et appartiennent à des tiers à la procédure. Il en résulterait une méconnaissance du droit au respect de la vie privée et du principe de l’inviolabilité du domicile.

La question reproche également à ces dispositions de ne pas prévoir l’information des tiers à la procédure en cas de saisie d’un document informatique leur appartenant lors d’une visite domiciliaire, ce qui les priverait ainsi de la possibilité de contester utilement une telle opération. Il en résulterait une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif et des droits de la défense.

Pour les mêmes motifs, les requérants soutiennent que le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence.

Concernant le droit au respect de la vie privée, le Conseil constitutionnel répond que, en premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu adapter les prérogatives de l’administration fiscale à l’informatisation des données des contribuables et à leur stockage à distance sur des serveurs informatiques. Il a ainsi poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale.

En deuxième lieu, d’une part, le droit de saisie reconnu aux agents habilités de l’administration des impôts ne peut être mis en œuvre qu’au titre d’une visite ayant pour objet la recherche de la preuve d’agissements de fraude fiscale, dans le cas où il existe des présomptions qu’un contribuable se soustrait à l’établissement ou au paiement des impôts sur le revenu ou sur les bénéfices ou des taxes sur le chiffre d’affaires en se livrant à des achats ou à des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures ou en passant ou en faisant passer sciemment des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le code général des impôts.

D’autre part, si peuvent être saisis à cette occasion des documents n’appartenant pas aux personnes visées par ces présomptions, ce n’est qu’à la condition qu’ils se rapportent à de tels agissements.

En dernier lieu, d’une part, la saisie ne peut intervenir qu’à l’occasion d’une visite autorisée par le JLD, qui doit vérifier de manière concrète que la demande d’autorisation qui lui est soumise comporte tous les éléments d’information en possession de l’administration de nature à justifier la visite. Sa décision doit être motivée par l’indication des éléments de fait et de droit qu’il retient et qui laissent présumer, en l’espèce, l’existence des agissements frauduleux dont la preuve est recherchée. D’autre part, les opérations de visite et de saisie s’effectuent sous l’autorité et le contrôle du JLD, qui est tenu informé du déroulement de ces opérations et peut donner des instructions aux agents, se rendre dans les locaux durant l’intervention et décider à tout moment la suspension ou l’arrêt de la visite.

Il en résulte que les dispositions contestées procèdent à une conciliation équilibrée entre l’objectif de valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale et le droit au respect de la vie privée.

Concernant le droit à un recours juridictionnel effectif, le Conseil constitutionnel répond que l’article contesté prévoit que l’ordonnance du JLD autorisant la visite des agents de l’administration des impôts peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la cour d’appel dans un délai de quinze jours. Ce dernier connaît également des recours contre le déroulement des opérations de visite et de saisie. Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que ces recours peuvent être formés non seulement par la personne visée par l’ordonnance du JLD et l’occupant des lieux visités, mais aussi par toute personne ayant qualité et intérêt à contester la régularité de la saisie d’un document.

Sources :
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