Tout savoir et tout comprendre sur les dernières actualités du droit immobilier notarial

Publié le 04/07/2025

À l’occasion de la prochaine formation organisée par Lextenso en partenariat avec la rédaction du Defrénois le 17 septembre prochain, sur l’actualité du droit immobilier notarial, le professeur, Hugues Périnet-Marquet, a bien voulu répondre aux questions d’Actu-Juridique sur les questions qui ne manqueront pas d’être abordées lors de cette webformation. Rencontre.

Actu-Juridique : La loi Le Meur facilite la charge de la preuve pour les municipalités qui veulent démontrer que les propriétaires de meublés ont illégalement transformé des biens à usage d’habitation en locaux commerciaux. La Cour de cassation vient de préciser que ce texte ne peut s’appliquer qu’aux nouvelles procédures, quels enseignements en tirez-vous ?

Hugues Périnet-Marquet : La loi Le Meur (L. n° 2024-1039 du 19 novembre 2024) a effectivement pour but de faciliter la preuve de l’usage d’habitation pour les municipalités. Mais elle va au-delà, dans la mesure où elle aboutit à multiplier le nombre de jours qui peuvent être pris en compte au titre de cet usage d’habitation : un seul avant la réforme (le 1er janvier 1970), plus de 13 500 après, ce qui est révélateur d’un changement de fond et pas seulement de mode de preuve. La position de la Cour de cassation, dans son avis du 10 avril 2025, n°25-70.002, qui considère que la loi ne peut pas être rétroactive et que « lorsqu’une amende civile prévue par l’article L. 651-2 du code de la construction et de l’habitation est sollicitée sur le fondement d’un changement d’usage illicite intervenu avant l’entrée en vigueur de l’article 5, I, 1°, d, de la loi n° 2024-1039 du 19 novembre 2024, la détermination de l’usage d’habitation du local prévue par l’article L. 631-7 du même code doit s’effectuer à l’aune des critères de la loi ancienne » est logique. Mais, comme vient de le préciser le ministère du Logement dans une foire aux questions du 25 juin 2025, les nouvelles dispositions vont s’appliquer aux nouveaux contrats ou aux contrats renouvelés. Ainsi, pour tous ceux ayant acquis leurs biens avant la réforme, en considérant légitimement qu’ils n’étaient pas à usage d’habitation, l’application immédiate des nouvelles règles constitue une forme de rétroactivité économique puisque, pour les contrats à venir, ils sont censés être à usage d’habitation. Or une telle rétroactivité économique peut s’avérer tout aussi gênante que la rétroactivité juridique.

AJ : La nouvelle loi n°2025-541 visant à faciliter la transformation de bureaux en logements est-elle de nature à accroître les surfaces d’habitation ?

Hugues Périnet-Marquet : Cette nouvelle loi est intéressante en ce qu’elle permet, outre des possibilités de dérogation, la possibilité de délivrer un permis en visant plusieurs destinations. Ce permis multi-destination permettra donc de passer d’une destination à l’autre pendant 20 ans sans que l’autorité publique ne puisse s’y opposer. De même, le changement de destination de l’immeuble au regard de la copropriété pourra être voté à la majorité de l’article 24 s’il conduit à permettre un usage d’habitation total ou partiel. Ces dispositions ne sont pas d’un intérêt négligeable mais risquent de se heurter à une dure réalité économique. Beaucoup d’études montrent, en effet, que la transformation d’immeubles de bureaux en logement n’est pas rentable, compte tenu du coût des travaux et de la baisse de la valeur de l’immeuble puisque le mètre carré d’habitation n’est pas au même prix que celui de bureau. Ce n’est donc que si des opérations de transformation sont, d’une manière ou d’une autre, aidées par les pouvoirs publics que celles-ci pourront intervenir.

AJ : Les ZAN et les ZFE sont en péril ; qu’en est-il pour le DPE  ?

Hugues Périnet-Marquet : L’écologie fait face aujourd’hui à des vents démocratiques contraires. Alors que d’un côté une proposition de loi vise à régir les passoires thermiques, beaucoup de députés, comme leurs votes l’ont montré, tentent de marginaliser les ZAN et de supprimer les ZFE. De nombreuses voix s’élèvent également pour remettre en cause la pertinence des DPE. Un rapport de la Cour des comptes du 3 juin 2025, particulièrement sévère sur la fiabilité de ces DPE, n’a pas calmé les ardeurs de ces détracteurs, bien au contraire. Le ministère du Logement est donc contraint d’agir sur deux fronts. D’une part, il doit tenter de rassurer sur la compétence des diagnostiqueurs et sur la fiabilité  de leur travail. De nouvelles dispositions de vérifications des compétences ont donc été prises et une réflexion est en cours en ce qui concerne la création éventuelle d’un ordre professionnel. D’autre part, sans avoir l’air de reculer, les pouvoirs publics doivent tenter de limiter les impacts négatifs des DPE sur la mise en location de logement. Des dispositions ont donc été prises au regard des petites surfaces et il sera sans doute nécessaire de s’interroger sur le bien-fondé des délais très contraints initialement fixés (et notamment l’échéance de 2028) dont tous les professionnels savent qu’ils sont aussi bien techniquement qu’économiquement intenables.  Mais, pour l’instant, les textes s’appliquent et les notaires doivent en tenir compte. la chasse aux diagnostics de complaisance doit être menée efficacement sous peine de voir se multiplier des actions responsabilités affectant tant les contrats de vente que les baux.

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