Les modalités d’individualisation et de répartition des frais de chauffage et de refroidissement sont précisées
Présentation du décret n° 2019-496 du 22 mai 2019 relatif à la détermination individuelle de la quantité de chaleur, de froid et d’eau chaude sanitaire consommée et à la répartition des frais de chauffage, de refroidissement et d’eau chaude sanitaire, dans les immeubles collectifs à usage d’habitation ou à usage mixte d’habitation et professionnel.
L’article 71 de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite ELAN1, prévoit l’individualisation des frais de chauffages et de climatisation pour les immeubles collectifs à usage principal d’habitation, ou à usage mixte professionnel et d’habitation (I). Elle renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de préciser le cadre de mise en place de ces méthodes. C’est chose faite avec le décret n° 2019-496 du 22 mai 2019 relatif à la détermination individuelle de la quantité de chaleur, de froid et d’eau chaude sanitaire consommée et à la répartition des frais de chauffage, de refroidissement et d’eau chaude sanitaire, dans les immeubles collectifs à usage d’habitation ou à usage d’habitation et professionnel (II)2.
I – Rappel du cadre législatif
L’article 71 de la loi ELAN prévoit que les immeubles à usage principal d’habitation, ou à usage mixte professionnel et d’habitation, pourvus d’une installation centrale de chauffage (et non plus d’un chauffage commun), doivent comporter, si cela est techniquement possible, une installation permettant de déterminer, et aussi désormais de réguler, la quantité de chaleur utilisée par logement, afin de permettre à l’occupant de contrôler la quantité de chaleur utilisée et d’en maîtriser le coût.
Ce dispositif est étendu aux climatisations. En effet, désormais, tout immeuble collectif d’habitation ou mixte pourvu d’une installation centrale de froid doit comporter, quand la technique le permet, une installation permettant de déterminer et de réguler la quantité de froid fournie à chaque local occupé à titre privatif.
Toutefois, elle précise que lorsqu’il n’est pas rentable ou techniquement possible d’utiliser des compteurs individuels pour déterminer la quantité de chaleur, des répartiteurs des frais de chauffage individuels sont utilisés pour déterminer la quantité de chaleur à chaque radiateur, à moins que l’installation de tels répartiteurs ne soit ni rentable ni techniquement possible.
Dans ces cas, d’autres méthodes rentables, permettant de déterminer la quantité de chaleur fournie à chaque local occupé à titre privatif, sont envisagées.
Le décret du 22 mai 2019 est venu préciser le cadre de mise en place de ces méthodes.
II – Présentation du dispositif réglementaire
Équipements obligatoires de répartition des frais de chauffage et de refroidissement (articles 1 et 2)
Désormais, afin de prendre en compte les nouvelles obligations légales, le nouvel intitulé de la sous-section 1 de la section 2 du chapitre unique du titre IV du livre II de la partie réglementaire du Code de l’énergie indique : « Sous-section 1 : Équipement obligatoire des immeubles collectifs à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation et répartition des frais de chauffage et de refroidissement ».
L’article R. 241-6 du Code de l’énergie précise alors que, au sens et pour l’application de cette sous-section, on entend par « immeuble collectif pourvu d’une installation centrale de chauffage ou alimenté par un réseau de chaleur, ou pourvu d’une installation centrale de froid ou alimenté par un réseau de froid » celui qui comprend au moins deux locaux destinés à être occupés à titre privatif et chauffés ou refroidis, selon le cas, par une même installation et qu’un « local occupé à titre privatif » est celui constitué par la pièce ou l’ensemble des pièces réservées à la jouissance exclusive de personnes physiques ou morales.
Domaine d’application de l’obligation d’individualisation des frais de chauffage (article 3)
Le principe de l’individualisation – Le nouvel article R. 241-7 du Code de l’énergie énonce désormais que tout immeuble collectif à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation pourvu d’une installation centrale de chauffage ou alimenté par un réseau de chaleur est muni de compteurs individuels d’énergie thermique permettant de déterminer la quantité de chaleur fournie à chaque local occupé à titre privatif et ainsi d’individualiser les frais de chauffage collectif.
