Vers une disparition du sexe juridique. Regard sur le sexe comme élément de l’état des personnes

Publié le 07/03/2018

Le Code civil impose l’assignation d’un sexe à la personne dès le commencement de sa vie. Néanmoins, l’affirmation de l’égalité des sexes et les évolutions en la matière posent aujourd’hui la question de l’utilité du sexe juridique. Pour y répondre, le sexe sera envisagé comme un élément de l’état des personnes devant alors permettre la caractérisation de la personne puis l’application d’un statut juridique subséquent.

L’histoire raconte que les religieux byzantins étaient occupés à discuter de la question théologique du sexe des anges alors que les forces turques assiégeaient Constantinople. Ainsi avait été facilitée la prise de la ville le 29 mai 1453. De là vient l’expression « débattre du sexe des anges » pour parler d’un débat sur une question futile occultant un problème plus important1. On pourrait être tenté de penser qu’une controverse sur le sexe des hommes est tout autant une querelle byzantine. Spécialement pour le juriste, le sexe n’est-il pas nécessairement et indiscutablement un élément de l’état des personnes ? Pourtant, à y réfléchir, la question de la légitimité de la prise en compte du sexe en tant qu’élément de l’état des personnes n’est nullement chimérique.

Si tous les hommes ont un sexe, tous n’ont pas le même. On est mâle ou femelle, on est un homme ou une femme. Cette qualité humaine est appréhendée, voire sacralisée par le droit puisque, outre son assignation biologique, la personne est juridiquement soit un homme, soit une femme dès le commencement de sa vie2 et jusqu’à sa mort3. On est, ou plutôt l’on naît, homme ou femme et défini comme tel par le droit4.

Pourtant, bien que chaque personne ait ce que l’on peut désigner comme un sexe juridique, point de définition légale du sexe, ni de l’homme ni de la femme5. Le sexe et ses composantes font partie des notions qui, bien qu’utilisées par le droit, ne sont pas des concepts juridiques, en ce sens qu’il ne s’agit pas de notions conçues et définies par lui. Il en est de même de la vie humaine, nécessaire au bénéfice de la personnalité juridique6 ou de la mort. S’il existe certains critères, consacrés par le droit7 ou non8, permettant de conclure à l’existence de la vie ou à sa fin, la vie comme la mort ne sont pas en tant que telles définies par la loi et sont, dans les faits, laissées à l’appréciation des médecins9. Le sexe ne fait pas exception et c’est bien l’observation du médecin qui détermine si le nouveau-né appartient au sexe masculin ou féminin.

La vie, la mort et le sexe sont des notions biologiques dont le constat est laissé à l’appréciation du corps médical10. En réalité, au-delà de la biologie ou de la médecine, la vie, la mort et le sexe relèvent de la nature11 et tout un chacun est en mesure d’opérer leur constat. Le recours au médecin pourrait dans la grande majorité des cas ne pas apparaître nécessaire sauf dans les cas limites ou extrêmes pour lesquels un œil expert et avisé est indispensable. Ainsi, si d’aucuns affirment que les rédacteurs du Code civil ont consulté le corps médical à ce sujet12, il apparaît que le sexe ne méritait pas plus d’être défini que l’arbre de l’article 520.

Si le sexe ne fait l’objet d’aucune définition légale, au sens courant, il peut avoir trois significations : le caractère physique permanent de l’individu permettant de distinguer les mâles des femelles, les organes sexuels ou encore la sexualité13.

Le Vocabulaire juridique Cornu, proposant une définition doctrinale, retient également trois significations. Il s’agira chez l’homme ou la femme des organes de la reproduction et de la sexualité, de chacune des deux moitiés du genre humain ou encore de l’appartenance à l’un de ces groupes ou, pour finir, d’un élément de l’état des personnes auquel la loi attache certaines conséquences juridiques14. Ainsi, le mot « sexe » a non pas trois mais quatre sens. Il peut faire référence à une catégorie (celle d’homme ou de femme), à un organe (l’appareil sexuel masculin ou féminin), à une activité (la sexualité) ou alors à un élément de l’état des personnes.

Définir le sexe par l’organe revient à déterminer les critères physiques, anatomiques, mais on peut aller plus loin en retenant des critères génétiques, hormonaux et autres15, qui font que l’individu est médicalement homme ou femme16. Pour autant, la définition de l’homme ou de la femme relève de la biologie et de la médecine qui peinent d’ailleurs à fixer des critères et il ne revient pas au droit d’opérer ce travail de définition17. Le sexe apparaît comme « insaisissable »18 et il ne sera pas discuté des critères physiques qui font entrer la personne dans l’une ou l’autre catégorie. Néanmoins, même en l’absence de définition juridique, de l’organe découle la catégorie et l’activité sexuelle de l’usage que l’on en fait.

Bien que l’activité sexuelle soit appréhendée par le droit19, elle ne sera pas abordée ici. En revanche, la question de la catégorie assignée en raison de l’organe sexuel est au cœur du sujet. La détermination du sexe va avoir pour effet de faire entrer l’individu dans une catégorie : celle d’homme ou de femme. En conséquence, de la sexuation physique découlera la sexuation juridique.

L’attribution d’une qualité sexuée à la personne soulève inévitablement la question du genre. Il faut ici distinguer le sexe et le genre. Si les théories dites du « genre » ont été développées outre-Atlantique dès les années soixante-dix20, la question du genre est d’apparition relativement récente en France21. Dans une vision simplifiée (et certainement simpliste), on peut considérer que la théorie du genre est une théorie sociale visant à étudier les mécanismes déterminants du comportement socialement attendu des hommes ou des femmes. Le droit y est considéré comme un des leviers participant de la construction d’une féminité ou d’une masculinité sociales appelées genre22. En outre, appliquée à l’individu, la notion de genre fait référence au sexe ressenti, au sexe psychologique ou psychique, qui peut correspondre ou non au sexe physique23.

Bien que la notion de genre dépasse largement le droit, encore qu’elle soit reconnue dans certains pays24, le terme est utilisé dans la littérature juridique soit pour désigner le sexe masculin ou féminin25, soit pour illustrer un décalage, une différence, entre le sexe juridiquement attribué à la personne et le sexe qu’elle affiche au regard des critères traditionnellement attribués à l’un ou l’autre des sexes26. Cette terminologie ne sera pas retenue ici. Seul le mot « sexe » sera utilisé, principalement au sens de sexe juridique reconnu par le droit et figurant sur les documents d’état civil, mais seront également évoqués le sexe biologique ou sexe de naissance et le sexe apparent ou sexe affiché, qui est celui choisi par la personne, qu’il corresponde ou non à ses sexes biologique ou juridique.

Bien qu’elle soit écartée ici, l’introduction de la notion de genre constitue néanmoins la marque du mouvement permanent, bien que manifestement occulte, qui anime la question du sexe en droit. Le sexe juridique, fondé sur la nature, apparaît comme une sorte d’évidence ponctuellement bousculée par quelques revendications manifestées par des groupes d’individus plus ou moins larges (féministes, transsexuels, intersexuels27…) souvent considérés comme marginaux. Pourtant, la question du sexe anime les débats juridiques dans une proportion beaucoup plus large et les discussions relatives au sexe s’organisent autour de deux axes.

Le premier d’entre eux porte sur l’attribution du sexe, et, si le sexe est au cœur de discussions et d’avancées récentes, il faut constater que le sujet émaille les débats juridiques depuis le début du XIXe siècle. Les discussions ont tout d’abord porté sur la validité du mariage lorsqu’il s’avère que l’un des époux dispose d’organes sexuels atypiques qui ne correspondent pas en tout point à ceux de son sexe28. Par la suite, c’est la question du sort des personnes transsexuelles qui a posé question et a été nouvellement régi par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle intégrant des dispositions relatives à la modification du sexe au sein du Code civil29. Plus récemment encore, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur la possibilité de solliciter l’attribution d’un sexe neutre en cas d’intersexualisme30. Cette question a d’ailleurs suscité le dépôt d’un projet de loi tendant à imposer la mention d’un sexe masculin ou féminin, à l’exclusion de tout autre31.

Parallèlement, et c’est le second axe de discussion, un mouvement tendant à gommer les conséquences de la différence de sexe a pris progressivement de l’ampleur. S’appuyant sur le principe de non-discrimination, la Cour européenne des droits de l’Homme32 et la Cour de justice de l’Union européenne33 ont fait du principe d’égalité entre les sexes l’un des droits fondamentaux partagé par tous les États du continent. La promotion de ce principe essentiel était déjà faite en France depuis plusieurs années, et continue à l’être. On a ainsi assuré l’égalité entre les hommes et les femmes dans le mariage34, dans l’exercice de l’autorité parentale35, dans la transmission du nom aux enfants36. Les unions sans considération de la différence de sexe37 ont été consacrées, jusqu’à l’adoption du mariage entre personnes de même sexe38. On assiste alors à une « bilatéralisation » des textes qui produisent des normes mixtes s’appliquant précisément aux hommes et aux femmes ou unisexes. Ces normes visent les personnes sans distinction de leur sexe39.

