Paris : l’encadrement des loyers insuffisamment respecté

Publié le 10/03/2025
Paris : l’encadrement des loyers insuffisamment respecté
Xiongmao/AdobeStock

Encore trop d’annonces ne respectent pas l’encadrement des loyers à Paris, un dispositif expérimental mis en place jusqu’en novembre 2026.

29 % des annonces à Paris ne respectent pas les règles du dispositif d’encadrement des loyers, conclut une étude de l’Association nationale de défense des consommateurs et usagers, Consommation, Logement et Cadre de Vie (CLCV), dont les résultats ont été dévoilés à l’automne dernier.

Un dispositif applicable jusqu’en 2026

À la demande de la mairie de Paris, l’encadrement des loyers est mis en place depuis le 1er juillet 2019. Ce dispositif permet de limiter l’augmentation des loyers du parc privé. Il entre dans le périmètre d’une expérimentation prévue pour une durée de cinq ans par la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (loi Elan). Cette expérimentation a été prolongée jusqu’en 2026 par la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation et la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l’action publique locale (dite Loi 3DS). Paris a été la première candidate à cette expérimentation, vite rejoint par de nombreuses villes.

Le mécanisme d’encadrement des loyers à Paris

Le principe en est simple. À la signature du bail, le loyer, hors charges et hors complément de loyer, proposé par le bailleur ne peut pas dépasser un montant plafond au mètre carré. Ce loyer-plafond, dit loyer de référence majoré, varie en fonction du quartier, du type de location, vide ou meublée, du nombre de pièces et de l’époque de construction du logement. Par exception, si la qualité du bien le justifie, l’investisseur-bailleur peut opter pour un complément de loyer. Le loyer de référence minoré permet, quant à lui, à ce propriétaire, d’augmenter le montant d’un loyer inférieur à ce seuil, notamment en cas de relocation. Précisons que ce dispositif d’encadrement s’ajoute au décret annuel qui limite la hausse annuelle des loyers à la relocation (IRL), en agissant sur le montant des loyers.

Trois loyers de référence fixés chaque année

Concrètement ce dispositif repose sur trois références fixées chaque année par arrêté préfectoral en fonction du marché locatif observé et déclinés par secteur géographique :

  • un loyer de référence ;
  • un loyer majoré (loyer de référence + 20 %);
  • un loyer minoré (loyer de référence – 30 %).

L’arrêté actualisant ces loyers de référence à Paris a été signé le 28 mai 2024. Ces nouveaux loyers de référence s’appliquent depuis le 1er juillet 2024, pour les biens mis en location dans les 80 quartiers de la capitale. Ces loyers de référence doivent être pris en compte pour les renouvellements des baux comme pour les nouveaux contrats signés à partir du 1er juillet 2024.

De nombreuses annonces ne respectent pas la réglementation

À Paris, 30 % des annonces ne respectent pas la réglementation. Cette situation marque un recul par rapport à la période 2022/2023, mettant ainsi fin à plusieurs années de progression continue, souligne la CLCV. 27 % des locations nues sont concernées. Les locations meublées sont particulièrement impactées par ce phénomène. 32 % des annonces de locations meublées ne respectent pas la réglementation.  En moyenne, il est réclamé au locataire, en toute illégalité, un surcoût mensuel de près de 170 €, souligne la CLCV. Certaines annonces vont bien au-delà. Ainsi, un studio de 20 m² loué 1 300 € alors qu’il ne pouvait excéder 642,50 €, soit une différence de 657,50 € par mois, 7 890 € à l’année. Ou encore un 4 pièces loué 1 650 € au lieu de 818,10 €, ce qui représente un écart mensuel de 831,90 €, près de 10 000 € à l’année.

De nouveaux types de baux détournés de leur utilisation première

La CLCV constate une transformation du marché locatif. Les meublés autrefois minoritaires sont désormais à égalité avec les locations nues. Il n’est plus rare de trouver des 3 ou 4 pièces loués en meublé alors que ce phénomène était jusqu’alors limité aux studios et aux deux pièces. La CLCV constate également une hausse des baux mobilité. L’association constate que « le bail mobilité est détourné par les propriétaires de son utilisation première, lesquels pensent qu’il s’agit d’une location saisonnière alors que le bien demeure soumis à l’encadrement des loyers. Nous avons ainsi vu un logement loué 2 500 € charges comprises alors que le loyer maximum était de 1 084 €, soit, hors charges, une différence de 1 100 € par mois, 13 200 € à l’année », précise l’étude. La CLCV observe également une augmentation sensible des baux dits « Code civil » pour une résidence secondaire ou un logement de fonction. Enfin, plusieurs annonces omettent de mentionner le nombre de m2 ou de pièces rendant impossible pour le locataire de s’assurer du respect ou non de l’encadrement des loyers.

Des abus en matière de complément de loyer

En principe, le loyer hors charges d’un logement mis en location ne peut dépasser le loyer de référence majoré. Par exception, si la qualité du bien le justifie, l’investisseur-bailleur peut opter pour un complément de loyer pour un bien présentant des caractéristiques de localisation ou de confort déterminantes, par comparaison avec les logements de la même catégorie situés dans le même secteur géographique. Ce complément de loyer doit être expressément mentionné, chiffré et justifié dans le bail. « Le complément de loyer, qui devait initialement ne concerner que quelques logements présentant des caractéristiques exceptionnelles, est utilisé par de plus en plus de bailleurs afin de contourner l’encadrement des loyers », constate l’étude de la CLCV. L’association cite en exemple des propriétaires qui justifient un complément de 183 € par la présence d’un ascenseur dans l’immeuble, d’une cave et du bon état général du logement, voire un complément de loyer de 520 € par mois sans fournir la moindre explication.

Le contrôle de la ville de Paris

La loi 3DS du 21 février 2022 a permis à la ville de Paris de se voir déléguer les attributions du préfet concernant le contrôle du respect des loyers de référence majorés sur son territoire. Les autres modalités du dispositif, notamment le recours relatif au complément de loyer, à l’absence de mention dans bail, à l’évolution des loyers dans le cadre d’un renouvellement de bail restent sous la responsabilité de la Commission départementale de conciliation (CDC) et ou du juge des contentieux de la protection. Ainsi, en cas de non-respect supposé des plafonds de loyer après évaluation via le simulateur disponible sur le site Paris.fr, un signalement peut être effectué auprès de la ville de Paris en utilisant une plateforme dédiée.

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