Les exceptions à l’individualisation – Aussitôt le principe énoncé, le texte liste les cas où il est écarté. Ainsi, le principe d’individualisation des frais de chauffage d’un immeuble collectif à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation n’est pas applicable aux :
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logements foyers ;
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immeubles dans lesquels, pour des motifs et dans des cas précisés par arrêté conjoint des ministres de l’Énergie et de la Construction, il est techniquement impossible d’installer des compteurs individuels pour mesurer la chaleur consommée par chaque local pris séparément ou de poser un appareil permettant aux occupants de chaque local de moduler la chaleur fournie par le chauffage collectif ;
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immeubles dont les valeurs de consommation en chauffage sont inférieures à un seuil fixé par arrêté des ministres chargés de l’Énergie et de la Construction ;
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autres immeubles pour lesquels le propriétaire ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, justifient que l’individualisation des frais de chauffage par l’installation de compteurs individuels se révèle techniquement impossible ou entraîne un coût excessif au regard des économies d’énergie susceptibles d’être réalisées. Dans ce cas, le propriétaire de l’immeuble ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic établit une note justifiant de cette impossibilité technique ou de ce coût excessif. Cette note est jointe aux carnets numériques d’information, de suivi et d’entretien des logements3.
Les répartiteurs par défaut – Mais alors, à l’exception des logements foyers, pour ces immeubles, dans lesquels l’installation de compteurs individuels d’énergie thermique ne serait pas techniquement possible, ou entraînerait des coûts excessifs au regard des économies d’énergie attendues, des répartiteurs de frais de chauffage doivent être installés pour mesurer la consommation de chaleur à chaque radiateur.
L’exclusion des répartiteurs – Le texte précise que l’obligation d’installer des répartiteurs de frais de chauffage ne s’applique toutefois pas aux immeubles :
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dans lesquels, pour des motifs et dans des cas précisés par un arrêté des ministres de l’Énergie et de la Construction, il est techniquement impossible d’installer des répartiteurs de frais de chauffage pour mesurer la chaleur consommée par chaque local pris séparément ou de poser un appareil permettant aux occupants de chaque local de moduler la chaleur fournie par le chauffage collectif ;
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dont les valeurs de consommation en chauffage sont inférieures à un seuil fixé par un arrêté des ministres de l’Énergie et de la Construction ;
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autres immeubles pour lesquels le propriétaire ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, justifient que l’individualisation des frais de chauffage par l’installation de répartiteurs de frais de chauffage se révèle techniquement impossible ou entraîne un coût excessif au regard des économies d’énergie susceptibles d’être réalisées. Dans ce cas, le propriétaire de l’immeuble ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic établit une note justifiant de cette impossibilité technique ou de ce coût excessif. Cette note expose, le cas échéant, la méthode alternative employée pour évaluer la quantité de chaleur consommée dans chaque logement. Elle est jointe aux carnets numériques d’information, de suivi et d’entretien des logements de l’article L. 111-10-5 du Code de la construction et de l’habitation.
Les précisions à venir – Le décret indique donc qu’un arrêté conjoint des ministres de l’Énergie et de la Construction doit venir préciser les modalités de mise en œuvre du nouveau dispositif et, notamment les cas d’impossibilité d’individualiser les frais de chauffage ou d’installation des répartiteurs et le contenu de la note du propriétaire ou, le cas échéant, par le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic, justifiant de l’impossibilité technique ou du coût excessif à y procéder.
Le texte confie à l’arrêté le soin de préciser les méthodes alternatives susceptibles d’être employées pour évaluer la quantité de chaleur consommée dans chaque logement, lorsqu’il n’est pas possible techniquement de munir l’immeuble de compteurs individuels ni de répartiteurs de frais de chauffage ou lorsque cela entraînerait un coût excessif au regard des économies attendues.
Domaine d’application de l’obligation d’individualisation des frais de froid (article 4)
Le principe de l’individualisation – Le nouvel article R. 241-8 du Code de l’énergie énonce désormais que tout immeuble collectif à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation pourvu d’une installation centrale de froid ou alimenté par un réseau de froid est muni d’appareils de mesure permettant de déterminer la quantité de froid fournie à chaque local occupé à titre privatif et ainsi d’individualiser les frais de refroidissement collectif.