Ce mouvement conduit à s’interroger sur l’utilité de la notion de sexe en droit. S’il faut constater que le droit utilise le sexe tant dans la définition de la personne elle-même que dans celle des fonctions qu’elle occupe, on peut néanmoins se demander si le sexe est une notion nécessaire au droit. Le sexe ne découle pas ipso facto de la personnalité juridique. Les personnes morales n’ont d’ailleurs pas de sexe. Il est évident qu’il s’agit de personnes fictives qui n’ont pas de sexe physique, ce qui suffit en soi à expliquer l’absence de sexe juridique. Pour autant, il s’agit tout de même de personnes reconnues comme telles par le droit sans être caractérisées par un sexe. Leur existence ne fait que renforcer les interrogations sur la pertinence de maintenir un sexe juridique.

Pour traiter de cette question, il apparaît intéressant de se fonder sur le dernier élément de définition du sexe : le sexe en tant qu’élément de l’état des personnes.

L’état des personnes regroupe un ensemble d’éléments relatifs à la personne. Il a une fonction d’identification de la personne ainsi qu’une fonction d’individualisation de la norme en ce sens que l’état de la personne va permettre la détermination, la personnalisation des règles de droit qui lui sont applicables40. L’état des personnes constitue « l’image juridique de la personne »41.

Le sexe contribue-t-il à l’élaboration de ce portrait ? La question peut être posée, car la notion d’état des personnes n’est pas le déversoir de l’ensemble des qualités individuelles et humaines. Seuls certains critères sont pris en compte. Ce sont alors les éléments considérés comme déterminants par le droit en ce sens qu’ils permettent l’identification de la personne et la détermination de son statut juridique. Relèvent de l’état des personnes, à tout le moins au plan personnel, les critères suivants : le nom, le domicile, la nationalité42 et le sexe, traditionnellement admis comme tel43.

Pour s’en tenir ici au Code civil, on remarque que la sexuation des individus est omniprésente que la personne soit appréhendée dans son individualité ou dans sa fonction. Avoir un sexe, c’est être, au regard du droit, un homme ou une femme, mais c’est également être un père ou une mère, un mari ou une femme.

Néanmoins, cette sexuation apparente emporte-t-elle des conséquences ? Est-on juridiquement différent selon que l’on est un homme ou une femme ?

Les évolutions du droit sur ce point peuvent permettre d’en douter, pourtant si le sexe est un élément de l’état des personnes, dont la fonction est l’identification de la personne et l’individualisation de la norme, il devrait permettre la qualification de l’individu (homme ou femme), puis l’application d’un statut juridique particulier. On pense classiquement à celui de père ou de mère et d’époux ou d’épouse, mais on pourrait également constater des spécificités entre concubin ou concubine, héritier ou héritière, salariée ou salarié, etc.

Si l’opération de qualification précède normalement l’application d’un statut juridique, on peut s’interroger sur la pertinence d’une telle opération en l’absence de conséquences juridiques. Est-il nécessaire de qualifier si aucun régime juridique n’en est la conséquence ? Il faut alors en premier lieu vérifier si la sexuation de la personne a une conséquence dans la définition de son statut juridique, si le sexe joue un rôle dans l’individualisation de la norme. Néanmoins, le cas du sexe est particulier en ce sens que s’il peut avoir un rôle dans l’individualisation de la norme (I), il a également, et indépendamment, une fonction d’individualisation de la personne (II).

I – Le sexe dans l’individualisation de la norme

L’état des personnes a pour fonction de fixer le statut juridique de la personne. En conséquence, si le sexe est un élément de l’état des personnes, il devrait avoir une incidence sur le statut juridique des individus, c’est-à-dire sur les règles de droit qui leur sont applicables. Est-ce le cas ? La question peut surprendre ; il y aurait des conséquences juridiques à être qualifié d’homme ou de femme. Il existerait ainsi des différences à faire entre les hommes et les femmes alors même que l’égalité de droits entre les hommes et les femmes a valeur constitutionnelle44. La caractéristique sexuelle, et donc physique, serait ainsi juridiquement discriminante, pour ne pas dire discriminatoire. Il est certain qu’elle l’a été. Il suffit pour s’en convaincre de retourner à la première édition du Code civil45 qui faisait des différences notables entre l’homme et la femme. Citons à titre d’exemple l’ancien article 144 énonçant que : « L’homme avant 18 ans révolus, la femme avant 15 ans révolus ne peuvent contracter mariage »46. On avait même décidé que la femme, sexe faible, était présumée mourir avant l’homme47. Néanmoins qu’en est-il aujourd’hui ? Persiste-t-il dans le Code civil ou dans d’autres branches du droit des distinctions selon que l’on est homme ou femme ?

Si certains textes du Code civil sont marqués par la sexuation, l’on s’aperçoit que règne en son sein une égalité juridique entre homme et femme ayant pour conséquence l’asexuation du statut juridique de l’individu (A). Hors du Code civil, on trouve peu de règles sexuées dans les autres branches du droit48. Pour autant, la problématique de la sexuation n’est pas ignorée puisqu’elle est en réalité prohibée (B).

A – Une asexuation individuelle fondée sur l’égalité dans le Code civil

La sexuation des individus est présente dans le Code civil. Les termes « homme » et « femme » sont présents, mais la qualité d’homme fait en réalité référence à l’individu en général sans considération de son sexe. À titre d’exemple, on peut remarquer que l’on trouve ce vocable à l’article 1240 du Code civil49 évoquant le fait quelconque de « l’homme » qui cause à autrui un dommage ou à l’article 579 visant l’usufruit établi par la main de « l’homme ». Nul doute que ces textes s’appliquent tant aux hommes qu’aux femmes. Seul l’article 311-20, alinéa 3, du Code civil relatif à l’assistance médicale à la procréation50 vise l’homme en tant qu’être masculin et la femme en tant qu’être féminin, seuls termes permettant alors de définir les protagonistes d’une procédure d’assistance médicale à la procréation.

En réalité, la sexuation apparaît principalement dans la terminologie utilisée pour désigner les fonctions occupées par les hommes et les femmes, et plus précisément celles de mari et de femme (au sens d’épouse) ou de père et de mère. L’ensemble de ces textes place cependant le mari et la femme sur un pied d’égalité puisque sont systématiquement visés le mari et la femme51, voire indistinctement les époux52. Les qualités de père et mère sont omniprésentes dans le Code civil53 mais, là encore, point de différence de droits entre eux. L’ensemble des textes est bilatéralisé, visant indistinctement « le père et la mère » ou « le père ou la mère »54.

On constate également une égalité en matière successorale. Non seulement l’absence de distinction est affirmée à l’article 735 du Code civil, mais elle est reprise dans d’autres dispositions. Ainsi, égalité pour les fils ou filles55, gendres et belles-filles56, petits-fils ou petites-filles, oncles ou tantes, frères et sœurs57, aïeuls ou aïeules58.

L’identité générale de statut juridique entre homme et femme au sein du Code civil est le fruit d’une lente et longue évolution législative. Par touches successives, le législateur a fait disparaître la différence de statut juridique entre homme et femme au sein du Code civil59.

S’il devait persister un dernier bastion de la sexuation dans le Code civil, il s’agirait alors de la filiation qui est un domaine dans lequel la sexuation des individus est marquée puisque la procréation est elle-même sexuée. Cette sexuation de la reproduction a d’ailleurs été consacrée à l’article 6-1 du Code civil qui réserve les textes relatifs à la filiation charnelle aux couples hétérosexuels, neutralisant ainsi certains des effets du mariage pour les couples homosexuels.

Seule une femme peut être mère de manière certaine par l’accouchement60 et seul un homme peut être présumé père. Cette persistance de la sexuation s’agissant de la filiation s’explique alors par la nature qui veut qu’un homme et une femme s’unissent pour procréer et ainsi devenir mère et père. Pourtant, la femme, bien qu’ayant porté et accouché de l’enfant peut se libérer de sa maternité en demandant le secret de son identité61, tout comme un homme n’a pas d’obligation de reconnaître son enfant. Le père comme la mère s’exposent alors à une action en recherche de paternité ou de maternité62. En outre, si la procréation médicalement assistée n’est aujourd’hui ouverte qu’aux couples hétérosexuels63, son ouverture aux femmes seules ou aux femmes engagées dans une union homosexuelle est annoncée64.

Les nouveaux articles 61-5 et suivants du Code civil fixant les conditions du changement de sexe juridique en cas de transsexualisme soulèvent une difficulté au regard de la filiation. L’apport majeur de la réforme est la suppression de toute condition physique en cas de demande de changement de sexe. Il n’est plus exigé, comme cela l’était auparavant par la Cour de cassation65, que les personnes concernées subissent une intervention chirurgicale66 supprimant les caractères de leur sexe d’origine. Dès lors, on peut envisager qu’une personne transsexuelle obtienne le changement de son sexe juridique tout en conservant les organes reproducteurs de son sexe de naissance. Cette personne pourrait alors concevoir naturellement un enfant avec une personne du sexe opposé à son sexe de naissance mais identique à son sexe juridique. La filiation charnelle de l’enfant serait-elle alors établie envers deux parents de même sexe67 ? La réponse est bien incertaine !