Les exceptions à l’individualisation – Aussitôt le principe énoncé, le texte liste les cas où il n’est pas applicable. Ainsi, le principe d’individualisation des frais de refroidissement d’un immeuble collectif à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation n’est pas applicable aux :
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logements foyers ;
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immeubles collectifs dans lesquels il est techniquement impossible de mesurer le froid consommé par chaque local pris séparément ou de poser un appareil permettant aux occupants de chaque local de réguler le refroidissement fourni par la centrale de froid ou le réseau de froid collectif ;
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immeubles dont les valeurs de consommation en froid sont inférieures à un seuil fixé par arrêté des ministres de l’Énergie et de la Construction ;
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autres immeubles pour lesquels le propriétaire ou le cas échéant, le syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, justifient que l’installation d’appareils de mesure permettant d’individualiser les frais de refroidissement collectif se révèle techniquement impossible ou entraîne un coût excessif au regard des économies d’énergie susceptibles d’être réalisées. Dans ce cas, le propriétaire de l’immeuble ou, le cas échéant, le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic établit une note justifiant de cette impossibilité ou de ce coût excessif. Cette note est jointe aux carnets numériques d’information, de suivi et d’entretien des logements prévu par l’article L. 111-10-5 du Code de la construction et de l’habitation.
Les précisions à venir – Le décret précise qu’un arrêté conjoint des ministres de l’Énergie et de la Construction précise les modalités du nouveau dispositif et notamment les cas d’impossibilité d’individualiser le refroidissement, ainsi que le contenu de la note établie par le propriétaire ou, le cas échéant, par le syndicat des copropriétaires représenté par le syndic, justifiant de l’impossibilité ou du coût excessif d’y procéder.
Mise en service des compteurs individuels et des répartiteurs (article 5)
L’article R. 241-10 du Code de l’énergie prévoit désormais que les immeubles dont les valeurs de consommation en chauffage sont supérieures ou égales à 120 kWh/m2/an doivent être équipés des appareils d’individualisation et des répartiteurs4. Toutefois, pour les immeubles dont les valeurs de consommation en chauffage sont supérieures aux seuils fixés par arrêtés pour les compteurs individuels d’énergie thermique et de répartiteurs de frais de chauffage, leur mise en place aura lieu au plus tard le 25 octobre 2020.
Il prévoit que la mise en service des appareils de mesure permettant de déterminer la quantité de froid fournie à chaque local occupé à titre privatif et ainsi d’individualiser les frais de refroidissement5 interviendra au plus tard le 25 octobre 2020.
Les relevés de consommation (article 6)
Après avoir rappelé que les appareils d’individualisation des fluides (chaud, froid) et les répartiteurs de chauffage doivent être conformes à la réglementation relative au contrôle des instruments de mesure, l’article R. 241-11 du Code de l’énergie prévoit désormais que les relevés desdits appareils doivent pouvoir être effectués sans qu’il soit nécessaire de pénétrer dans les locaux privatifs. Ceux installés à partir du 25 octobre 2020 sont relevables par télé-relève. À compter du 1er janvier 2027, c’est l’ensemble des appareils qui doit être relevable par télé-relève.
Notion de frais de refroidissement (article 7)
Le nouvel article R. 241-12-1 du Code de l’énergie précise que, dans les immeubles collectifs équipés des appareils d’individualisation, les frais de refroidissement afférents à l’installation commune sont divisés, d’une part, en frais de combustible ou d’énergie et, d’autre part, en autres frais de refroidissement tels que les frais relatifs à la conduite et à l’entretien des installations de refroidissement et les autres frais relatifs à l’utilisation d’énergie électrique (ou éventuellement d’autres formes d’énergie) pour le fonctionnement des appareillages.
La répartition des frais de chauffage et de refroidissement (articles 8 et 9)
L’article R. 241-13 du Code de l’énergie prévoit que les frais de combustible ou d’énergie sont répartis entre les locaux desservis en distinguant des frais communs et des frais individuels.
Les frais communs de combustible ou d’énergie sont obtenus en multipliant le total des dépenses de combustible ou d’énergie par un coefficient égal à 0,30. Dans le cas des immeubles pour lesquels des appareils de mesure6 ont déjà été installés, le coefficient choisi entre 0 et 0,50 au moment de l’installation de ces appareils est conservé. Toutefois, l’assemblée générale des copropriétaires ou le gestionnaire d’un immeuble entièrement locatif peut remplacer le coefficient initial par le coefficient de 0,30.