Bien qu’elle soit affirmée par le droit, les marques juridiques de la reproduction sexuée s’amenuisent. Le législateur est allé très loin dans cette neutralisation du sexe, puisque les couples de même sexe peuvent désormais adopter un enfant68 et devenir un couple de parents père-père ou mère-mère. Un tel statut implique par hypothèse une stricte égalité des droits des époux et parents, qu’il n’a été possible de consacrer officiellement que par le truchement du mécanisme posé à l’article 6-1 du Code civil.

La conclusion ne fait pas de doute : les distinctions entre homme et femme sont gommées69 au sein du Code civil70. Il en persiste apparemment une : c’est la filiation charnelle. Mais est-il besoin de maintenir un sexe juridique pour qu’elle s’applique ? C’est l’accouchement qui fait la mère parce qu’elle peut naturellement porter un enfant et non parce que le droit lui a accordé cette faculté. L’attribution d’un sexe juridique n’a plus, en tant que telle, de conséquence au sein du Code civil. On aurait alors la tentation d’aller chercher hors du Code civil la différence de statut juridique entre homme et femme, qui expliquerait alors pourquoi le sexe est un élément de l’état des personnes. À moins que l’on arrive là aussi au même constat.

B – La prohibition de la sexuation dans les autres branches du droit

Si la question du sexe des personnes relève avant tout du droit civil en ce qu’elle touche l’individu, la personne humaine, elle, n’est pas inconnue des autres branches du droit. On pense en premier lieu au droit pénal ou au droit du travail mais d’autres corps de règles, parfois de manière encore plus surprenante, se sont aussi saisis de la question du sexe, comme le droit commercial ou le droit de la propriété intellectuelle71.

La question de la sexuation des personnes dépasse de façon évidente le droit civil. Néanmoins qu’en est-il exactement ? On retrouve dans d’autres branches du droit la volonté du législateur de supprimer toute différence de statut entre homme et femme. La technique dite de bilatéralisation des textes est parfois utilisée72 mais elle ne constitue pas l’essentiel. En dehors du Code civil, l’asexuation du droit ne se manifeste pas par l’égalité des individus mais repose sur un mécanisme de discrimination. La discrimination consiste à traiter de manière non pas simplement différente mais surtout inégale deux individus en raison de critères le plus souvent liés au sexe, à l’âge, à la race mais également à la religion ou au statut économique ou social. L’article 225-1 du Code pénal énonce dix-huit chefs de discrimination73 auxquels s’ajoutent les hypothèses visées par d’autres dispositions74.

La discrimination est en premier lieu négative lorsqu’elle consiste à traiter défavorablement une personne en raison de son sexe. Elle est alors purement et simplement prohibée non seulement par le Code pénal75 mais également en droit du travail76. Il doit néanmoins être précisé que la prohibition de la discrimination fondée sur le sexe n’interdit pas les différences de traitement lorsqu’elle sont justifiées. C’est là la distinction fondamentale entre discrimination et différence de situation77.

Cette interdiction d’une discrimination fondée sur le sexe des personnes a pour effet de proscrire toute inégalité de traitement fondée sur le sexe. En effet, contrairement au Code du travail qui prohibe la discrimination dans le domaine professionnel78, le Code pénal vise quant à lui « toute discrimination » quelle qu’elle soit et surtout quel qu’en soit le contexte. Ainsi, il ne doit pas y avoir de différence de traitement juridique, donc de statut juridique, entre l’homme et la femme. On parvient dans ce cadre à une asexuation du statut juridique des individus, fondée sur une prohibition qui pèse sur tout un chacun de traiter différemment un homme et une femme. L’asexuation de chaque personne est alors le résultat d’un comportement général relevant de l’ensemble des individus. L’asexuation effective, réelle, repose alors sur la collectivité.

Ce constat de la différence des sexes comme source de leur neutralité juridique par le mécanisme de la discrimination négative amène au pendant de cette notion : la discrimination positive.

La discrimination positive est « une politique visant à avantager un groupe de personnes lésé par le passé ou l’étant encore actuellement du fait de son appartenance ethnique ou de son sexe »79. Relativement à notre sujet, elle se manifeste au travers d’une obligation de mixité, voire de parité dans la gouvernance de certaines institutions. Cette technique a été très largement utilisée par le législateur et on la retrouve dans de nombreuses hypothèses.

C’est le cas par exemple pour les sociétés anonymes80 qui ont l’obligation de définir une politique de diversité appliquée aux membres du conseil d’administration.81 Il existe également une obligation de mixité dans la gouvernance des associations sportives82 ou dans la composition de l’Agence française de lutte contre le dopage83. Le législateur va parfois jusqu’à imposer la parité. C’est le cas pour la désignation des membres de l’autorité des marchés financiers84 ou la composition du Haut conseil de l’évaluation de l’enseignement supérieur et de la recherche85. En matière électorale, la parité semble difficile à imposer à l’électeur. Cela apparaît néanmoins possible au regard des termes de l’article L. 242-4-1 du Code rural enjoignant à l’électeur des conseils de l’ordre des vétérinaires, sous peine de nullité du vote, de ne « désigner qu’au maximum un nombre de candidats de chaque sexe égal à la moitié, le cas échéant arrondie à l’entier supérieur pour l’un des deux sexes, du nombre de membres du conseil régional ou national à élire ». En général, le législateur se contente en la matière soit d’imposer une alternance dans la composition des listes électorales86, soit d’imposer que le candidat et son suppléant soient de sexe différent87.

On pourrait être amené à penser que l’objectif de mixité, voire de parité est révélateur de la différence de statut juridique entre homme et femme et donc de sexuation du droit. Le droit, prenant acte de différences, réagit en offrant à chaque sexe un corps de règles propre. Ce raisonnement doit être rejeté car, bien que l’on ne puisse ignorer que les objectifs de mixité et de parité visent à favoriser l’accès des femmes à certaines fonctions88, les textes sont néanmoins protecteurs des deux sexes puisqu’ils ne visent spécifiquement ni les hommes ni les femmes. En outre, par la parité ou à tout le moins la mixité, l’asexuation n’est plus affirmée individuellement mais, ici encore, obtenue collectivement. On s’assure de l’asexuation globale des assemblées en question. Le sexe des personnes s’efface derrière l’asexuation globale du groupe.

Si l’on peut conclure à l’asexuation du statut juridique des individus même en dehors du droit civil, il faut néanmoins constater que cette asexuation n’est plus inhérente au statut de l’individu mais est obtenue indirectement par la protection de celui-ci. La personne, alors envisagée sans considération de son sexe, a des droits qui ne peuvent être remis en cause ou altérés en raison de son sexe. L’asexuation n’est donc plus obtenue individuellement mais collectivement par la mutualisation de la protection du statut juridique individuel. Ainsi, si le mécanisme de la discrimination ne permet pas de constituer de manière directe le statut juridique d’un individu, il permet néanmoins de le protéger en évitant que celui-ci ne soit altéré en raison du sexe de la personne.

Se pose alors la question de savoir si cette asexuation fondée sur la discrimination ne repose pas elle-même sur l’identité sexuée de chaque individu. La réponse est épineuse car il est évident que la discrimination au regard du sexe est fondée sur la sexuation de la personne. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une sexuation juridique. Ce n’est pas le sexe de la personne, en tant que caractère consacré par le droit, qui est visé, mais son sexe physique. La discrimination, à tout le moins la discrimination négative, peut aussi porter sur l’origine ethnique et est tout aussi prohibée. Or, ce qu’on appelle la race n’est pas un caractère juridique de la personne. Bien que physiquement ancrée dans la personne, la couleur de peau ne la définit pas juridiquement ; elle ne relève pas de l’état des personnes. Pour autant, le droit prend en compte cette physionomie pour interdire toute discrimination qui en serait la conséquence. On pourrait tout à fait raisonner de même pour le sexe. Les personnes sont naturellement sexuées et c’est cet état physique qui doit être protégé d’une différence de traitement sans qu’une sexuation juridique, c’est-à-dire consacrée par le droit, ne soit nécessaire.

La démonstration est d’ailleurs étayée par un sujet volontairement ignoré jusqu’à présent en ce qu’il relève non seulement du Code civil, mais également d’autres branches du droit et notamment le droit pénal : les violences faites aux femmes. Le fléau des violences conjugales dont les femmes sont les premières victimes a donné lieu à l’adoption d’une succession de lois89 dont certaines affichent dans leur intitulé même, qu’elles sont destinées à leur protection. Pour autant, les textes issus de ces lois ne visent ni les femmes ni les mères ou les épouses, mais indistinctement la personne victime de violences au sein de son couple ou « le conjoint qui n’est pas auteur des violences »90. Il en est de même de l’auteur qui peut être désigné comme un conjoint, un concubin ou un partenaire de PACS ou même comme la partie défenderesse. Ces textes auraient d’ailleurs vocation à s’appliquer au sein du couple même homosexuel et quel que soit le sexe de la victime et de l’auteur.

En conséquence, il faut avouer que le droit s’emploie à masquer toute différenciation des sexes et l’on peut dès lors légitimement se poser la question de savoir s’il est nécessaire, voire pertinent de continuer de qualifier juridiquement les personnes par leur sexe91. On pourrait être tenté de répondre que, puisque le législateur traite également homme et femme et interdit toute prise en compte de leur différence de sexe, le temps serait venu d’abandonner la référence au sexe en matière d’état des personnes. Mais ce serait excessif. Le sexe a également une autre fonction : celle d’individualisation de la personne.

II – Le sexe dans l’individualisation de la personne

Le sexe est un caractère de l’individu et constitue un élément, un support de son individualisation. En tant qu’élément de l’état des personnes, le sexe a une fonction d’identification, de singularisation, de la personne. Joint à d’autres éléments, notamment le nom et le prénom, il permet de la différencier de tout autre individu92.

La singularisation de la personne au regard d’autres sujets de droit repose sur une attribution imposée du sexe (A) et constitue les prémices de sa fonction de reconnaissance (B).

A – La singularisation de la personne par son sexe

L’individu, le sujet de droit, doit être distingué de l’ensemble des autres. Pour ce faire, le droit utilise un ensemble de critères relevant de l’état des personnes dont le sexe fait partie93. C’est par l’accumulation de caractéristiques personnelles que l’individu va être singularisé. Plus les critères sont nombreux, moins les confusions sont possibles et le sexe va pouvoir intervenir comme critère distinctif entre deux individus. Si l’on comprend bien l’utilité du sexe dans ce contexte, on peut douter qu’il soit absolument nécessaire pour singulariser un individu. Les hypothèses dans lesquelles, tous les autres critères étant identiques, le sexe serait le seul critère discriminant paraissent infimes, voire inexistantes. Néanmoins, en l’état actuel du droit, le sexe reste un élément d’identification de la personne94 et son attribution est obligatoire.

Le processus d’attribution du sexe juridique se décline selon trois règles. La première est l’immédiateté de la détermination du sexe, la deuxième est l’obligation de rattacher l’enfant au sexe masculin ou féminin, la troisième est l’identité du sexe biologique et du sexe juridique. La détermination du sexe est imposée ab initio puisque le sexe juridique doit être déclaré à l’officier d’état civil dans les 5 jours de la naissance ainsi que le prévoit l’article 56 du Code civil. Si aucun texte n’impose que le sexe soit masculin ou féminin, ni même finalement qu’il corresponde au sexe biologique, la jurisprudence exige que le sexe indiqué sur l’acte de naissance soit masculin ou féminin95 et accepte de rectifier les actes de l’état civil faisant état du mauvais sexe sur le fondement de l’article 99 du Code civil96.

Ce mécanisme de sexuation juridique pose aujourd’hui question s’agissant des personnes présentant ce que l’on peut nommer une dissonance sexuelle : les personnes intersexuées et les personnes transsexuelles. Les individus intersexués présentent des caractères sexuels à la fois mâle et femelle. Leurs organes sexuels présentent une ambiguïté de développement, et ce dès la naissance, si bien qu’il n’est pas véritablement possible de déterminer le sexe de l’individu. Pourtant, intersexe ou pas, l’enfant doit être déclaré masculin ou féminin. La pratique voulait alors qu’il soit conseillé aux parents d’attribuer un prénom mixte à l’enfant et de déclarer le sexe le plus probable quitte à le modifier par la suite sous couvert d’une modification des actes de l’état civil en cas de détermination de l’enfant dans le sexe opposé. Une autre pratique plus rude consiste à pratiquer médicalement une réassignation, c’est-à-dire une opération chirurgicale dont l’objet est d’attribuer un sexe à l’enfant sans considération de sa détermination future97. Bien que les enfants présentant une ambiguïté sexuelle bénéficient d’un délai supplémentaire quant à la déclaration du sexe auprès de l’état civil, ce n’est qu’à la condition que les choses « rentrent dans l’ordre » à relativement brève échéance98. Ainsi, qu’une réassignation médicale soit pratiquée ou non, l’enfant, adulte en devenir, va se trouver enfermé dans une catégorie sexuelle ne lui correspondant pas forcément99.

L’autre hypothèse est celle de la personne transsexuelle qui, bien que déclarée sous le « bon sexe », ne se rattache pas psychologiquement à son sexe de naissance. Elle adopte alors l’apparence et le comportement du sexe opposé.

Intersexuels et transsexuels sont victimes d’une attribution imposée et prématurée de leur sexe qui occulte les aspects psychologiques, psychiques et même physiologiques qui peuvent intervenir s’agissant de l’appartenance à un sexe100. Les personnes concernées par une dissonance sexuelle sont en général en grande souffrance et sollicitent souvent une modification de leur sexe juridique.

Réticente à autoriser le changement de sexe juridique des personnes transsexuelles, la Cour de cassation y a finalement été contrainte101 en raison de la position de la Cour européenne des droits de l’Homme102 sur cette question. Depuis, la situation des personnes transsexuelles s’est améliorée par l’adoption des articles 61-5 et suivants du Code civil en ce qu’ils permettent la modification du sexe juridique de la personne sans exiger désormais qu’une intervention chirurgicale soit pratiquée. Ces dispositions mettent fin au bras de fer juridique qui se jouait entre les personnes transsexuelles et le droit, celles-ci sollicitant la reconnaissance d’un changement de fait non reconnu par la loi. Le transsexualisme est aujourd’hui consacré, il en est de même de ses conséquences. On peut alors changer de sexe comme l’on change de prénom ou de nom, c’est-à-dire dans le cadre d’une mutabilité contrôlée103.

Les personnes intersexuelles ont quant à elle toujours bénéficié de l’action en rectification des actes de l’état civil au regard de l’erreur commise dans la détermination de leur sexe. L’existence de cet outil juridique a pu permettre de contribuer à dissimuler les cas d’intersexualisme104, ce qui explique en partie que la situation des personnes intersexuées soient restée aussi longtemps méconnue et que ce ne soit que récemment que des revendications quant à la reconnaissance de l’intersexuation et surtout d’un sexe neutre sont apparues. Bien que reconnu par certaines législations étrangères105, il a été rejeté par la Cour de cassation106 aux motifs que « la loi française ne permet pas de faire figurer, dans les actes de l’état civil, l’indication d’un sexe autre que masculin ou féminin ». L’affirmation est somme toute discutable puisqu’aucun texte n’impose ce choix et que le principe est énoncé en l’absence de visa107.

On peut alors s’interroger sur la nécessité d’une assignation précoce du sexe. L’assignation sexuelle à la naissance n’a pas d’utilité en soi et l’on pourrait tout à fait différer la déclaration du sexe à la puberté, voire à la majorité. Cela éviterait les difficultés liées aux situations de transsexualisme ou d’intersexuation à la condition que la personne intersexuelle se revendique de l’un ou l’autre sexe. Cette méthode déclarative n’est cependant pas sans poser question notamment sur la pérennité du choix ou son absence108.

S’agissant de la reconnaissance d’un sexe neutre, la Cour de cassation y est hostile puisqu’elle considère que la dualité des sexes « est nécessaire à l’organisation sociale et juridique, dont elle constitue un élément fondateur ; que la reconnaissance par le juge d’un « sexe neutre » aurait des répercussions profondes sur les règles du droit français construites à partir de la binarité des sexes et impliquerait de nombreuses modifications législatives de coordination ». Là encore, la motivation est sujette à discussion. Les particularités juridiques liées au sexe sont mineures, voire résiduelles109 quant aux difficultés d’intégration de ce nouveau sexe dans le droit existant. La Cour de cassation précise bien que cela relèverait de la compétence du législateur, il n’y a alors pas d’impossibilité absolue à aller vers la reconnaissance d’un sexe neutre. Le travail a bien été fait s’agissant de l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de même sexe !

En réalité, on sent bien qu’il existe une réticence tant du juge que du législateur à modifier l’ordre sexuel établi. Le principe d’indisponibilité de leur état110 interdirait aux personnes de modifier de leur propre initiative ses éléments et donc leur sexe111. Ce raisonnement a déjà fait l’objet de critiques car, s’il est indisponible, l’état des personnes n’est pas immuable112. Les individus modifient librement leur domicile sans qu’aucun contrôle ne soit opéré et les modifications du nom et du prénom bien qu’encadrées sont autorisées. Pourquoi le sexe est-il traité si strictement ? En réalité, il semble que les réticences à modifier l’identité sexuelle des individus sont moins intéressantes dans leur contenu que dans leur résultat : la binarité et la stabilité du sexe de la personne.

Le sexe ne permet pas seulement l’individualisation de la personne au sens de sa singularisation vis-à-vis des autres. Le sexe permet de reconnaître et donc d’identifier physiquement la personne.

B – L’identification de la personne par son sexe

L’individualisation de la personne permet de distinguer un individu de tous les autres, mais cette fonction serait incomplète si elle ne permettait pas sa reconnaissance. Si l’on peut abstraitement distinguer une personne d’une autre au regard d’une somme de critères définis par le droit, encore faut-il déterminer concrètement qui est l’humain ainsi défini juridiquement. Il n’est pas tout de singulariser la personne, encore faut-il la reconnaître.