Les frais communs sont répartis dans les conditions fixées par le règlement de copropriété ou les documents en tenant lieu.
Le total des frais individuels s’obtient par différence entre le total des frais de combustible ou d’énergie et les frais communs. Ce total est réparti en fonction des indications fournies par les appareils d’individualisation ou les répartiteurs7, les situations ou configurations thermiquement défavorables des locaux pouvant être prises en compte.
Désormais, il est précisé que ces modalités de répartition présentées s’appliquent de la même façon pour les immeubles équipés des appareils individualisant les frais de refroidissement8.
Un arrêté conjoint des ministres de l’Énergie et de la Construction doit préciser les modalités de répartition des frais de chauffage ou de refroidissement et d’information des occupants.
L’article R. 241-14 du Code de l’énergie prévoit que les autres frais de chauffage, tels que les frais relatifs à la conduite et à l’entretien des installations de chauffage et les frais relatifs à l’utilisation d’énergie électrique (ou éventuellement d’autres formes d’énergie) pour le fonctionnement des appareillages, notamment les instruments de régulation, les pompes, les brûleurs et les ventilateurs9, sont répartis dans les conditions fixées par le règlement de copropriété ou les documents en tenant lieu. Cette précision est étendue aux autres frais de refroidissement mentionnés tels que les frais relatifs à la conduite et à l’entretien des installations de refroidissement et les autres frais relatifs à l’utilisation d’énergie électrique (ou éventuellement d’autres formes d’énergie) pour le fonctionnement des appareillages10.
Répartition de l’eau chaude (article 10)
Désormais, l’article R. 241-16 du Code de l’énergie prévoit que, sauf dans les cas dérogatoires11, dans les immeubles collectifs où la production d’eau chaude est commune à tout ou partie des locaux occupés à titre privatif, les frais de combustible ou d’énergie afférents à la fourniture d’eau chaude sont répartis entre ces locaux proportionnellement à la mesure des compteurs individuels d’eau chaude.
Lorsque les conditions de fourniture de l’eau chaude ne permettent pas de connaître la part des frais de combustible ou d’énergie entrant dans le prix de cette fourniture, cette part fait l’objet, pour l’application du présent article, d’une estimation forfaitaire égale aux deux tiers au moins du prix total de l’eau chaude fournie par l’installation commune de l’immeuble.
Toutefois, le texte prévoit qu’il n’est pas dérogé par les nouvelles dispositions à celles des conventions ou usages en vigueur pour la répartition des frais, fixes ou non, et des charges afférentes à la fourniture d’eau chaude autres que les frais de combustible ou d’énergie mentionnés ci-dessus.
Il précise que les appareils de mesure installés à partir du 25 octobre 2020 sont relevables par télé-relève. À compter du 1er janvier 2027, l’ensemble des appareils de mesure doit être relevable par télé-relève ».
On l’aura compris, l’effectivité de l’entrée en vigueur du texte est conditionnée à la parution d’un décret conjoint des ministres de l’Énergie et de la Construction précisant les modalités du nouveau dispositif.
Notes de bas de pages
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1.
Pour une présentation de la loi ELAN, v. Battistini P., La loi Elan décryptée pour les professionnels de l’immobilier, 15 fiches pour appréhender les nouveautés majeures de cette réforme, Gualino, Droit en Poche, 2019 ; Battistini P., Logement social, Construction, Urbanisme… ce que change la loi ELAN, 21 fiches pour décrypter la réforme, Gualino, Droit en Poche, 2019.
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2.
JO, 23 mai 2019.
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3.
V. CCH, art. L. 111-10-5.
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4.
C. énergie, art. R. 241-7.
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5.
C. énergie, art. R. 241-8.
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6.
C. énergie, art. R. 241-7.
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7.
C. énergie, art. R. 241-7.
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8.
C. énergie, art. R. 241-8.
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9.
C. énergie, art. R. 241-12.
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10.
C. énergie, art. R. 241-12-1.
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11.
C. énergie, art. R. 241-18 et C. énergie, art. R. 241-19.