Il est souvent nécessaire de s’assurer de l’identité d’une personne. C’est le cas par exemple du notaire qui a l’obligation de vérifier l’identité des parties à un acte notarié113. Cette opération fondamentale de reconnaissance relève du terrain de la preuve. L’individu doit démontrer qu’il est concrètement, physiquement, la personne juridique définie par son état. Ainsi, pour bénéficier de son statut juridique, l’individu doit apporter une double preuve : celle de son état et celle de son identité. La preuve de l’état de la personne est organisée par l’état civil114, cet état civil étant lui-même pour partie reporté sur les documents destinés à prouver l’identité115 : la carte nationale d’identité116.

Pour le doyen Jean Carbonnier, la carte d’identité est la « synthèse portative » des éléments civils de l’identité (nom, naissance, domicile, sexe)117. Or, parmi ces éléments, le sexe est le seul critère physique. Le sexe est l’unique critère d’identification corporel, matériel, visuel de la personne118. Dire de quelqu’un qu’il est un homme ou une femme permet une représentation mentale de l’individu et l’on s’attend alors à trouver quelqu’un qui ressemble physiquement globalement à un homme ou une femme. Le sexe est la seule composante de l’état des personnes qui permet de faire un lien entre la personne juridique et la personne physique. En ce sens, il pourrait finalement apparaître comme nécessaire.

On porte sur soi que l’on est homme ou femme et c’est là le premier critère d’identification de la personne. C’est en réalité dans ce contexte que la modification du sexe ou la reconnaissance d’un sexe neutre peut être discutée et pourrait – non sans encourir la critique – justifier la différence de traitement entre transsexualisme et intersexualisme. La personne transsexuelle modifie son apparence dans le but de changer son sexe visible créant ainsi un décalage entre son apparence et son sexe juridique ; l’apparence n’est alors plus l’appartenance119. La situation peut sembler dangereuse puisqu’il ne sera plus possible de faire le lien entre la personne physique et le sujet de droit. La Cour de cassation avait finalement choisi de réparer cette discordance sur le fondement du droit au respect de la vie privée de l’individu comme l’y invitait la Cour européenne des droits de l’Homme120, mais l’ordre public121 aurait pu continuer à être retenu en la matière. En effet, une fois le transsexualisme constaté et même irréversible, tel que l’exigeait la Cour de cassation, il relevait de l’ordre public122 et de la sécurité juridique d’être en mesure d’identifier, de reconnaître la personne, or la différence entre sexe apparent et sexe juridique l’en empêchait. Il était donc important de remédier à cette discordance ; la personne doit pouvoir être identifiée selon son apparence.

S’agissant de l’intersexualité, et surtout de la reconnaissance du sexe neutre, la problématique est différente. En effet, si les personnes transsexuelles ne se reconnaissent pas dans leur sexe de naissance, elles se revendiquent de l’autre sexe. Il suffit alors de mettre en relation leur sexe apparent et leur sexe juridique afin de pouvoir les reconnaître. Ainsi, le sexe juridique sera conforme au sexe apparent123 défini selon des caractères traditionnels124 de l’un ou l’autre sexe. Cependant, quels sont les critères du sexe neutre ? Quelle représentation mentale peut-on avoir d’un individu se revendiquant d’un sexe neutre ? S’il n’est ni homme ni femme, comment le reconnaître ? Si la question est posée, nous nous garderons bien de tenter d’y répondre, mais cela explique en partie le refus de la reconnaissance d’un sexe neutre puisque la fonction de reconnaissance du sexe est alors tenue en échec.

Pourtant, s’il apparaît que le sexe, en tant que critère physique, joue un rôle dans l’identification matérielle et concrète d’un individu et si l’on peut imaginer que cette fonction soulève une interrogation dans le cas des personnes touchées par une dissonance sexuelle, certaines remarques s’imposent. En premier lieu, il n’y a pas d’obligation pour la personne transsexuelle de solliciter la modification de son sexe à l’état civil et libre à elle de maintenir une discordance entre son sexe apparent et son sexe juridique. Par ailleurs, le sexe juridique de la personne ne sera pas modifié sur les actes de l’état civil de son conjoint ou de ses enfants125. Ensuite, et au-delà de la question du transsexualisme, rien n’impose à quiconque de se conformer aux caractères traditionnels de son sexe. La fonction de reconnaissance physique du sexe doit donc être mesurée.

Le sexe n’est en outre pas le seul élément matériel d’identification de la personne. Si la carte nationale d’identité fait apparaître les éléments de l’état des personnes, elle ne s’en contente pas. Il faut ajouter la taille, la signature, mais surtout la photographie de son titulaire126. L’identité de la personne est en réalité prouvée directement par la représentation de celle-ci sur sa photographie. C’est donc l’image de la personne qui va permettre son identification. Ce lien entre image et identité justifie d’ailleurs l’existence d’un droit sur son image que Gérard Cornu définit comme le droit « de ne pas être pris et retenu captif en la possession d’autrui sous une forme identifiante »127. En conséquence, l’indication des autres critères physiques bien que complémentaire128 paraît accessoire ; c’est la photographie, et non un élément de l’état civil, qui permet la reconnaissance de la personne129.

En ce sens, le sexe juridique n’est pas un élément absolument nécessaire à la reconnaissance et donc à l’identification physique de la personne.

L’étude du sexe en tant qu’élément de l’état des personnes a permis de s’interroger sur l’utilité du sexe en tant que déterminant du statut juridique de la personne et en tant qu’outil d’individualisation de celle-ci.

On ne peut que constater qu’il n’existe pas de véritable différence de statut juridique selon que l’on est homme ou femme. Cela est finalement peu surprenant puisque le droit s’efforce d’assurer une égalité au moins théorique des sexes et que les distinctions fondées sur le sexe sont elle-même interdites. En tant qu’élément de singularisation son utilité est limitée, voire inexistante et la définition de la personne par son sexe est source de difficulté et de contentieux. En outre, il est supplanté par d’autres outils dans sa fonction de reconnaissance.

Dans ces conditions, il apparaît difficile de considérer le sexe comme élément de l’état des personnes alors qu’il ne remplit plus les fonctions relevant de cette notion. Pour autant, le sexe reste une caractéristique juridique de la personne puisque la détermination du sexe est imposée. Pourrait-on envisager sa suppression ? La réponse n’est pas évidente et deux points de vue s’opposent.

Dans une première posture, on peut considérer que, si l’on peine à vérifier qu’il existe encore des distinctions à opérer juridiquement entre l’homme et la femme, le sexe des individus reste omniprésent. La nature a fait les êtres humains homme ou femme et le droit ne peut s’en détacher. Arrêter d’attribuer un sexe juridique aux personnes relèverait alors de la pure fiction et, pour reprendre les termes de la Cour de cassation, « aurait des répercussions profondes sur les règles du droit français construites à partir de la binarité des sexes et impliquerait de nombreuses modifications législatives de coordination ». En outre, si l’on peut proposer la suppression du sexe juridique, l’arbre ne doit pas masquer la forêt. La disparition du sexe juridique ne fera non seulement pas disparaître la distinction entre homme et femme, mais moins encore les différences de traitement qui sont faites entre les deux sexes. La sexuation juridique de l’individu suivie de l’asexuation de son statut est un vecteur d’égalité.

D’un second point de vue, on pourrait considérer que la sexuation juridique n’apparaît pas comme nécessairement protectrice. Le parallèle entre le sexe et la race semble alors pertinent, car ils constituent tous deux des caractéristiques naturelles de la personne et sont également source d’inégalité et de discrimination. Pourtant, dans le cas de la race, le choix est d’exclure tout marqueur juridique, tout en prohibant toute différence de traitement. Le sexe est, quant à lui, imprimé juridiquement dès la naissance pour qu’ensuite soit prononcée l’égalité. On pourrait penser que, à l’instar de la race, l’absence de consécration de la différence des sexes constituerait le marqueur d’une identité et donc d’une égalité absolue des sujets de droit.

La proposition de loi définissant l’altérité sexuelle comme fondatrice de l’état civil ne va pas dans ce sens, mais dans celui du maintien et de l’affirmation de la sexuation juridique. Il revient, en tout état de cause, au législateur de se prononcer sur cette question.

Notes de bas de pages

  • 1.
    V. Guyotat P., Leçons sur la langue française, Léo Scheer, 2011.
  • 2.
    La déclaration de naissance mentionnant le sexe de l’enfant doit avoir lieu dans les 5 jours suivant la naissance (C. civ., art. 55).
  • 3.
    Carbonnier J., Droit civil, 2004, PUF, § 268.
  • 4.
    CA Paris, 18 janv. 1974 : D. 1974, p. 196, concl. Granjon – TGI Dijon, 2 mai 1977, Gaz. Pal. 1977, 2, p. 577 – TGI Saint-Étienne, 11 juill. 1979 : D. 1981, p. 271.
  • 5.
    V. Raoul-Cormeil G., « La question du genre dans le Code civil », RRJ 2009, 1, p. 183 à 208, spéc. § 10, p. 191 ; Rassat M.-L., « Sexe, médecine et droit », in Mélanges Raynaud, 1985, Dalloz, p. 651 à 674, spéc. p. 655.
  • 6.
    Bien qu’aucun texte ne l’affirme expressément, la règle ressort de diverses dispositions (v. par ex. C. civ., art. 16, C. civ., art. 318, C. civ., art. 725, C. civ., art. 906).
  • 7.
    CSP, art. R. 1232-1 : « Si la personne présente un arrêt cardiaque et respiratoire persistant, le constat de la mort ne peut être établi que si les trois critères cliniques suivants sont simultanément présents :
  • 8.
    1° Absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée ;
  • 9.
    2° Abolition de tous les réflexes du tronc cérébral ;
  • 10.
    3° Absence totale de ventilation spontanée. »
  • 11.
    Des seuils de viabilité ont été fixés mais les critères définis ne sont pas contraignants. L’Organisation mondiale de la Santé considère comme viable un enfant qui remplit l’un des deux critères suivants : soit une naissance à 22 semaines d’aménorrhée, soit un poids fœtal de 500 g minimum.
  • 12.
    Si les critères posés par l’Organisation mondiale de la Santé ont le mérite de l’objectivité, ils en ont également les défauts. C’est pour cette raison que le législateur a finalement refusé de les intégrer au Code civil afin de laisser une marge d’appréciation au corps médical.
  • 13.
    Les critères de l’article R. 1232-1 du Code de la santé publique ne sont là que pour autoriser un prélèvement d’organes alors que le donneur présente une apparence de vie et n’est donc par hypothèse pas décédé : Cass. 1re civ., 19 oct. 1999, n° 97-19845 : Bull. civ. I, n° 28 ; JCP N 2000, I, p. 255 ; LPA 23 févr. 2001, p. 14, note Py B. ; D. 2000, 2, p. 310, note Chartier Y.
  • 14.
    Beigner B. et Binet J.-R., Droit des personnes et de la famille, 2e éd., 2015, LGDJ, § 241 et s. ; Rassat M.-L., « Sexe, médecine et droit », op. cit.
  • 15.
    Cornu G., Droit civil. Les personnes, 13e éd., 2007, Montchrestien, § 37 ; Raoul-Cormeil G., « L’identité sexuée, une notion juridique réductible à la sexuation », in Brunetti-Pons C. (dir.), L’institué : le donné, la volonté et la responsabilité, 2016, Bruylant, p. 101 à 134.
  • 16.
    Rassat M.-L., « Sexe, médecine et droit », op. cit.
  • 17.
    Dictionnaire Larousse, 2017.
  • 18.
    Cornu G., Vocabulaire juridique, 11e éd., 2016, PUF.
  • 19.
    Petit J., « L’ambiguïté du droit face au syndrome transsexuel », RTD civ. 1976, p. 264 et s., spéc. p. 269.
  • 20.
    CA Agen, 2 févr. 1983 : Gaz. Pal. 1983, p. 603, note Sutton G. ; JCP G 1984, II, 20133, note Penneau J.
  • 21.
    V. supra.
  • 22.
    V. Vialla F., Les grandes décisions du droit médical, 2009, LGDJ, p. 112 et s. et « Du sexe au genre ? », JCP G 2012, n° 122.
  • 23.
    Pour une étude très complète de la question, v. Caballero F., Droit du sexe, 2010, LGDJ. V. égal. Pierrat E., Le sexe et la loi, 2e éd., 2015, La Musardine.
  • 24.
    V. par ex. Stoller R., Recherches sur l’identité sexuelle à partir du transsexualisme, 1978, Gallimard.
  • 25.
    Charruau J., « Introduction du genre en droit français », RFDA 2015, p. 127.
  • 26.
    Sur ces questions, v. Hennette-Vauchez S., Pichard M. et Roman D., La loi et le genre. Études critiques de droit français, 2014, CNRS, p. 23 et s. Plus largement, le groupe de travail REGINE (Recherche et Études sur le Genre et les Inégalités dans les Normes en Europe) y consacre ses travaux et publie une chronique annuelle au Recueil Dalloz (http://regine.u-paris10.fr/).
  • 27.
    Dans les principes sur l’application de la législation internationale des droits humains en matière d’orientation sexuelle et d’identité de genre, aussi appelés « principes de Yogyakarta », présentés au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies le 26 mars 2007, le genre a été défini comme : « l’expérience intime et personnelle du sexe faite par chacun, qu’elle corresponde ou non au sexe assigné à la naissance, y compris une conscience personnelle du corps (qui peut impliquer, si consentie librement, une modification de l’apparence ou des fonctions corporelles par des moyens médicaux, chirurgicaux ou divers) et d’autres expressions du sexe, y compris l’habillement, le discours et les manières de se conduire. »
  • 28.
    En Argentine, par exemple, la loi prévoit que toute personne a le droit à la reconnaissance de son identité de genre. La Suède reconnaît également l’identité de genre et va jusqu’à modifier sa grammaire en introduisant un pronom neutre.
  • 29.
    V. Raoul-Cormeil G., « L’identité sexuée, une notion juridique réductible à la sexuation », op. cit.
  • 30.
    Batteur A., Droit des personnes, des familles et des majeurs protégés, 9e éd., 2017, LGDJ, § 58.
  • 31.
    Pour une énonciation plus complète, v. Reigné P., « L’intersexuation et la mention du sexe à l’état civil », D. 2016, p. 1915.
  • 32.
    Cass. civ., 6 avr. 1903 : DP 1904, I, p. 395, note Baudoin ; S. 1904, I, 273, note Wahl.
  • 33.
    C. civ., art. 61-5 et s. Néanmoins, la proposition de loi n° 222, définissant l’altérité sexuelle comme fondatrice de l’état civil, enregistrée à la présidence de l’Assemblée nationale le 27 septembre 2017 propose la suppression de ces dispositions.
  • 34.
    Cass. 1re civ., 4 mai 2017, n° 16-17189 : JCP N 2017, n° 19, act. 542 ; D. 2017, p. 1404, note Moron-Puech B. ; AJ fam. 2017, p. 354, note Houssier J. ; Gaz. Pal. 4 juill. 2017, n° 298f5, note Bloquel B. ; LPA 16 juin 2017, n° 127f6, p. 18, Péron M. ; LEFP juin 2017, n° 110p5, note Batteur A. ; Gaz. Pal. 23 mai 2017, n° 293x5, note Berlaud C. ; AJ fam. 2017, p. 354, note Gobert M. ; D. 2017, p. 1399, note Vauthier J.-P. et Vialla F. ; RTD civ. 2017, p. 607, note Hauser J.
  • 35.
    V. prop. loi n° 222, op. cit.
  • 36.
    V. not. CEDH, 28 mai 1985, n° 15/1983/71/107-109, Abdulaziz, Cabales et Balkandali c/ Royaume-Uni : JDI 1986, p. 1084, obs. Rolland P.
  • 37.
    V. not. CJCE, 15 juin 1978, n° 149/77, Gabrielle Defrenne c/ SABENA : RTD Europ. 1986, 231, note Imbrechts L. ; JT 1979, 154, note Desorle G.
  • 38.
    L. n° 65-570, 13 juill. 1965, portant réforme des régimes matrimoniaux et L. n° 85-1372, 23 déc. 1985, relative à l’égalité des époux dans les régimes matrimoniaux et des parents dans la gestion des biens des enfants mineurs.
  • 39.
    L. n° 70-459, 4 juin 1970, relative à l’autorité parentale.
  • 40.
    L. n° 2002-304, 4 mars 2002, relative au nom de famille.
  • 41.
    L. n° 99-944, 15 nov. 1999, relative au pacte civil de solidarité.
  • 42.
    L. n° 2013-404, 17 mai 2013, ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.
  • 43.
    V. par ex. C. civ., art. 1438 : « Si le père et la mère ont doté conjointement l’enfant commun sans exprimer la portion pour laquelle ils entendaient y contribuer, ils sont censés avoir doté chacun pour moitié, soit que la dot ait été fournie ou promise en biens de la communauté, soit qu’elle l’ait été en biens personnels à l’un des deux époux. Au second cas, l’époux dont le bien personnel a été constitué en dot, a, sur les biens de l’autre, une action en indemnité pour la moitié de ladite dot, eu égard à la valeur du bien donné au temps de la dotation » (nous soulignons).
  • 44.
    Leroyer A.-M., « La notion d’état des personnes », in Ruptures, mouvements et continuité du droit. Autour de Michelle Gobert, 2004, Economica, p. 247 à 283, spéc. § 3, p. 249.
  • 45.
    Branlard J.-P., Le sexe et l’état des personnes, 1993, LGDJ, § 19, p. 15.
  • 46.
    Batteur A., LEFP juin 2017, n° 110p5, p. 41 et s. ; Beigner B. et Binet J.-R., op. cit., p. 64 et s. ; Bellivier F., Droit des personnes, 2015, LGDJ, p. 65 et s. ; Carbonnier J., op. cit., p. 419 et s. ; Cornu G., Droit civil. Les personnes, Montchrestien, 13ème éd., 2007, p. 83 et s. ; Douchy-Oudot M., Droit civil, 8e éd., 2015, Dalloz, p. 233 et s. ; Loiseau G., Le droit des personnes, 2016, Ellipses, p. 44 et s. ; Malaurie P., Droit des personnes, 8e éd., 2016, LGDJ, § 101, p. 44 ; Terré F. et Fenouillet D., Droit civil, Les personnes, 8e éd., 2012, Dalloz, p. 157 et s. ; Teyssié B., Droit civil, Les personnes, 18e éd., 2016, LexisNexis, § 6 et s.
  • 47.
    Branlard J.-P., op. cit., § 22, p. 16.
  • 48.
    Préambule de la constitution du 27 octobre 1946, art. 3 : « La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme ».
  • 49.
    V. Code civil des français, 1804, Paris, Imprimerie de la République.
  • 50.
    L’article 144 du Code civil a été modifié par la loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. Il énonçait alors que : « L’homme et la femme ne peuvent contracter mariage avant 18 ans révolus. » Il a à nouveau été modifié par la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. Il prévoit désormais que : « Le mariage ne peut être contracté avant 18 ans révolus. »
  • 51.
    C. civ., anc. art. 720 : « Si plusieurs personnes respectivement appelées à la succession l’une de l’autre, périssent dans un même événement sans qu’on puisse reconnaître laquelle est décédée la première, la présomption de survie est déterminée par les circonstances du fait, et, à leur défaut, par la force de l’âge ou du sexe. »
  • 52.
    Elles sont principalement présentes en droit du travail et concernent l’état de grossesse des salariées.
  • 53.
    C. civ., art. 1240 : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
  • 54.
    C. civ., art. 311-20, al. 3.
  • 55.
    C. civ., art. 108.
  • 56.
    V. par ex. C. civ., art. 212 et C. civ., art. 1403.
  • 57.
    On trouve plus d’une centaine de textes faisant référence à ces rôles.
  • 58.
    V. L. n° 70-459, 4 juin 1970, relative à l’autorité parentale.
  • 59.
    C. civ., art. 156.
  • 60.
    C. civ., art. 206.
  • 61.
    C. civ., art. 734.
  • 62.
    C. civ., art. 734.
  • 63.
    C. civ., art. 734.
  • 64.
    C. civ., art. 311-25.
  • 65.
    C. civ., art. 57 et C. civ., art. 327. Mme Batteur et M. Larralde l’analysent en une liberté : celle de ne pas devenir mère (v. Batteur A. (dir.), Les grandes décisions du droit des personnes et de la famille, 2e éd., 2016, LGDJ, p. 167 et s.).
  • 66.
    C. civ., art. 325 et s.
  • 67.
    CSP, art. L. 2141-2.
  • 68.
    Le Monde, 17 sept. 2017.
  • 69.
    Cass. ass. plén., 11 déc. 1992, n° 91-11900 : Bull. civ. n° 13 ; GAJC 12e éd., n° 25-26, II ; JCP 1993, II, 21991, note Mémeteau G. ; Gaz. Pal 1993, 1, 180, concl. Jéol M. ; Defrénois 1993, p. 431, note Massip J. ; RTD civ. 1993, p. 97, obs. Hauser J.
  • 70.
    La France a d’ailleurs été très récemment condamnée par la Cour européenne des droits de l’Homme sur ce point : CEDH, 6 avr. 2017, n° 79885/12, G. et N. c/ France : D. 2017, Actu., Coustet T.
  • 71.
    V. Paricard S., « Une libéralisation du changement de sexe qui suscite des interrogations majeures », AJ fam. 2016, p. 585.
  • 72.
    Cons. const., 17 mai 2013, n° 2013-669 DC : JO, 18 mai 2013 ; D. 2013, p. 1643, note Dieu F. ; D. 2014, p. 689, obs. Douchy-Oudot M. ; AJ fam. 2013, p. 332, note Chénedé F. ; RFDA 2013, p. 923, note Delvolvé F. ; RFDA 2013, p. 936, note Drago G. ; RDSS 2013, p. 908, note Brunet L. ; Constitutions 2013, 166, note Le Pourhiet A.-M. ; Constitutions 2013, 381, note Le Pourhiet A.-M. ; Constitutions 2013, 555, obs. Chénedé F. ; RTD civ. 2013, p. 579, obs. Hauser J.
  • 73.
    Il faut noter également la disparition de la référence faite au sexe pour déterminer l’ordre des décès dans la théorie des comourants (C. civ, art. 725-1) ainsi que pour apprécier l’existence de la violence dans les vices du consentement (C. civ, art. 1140 et s.).
  • 74.
    Leveneur L., « La différenciation des sexes en droit privé contemporain », in Le sexe, la sexualité et le droit. Actes du XVIIe colloque national de la Confédération des Juristes Catholiques de France, 2002, éd. Pierre Téqui, p. 45.
  • 75.
    La liste n’est pas exhaustive.
  • 76.
    V. par ex. CPP, art. 255 : « Peuvent seuls remplir les fonctions de juré, les citoyens de l’un ou de l’autre sexe, âgés de plus de 23 ans, sachant lire et écrire en français, jouissant des droits politiques, civils et de famille, et ne se trouvant dans aucun cas d’incapacité ou d’incompatibilité énumérés par les deux articles suivants. » V. égal. C. pén., art. 225-4-10, al. 1er : « Le fait pour toute personne d’imposer à une ou plusieurs autres personnes de dissimuler leur visage par menace, violence, contrainte, abus d’autorité ou abus de pouvoir, en raison de leur sexe, est puni d’un an d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende. »
  • 77.
    C. pén., art. 225-1, al. 1er : « Constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes physiques sur le fondement de leur origine, de leur sexe, de leur situation de famille, de leur grossesse, de leur apparence physique, de la particulière vulnérabilité résultant de leur situation économique, apparente ou connue de son auteur, de leur patronyme, de leur lieu de résidence, de leur état de santé, de leur perte d’autonomie, de leur handicap, de leurs caractéristiques génétiques, de leurs mœurs, de leur orientation sexuelle, de leur identité de genre, de leur âge, de leurs opinions politiques, de leurs activités syndicales, de leur capacité à s’exprimer dans une langue autre que le français, de leur appartenance ou de leur non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une Nation, une prétendue race ou une religion déterminée. »
  • 78.
    C. pén., art. 225-1-1, pour les personnes ayant subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel tels que définis à l’article 222-33 ou témoigné de tels faits. Et C. pén., art. 225-1-2, pour les personnes ayant subi ou refusé de subir des faits de bizutage tels que définis à l’article 225-16-1 ou témoigné de tels faits.
  • 79.
    C. pén., art. 225-2.
  • 80.
    C. trav., art. L. 1132-1, C. trav., art. L. 1142-1, C. trav., art. L. 1142-2 et C. trav., art. L. 1142-2-1.
  • 81.
    La Cour européenne des droits de l’Homme exige une différence de traitement alors que les situations sont analogues : CEDH, 13 juin 1979, série A n° 31, Marckx c/ Belgique ; CEDH, 23 nov. 1983, série A n° 70, § 46, Van der Mussele c/ Belgique – CEDH, 18 févr. 1991, série A n° 192, § 60, Fredin c/ Suède : RUDH, 1992, p. 9, chron. Sudre F.
  • 82.
    Le titre IV du livre 1er de la première partie du Code du travail s’intitule « Égalité professionnelle entre les hommes et les femmes ».
  • 83.
    Boëton M., « Discrimination positive en France », Études 2003/2, t. 398, p. 175-184.
  • 84.
    Celles qui dépassent certains seuils.
  • 85.
    C. com., art. L. 225-37-4, 6°.
  • 86.
    C. sport, art. L. 131-8.
  • 87.
    C. sport, art. L. 231-7.
  • 88.
    C. mon. fin., art. L. 621-2 : « L’écart entre le nombre de femmes et d’hommes parmi les membres nommés au titre des 8° et 9° ne peut être supérieur à un. »
  • 89.
    C. rech., art. L. 114-3-3, II, al. 3 : « Le collège est composé de 30 membres nommés par décret. Il comprend autant d’hommes que de femmes ».
  • 90.
    V. par ex. C. élect., art. L. 289, al. 1er : « Dans les communes visées aux chapitres III et IV du titre IV du livre 1er du présent code, l’élection des délégués et des suppléants a lieu sur la même liste suivant le système de la représentation proportionnelle avec application de la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Les listes peuvent comprendre un nombre de noms inférieur au nombre de sièges de délégués et de suppléants à pourvoir. Chaque liste de candidats aux fonctions de délégués et de suppléants est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe. »
  • 91.
    V. par ex. CPI, art. L. 327-4, relatif à la commission de contrôle des organismes de gestion des droits d’auteur et des droits voisins :
  • 92.
    « Le collège des sanctions est composé de trois membres nommés par décret :
  • 93.
    1° Un conseiller d’État, président, désigné par le vice-président du Conseil d’État ;
  • 94.
    2° Un conseiller maître à la Cour des comptes, président suppléant, désigné par le premier président de la Cour des comptes ;
  • 95.
    3° Un conseiller à la Cour de cassation, désigné par le premier président de la Cour de cassation.
  • 96.
    Des membres suppléants sont désignés dans les mêmes conditions. Le membre titulaire et son suppléant sont de sexe différent.
  • 97.
    Les fonctions de membre du collège des sanctions sont incompatibles avec celles de membre du collège de contrôle. »
  • 98.
    Selon Cornu, « la loi n’établit qu’une égalité juridique, abstraite et virtuelle. Elle confère aux deux sexes les mêmes droits, mais la question de leur égalité réelle, concrète, économique et sociale demeure ouverte » (Cornu G., Droit civil. Les personnes, 13e éd., 2007, Montchrestien, § 38).
  • 99.
    L. n° 2004-439, 26 mai 2004, relative au divorce a mis en place, au plan civil, une mesure d’éviction du conjoint violent du domicile conjugal (C. civ., anc. art. 220-1, al. 3) ; L. n° 2005-1549, 12 déc. 2005, relative au traitement de la récidive des infractions pénales modifiant l’article 41-1 du Code de procédure pénale ; L. n° 2006-399, 4 avr. 2006, renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs modifiant nombre de dispositions des codes civil et pénal ; L. n° 2010-769, 9 juill. 2010, relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants modifiant les codes civil et pénal et de procédure pénale ; L. n° 2014-873, 4 août 2014, pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes modifiant le Code civil, le Code pénal et le Code de procédure pénale.
  • 100.
    V. C. civ., art. 515-9 et s. ou par ex. C. pén., art. 222-14 et CPP, art. 41-1, 6°.
  • 101.
    Borrillo D., « Pour une théorie du droit des personnes et de la famille émancipée du genre », in Gallus N. (dir.), Droit des familles, genre et sexualité, 2012, LGDJ, p. 7.
  • 102.
    Pichard M., « État des personnes », in Hennette-Vauchez S., Pichard M. et Roman D. (dir.), Genre et droit, 2016, Dalloz, p. 27-57.
  • 103.
    V. supra.
  • 104.
    Il en est ainsi depuis la laïcisation de l’état civil par le décret du 20 septembre 1792 (v. Libchaber R., « Les incertitudes du sexe », D. 2016, p. 20).
  • 105.
    CA Paris, 18 janv. 1974 : D. 1974, p. 196, concl. Granjon et, tout à fait récemment, Cass. 1re civ., 4 mai 2017, n° 16-17189.
  • 106.
    CA Paris, 8 déc. 1967 : D. 1968, p. 289 ; JCP 1968, II, 15518 bis, note Ny P. ; RTD civ. 1968, p. 536, obs. Nerson R. – Cass. 1re civ., 26 janv. 1983, n° 81-16795 : Bull. civ. I, n° 38 ; D. 1983, p. 436, note Massip J. – CA Versailles, 22 juin 2000 : JCP 2001, II, 10595, note Guez V. ; RTD civ. 2001, p. 849, obs. Hauser J. Sur le refus de cette procédure aux transsexuels, v. Cass. 1re civ., 16 déc. 1975, n° 73-10615 : Bull. civ. I, n° 374 ; JCP G 1976, II, 18503, Penneau J. ; D. 1976, 2, p. 397, note Lindon R. – CA Paris, 24 févr. 1978 : JCP G 1979, II, 19202, Penneau J.
  • 107.
    V. Reigné P., « Sexe, genre et état des personnes », JCP G 2011, I, 1140.
  • 108.
    V. Circ., 28 oct. 2011, relative aux règles particulières à divers actes de l’état civil relatifs à la naissance et à la filiation, NOR : JUSC1119808C, § 55.
  • 109.
    V. infra.
  • 110.
    Vialla F., « Prolégomènes sur l’approche juridique de la transidentité », Dr. famille 2013, p. 8 et s.
  • 111.
    Cass. ass. plén., 11 déc. 1992, n° 91-11900 : Bull. civ. n° 13.
  • 112.
    CEDH, 25 mars 1992, série A n° 40, Van Oosterwijck c/ Belgique : D. 1993, p. 101, note Marguénaud J.-P. ; D. 1992, Somm., p. 325, obs. Renucci J.-F. ; JCP 1992, II, n° 21955, note Garé T. ; RTD civ. 1992, p. 540, obs. Hauser J.
  • 113.
    Bellivier F., op. cit., § 48.
  • 114.
    Selon P. Reigné (op. cit.), la décision de la cour d’appel de Paris du 22 juin 2000 (JCP G 2001, II, 10595, note Guez P.) est la première rendue depuis 25 ans.
  • 115.
    Allemagne, Brésil, Canada, Suède… V. Gobert M., « État civil – Le sexe neutre ou de la difficulté d’exister », AJ fam. 2017, p. 354.
  • 116.
    Cass. 1re civ., 4 mai 2017, n° 16-17189.
  • 117.
    Moron-Puech B., « Rejet du sexe neutre : une “mutilation” juridique ? », D. 2017, p. 1404.
  • 118.
    Guez P., « Faut-il supprimer la mention du sexe de la personne à l’état civil ? », Revue des droits de l’homme, 2015 (http://revdh.revues.org/1660).
  • 119.
    Moron-Puech B., op. cit.
  • 120.
    Cass. 1re civ., 16 déc. 1975, n° 73-10615 – Cass. 1re civ., 3 mars 1987, n° 84-15691 : D. 1987, p. 445, note Jourdain P. ; JCP G 1988, II, 21000, note Agostini E. ; Gaz. Pal. 1987, 2, 577, note de la Marinière E. – Cass. 1re civ., 17 juin 1988, n° 86-13698 : Bull. civ. n° 176 ; Gaz. Pal. 1989, 2, 417, note Agostini E. ; RTD civ. 1989, 721, obs. Rubellin-Devichi J. – Cass. 1re civ., 10 mai 1989, n° 87-17111 : Bull. civ. I, n° 189.
  • 121.
    Goubeaux G., Droit civil, Les personnes, 1989, LGDJ, § 263.
  • 122.
    V. Bellivier F., op. cit., § 47 et § 74, ou Leroyer A.-M., op. cit., § 1.
  • 123.
    D. n° 71-941, 26 nov. 1971, relatif aux actes établis par les notaires, art. 5.
  • 124.
    Marquant R., L’état civil et l’état des personnes, 1977, Masson, p. 72.
  • 125.
    Sur les liens entre individualisation, identification et état civil, v. Goubeaux G., op. cit., § 109 ; Carbonnier J., op. cit., § 219 ; Terré F. et Fenouillet D., op. cit., § 126.
  • 126.
    Gutton J.-P., Établir l’identité, 2010, Presses universitaires de Lyon, p. 159 et s.
  • 127.
    Carbonnier J., op. cit., § 219.
  • 128.
    On aurait pu évoquer l’âge, néanmoins celui-ci peut dans une certaine mesure se corriger et l’on peut facilement modifier son âge apparent. En outre, l’âge n’apparaît pas en tant que tel, dans l’état des personnes, mais par l’intermédiaire de la date de naissance. La connaissance de l’âge est donc indirecte et plus complexe. Ainsi, l’âge ne paraît pas être l’élément premier de l’identification de la personne. Le sexe est le premier élément de la représentation mentale de la personne. Pour une comparaison entre l’âge réel et l’âge ressenti, v. Hauser J., « Un sexe évolutif ? Du transsexualisme, du transgenre et des prénoms », RTD civ. 2010, p. 759.
  • 129.
    Sur la distinction entre le signifiant et le signifié, v. Terré F. et Fenouillet D., op. cit., § 129.
  • 130.
    V. supra.
  • 131.
    V. Leroyer A.-M., op. cit., § 8 et s., p. 254 et s.
  • 132.
    Bellivier F., op. cit., § 47 ; Branlard J.-P., op. cit., § 1564, p. 1501.
  • 133.
    Hauser J. évoque un droit à la conformité entre l’apparence et l’état civil (Hauser J., « Respect dû à la vie privée et sexe apparent », RTD civ. 1993, p. 97).
  • 134.
    Batteur A., op. cit.
  • 135.
    Sauf s’ils en font la demande.
  • 136.
    D. n° 55-1397, 22 oct. 1955, instituant la carte nationale d’identité, art. 1er.
  • 137.
    Cornu G., op. cit., § 33, p. 72.
  • 138.
    Dans le but de renforcer le lien entre les titres de voyage et leurs titulaires et de lutter ainsi contre la fraude, l’Union européenne a décidé de doter ses ressortissants d’un passeport biométrique (règlement (CE) n° 2252/2004 du Conseil du 13 déc. 2004). En complément des données classiques et de la photographie, l’image numérisée des deux empreintes digitales est désormais stockée dans une puce.
  • 139.
    L’article 16-11 du Code civil autorise l’identification de la personne par ses empreintes génétiques mais uniquement dans certaines circonstances.
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